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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-4
ARRÊT AU FOND
DU 12 JANVIER 2023
N° 2023/
CM/FP-D
Rôle N° RG 19/15261 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BE6TL
[J] [Z]
C/
SAS TRAVEL LAB
Copie exécutoire délivrée
le :
12 JANVIER 2023
à :
Me Nicolas MATTEI, avocat au barreau de NICE
Me Arielle LACONI, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CANNES en date du 19 Juillet 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 18/00092.
APPELANTE
Madame [J] [Z], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Nicolas MATTEI, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
SAS TRAVEL LAB prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant et domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Arielle LACONI, avocat au barreau de MARSEILLE,
et par Me Guillaume DESMOULIN, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Ambre DALBES, avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Catherine MAILHES, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre
Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller
Madame Catherine MAILHES, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2023.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2023
Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Mme [Z] (la salariée) a été embauchée à compter du 12 mai 2003 par la société Travel Lab (la société) portant la dénomination commerciale ‘Voyages Kuoni’ selon contrat à durée indéterminée en qualité de déléguée commerciale.
Elle était au dernier état de la relation, chargée du secteur géographique comprenant les départements suivants : 04, 05, 06, 07, 20 (2A et 2B), 26,38, 43, 48, 83 et 98 ([Localité 6]).
La société est spécialisée dans le métier du tour opérateur (fabrication et vente de voyages, principalement long-courrier et haut-de-gamme) et applique les dispositions de la convention collective des agences de voyages et de tourisme.
La salariée avait pour mission principale d’accompagner le développement commercial des agences composant son portefeuille, de fidéliser leur attachement à la marque et d’accroître leur chiffre d’affaires sur la vente des voyages proposés par la société, devant visiter régulièrement les agences et aller à la rencontre de prospects du secteur de tourisme susceptibles d’être intéressés par les voyages proposés par la société.
Le 3 février 2016, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à licenciement pour le 15 février 2016.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 23 février 2016, la salariée a été licenciée pour insuffisance professionnelle.
Le 22 février 2018, Mme [Z], contestant son licenciement, a saisi le conseil de prud’hommes de Cannes aux fins de voir requalifier son licenciement pour insuffisance professionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse, de voir la société Travel Lab condamnée à lui verser des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail à hauteur de 30’815 euros, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 61’630 euros outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
La société Travel Lab s’est opposée aux demandes de la salariée et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de celle-ci au versement d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 19 juillet 2019, le conseil de prud’hommes de Cannes a :
dit et jugé que le licenciement de Mme [Z] repose sur une cause réelle et sérieuse,
débouté Mme [Z] de l’ensemble de ses demandes,
débouté le défendeur de sa demande reconventionnelle,
condamné chacune des parties à conserver la charge de ses dépens.
Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 2 octobre 2019, Mme [Z] a interjeté appel dans les formes et délais prescrits de ce jugement, aux fins d’annulation sinon d’infirmation en ce qu’il a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes.
Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 23 décembre 2019, Mme [Z] demande à la cour de :
déclarer son appel partiel recevable et bien fondé,
y faisant droit,
juger recevable et bien fondée Mme [Z] en ses demandes,
réformer partiellement le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Cannes le 19 juillet 2019,
statuant à nouveau,
requalifié le licenciement pour insuffisance professionnelle prononcée à l’encontre de la salariée en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
condamner la société Travel Lab au paiement des sommes suivantes, sur la base d’un salaire mensuel moyen de 2567,90 euros bruts :
61’630 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (24 mois de salaire),
30’815 euros nets à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail (12 mois de salaire),
condamner la société Travel Lab à lui payer la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens de l’instance en application de l’article 696 du code de procédure civile.
Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 29 septembre 2022, la société Travel Lab demande à la cour de :
confirmer le jugement en ce qu’il a dit le licenciement de Mme [Z] reposant sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu’il a débouté de ses demandes,
en conséquence,
débouter Mme [Z] de l’ensemble de ses prétentions présentées en cause d’appel,
condamner Mme [Z] à lui verser la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
condamner Mme [Z] aux entiers dépens.
La clôture des débats a été ordonnée le 3 octobre 2022 et l’affaire a été évoquée à l’audience du 17 octobre 2022.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l’exécution du contrat de travail
La salariée fait grief au jugement de la débouter de sa demande dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail en faisant valoir que :
– elle a été dénigrée et nullement considérée pour le travail accompli et les bons résultats réalisés,
– elle n’a jamais fait l’objet d’aucune valorisation ni de son ancienneté ni de ses compétences depuis son embauche,
– elle n’a jamais bénéficié d’un encadrement managérial de la part de la direction,
– elle n’a pas été informée des méthodes et techniques d’évaluation professionnelles mises en oeuvres et justifiant sa prétendue insuffisance,
– elle a été privée de son droit d’informer ses collaborateurs et clients de son départ.
La salariée à qui incombe la charge de la preuve de l’exécution déloyale du contrat de travail n’apporte strictement aucun élément au soutien de ses assertions, alors même qu’il ressort des pièces versées aux débats qu’elle bénéficiait d’une rémunération variable la valorisant et prenant nécessairement en considération ses compétences, qu’elle bénéficiait d’un réel encadrement managérial.
Elle sera ainsi déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il l’a déboutée de cette demande.
Sur la rupture du contrat de travail
Pour contester le jugement entrepris en ce qu’il a dit que le licenciement pour insuffisance professionnelle est justifié, la salariée fait valoir que :
– les objectifs annoncés lors de l’entretien annuel de janvier 2015 étaient différents de ceux qui lui ont été fixés au sein du courriel du 13 février 2015 et irréalistes au regard des difficultés économiques du secteur dans le contexte géopolitique des attentats de 2015, de la taille pénalisante de son secteur géographique, s’agissant du secteur le plus étendu de l’ensemble des commerciaux et dont 70% se situait au-delà de 3 à 6 heures de route alors que la Côte d’Azur représentait 75% de son chiffre d’affaires, de ce que celui-ci s’est accru en 2013 par la récupération du secteur démarché par une remplaçante et en 2015 par l’attribution de deux grandes enseignes à [Localité 7] et [Localité 4], ce d’autant qu’elle avait les meilleurs résultats ;
– elle avait une méthode de travail différente par ‘workshop’ et des actions de formations qui n’étaient pas comptabilisées comme visites ;
– aucun client ou agence ne s’est plaint d’un manque de disponibilité de sa part ;
– elle a subi une intervention chirurgicale en 2015 ;
– la société ne lui a pas donné les moyens d’accomplir sa mission en lui refusant l’attribution d’un véhicule de 5 places et par un défaut d’accompagnement managérial.
La société estime rapporte la preuve de l’insuffisance professionnelle reprochée et dénie tant le caractère irréaliste des objectifs allégué par la salariée que l’absence de moyens pour mener à bien ses missions.
Aux termes de la lettre de licenciement du 23 février 2016 la salariée a été licenciée pour les motifs suivants :
‘(…)Vous occupez, depuis le 17 février 2003 les fonctions de Déléguée Commerciale BtoB.
Dans ce cadre, il vous incombe de gérer, dans votre secteur géographique, un portefeuille de clients constitués majoritairement d’agences de voyage.
Une des principales missions du poste consiste à visiter régulièrement ces agences afin de les
assister dans la résolution des problèmes et les inciter à accroître leur chiffre d’affaires avec les
différentes marques de notre Société.
En dépit de ces prérequis connus de vous, nous sommes cependant amenés à constater, depuis plus d’un an, de très sérieuses carences dans l’exercice de vos missions.
Ces carences se manifestent tout à la fois par une méconnaissance des enjeux du métier, ou encore par des initiatives en décalage avec les attentes légitimes de votre responsable hiérarchique.
En 2014 et en 2015, vous n’avez effectué respectivement que 302 et 312 visites aux agences de
votre secteur. Vous n’avez ainsi visité que 55% de l’ensemble des agences dont vous avez la responsabilité, soit le plus faible taux de l’ensemble des délégués commerciaux.
En outre, il s’avère que plus de 10% des agences visitées n’ont réalisé aucun chiffre d’affaires avec notre société en 2015, et que parmi les 25 agences les plus visitées, plus d’un tiers d’entre elles ont réalisé moins de 50.000 euros de chiffre d’affaires au cours des 12 derniers mois.
En 2015, vous vous êtes rendu 4 fois à l’agence Contraste de [Localité 7] alors que cette dernière n’a
réalisé aucun chiffre d’affaires avec notre Société.
A l’inverse, parmi les agences que vous n’avez visitées qu’une seule fois dans l’année, 10 d’entre
elles réalisent un chiffre d’affaire supérieur à 50.000 euros, et deux d’entre elles supérieur à 100.000 euros.
Vous n’hésitez cependant pas à vous rendre à 8 ou 10 reprises dans des agences situées à proximité de votre domicile.
Non seulement le nombre et la couverture géographique de vos visites se révèlent être nettement
insuffisant, mais de surcroît le choix des agences que vous visitez n’obéit à aucun plan commercial précis. Animer un réseau constitue pourtant la base de votre métier.
Ce manque de crédibilité et de professionnalisme est préjudiciable s’agissant de nos relations avec les principaux partenaires commerciaux de l’entreprise.
Ainsi, les relations que vous entretenez avec certains de nos principaux réseaux de distribution se sont nettement dégradées, notamment avec le réseau Tourcom, Selectour Afat ou encore
Univairmer dont les représentants nous ont fait part de leur insatisfaction en raison de votre
manque évident d’assiduité auprès de leurs agences.
Sur une ville comme [Localité 4] par exemple, ou deux acteurs majeurs de notre Distribution
constituent des potentiels extrêmement importants (les Voyages d’Alfred à plus de 250.000 euros de
CA /an ou encore notre Franchise Kuoni Univairmer à plus de 600.000 ( de CA I an), vous n’avez
effectué qu’une seule visite sur l’année 201 5, ce qui représente une insuffisance particulièrement
évidente de présence locale, lourdement reprochée à notre entreprise par ces partenaires qui vont
même jusqu’à remettre en cause leur engagement de développement de notre activité commune,
ce qui est gravement pénalisant pour nos performances à venir.
De façon plus globale, vous ne vous positionnez pas comme un interlocuteur fiable et efficace vis-à-vis de la plupart de nos partenaires privilégiés.
Parmi les incidents les plus notables, vos négligences dans le suivi des agences Ciel et Mer Voyages, Privilèges Voyages ou Acropolis ont conduit en octobre dernier la Direction Commerciale de Tourcom à remettre en cause notre partenariat avec ce réseau qui représente pour notre société plus de 10 millions de Chiffre d’affaires.
Votre comportement a pour effet de détériorer “image de notre société et de nous faire perdre en
crédibilité auprès de nos principaux partenaires commerciaux, ce qui n’est pas acceptable compte
tenu du contexte hyperconcurrentiel dans lequel nous évoluons aujourd’hui.
Ce manque de professionnalisme s’accompagne en outre de résultats commerciaux décevants pour votre secteur.
Ces derniers mois, votre responsable hiérarchique n’a pourtant eu de cesse de vous mettre en garde contre votre manque de rigueur et d’organisation, comme par exemple le retard de saisie des données dans le CRM (email du 26 août 2015), ou les erreurs dans vos notes de frais (email du 7 janvier 2016).
Autre illustration de votre négligence, vous n’avez pas jugé bon de prévenir votre responsable
hiérarchique de votre absence à votre entretien annuel le 4 janvier dernier malgré ses nombreux
rappels.
Lors de dernier votre entretien annuel du 20 janvier 2015, votre responsable hiérarchique avait
déjà noté de graves insuffisances quant à l’organisation de votre travail.
De telles carences sont d’autant moins acceptables compte tenu de votre ancienneté à ce poste.
Par conséquent, au regard des responsabilités attachées à vos fonctions et de l’absence de perspectives d’améliorations, nous sommes amenés à vous notifier, par la présente, votre licenciement pour insuffisance professionnelle. (…)’
L’insuffisance professionnelle se définit comme l’incapacité d’un salarié à exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification et se caractérise par une mauvaise qualité du travail accompli. L’appréciation de l’insuffisance professionnelle d’un salarié relève du pouvoir de direction de l’employeur, nécessitant néanmoins l’existence de motifs précis objectifs et matériellement vérifiables dont la preuve aura été rapportée.
Il est établi par les pièces versées aux débats que pour les années 2014 et 2015, la salariée a effectué 302 et 312 visites, représentant 55% de l’ensemble des agences de son secteur et l’un des taux le plus faible de l’ensembles des délégués commerciaux (avant dernier). Contrairement à ce que la salariée prétend, son secteur géographique avait été réduit depuis son embauche en passant de 12 à 11 départements et n’était pas plus pénalisant. S’il comprenait à la place des départements 13 (Bouches-du-Rhône), 30 (Gard), 34 (Hérault), et 84 (Vaucluse) qui avaient été ôtés, ceux de la Drôme (26) et de l’Isère (38), ces deux départements n’étaient pas plus éloignés que l’Hérault ou le Vaucluse. Dans ce cadre, elle avait récupéré en septembre 2013, le secteur démarché par sa remplaçante pendant sa période de temps partiel de 2011 à 2013, sans incidence. Par ailleurs, le fait de lui avoir attribué deux grandes agences Kuoni à [Localité 7] et [Localité 4] au début de l’année 2015, qui étaient considérés comme des grands comptes, n’est pas de nature à avoir une incidence négative sur son activité, permettant au contraire de se concentrer sur celles-ci et de ne pas s’éparpiller.
Par ailleurs, il ne lui est pas reproché de ne pas avoir atteint les objectifs en terme de chiffre d’affaires, en sorte que le moyen selon lequel ses objectifs, qui ne fixaient que des montant de chiffres d’affaire à réaliser, n’étaient pas réalisables et qu’ils étaient différents de ceux indiqués lors de l’entretien annuel, est sans emport sur la solution du litige, de même que la situation géopolitique instable entraînant une désaffection pour certaines destinations.
Elle n’apporte pas plus d’éléments au soutien de ce qu’elle avait une méthode de travail différente et qu’elle effectuait d’autres rencontres qui n’étaient pas comptabilisées comme visites, la seule pièce apportée concernant une action de novembre 2013, antérieure à la période en cause, alors même que les visites étaient expressément prévues par la fiche de poste (démarcher, gérer, convaincre, former, assister dans la résolution des problèmes les agences du portefeuille afin de développer leur attachement à la marque, leurs ventes et accroître leur chiffre d’affaires avec les différentes marques de Kuoni Travel Lab, au moyen de visites en agence, téléphone, news letter, webinar). Elle ne justifie pas plus de périodes d’absences liées à des problèmes de santé ayant eu un impact sur le nombre de visites et sa disponibilité pour celles-ci.
Il ressort des pièces versées par l’employeur que 10% des agences visitées n’avait réalisé aucun chiffre d’affaires pour la société en 2015 et que les 25 agences les plus visitées avaient rapporté moins de 5.000 euros de chiffre d’affaires pour la société au cours des 12 derniers mois, qu’il s’agissait d’agences situées sur la Côte d’Azur ([Localité 5], [Localité 7], [Localité 8]), à proximité de son domicile fixé à [Localité 3]. Sur les agences visitées une seule fois au cours de l’année 2015 par la salariée, huit d’entre elles présentaient un chiffre d’affaires dépassant 50.000 euros et deux 100.000 euros. Ces éléments démontrent effectivement que la salariée avait concentré ses efforts sur les agences situées à proximité de son domicile mais que celles-ci étaient dépourvues de potentiel commercial intéressant. Aussi, à défaut d’apporter d’éléments contraires, il est établi que la salariée n’avait pas de plan commercial précis.
Les divers courriels versés aux débats démontrent que les relations avec les réseaux de distribution comme Tourcom,Sélectour Afat et Univairmer s’étaient dégradées et que certaines agences avaient remis en cause leurs engagements de développement commercial avec la société Travel Lab. Ainsi le manager du réseau Univairmer s’était plaint le 30 mai 2015 de ce que Mme [Z] ne s’était rendue qu’une seule fois au sein de l’agence de [Localité 4] depuis le début de l’année 2015 et la responsable de l’agence avait, en décembre 2015, indiqué que les performances commerciales de l’agence avaient pâti du manque de soutien de la salariée, se plaignant de ce qu’il n’y avait eu qu’une seule visite en juillet 2015 malgré le mail du 30 mai dernier. L’agence Ailleurs Voyages s’était également plainte de l’absence de réponse à une demande de ristourne pour des clients fidèles, de même que la responsable du réseau ‘Sud Ailleurs voyages’ qui se plaignait de n’avoir aucun contact avec la commerciale des Alpes-Maritimes. La directrice commerciale du réseau Tourcom a indiqué par courriel du 7 octobre 2015 que ses agences de [Localité 3] et [Localité 7] qui avaient fait plusieurs demandes chez Kuoni n’avaient pas obtenu de réponse en sorte qu’elles passaient dorénavant par un autre tour opérateur et a précisé par la suite avoir fait le même constat au sein des agences Privilège Voyages et Acropolis.
Il est également établi que la salariée a tardé dans la saisie de ses données dans le ‘CRM’ comme il ressort du courriel de son supérieur du 26 août 2015, qu’elle a fait des erreurs dans trois notes de frais le 7 janvier 2016 et qu’elle avait omis de prévenir son responsable de son absence à l’entretien professionnel annuel du 4 janvier 2016.
La salariée ne saurait prétendre que les moyens ne lui pas été données par la société en refusant de lui faire bénéficier d’un véhicule 5 portes, alors même qu’il est constant qu’elle disposait d’un véhicule de fonction et qu’elle ne donne aucune explication sur l’apport objectif lié à l’attribution d’une voiture de cinq portes.
Elle avait par ailleurs bénéficié d’une formation commerciale en 2014 adaptée à ses fonctions puisque celle-ci était destinée à donner une nouvelle impulsion en renforçant l’approche commerciale des commerciaux dans leurs visites des réseaux des agences de voyage, à mieux préparer et conduire les visites en les structurant davantage, à mettre l’accent sur la contribution aux objectifs commerciaux.
Par ailleurs, la périodicité annuelle des entretiens professionnels et notamment celui du mois de janvier 2015 outre les courriels récurrents de son supérieur hiérarchique qui l’alertait sur les distorsions de chiffres par rapport à ses collègues, lui demandait des explications, l’incitait à faire des visites sur les agences qui l’avait sollicitée à défaut de réponse de sa part, démontrent que celui-ci l’accompagnait dans ses missions tout en maintenant l’autonomie qu’elle entendait voir valorisée. Elle avait eu ainsi comme objectifs pour 2014, d’organiser un séminaire avec des agences VIP et de respecter les délais pour l’administratif, lesquels n’avaient pas été atteints. Il lui était demandé pour 2015 de mettre l’accent sur les visites de façon à atteindre le nombre de visites, ce qui n’a pas été au rendez-vous au regard des chiffres ci-dessus énoncés, outre respecter les délais, atteindre le budget et lutter contre le passéisme.
L’ensemble de ces éléments permet de considérer que le licenciement pour insuffisance professionnelle repose sur une cause réelle et sérieuse et qu’en conséquence, la salariée sera déboutée de sa demande indemnitaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a dit que le licenciement de Mme [Z] reposait sur cause réelle et sérieuse et en ce qu’il l’a déboutée de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
La salariée succombant sera condamnée aux entiers dépens de l’appel. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a dit que chacune des parties conservera à sa charge ses dépens et débouté Mme [Z] de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Ni l’équité ni la disparité économique commande de faire bénéficier la société Travel Lab des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et celle-ci sera déboutée de sa demande à ce titre au titre de l’appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile;
Dans la limite de la dévolution,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs demandes d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais d’appel;
Condamne Mme [Z] aux entiers dépens de l’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT