Violation de clause d’exclusivité : 18 novembre 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 19-16.649

Violation de clause d’exclusivité : 18 novembre 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 19-16.649

18 novembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n°
19-16.649

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 novembre 2020

Rejet non spécialement motivé

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10996 F

Pourvois n°
Q 19-16.649
Y 19-19.141 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 NOVEMBRE 2020

I. La société Espace 2, société anonyme, dont le siège est […] ,

II. M. K… A…, domicilié […] ,

ont formé respectivement les pourvois n° Q 19-16.649 et Y 19-19.141 contre l’arrêt rendu le 27 février 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige les opposant.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Espace 2, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. A…, après débats en l’audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présentes Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° Q 19-16.649 et Y 19-19.141 sont joints.

Sur le pourvoi n° Q 19-16.649

2. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le pourvoi n° Y 19-19.141

3. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

4. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces pourvois.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Espace 2, demanderesse au pourvoi n° Q 19-16.649

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté la société ESPACE 2 de l’ensemble de ses demandes, et de l’AVOIR condamnée aux dépens

AUX MOTIFS QUE « à titre principal, la responsabilité de Monsieur A… est recherchée sur le fondement de la responsabilité contractuelle (article 1134 et 1147 et suivants anciens du Code Civil), et subsidiairement sur le fondement délictuel (article 1382 et 1383 anciens du Code Civil);
Considérant cependant, sur le terrain contractuel, qu’aucune faute n’est établie à l’encontre du salarié ; que Monsieur A… qui savait son avenir professionnel délicat était fondé à créer sa propre entreprise, le contrat de travail ne comportant par ailleurs aucune clause de non concurrence ;
Que le salarié établit que la société ESPACE 2 connaissait avant son licenciement le projet immobilier […] ;
Qu’en l’espèce, il n’est démontré aucune faute lourde imputable au salarié emportant le remboursement des salaires versés au salarié durant l’exécution du contrat de travail ;
Que par ailleurs, la société ESPACE 2 ne démontre aucun préjudice à elle causé par Monsieur A… ;
Que , sur le fondement délictuel, force est de constater que l’employeur n’établit :
– aucun détournement de clientèle,
– aucune confusion entre l’entreprise créée par le salarié et la sienne;
– aucun débauchage de personnel;
– aucun dénigrement ;
– aucune manoeuvre à caractère déloyal ;
Qu’en conséquence, le jugement sera infirmé »

1/ ALORS QUE commet une faute le salarié qui méconnait la clause d’exclusivité insérée dans son contrat de travail ; qu’en l’espèce, le contrat de travail de M. A… contenait une clause lui interdisant d’« accepter, sauf autorisation écrite de la direction générale aucune fonction ni aucun contrat pour les tiers ni exercer aucune activité à caractère professionnel pour son compte » ainsi qu’une clause lui interdisant « d’exercer pour son propre compte ou pour le compte d ‘une autre entreprise une activité concurrente de celle de son employeur »; que la société Espace 2 reprochait au salarié d’avoir violé ces deux clauses en ayant créé pendant l’exécution de son contrat de travail, sa propre entreprise ayant une activité concurrente de la sienne ; qu’en jugeant que le salarié n’avait commis aucune faute en créant sa propre entreprise, aux motifs inopérants qu’il n’était pas lié par une clause de non-concurrence et qu’il savait son avenir menacé par les difficultés financières de son employeur, la cour d’appel a violé les articles L. 1221-1 et L. 1222-1 du code du travail ;

2/ ALORS QUE les juges du fond doivent préciser l’origine de leurs constatations; qu’en affirmant péremptoirement que M. A… savait son avenir professionnel délicat lorsqu’il avait créé sa propre entreprise, sans préciser de quelle pièce elle déduisait une telle affirmation, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

3/ ALORS QUE commet une faute lourde le salarié qui, en violation de la clause d’exclusivité insérée dans son contrat de travail, crée une entreprise dont l’activité concurrente de celle de son employeur débute avant la rupture de leurs relations contractuelles, use de ses fonctions au sein de la société et des moyens de celle-ci pour détourner sa clientèle à son insu et la dénigre; que les juges du fond sont tenus de motiver leur décision en analysant les circonstances de fait propres à l’espèce qui leur est soumise; que la société Espace 2 faisait valoir et offrait de prouver au moyen de très nombreuses pièces versées aux débats parmi lesquelles figurait le constat d’huissier du 30 avril 2010 qu’elle avait obtenu de faire réaliser par ordonnance sur requête, ainsi que les pièces saisies à cette occasion par l’huissier, qu’en violation de la clause d’exclusivité contenue dans son contrat de travail, M. A… avait, avec la complicité d’un autre salarié, M. N…, créé une société Giphim ayant une activité identique à celle de son employeur, s’était servi de ses fonctions de directeur de la promotion de la société Espace 2, des moyens et des fichiers de celle-ci qu’il s’était appropriés, pour négocier à l’insu de cette dernière, puis acquérir en son nom et celui de M. N… auxquels devait se substituer une SCI 69 Sellier que les deux salariés s’étaient engagés à constituer, des terrains à construire situés à Suresnes pour y mener une opération immobilière « […] » après avoir dénigré la société Espace 2 et fait savoir aux vendeurs des terrains et aux partenaires de l’opération que celle-ci renonçait à cette opération n’ayant pas la capacité financière suffisante (conclusions d’appel de l’exposante p 13-26); qu’en affirmant péremptoirement qu’il n’était démontré aucune faute lourde imputable au salarié, aucun détournement de clientèle, ni dénigrement, ni manoeuvre à caractère déloyal, sans cependant analyser aucune des circonstances de fait invoquées par la société Espace 2 ni examiner aucune des pièces qu’elle produisait, la cour d’appel qui n’a pas mis la Cour de cassation en mesure d’exercer son contrôle, a violé l’article 455 du code de procédure civile;

4/ ALORS QUE les juges du fond doivent préciser l’origine de leurs constatations ; que la société Espace 2 contestait formellement avoir eu connaissance du projet « […] » avant la rupture du contrat de travail de M. A… en faisant valoir que le salarié l’avait soigneusement dissimulé en ne mentionnant nulle part dans l’agenda aucun de ses rendez-vous concernant ce projet et en ne transmettant pas à son employeur le compte-rendu de ceux-ci ; qu’elle soutenait n’en avoir eu connaissance qu’après la rupture du contrat de travail de M. A…, au mois d’avril 2009 lorsqu’elle avait reçu un appel téléphonique de la société Perl destiné à M. A… concernant le projet « de Suresnes », puis au mois de juillet 2009 lorsqu’elle avait reçu une télécopie de la société Axis destinée à M. N… « SCI 69 Sellier » concernant également ce projet (conclusions d’appel de l’exposante p 13, 15, 17, 21-22) ; qu’en affirmant péremptoirement que le salarié démontrait que la société Espace 2 connaissait avant son licenciement le projet immobilier « […] », sans préciser de quelle pièce elle déduisait une telle connaissance, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

5/ ALORS QUE la société Espace 2 faisait valoir qu’outre un préjudice moral lié au dénigrement dont elle avait été victime, elle avait subi un préjudice financier et commercial correspondant au bénéfice qu’elle aurait tiré de la réalisation de l’opération « […] » qui aurait dû lui revenir et justifiait très précisément de la perte de marge commerciale correspondante qu’elle avait calculée en prenant pour base la marge réalisée par la SCI 69 Sellier lors de la vente des lots et la marge complémentaire correspondant aux honoraires de gestion et de commercialisation, et en tenant compte de la marge qu’elle aurait elle-même réalisée compte tenu de ses propres moyens, pièces à l’appui (conclusions d’appel de la société Espace 2 p 34-39) ; qu’en affirmant péremptoirement qu’aucun préjudice causé par le salarié n’était démontré sans examiner aucun des chefs de préjudice invoqués par la société Espace 2 ni aucune des pièces qu’elle produisait pour en justifier, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté la société ESPACE 2 de ses demandes tendant à être autorisée à se faire remettre par Me P… l’intégralité des fichiers copiés sur l’ordinateur de M. A… mentionnant le nom « Espace 2 » et à voir procéder à une vérification de l’authenticité du document intitulé « analyse des dossiers en cours au 10 juin 2008 » annexé au constat d’huissier en procédant à une comparaison par rapport au document produit en pièce 52 adressé le 18 juillet 2008 par M. A… à Mme F…, et de l’AVOIR condamnée aux dépens

AUX MOTIFS QUE « à titre principal, la responsabilité de Monsieur A… est recherchée sur le fondement de la responsabilité contractuelle (article 1134 et 1147 et suivants anciens du Code Civil), et subsidiairement sur le fondement délictuel (article 1382 et 1383 anciens du Code Civil);
Considérant cependant, sur le terrain contractuel, qu’aucune faute n’est établie à l’encontre du salarié ; que Monsieur A… qui savait son avenir professionnel délicat était fondé à créer sa propre entreprise, le contrat de travail ne comportant par ailleurs aucune clause de non concurrence ;
Que le salarié établit que la société ESPACE 2 connaissait avant son licenciement le projet immobilier […] ;
Qu’en l’espèce, il n’est démontré aucune faute lourde imputable au salarié emportant le remboursement des salaires versés au salarié durant l’exécution du contrat de travail ;
Que par ailleurs, la société ESPACE 2 ne démontre aucun préjudice à elle causé par Monsieur A… ;
Que , sur le fondement délictuel, force est de constater que l’employeur n’établit :
– aucun détournement de clientèle,
– aucune confusion entre l’entreprise créée par le salarié et la sienne ;
– aucun débauchage de personnel ;
– aucun dénigrement ;
– aucune manoeuvre à caractère déloyal ;
Qu’en conséquence, le jugement sera infirmé » ;

ALORS QU’au soutien de ses demandes tendant à être autorisée à se faire remettre par Me P… l’intégralité des fichiers copiés mentionnant le nom « Espace 2 » lors des opérations de constat du 30 avril 2010, et à voir procéder à une vérification de l’authenticité du document intitulé « analyse des dossiers en cours au 10 juin 2008 » annexé au constat d’huissier en procédant à une comparaison par rapport au document produit en pièce 52 adressé le 18 juillet 2008 par M. A… à Mme F…, la société Espace 2 faisait valoir qu’il résultait du constat d’huissier dressé par Me P… que M. A… était en possession d’un disque dur externe sur lequel figuraient plus de 5000 fichiers concernant la société Espace 2 et qu’elle avait des raisons de penser que d’autres affaires avaient été détournées par MM. A… et N… (conclusions d’appel de l’exposante p 20-21); qu’en déboutant la société Espace 2 de ces demandes sans répondre à ce moyen péremptoire, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. A…, demandeur au pourvoi n° Y 19-19.141

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir débouté M. K… A… de ses demandes nouvelles tendant, à titre principal, à déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse et à condamner, par voie de conséquence, la société Espace 2 au paiement des sommes de 124.999 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 100.000 € au titre du préjudice moral et 50.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ces sommes portant intérêt au taux légal, ou, à titre subsidiaire, à condamner la société Espace 2 au paiement de 200.000 € au titre du préjudice moral et 50.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ces sommes portant intérêt au taux légal ;

AUX MOTIFS QUE sur la contestation tardive du licenciement, pour la première fois en cause d’appel, M. A… sollicite la condamnation de l’employeur à lui payer la somme de 124.999 euros à titre de dommages et intérêts pour le licenciement économique prononcé en février 2009 ; que cependant, en application de l’article L. 1235-7 du code du travail, dans sa version applicable au moment du licenciement, le salarié disposait d’un délai de 12 mois pour contester la rupture du contrat de travail ; que dès lors, sa demande est irrecevable ;

1° ALORS QUE le délai de douze mois prévu par le second alinéa de l’article L. 1235-7 du code du travail ne concerne que les actions mettant en cause la régularité de la procédure relative au plan de sauvegarde de l’emploi ou susceptibles d’entraîner la nullité de la procédure de licenciement en raison de l’absence ou de l’insuffisance d’un tel plan ; qu’en déclarant irrecevable la demande formée en cause d’appel par M. A… au motif qu’elle n’aurait pas été formée dans le délai de douze mois prévu par l’article L. 1235-7 du code du travail, quand la demande du salarié, qui discutait la cause économique du licenciement, relevait du délai de prescription de droit commun alors applicable, la cour d’appel a violé l’article L. 1235-7 du code du travail.

2° ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la fraude dans le recours au licenciement économique a pour effet de reporter le point de départ du délai de prescription prévu à l’article L. 1235-7 du code du travail au jour où celui qui l’invoque en a eu connaissance ; que, pour la première fois au cours de l’instance prud’homale (production n° 9), la société Espace 2 a révélé qu’au moment du licenciement, elle était en parfaite santé financière et avait poursuivi sa politique d’acquisition de terrains (cf. notamment p. 23) ; qu’en omettant de rechercher, comme cela lui était pourtant demandé (cf. concl. p. 36-37), si la société Espace 2, en licenciant M. A…, ne s’était pas rendue auteur d’une fraude de nature à reporter le point de départ du délai de prescription jusqu’à sa révélation au cours de l’instance prud’homale, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1235-7 du code du travail.

 


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