Violation de clause d’exclusivité : 28 septembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/02229

Violation de clause d’exclusivité : 28 septembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/02229

28 septembre 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
21/02229

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 28 SEPTEMBRE 2023

N° RG 21/02229 –

N° Portalis DBV3-V-B7F-UUDY

AFFAIRE :

[M] [G]

C/

S.A.R.L. CRISTAL SOLUTIONS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Juin 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : Encadrement

N° RG : 18/00338

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Grégory MENARD

Me Mélina PEDROLETTI

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, initialement fixé au 25 mai 2023, prorogé au 06 juillet 2023 puis au 28 septembre 2023, les parties ayant été avisées, dans l’affaire entre :

Monsieur [M] [G]

né le 01 Février 1972 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Grégory MENARD, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : PB267

APPELANT

****************

S.A.R.L. CRISTAL SOLUTIONS

N° SIRET : 800 882 656

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626

Représentant : Me Natalie BARDY, Plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Mars 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Régine CAPRA, Présidente chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Sophie RIVIERE,

Greffier lors du prononcé : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI,

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Cristal Solutions, qui a pour objet la commercialisation et la vente de prestations de services de conseil en ingénierie, informatique, sécurité des systèmes d’information, de type SSII, de conseil en recrutement de type cabinet de recrutement et de management de transition, a engagé, par contrat de travail à durée indéterminée du 9 mai 2016, M. [M] [G] en qualité d’ingénieur en intégration et vérification système télécom, statut cadre, position 2.3, coefficient 150, moyennant un salaire mensuel brut forfaitaire de 3 500 euros sur 12 mois, soit 42 000 euros brut annuel.

Les relations entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs conseils et des sociétés de conseil, dite Syntec, du 15 décembre 1987, dans sa rédaction antérieure au 16 juillet 2021.

Selon ordre de mission en date du 9 mai 2016, la société Cristal Solutions a affecté M. [G] à la réalisation d’une mission d’intégration et de vérification système télécom pour la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle concernant le projet PRJ20-Airbus D&S-SII commençant le 10 mai 2016 dans le cadre duquel la société SII intervenait comme prestataire de Airbus Defence and Space.

M. [G], dont la mission auprès de la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle avait pris fin le 23 décembre 2016, à l’issue du contrat de prestation de service conclu par celle-ci avec Airbus D&S, ne s’est pas présenté auprès de la société Cristal Solutions et a conclu un contrat de travail avec la société Protectic, le nouveau prestataire choisi par Airbus D&S pour poursuivre le projet.

Après avoir convoqué M. [G] par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 8 mai 2017 à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 19 mai 2017, la société Cristal Solutions a, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 24 mai 2017, notifié à M. [G] son licenciement pour faute grave pour ne plus s’être présenté à son poste de travail à partir du 2 janvier 2017 sans fournir de justificatif d’absence, pour violer la clause d’exclusivité stipulée à son contrat de travail et être entré au service d’une entreprise concurrente.

Reprochant à la société Cristal Solutions de s’être livrée à une opération de prêt de main d”uvre illicite et à une opération de marchandage, M. [G] a saisi, par requête reçue au greffe le 16 février 2018, le conseil de prud’hommes de Nanterre afin d’obtenir la condamnation, avec exécution provisoire, de celle-ci à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts ainsi que la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Contestant s’être livrée à une opération de prêt de main d”uvre illicite et à une opération de marchandage, la société Cristal Solutions a demandé au conseil de prud’hommes de débouter M. [G] de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de loyauté et violation de l’obligation contractuelle d’exclusivité ainsi que la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 11 juin 2021, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil des prud’hommes de Nanterre a :

– dit que le prêt de main d”uvre et le délit de marchandage de la part de la société Cristal Solutions n’est pas caractérisé,

– dit qu’il y a violation par M. [G] de son obligation de loyauté et d’exclusivité,

– débouté M. [G] de l’ensemble de ses demandes,

– condamné M. [G] à payer à la société Cristal Solutions les sommes suivantes :

*1 500 euros à titre de dommages- intérêts pour violation de la clause d’exclusivité et de loyauté,

*300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [G] aux éventuels dépens.

M. [G] a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 8 juillet 2021.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 17 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, M. [G] demande à la cour de :

– dire son appel recevable et bien fondé ;

– infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

– condamner la société Cristal Solutions à lui verser les sommes suivantes :

*10 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par le prêt de main-d”uvre illicite et le marchandage ;

*2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouter la société Cristal Solutions de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

– condamner la société Cristal Solutions aux entiers frais et dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 3 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la société Cristal Solutions demande à la cour de :

– déclarer M. [G] mal fondé en son appel, l’en débouter ;

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [G] de toutes ses demandes ;

-confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné M. [G] :

*à lui payer des dommages-intérêts pour violation de la clause d’exclusivité et de loyauté ;

*à lui payer un montant au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

*au paiement des entiers dépens ;

– la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident et y faire droit et, en conséquence :

– réformer le quantum de la somme qui lui a été allouée en première instance au titre de la violation de l’obligation de loyauté et d’exclusivité par M. [G] et porter ce montant à 10.000 euros,

– réformer le quantum de la somme qui lui a été allouée en première instance au titre de l’article 700 du code de procédure civile et porter ce montant à 3 000 euros ;

– condamner M. [G] aux entiers dépens dont le montant sera recouvré par Me Pedroletti, Avocat, dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 8 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le prêt illicite de main d’oeuvre et le marchandage

Constitue une opération de prêt illicite de main d’oeuvre à but lucratif prohibée par l’article L. 8241-1 du code du travail, le fait par une entreprise de mettre à disposition d’une autre entreprise, moyennant rémunération, le salarié qu’elle a engagé, à cet effet, pour la durée déterminée d’un chantier, lequel a été placé sous l’autorité d’une autre entreprise, la société prêteuse n’ayant conservé aucun pouvoir de contrôle et de direction sur le salarié.

Constitue une opération de marchandage, prohibée par l’article L. 8231-1 du code du travail, toute opération à but lucratif de fourniture de main d’oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail.

Il résulte des pièces produites :

– que la société Cristal Solutions a recherché un ingénieur en intégration et vérification système télécom en vue d’une mission à effectuer pour le compte de la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle au sein Airbus D&S ;

– qu’un contrat de sous-traitance a été conclu par la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle avec la société Cristal Solutions portant sur une prestation à effectuer dans les locaux de Airbus D&S à [Localité 4] à compter du 10 mai 2016 jusqu’au 18 novembre 2016, à raison d’une moyenne de 21 jours par mois, soit 126 jours, moyennant un prix total H.T. de 42 840 euros, soit un tarif journalier de 340 euros avec possibilité de prolonger la durée de la mission en cas de prolongation de la prestation ; que le tarif journalier a été porté à 377 euros à compter de la prolongation de la mission ; que si l’exemplaire du contrat écrit produit n’est pas signé, l’existence d’un tel contrat est corroborée par les factures mensuelles de prestation de service adressées par la société Cristal Solutions à la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle pour les mois de mai à décembre 2016 ;

– que M. [G] n’a pas été engagé par la société Cristal Solutions uniquement pour la seule durée de la mission à effectuer par la société SII-Société pour l’Informatique au sein de Airbus D&S mais par contrat de travail à durée indéterminée ;

– que le contrat de travail conclu par M. [G] avec la société Cristal Solutions stipule qu’il est placé sous l’autorité et la subordination exclusives de M. [Y] [B], gérant de la société Cristal Solutions ; que si, dans le cadre de l’exercice de ses fonctions, il constate qu’il n’est pas en mesure de respecter les durées minimales de repos ou qu’il est confronté à une difficulté d’organisation liée, par exemple, à la charge de travail, il a l’obligation d’en alerter sans délai M. [Y] [B] afin qu’une solution alternative puisse être trouvée ; qu’il lui appartiendra de soumettre la date de ses congés payés, selon les procédures et délais en vigueur au sein de la société, à l’accord préalable de son supérieur hiérarchique au sein de la société ;

– que l’ordre de mission établi le 9 mai 2016 par M. [Y] [B], gérant de la société Cristal Solutions, à effet du 10 mai au 15 novembre 2016, accepté par M. [G], et prolongé le 14 novembre 2016 à effet au 16 novembre 2016, précise :

¿ Vos obligations

*vous devez prendre connaissance et respecter le règlement intérieur en vigueur chez le client ;

*vous devez prendre connaissance et respecter les dispositions spécifiques de sécurité en vigueur chez le client ;

*vous devez respecter le secret professionnel vis-à-vis des informations obtenues chez le client ou chez votre employeur ;

¿ Pendant la mission

*chaque fin de mois établissez une feuille d’activité mensuelle pour le mois écoulé, faites-la signer par votre chef de projet et envoyez-la à votre employeur ;

*pour des problèmes administratifs contactez votre responsable ;

¿ Absences

*toute absence prévisible doit être signalée à votre employeur le plus tôt possible ;

*en particulier pour les congés :

#pour la période de congés escomptés, tenir compte des impératifs de la mission en concertation avec le client,

#établir une demande de congés écrite et l’adresser à votre employeur,

#après l’accord de votre employeur, confirmer la période de congés au client ;

*les absences non prévues (maladie, accident, cas de force majeure…) doivent être signalées le plus rapidement possible à votre employeur et au client ;

¿ Organisation du temps de travail

*le prestataire est-il aux 35H hebdomadaires effectives ‘ Non

*vous devez suivre l’organisation du temps de travail de votre employeur telle qu’elle est décrite dans l’accord d’entreprise de réduction du temps de travail ;

*vous vous engagez à respecter les jours de société fermée du client et la prise de congé afférente ;

– que si M. [G] adressait des synthèses hebdomadaires sur l’avancée de son travail au chef de projet d’Airbus D&S et s’il avait des échanges sur le déroulement de sa mission avec celui-ci et l’ingénieur d’affaires de la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle en charge du contrat de prestations de service conclu par celle-ci avec Airbus D&S, il établissait ses rapports mensuels d’activité sur un document à en-tête de la société Cristal Solutions, mentionnée sur ce document comme étant le prestataire du client SII-Société pour l’Informatique Industrielle, et les adressait à la société Cristal Solutions après les avoir fait viser par le chef de projet d’Airbus D&S ;

– que la société Cristal Solutions validait les feuilles de temps de M. [G] ;

– que si M. [G] faisait viser ses demandes d’absence par le chef de projet d’Airbus D&S, responsable métier du bénéficiaire final de la prestation, c’était la société Cristal Solutions qui validait ses demandes d’absence, dont sa demande de prise de jours de congés payés par anticipation ; qu’il est inopérant que, par mail du 5 décembre 2016, l’ingénieur d’affaire de la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle ait informé l’ensemble des personnes mises par celle-ci à disposition d’Airbus D&S sur le site d'[Localité 4], que celui-ci était fermé le lundi 02 janvier 2017 et leur a demandé en conséquence de poser un jour de congé ou de RTT, dès lors qu’en acceptant son ordre de mission, M. [G] s’était lui-même engagé vis-à-vis de la société Cristal Solutions à respecter les jours de fermeture du site sur lequel il travaillait ;

– que la société Cristal Solutions était l’interlocuteur de M. [G] concernant sa rémunération ; que c’est auprès du gérant de celle-ci qu’il a sollicité une augmentation le 5 décembre 2016 ;

– que la société Cristal Solutions validait les notes de frais de M. [G] ;

– que si la perspective d’un transfert du contrat de travail de M. [G] de la société Cristal Solutions à la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle a été envisagée entre les parties au contrat de travail début octobre 2016, il ne s’est pas concrétisé et la société Cristal Solutions a demandé à M. [G], par courriel du 7 décembre 2016, de lui transmettre, comme demandé par téléphone la semaine précédente, son CV détaillé et le dossier technique (DT) Cristal Solutions à jour avec l’expérience Airbus et lui a demandé de le lui adresser si possible le jour même ou le lendemain, “car la fin de ta mission-à ta demande au client final Airbus et à mon client SII-arrivant le 2312/2016 soir, il est plus qu’urgent que je cherche d’autres projets pour toi” et a demandé à le voir au plus vite avec son CV et son DT Cristal Solutions faits au préalable ;

– que la société Cristal Solutions a exercé son pouvoir disciplinaire sur M. [G], en le convoquant à un entretien préalable et en lui notifiant son licenciement.

Il est établi par les pièces produites, d’une part, que M. [G], qui détenait une compétence particulière en matière d’intégration et de vérification de système télécom, a été mis à la disposition de la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle pour y apporter, dans le cadre d’une prestation de service, un savoir-faire spécifique dont les salariés de celle-ci ne disposaient pas, et, d’autre part, que M. [G] n’était pas en lien de subordination avec la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle mais demeurait subordonné à la société Cristal Solutions à laquelle il s’adressait concernant ses feuilles de temps, ses prises de congés, ses notes de frais et ses salaires.

Il en résulte que cette mise à disposition de M. [G], qui s’inscrivait dans le cadre d’une prestation de services spécifique fournie à la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle par la société Cristal Solutions, laquelle continuait à exercer son autorité et son contrôle sur le salarié, ne caractérisait pas une simple fourniture de main d’oeuvre.

Elle ne constituait dès lors ni une opération illicite de prêt de main d’oeuvre à but lucratif, ni une opération de marchandage.

S’agissant du marchandage, il y a lieu de constater en outre, d’une part, qu’il n’est pas allégué que le contrat conclu entre la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle et la société Cristal Solutions ait eu pour effet d’éluder l’application de dispositions légales ou de stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail et, d’autre part, qu’il n’est pas établi que ce contrat ait eu pour effet de porter préjudice à M. [G], aucun élément ne démontrant que le salarié aurait perçu, ainsi qu’il le prétend, une rémunération plus élevée s’il avait été embauché par la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle au lieu d’être embauché par la société Cristal Solutions.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que le prêt de main d”uvre et le marchandage n’était pas caractérisé et a débouté M. [G] de sa demande de dommages-intérêts de ces chefs.

Sur la violation de l’obligation de loyauté et de l’obligation d’exclusivité

Le salarié est soumis pendant l’exécution de son contrat de travail à une obligation générale de loyauté qui lui interdit de se livrer à une activité concurrente de celle de son employeur.

Par ailleurs, le contrat de travail conclu par M. [G] avec la société Cristal Solutions comportait une clause d’exclusivité rédigée comme suit :

“Pendant l’exécution du présent contrat :

-Vous vous engagez à consacrer professionnellement toute votre activité et tous vos soins à la Société (et/ou celles entrant dans votre périmètre d’activité), votre employeur exclusif, et vous interdisez donc d’exercer une autre activité professionnelle soit pour votre propre compte, soit pour le compte de tiers.

-Vous vous interdisez par ailleurs, sauf accord préalable de la Société, de vous intéresser, directement ou indirectement, de quelque manière et à quelque titre que ce soit (salarié, non salarié, entreprise personnelle, associé, mandataire social, voire commanditaire…) À toute affaire créée ou en voie de création susceptible de faire concurrence à la Société.”

Si M. [G] n’a pas déféré à la sommation de communiquer le contrat de travail qu’il a conclu avec la société Protectic, choisie comme prestataire par Airbus D &S pour poursuivre la réalisation du projet à l’issue de la prestation confiée à la société SII-Société pour l’Informatique Industrielle, il est constant que l’intéressé, qui n’avait pas démissionné de son emploi, était toujours lié par son contrat de travail à la société Cristal Solutions lorsqu’il a été engagé fin 2016/début 2017 par contrat de travail par la société Protectic, société de conseil en ingénierie qui exerçait une activité concurrente de son employeur.

Il est établi que M. [G], qui n’a pas démissionné de son emploi au sein de la société Cristal Solutions comme il l’avait laissé entendre, ne s’est pas non plus présenté à son poste, éludant les rendez-vous qui lui ont été proposés par cette dernière, puis tentant d’obtenir de celle-ci la conclusion d’une convention de rupture conventionnelle afin de préserver ses droits aux indemnités de chômage en cas de rupture de sa période d’essai par son nouvel employeur.

L’intéressé est mal fondé à prétendre que la société Cristal Solutions ne lui avait pas confié de nouvelle mission alors qu’il n’avait pas donné suite aux demandes de cette dernière de lui adresser son CV détaillé et le dossier technique (DT) Cristal Solutions à jour avec l’expérience Airbus et aux rendez-vous proposés par celle-ci et l’avait informée qu’il s’était engagé par contrat de travail auprès d’un autre employeur.

Le manquement de M. [G] à l’obligation générale de loyauté qui lui incombait et à la clause d’exclusivité stipulée à son contrat de travail est établi.

La responsabilité pécuniaire du salarié ne pouvant toutefois être engagée qu’en cas de faute lourde, laquelle suppose une intention de nuire, non démontrée en l’espèce, ni même alléguée, le salarié ayant été licencié pour faute grave, il convient d’infirmer le jugement entrepris et de débouter la société Cristal Solutions de sa demande de dommages-intérêts. Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé en ce qu’il a condamné M. [G] à payer à celle-ci la somme de 1 500 euros pour manquement à l’obligation de loyauté et à la clause d’exclusivité.

Sur les dépens et l’indemnité de procédure

M. [G], à l’initiative de la procédure prud’homale, succombant en ses propres demandes, sera condamné aux dépens de première instance et d’appel et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande d’indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en première instance.

Il convient d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a condamné à payer à la société Cristal Solutions la somme de 300 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés par celle-ci en première instance et de le condamner à payer à celle-ci la somme de 2 000 euros à ce titre.

Il convient de débouter M. [G] et la société Cristal Solutions de leurs demandes d’indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en ce qu’elles portent sur les frais irrépétibles exposés en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La COUR,

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE,

Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre en date du 11 juin 2021, sauf en ce qu’il a condamné M. [M] [G] à payer à la société Cristal Solutions la somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts pour violation de la clause d’exclusivité et de l’obligation de loyauté et la somme de 300 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau de ces chefs :

Déboute la société Cristal Solutions de sa demande de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de loyauté et de la clause d’exclusivité ;

Condamne M. [M] [G] à payer à la société Cristal Solutions la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en première instance ;

Y ajoutant :

Déboute M. [M] [G] et la société Cristal Solutions de leurs demandes d’indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en ce qu’elles portent sur les frais irrépétibles exposés en cause d’appel ;

Condamne M. [M] [G] aux dépens d’appel et autorise Maître Pedroletti, Avocat, à recouvrer directement contre lui ceux dont il a fait l’avance sans avoir reçu provision conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x