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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 1
ARRET DU 29 MARS 2023
(n°044/2023, 25 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 20/17992 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCZC4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Septembre 2020 -Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre – 2ème section – RG n° 18/01381
Jonction avec le dossier RG 21/00955 par ordonnance du 22 juin 2021
APPELANTES
SAS OBERTHUR FIDUCIAIRE,
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 803 311 372
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Assistée de Maître Olivier LEGRAND de la SCP LEGRAND LESAGE-CATEL, avocat au barreau de PARIS, toque: D1104
SARL EURO VENDING COMPANY,
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de CLERMONT-FERRAND sous le numéro 403 241 037
Agissant poursuites et diligrences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
SAS EURO BANKNOTE MEMORY,
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 805 406 654
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représentées par Me Nadia SALEH de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125
Assistées de Me Jean-Claude BRUN de la SELARL JURIS ID, avocat au barreau de LYON, toque : 135
INTIMEES
SAS OBERTHUR FIDUCIAIRE,
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 803 311 372
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Assistée de Maître Olivier LEGRAND de la SCP LEGRAND LESAGE-CATEL, avocat au barreau de PARIS, toque: D1104
SARL EURO VENDING COMPANY,
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de CLERMONT-FERRAND sous le numéro 403 241 037
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
SAS EURO BANKNOTE MEMORY,
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 805 406 654
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représentées par Me Nadia SALEH de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125
Assistées de Me Jean-Claude BRUN de la SELARL JURIS ID, avocat au barreau de LYON, toque : 135
S.A.S. FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de MONTPELLIER sous le numéro 518 498 183
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit zsiège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Audrey KUBACKI de la SELEURL AUDREY KUBACKI AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1857
Assistée de Me Camille SAVOYE du cabinet LKJ AVOCATS-LEONID GNINAFON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, toque: 110
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 8 février 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Françoise BARUTEL, conseillère, et Mme Déborah BOHEE, conseillère chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.
Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre,
Mme Françoise BARUTEL, conseillère,
Mme Déborah BOHEE, conseillère,
Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON
ARRÊT :
Contradictoire
par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société EURO VENDING COMPANY se présente comme étant spécialisée dans la conception et l’exploitation de souvenirs de type médailles souvenir ou billets souvenir de qualité fiduciaire.
Elle est titulaire de la marque verbale de l’Union Européenne « 0 €uro Souvenir », n°13048954, déposée le 10 septembre 2014 en classes 9, 14 et 16 pour désigner notamment les produits de l’imprimerie, cartes et dessins.
Elle précise avoir concédé une licence exclusive de cette marque à la société EURO BANKNOTE MEMORY qu’elle a constituée avec la société OBERTHUR FIDUCIAIRE, la société EURO BANKNOTE MEMORY étant donc le distributeur exclusif des produits.
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE est spécialisée dans la conception et la fabrication de billets de banque et documents sécurisés et notamment les billets souvenirs commercialisés par la société EURO BANKNOTE MEMORY.
La société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 (ci après la société FONDERIE SAINT LUC) se présente comme une société qui commercialise depuis sa création en 2009 des objets souvenirs, notamment des médailles porte-clés ou des jetons vendus sur des sites touristiques. Elle précise avoir décidé en 2016 de commercialiser également des billets souvenirs à l’effigie de certains sites touristiques et de villes françaises et a déposé le 7 octobre 2016 trois modèles français de billets souvenirs enregistrés sous les numéros n°20165060-001, -002 et -003.
La direction régionale des douanes de Lyon a procédé à la retenue de 20.000 billets souvenirs dont la société EURO VENDING COMPANY a, par courrier du 22 septembre 2016, confirmé le caractère contrefaisant de sa marque, les produits étant saisis dans les locaux de la société FONDERIE SAINT LUC, le 28 septembre 2016.
La société EURO VENDING COMPANY a déposé plainte pour contrefaçon de marques les 28 septembre et 6 octobre 2016, plainte qui a donné lieu à un classement sans suite le 24 mars 2017 par le parquet de Clermont Ferrand. La transaction proposée par les douanes a été refusée par la société FONDERIE SAINT LUC.
La société FONDERIE SAINT LUC a réclamé à plusieurs reprises la restitution des billets en cause puis a fait assigner en référé la direction des douanes afin de faire constater le trouble manifestement illicite à ses droits, demande qui a été rejetée par ordonnance du 16 janvier 2018.
La société EURO VENDING COMPANY a été autorisée par ordonnances des 16 octobre 2017 puis du 9 janvier 2018 a faire procéder à une saisie contrefaçon entre les mains des douanes, saisie qui a été opérée le 15 janvier 2018.
C’est dans ce contexte que, par acte du 1er février 2018, les sociétés EURO VENDING COMPANY et EURO BANKNOTE MEMORY ont fait assigner la société FONDERIE SAINT LUC devant le tribunal de grande instance de Paris sur le fondement des règles du droit d’auteur, du droit des dessins et modèles, du droit des marques et de la concurrence déloyale et parasitaire.
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE est par la suite intervenue volontairement à l’instance, aux côtés des sociétés demanderesses.
Dans son jugement rendu le 4 septembre 2020 dont appel, le tribunal judiciaire de Paris a :
– débouté les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leurs demandes sur le fondement du droit d’auteur ;
– débouté les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leur demande d’annulation des dessins et modèles déposés par la société FONDERIE SAINT LUC le 7 octobre 2016 ;
– débouté les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leurs demandes sur le fondement du droit des marques ;
– débouté les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leurs demandes sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire ;
– débouté la société FONDERIE SAINT LUC de sa demande d’annulation de la marque « 0 €uro Souvenir » ;
– débouté la société FONDERIE SAINT LUC de ses demandes sur le fondement de la procédure abusive ;
– débouté la société FONDERIE SAINT LUC de ses demandes de publication ;
– condamné in solidum les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE à payer à la société FONDERIE SAINT LUC la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné in solidum les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE aux dépens dont distraction à Me Audrey KUBACKI.
Les sociétés EURO BANKNOTE MEMORY et EURO VENDING COMPANY ont interjeté appel de ce jugement le 10 décembre 2020.
Le 12 janvier 2021, la société OBERTHUR FIDUCIAIRE a interjeté appel de ce jugement.
Les deux instances ont été jointes sous le n° de RG 21/955.
Dans leurs dernières conclusions numérotées 7 et signifiées par RPVA le 17 janvier 2023, les sociétés EURO VENDING COMPANY et EURO BANKNOTE MEMORY demandent à la cour de :
– écarter des débats les pièces invoquées par FONDERIE SAINT LUC et non produites (pièce 0) ;
– débouter la FONDERIE SAINT LUC de sa demande en nullité de la marque européenne «0 €uro Souvenir » n°013048954 car elle serait dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7-1-b du règlement CE 2017/10001, et juger cette marque distinctive ;
– condamner la FONDERIE SAINT LUC pour avoir contrefait cette marque par imitation ;
– condamner la FONDERIE SAINT LUC à cesser toute utilisation, à quelque titre et sous quelque forme et support que ce soit, du signe « 0 €uro souvenir » ou tout signe similaire tel que notamment « 0 € » « zéro € » « 0 €uro » « zéro €uro », sous astreinte de 1000 € par jour et par infraction constatée, à compter de la notification du jugement à intervenir ;
– condamner la FONDERIE SAINT LUC pour avoir commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme à l’égard d’EURO BANKNOTE MEMORY par imitation des caractéristiques esthétiques et techniques des objets souvenirs décrites dans les présentes conclusions, pour usurper le code imprimeur de OBERTHUR dont EURO BANKNOTE MEMORY est le seul distributeur exclusif, et pour violer l’interdiction d’utiliser le fond vert des billets de 100 € faite par la Banque de France et qu’EURO BANKNOTE MEMORY respecte ;
– condamner la FONDERIE SAINT LUC pour avoir commis des actes de parasitisme de la notoriété et des investissements d’EURO BANKNOTE MEMORY et d’EURO VENDING COMPANY ;
– condamner la FONDERIE SAINT LUC à cesser les actes de concurrence déloyale et de parasitisme décrits ci-dessus et dans les présentes conclusions sous astreinte de 1000 € par jour et par infraction constatée, à compter de la notification du jugement à intervenir ;
– condamner FONDERIE SAINT LUC à payer à la société EURO VENDING COMPANY 50 000€ de dommages et intérêts, et autant à la société EURO BANKNOTE MEMORY en sa qualité de licenciée exclusive de la marque, en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon de la marque « 0 €uro Souvenir » ;
– condamner FONDERIE SAINT LUC à payer à la société EURO VENDING COMPANY 50 000 € au titre de la concurrence parasitaire ;
– condamner FONDERIE SAINT LUC à payer à EURO BANKNOTE MEMORY 300 000 € de dommages et intérêts, en réparation du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale et du parasitisme ;
– ordonner la publication du dispositif du jugement dans deux quotidiens nationaux, deux quotidiens régionaux, et dans deux revues spécialisées, tous choisis par le demandeur, dans un encart spécifique « condamnation judiciaire », en caractère ARIAL noir sur fond blanc de taille 18 mm minimum, avec un coût minimum de 5500 € HT par insertion mis à la charge du défendeur, et sous astreinte de 2500 € HT par jour à compter de la notification du jugement ;
– ordonner l’affichage du dispositif du jugement à intervenir sur toutes les portes d’entrée de tous les établissements de FONDERIE SAINT LUC, dans un encart spécifique « condamnation judiciaire » placé à hauteur d’yeux et imprimé en caractère ARIAL noir sur fond blanc de taille 18 mm minimum, pendant une durée de 3 mois à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 2500 € HT par jour à compter de la notification du jugement ;
– ordonner l’affichage du dispositif du jugement sur la page d’accueil du site internet de FONDERIE SAINT LUC situé à l’adresse http://www.fonderie-saint-luc.com, ainsi que sur la page d’accueil de sa page Facebook, dans un encart spécifique « condamnation judiciaire » imprimé en caractère ARIAL noir sur fond blanc de taille 18 mm minimum, pendant 3 mois à compter de la notification du jugement, et aux frais de FONDERIE SAINT LUC, et sous astreinte de 2500 € HT par jour à compter de la notification du jugement ;
– débouter FONDERIE SAINT LUC de toutes ses demandes et conclusions, notamment indemnitaires, notamment car FONDERIE SAINT LUC ne peut subir aucun préjudice puisqu’elle n’a pas le droit de commercialiser ses souvenirs à défaut d’avoir indiqué le nom de son imprimeur chinois sur ses souvenirs selon l’article 3 de la loi de 29.7.1881 ;
– juger que la cour se réserve le droit de liquider les astreintes prononcées ;
– condamner FONDERIE SAINT LUC à payer 30 000 € à EURO VENDING COMPANY et aussi à EURO BANKNOTE MEMORY au titre de l’article 700 code procédure civile, et la condamner aux entiers frais et dépens de l’instance, incluant ceux de la saisie-contrefaçon, avec distraction au profit de la AARPI TEYTAUD – SALEH sur son affirmation de droit.
Dans ses dernières conclusions numérotées 3 et signifiées le 6 janvier 2023, la société OBERTHUR FIDUCIAIRE demande à la cour de :
Infirmer le jugement du 4 septembre 2020 en ce qu’il a :
– débouté la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS de ses demandes sur le fondement du droit d’auteur ;
– débouté la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS de sa demande d’annulation des dessins et modèles déposés le 7 octobre 2016 par la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 ;
– débouté la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS de ses demandes sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire ;
– condamné la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS, in solidum avec les sociétés EURO VENDING COMPANY et EURO BANKNOTE MEMORY, à payer à la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS, in solidum avec les sociétés EURO VENDING COMPANY et EURO BANKNOTE MEMORY, aux dépens dont distraction à Me Audrey KUBACKI.
Et lorsqu’il déboute en conséquence la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS de ses demandes tendant à voir :
– juger que la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 a commis des actes de contrefaçon des droits d’auteur dont est titulaire la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS sur les dessins imprimés au recto et au verso des souvenirs ;
– ordonner à la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 de cesser l’utilisation, à quelque titre que ce soit, et sous quelque forme et support que ce soit, de reproductions des ‘uvres de la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS, sous astreinte de 1.000 € par jour et par infraction constatée, à compter de la notification du jugement ;
– annuler le modèle déposé le 7 octobre 2016 par la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 pour défaut de nouveauté et de caractère propre compte tenu du modèle antérieur de souvenir de la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS, et pour contrefaçon des droits d’auteur de la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS, ainsi qu’au regard de l’aveu de fonctionnalité de l’intégralité des éléments de ce modèle fait dans les conclusions n° 3 page 28 de la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 ;
– constater, dire et juger que la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire contre la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS en imitant les caractéristiques non esthétiques des souvenirs de la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS (numérotation, etc), et en apposant sa marque ;
– ordonner à la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 de cesser les actes de concurrence déloyale et parasitaire contre la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS sous astreinte de 1.000€ par jour et par infraction constatée, à compter de la notification du jugement à intervenir ;
– condamner la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 à payer à la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS 100.000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des actes de contrefaçon de ses droits d’auteur sur les dessins Recto et sur le dessin Verso des souvenirs et 100.000 € de dommages et intérêts, en réparation du préjudice résultant de la concurrence déloyale et parasitaire ;
– ordonner la publication du dispositif du jugement dans deux quotidiens nationaux, deux quotidiens régionaux, et dans deux revues spécialisées, tous choisis par le demandeur, dans un encart spécifique « condamnation judiciaire », en caractère Arial noir sur fond blanc de taille 18 mm minimum, avec un coût minimum de 5.500 € HT par insertion mis à la charge du défendeur, et sous astreinte de 2.500 € HT par jour à compter de la notification du jugement ;
– ordonner l’affichage du dispositif du jugement à intervenir sur toutes les portes d’entrée de tous les établissements de la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886, dans un encart spécifique « condamnation judiciaire » placé à hauteur d’yeux et imprimé en caractère Arial noir sur fond blanc de taille 18 mm minimum, pendant une durée de 3 mois à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 2.500 € HT par jour à compter de la notification du jugement ;
– ordonner l’affichage du dispositif du jugement sur la page d’accueil du site internet de la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 situé à l’adresse http://www.fonderie-saint-luc.com, ainsi que sur la page d’accueil de sa page Facebook, dans un encart spécifique « condamnation judiciaire » imprimé en caractère Arial noir sur fond blanc de taille 18 mm minimum, pendant 3 mois à compter de la notification du jugement, et aux frais de la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886, et sous astreinte de 2.500 € HT par jour à compter de la notification du jugement;
– juger que le tribunal se réserve le droit de liquider les astreintes prononcées ;
– condamner la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 à payer la somme de 7.000 € à la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et la condamner aux entiers frais et dépens de l’instance, incluant ceux attachés à la saisie contrefaçon, avec distraction au profit de Maître Alexandre Jacquet sur son affirmation de droit.
Et, statuant à nouveau :
A titre principal
– déclarer protégeables au titre du droit d’auteur les visuels créés par la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS, ayant fait l’objet des procès-verbaux de constat de la SCP Emile LEBRET ‘ Frédéric NEDELLEC ‘ Jean-Marc LE BOURHIS des 12 juin 2014 et 8 octobre 2015 et du bon à tirer du 25 novembre 2014 ;
– déclarer la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 coupable de contrefaçon de droits d’auteur au préjudice de la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS ;
– déclarer la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 coupable de concurrence déloyale au préjudice de la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS.
A titre subsidiaire :
– déclarer la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 coupable de concurrence déloyale et de parasitisme au préjudice de la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS.
En tout état de cause :
– déclarer nuls les dessins et modèles français n° 20165060-001, 20165060-002 et 20165060-003 déposés par la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 le 7 octobre 2016 ;
– dire que la décision à intervenir sera inscrite au Registre National des Dessins et Modèles à l’initiative de la partie la plus diligente ;
– ordonner la destruction, aux frais de la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886, des produits saisis par la Direction Régionale des Douanes et Droits Indirects de Clermont-Ferrand dans les locaux de la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 le 28 septembre 2016 ;
– faire interdiction à la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886, sous astreinte de 150 € par infraction constatée à compter de la signification de l’arrêt à intervenir et pendant une période de trois mois à l’issue de laquelle il sera à nouveau fait droit, de faire usage des visuels figurant sur chacune des faces des produits saisis le 28 septembre 2016, l’infraction s’entendant de chaque acte d’usage de l’un ou l’autre de ces visuels sur un support quelconque ;
– condamner la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 à verser à la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts ;
– ordonner la publication de l’arrêt à intervenir, in extenso ou par extraits, dans deux quotidiens nationaux, deux quotidiens régionaux et deux revues spécialisées, au choix de la société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS et aux frais de la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886, dans la limite de 5.500 € HT par insertion ;
– ordonner la publication par la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 du dispositif de l’arrêt à intervenir sur la page d’accueil du site internet de la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 situé à l’adresse https://fonderie-st-luc.com, ainsi que sur la page d’accueil de sa page Facebook, dans un encart spécifique « condamnation judiciaire » imprimé en caractères Arial noir sur fond blanc de taille 18 mm minimum, pendant une durée de trois mois à compter de la signification de l’arrêt, sous astreinte de 500 € par jour de retard ou par jour manquant ;
– dire que la cour se réservera la liquidation des astreintes ordonnées ;
– déclarer la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 mal fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions ; l’en débouter ;
– condamner la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 à verser à la Société OBERTHUR FIDUCIAIRE SAS la somme de 30.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile;
– condamner la société FONDERIE SAINT LUC DEPUIS 1886 aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction pour ceux la concernant au profit de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES sur son affirmation de droit.
Dans ses dernières conclusions, numérotées 4 et signifiées par RPVA le 16 janvier 2023, la société FONDERIE SAINT LUC demande à la cour de :
– confirmer le Jugement du Tribunal Judiciaire de Paris du 4 septembre 2020 en ce qu’il :
– déboute les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leurs demandes sur le fondement du droit d’auteur ;
– déboute les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leur demande d’annulation des dessins et modèles déposés par la société FONDERIE SAINT LUC le 7 octobre 2016 ;
– déboute les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leurs demandes sur le fondement du droit des marques ;
– déboute les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leurs demandes sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire ;
– condamne in solidum les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE à payer à la société FONDERIE SAINT LUC la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamne in solidum les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE aux dépens dont distraction à Maître Audrey KUBACKI.
En conséquence débouter les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de l’ensemble de leurs demandes.
– Infirmer le Jugement du Tribunal Judiciaire de Paris en ce qu’il :
– déboute la société FONDERIE SAINT LUC de sa demande d’annulation de la marque « 0 €uro Souvenir » ;
– déboute la société FONDERIE SAINT LUC de ses demandes sur le fondement de la procédure abusive ;
– déboute la société FONDERIE SAINT LUC de ses demandes de publication ;
Statuant à nouveau :
– prononcer la nullité de l’enregistrement 13048954 et de la marque zéro euro souvenir sur les classes 9, 14 et 16 revendiquées par celle-ci, ladite marque étant dépourvue de caractère distinctif.
– dire les procédures engagées par les sociétés EURO VENDING COMPANY et EURO BANKNOTE MEMORY abusives et que par-ailleurs ces deux sociétés ont commis des fautes ayant généré un préjudice à l’égard de la société SAS FONDERIE SAINT LUC.
En conséquence :
A titre principal, condamner les sociétés demanderesses à payer et porter à la SAS FONDERIE SAINT LUC la somme de 4 483500 € € à titre de dommages et intérêts, à parfaire.
A titre subsidiaire la somme de 3600000 € à titre de dommages et intérêts, à parfaire.
– condamner les appelantes solidairement dont la société OBERTHUR FIDUCIAIRE à payer et porter à la SAS FONDERIE SAINT LUC la somme de 30000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– ordonner la publication de la décision à intervenir aux frais des sociétés appelantes dans les mêmes conditions que celles requises par celle-ci à l’encontre de la société FONDERIE SAINT LUC, soit notamment dans deux quotidiens à diffusion nationale, deux quotidiens à diffusion régionale, affichage sur tous sites ou établissements de ces sociétés, ainsi que sur le site de la société FONDERIE SAINT LUC,
– les condamner toutes aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Audrey KUBACKI.
L’ordonnance de clôture été rendue le 31 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées.
Sur le problème de communication de pièces
Les sociétés EURO VENDING COMPANY et EURO BANKNOTE MEMORY demandent à la cour d’écarter des débats «les pièces invoquées par FONDERIE SAINT LUC et non produites (pièce 0)».
Cependant, outre que cette demande n’est nullement explicitée dans les écritures, la cour constate que cette pièce décrite comme le «dossier comparatif des billets litigieux et informations sur les véritables origines des billets culturels ou touristiques en euros ( sources l’Officiel des billets non monétaires 2015 Edictions Infopuce)» figure sur le bordereau de pièces et a été communiqué puisque les sociétés appelantes ont intégré des visuels de ces billets dans leurs écritures (notamment pages 50 et suivantes).
En conséquence, il convient de rejeter la demande ainsi formulée par les sociétés EURO VENDING COMPANY et EURO BANKNOTE MEMORY.
Sur les demandes au titre de la contrefaçon de droit d’auteur
Sur la titularité des droits
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE soutient que l’exploitation commerciale qu’elle fait, sous son nom, des ‘uvres en cause lui permet de se prévaloir de la présomption de titularité du droit de propriété incorporelle sur ces ‘uvres. Elle relève en outre que ni les conclusions signifiées par la société FONDERIE SAINT LUC les 15 mars et 12 juillet 2021, dans le délai de l’article 909 du code de procédure civile, ni ses dernières conclusions ne contiennent, dans leur dispositif, de demande tendant à voir déclarer la société OBERTHUR FIDUCIAIRE irrecevable en son action en contrefaçon de droits d’auteur pour défaut de qualité.
La société FONDERIE SAINT LUC conteste la titularité des droits revendiqués par la société OBERTHUR FIDUCIAIRE, s’agissant selon elle d’une exploitation équivoque de l”uvre originale de MM [Y] et [J], créateurs des billets originaux de 20 euros.
Sur ce, la cour rappelle qu’en vertu de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions. Or, la société FONDERIE SAINT LUC ne formule dans le dispositif de ses écritures aucune demande tendant à voir déclarer irrecevables les appelantes en leurs demandes au titre du droit d’auteur faute de titularité sur les oeuvres revendiquées et donc de qualité à agir.
La cour n’étant saisie d’aucune demande à ce titre, il n’y a donc pas lieu d’examiner les moyens soulevés sur ce point par la société FONDERIE SAINT LUC.
Sur la protection des visuels par le droit d’auteur
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE soutient que les modèles de billets souvenir qu’elle a conçus sont protégeables au titre du droit d’auteur, constituant, chacun, une ‘uvre de l’esprit, au regard des choix libres et créatifs, portant l’empreinte de la personnalité de leur auteur qu’elle décrit comme suit.
Ainsi, selon elle, le verso du billet représente six monuments européens choisis arbitrairement, représentés dans un enchevêtrement arbitraire, pris dans des angles spécifiques et sans respect de leurs proportions respectives, pour former un ensemble élancé vers le haut avec la représentation centrale de 12 étoiles disposées en cercle. Le choix des éléments représentés, leur agencement particulier et le traitement spécifique dont ils font l’objet portent l’empreinte de la personnalité de l’auteur de ce visuel et traduisent les choix libres et créatifs faits par celui-ci, justifiant, pour l’appelante, la protection au titre du droit d’auteur de ce visuel dans son ensemble et de la représentation centrale de monuments européens prise en elle-même.
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE ajoute, s’agissant du recto personnalisable, qu’il comporte la représentation centrale de 12 étoiles disposées en cercle, sur ses bords latéraux, selon le visuel, une ou deux bandes verticales hachurées en tout ou partie, occupant toute la hauteur du visuel ; la représentation entre la bande verticale gauche et le cercle d’étoiles, et de haut en bas du drapeau européen, suivie de la représentation du chiffre 0 avec un contour extérieur lui donnant un effet visuel de relief, d’une nuée d’étoiles de plus petites tailles, du chiffre 0, dont le quart supérieur gauche et le quart inférieur droit sont colorisés dans des couleurs différentes, suivie de la mention « EURO SOUVENIR » écrite sur trois lignes centrées verticalement par rapport au chiffre 0 et composées chacune de quatre caractères. Le choix des éléments ainsi représentés, leur agencement particulier et le traitement spécifique dont ils font l’objet portent, selon elle, l’empreinte de la personnalité de l’auteur de ce visuel et traduisent les choix libres et créatifs faits par celui-ci, justifiant la protection de ce visuel au titre du droit d’auteur.
Le recto personnalisé pour Carcassonne comporte, en plus, une représentation centrale du château comtal de la ville, réalisée dans un style graphique de gravure ancienne. Selon la société OBERTHUR FIDUCIAIRE l’ajout de cet élément et le traitement spécifique dont il fait l’objet portent l’empreinte de la personnalité de l’auteur de ce visuel et traduisent les choix libres et créatifs faits par celui-ci, justifiant de plus fort la protection de ce visuel au titre du droit d’auteur.
La société FONDERIE SAINT LUC soutient que la combinaison d’éléments individuellement dépourvus d’originalité n’a rien d’originale et ne peut être protégée au titre du droit d’auteur, les visuels ayant été simplement copiés à partir du billet fiduciaire ou imposés par la fonction même du produit. Ainsi, les éléments de sécurisation, filigranes ou hologrammes décrits, sont, selon elle, présents sur tous sur les billets fiduciaires dans les mêmes positions, de même que l’indication de la valeur faciale du billet. Elle ajoute que les éléments de personnalisation du billet sont imposés par la nature et la fonction même du billet souvenir qui est de présenter des lieux ou monuments historiques sur un billet inspiré des vrais billets de banque.
Selon l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, « L’auteur d’une ‘uvre de l’esprit jouit sur cette ‘uvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous ».
Le droit de l’auteur est conféré, selon l’article L.112-1 du même code, à l’auteur de toute oeuvre de l’esprit, quels qu’en soit le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination.
Il se déduit de ces dispositions le principe de la protection d’une ‘uvre sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale.
Néanmoins, lorsque cette protection est contestée en défense, l’originalité d’une ‘uvre doit être explicitée par celui qui s’en prétend auteur, seul ce dernier étant à même d’identifier les éléments traduisant sa personnalité.
Le visuel n°1: verso standard
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE décrit comme suit l’originalité de son visuel 1 «verso standard» décliné en deux modèles, le premier figurant Big Ben et ayant été remplacé suite au Brexit par la Tour de Belem.
«Ces visuels comportent à titre essentiel :
– la représentation centrale de monuments européens ;
– la représentation également centrale de 12 étoiles disposées en cercle ;
– la représentation en partie droite d’une nuée d’étoiles de plus petite taille, suivie de celle d’un demi-visage, elle-même suivie d’une bande verticale sur toute la hauteur du visuel ;
– la mention « 0 € » en partie supérieure gauche, le chiffre 0 ayant un contour extérieur lui donnant un effet visuel de relief ;
– la représentation en partie inférieure droite du chiffre 0, dont le quart supérieur gauche et le quart inférieur droit sont colorisés dans des couleurs différentes, suivie de la mention «EURO SOUVENIR » écrite sur trois lignes centrées verticalement par rapport au chiffre 0 et composées chacune de quatre caractères.
Les monuments européens ont été choisis arbitrairement ; ils n’illustrent ni les six villes les plus visitées en Europe, ni les monuments les plus visités dans les pays où ils se situent. (….)
Les monuments choisis sont représentés dans un enchevêtrement arbitraire, pris dans des angles spécifiques et sans respect de leurs proportions respectives, pour former un ensemble élancé vers le haut.
Sont en particulier mis en ‘uvre à cette fin :
– des jeux de taille, le Colisée semblant ainsi plus petit que Big Ben (ou la Tour de Belem) et la Sagrada Familia ;
– des effets de contre-plongée pour certains monuments, notamment un léger effet pour le Colisée et un effet maximum pour la Tour Eiffel.
Le choix des éléments représentés, leur agencement particulier et le traitement spécifique dont ils font l’objet portent l’empreinte de la personnalité de l’auteur de ce visuel et traduisent les choix libres et créatifs faits par celui-ci, justifiant la protection au titre du droit d’auteur :
– de ce visuel dans son ensemble ;
– de la représentation centrale de monuments européens prise en elle-même.»
Cependant la cour considère que la combinaison d’éléments visuels ainsi mis en avant correspond à une description précise et détaillée mais purement objective d’éléments disposés sur un billet de banque émis dans la zone euro attestant certes d’un savoir-faire nécessaire à la conception de ce type de produit, quoiqu’en partie inspiré des modèles existant, mais ne permettant pas de révéler l’empreinte de la personnalité de son auteur.
Le visuel n° 2 : recto personnalisable
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE décrit comme suit le visuel éligible selon elle à la protection au titre du droit d’auteur.
« Ce visuel comporte notamment :
– la représentation centrale de 12 étoiles disposées en cercle ;
– sur ses bords latéraux, selon le visuel, une ou deux bandes verticales hachurées en tout ou partie, occupant toute la hauteur du visuel ;
– la représentation entre la bande verticale gauche et le cercle d’étoiles, et de haut en bas :
‘ du drapeau européen, suivie de la représentation du chiffre 0 avec un contour extérieur lui donnant un effet visuel de relief ;
‘ d’une nuée d’étoiles de plus petite taille ;
‘ du chiffre 0, dont le quart supérieur gauche et le quart inférieur droit sont colorisés dans des couleurs différentes, suivie de la mention « EURO SOUVENIR » écrite sur trois lignes centrées verticalement par rapport au chiffre 0 et composées chacune de quatre caractères (EURO SOUV ENIR).
Le choix des éléments ainsi représentés, leur agencement particulier et le traitement spécifique dont ils font l’objet portent l’empreinte de la personnalité de l’auteur de ce visuel et traduisent les choix libres et créatifs faits par celui-ci, justifiant la protection de ce visuel au titre du droit d’auteur.»
La cour considère également que les éléments visuels ainsi repris ne correspondent qu’à la description précise et détaillé mais purement objective d’un recto de billet de banque de la zone euro, l’ensemble des éléments présents correspondant au demeurant aux détails usuels afin de sécuriser cette monnaie contre la circulation de faux billets ou pour décrire sa valeur monétaire tels que figurant notamment sur le billet de 20 euros dans son ancienne version notamment.
Ce visuel ainsi décrit ne permet pas à la cour de retenir qu’il constitue une oeuvre originale et qui porte l’empreinte de la personnalité de son auteur, de sorte que la société OBERTHUR FIDUCIAIRE ne peut revendiquer à son égard le bénéfice de la protection au titre du droit d’auteur.
Le visuel n° 3 : recto personnalisé pour Carcassonne
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE décrit comme suit l’originalité de son visuel.
«Ce visuel comporte, outre les éléments caractéristiques cités ci-dessus, une représentation centrale du château comtal de Carcassonne, réalisée dans un style graphique de gravure ancienne.
L’ajout de cet élément et le traitement spécifique dont il fait l’objet portent l’empreinte de la personnalité de l’auteur de ce visuel et traduisent les choix libres et créatifs faits par celui-ci, justifiant de plus fort la protection de ce visuel au titre du droit d’auteur.»
La cour considère que la description du visuel ainsi faite ne permet pas de caractériser son originalité, l’apposition d’une gravure de monument dans un style graphique ancien étant pour le moins usuelle en matière de billet de banque, la combinaison revendiquée attestant à nouveau d’un savoir faire technique et professionnel dans la conception du visuel, inspirée cependant de codes usuels en matière de billets fiduciaires, mais ne permettant pas de révéler l’empreinte de la personnalité de son auteur.
C’est en conséquence à juste titre que le tribunal a débouté la société OBERTHUR FIDUCIAIRE de l’ensemble de ses demandes au titre du droit d’auteur, le jugement dont appel étant confirmé de ce chef.
Sur la demande d’annulation des modèles déposés par la société FONDERIE SAINT LUC
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE soutient que le modèle n° 20165060-001 constitue la contrefaçon de visuels qu’elle a antérieurement créés, ayant fait l’objet de procès-verbaux d’huissier des 12 juin 2014 et 8 octobre 2015 et d’un bon à tirer du 25 novembre 2014; que le modèle n° 20165060-002 constitue la contrefaçon de ses visuels antérieurement créés ayant fait l’objet de procès-verbaux d’huissier des 12 juin 2014 et 8 octobre 2015; que le modèle n° 20165060-003 constitue également la contrefaçon d’un de ses visuels et qui a fait l’objet d’un procès-verbal d’huissier du 8 octobre 2015. Elle soulève en conséquence la nullité de ces modèles en vertu de l’article L. 512-4 d) du code de la propriété intellectuelle en ce qu’ils portent atteinte à ses droits d’auteur.
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE ajoute que la nullité de ces modèles est également caractérisée au sens du point a) de l’article L. 512-4 du code de la propriété intellectuelle, ses créations, divulguées par la société EURO BANKNOTE MEMORY dans le cadre de son activité de distributeur de souvenirs, étant opposables aux modèles déposés par la société FONDERIE SAINT LUC au titre de la nouveauté et du caractère propre.
La société FONDERIE SAINT LUC conclut au rejet des demandes de nullité en l’absence de droit d’auteur et de l’existence de différences entre les modèles déposés et ceux opposés par la société OBERTHUR FIDUCIAIRE.
En vertu de l’article L.512-4 du code de la propriété intellectuelle, «L’enregistrement d’un dessin ou modèle est déclaré nul par décision de justice :
a) S’il n’est pas conforme aux dispositions des articles L. 511-1 à L. 511-8 ;(…)
d) S’il porte atteinte au droit d’auteur d’un tiers ; (…)».
En outre, aux termes de l’article L.511-2 du code de la propriété intellectuelle, seul peut être protégé le dessin ou modèle qui est nouveau et présente un caractère propre.
La cour rappelle que la nouveauté d’un dessin ou modèle s’apprécie par comparaison globale entre le modèle tel qu’il est déposé et le modèle antérieurement divulgué qui est opposé, tous deux pris dans leur ensemble constitué par la combinaison de leurs éléments caractéristiques, et non par l’examen de chacun des éléments qui les composent pris isolément. Seule l’identité entre le modèle et la création divulguée, qui découle de l’absence de différences ou de l’existence de différences insignifiantes révélées par cet examen global, est destructrice de nouveauté, et il appartient à celui qui conteste la nouveauté du modèle de rapporter la preuve du contenu et de la date certaine de la divulgation de l’antériorité qu’il oppose.
L’examen du caractère individuel, quant à lui, doit être effectué de manière globale, en tenant compte du degré d’attention de l’utilisateur averti, se définissant comme doté non d’une attention moyenne, mais d’une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré, de l’importance respective qu’il y a lieu d’accorder aux différentes caractéristiques des dessins ou modèles comparés et, enfin, du degré de liberté du créateur qui varie selon la nature du produit.
À titre liminaire, dans la mesure où il a déjà été jugé que les visuels opposés par la société OBERTHUR FIDUCIAIRE ne sont pas protégeables au titre du droit d’auteur, la nullité des modèles invoquées ne peut être encourue de ce chef.
Sur ce, il n’est pas contesté que les modèles en cause ont été déposés à l’INPI le 7 octobre 2016 et que les modèles opposés par la société OBERTHUR FIDUCIAIRE ont fait l’objet de procès-verbaux d’huissier de justice des 12 juin 2014 et 8 octobre 2015 et d’un bon à tirer adressé par celle-ci à la société EURO BANKNOTE MEMORY le 25 novembre 2014 et ont été commercialisés à compter de 2015, antérieurement aux modèles déposés.
L’utilisateur averti est, au cas d’espèce, le client final qui achètera ces billets souvenirs, le plus souvent un touriste, ou le professionnel susceptible de les commercialiser. S’agissant d’un billet souvenir ayant l’apparence d’un billet de banque, le degré de liberté de leur concepteur doit être considéré comme moyen, au regard des codes imposés pour ce genre de réalisation, mais également de la liberté possible en matière d’illustration notamment.
S’agissant du modèle n° 20165060-001
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE oppose à titre d’antériorité un premier visuel constitué d’un recto personnalisable ainsi qu’un visuel comprenant le «CHÂTEAU COMTAL de CARCASSONNE» tel que décrit ci- dessus et figurant dans une gamme de ton rosé.
Le modèle en cause qui constitue également une imitation d’un billet de banque de la zone euro, comprend les codes habituels, soit la valeur fiduciaire, une zone hachurée un filigrane, une autre vue du château de Carcassonne ainsi que la marque exploitée par la société FONDERIE SAINT LUC «BILLET ROYAL» le tout décliné sans une gamme de ton gris vert.
Après avoir procédé à une comparaison globale entre le modèle tel qu’il est déposé et les modèles antérieurement divulgués qui sont opposés, tous pris dans leur ensemble constitué par la combinaison de leurs éléments caractéristiques, et non par l’examen de chacun des éléments qui les composent pris isolément, la cour considère qu’il n’existe pas d’identité entre le modèle et la création divulguée, au regard de différences qui ne sont pas insignifiantes, s’agissant tant des codes couleurs employés que des visuels sensiblement différents.
En conséquence, les antériorités invoquées ne sont pas destructrices de nouveauté.
En revanche, la cour considère, en tenant compte du degré d’attention de l’utilisateur averti, tel que précédemment défini, que le modèle déposé produit la même impression d’ensemble que l’antériorité opposée (soit le visuel reprenant la représentation du château de Carcassonne), puisque s’y retrouvent les même mentions à la même place, le même agencement entre la gravure et le reste des mentions du billet et le même type de gravure du même château de Carcassonne, la vue ne différant que par des détails mineurs.
En conséquence, il convient de prononcer la nullité du modèle n° 20165060-001 déposé par la société FONDERIE SAINT LUC le 7 octobre 2016 et d’infirmer le jugement de ce chef.
S’agissant du modèle n°20165060-002
Le modèle déposé par la société FONDERIE SAINT LUC se compose des mêmes éléments que précédemment décrits pour le billet «Carcassonne», sauf qu’il représente un ancien bateau à voile voguant en mer avec au premier plan, un homme le désignant et un drapeau, le tout accompagné de la marque déposée par l’intimée, «BILLET ROYAL» accompagné d’un blason et la mention Saint Malo.
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE oppose à ce modèle le recto à personnaliser de son billet tel que décrit précédemment.
Sur ce, la cour considère que le modèle «vierge» opposé ne peut détruire ni la nouveauté ni le caractère propre du modèle déposé par la société FONDERIE SAINT LUC, en l’absence d’identité et dans la mesure où ils ne produisent nullement la même impression d’ensemble, l’attention de l’utilisateur averti étant immédiatement attirée par la représentation du galion à voile occupant près des deux tiers du billet, les douze étoiles étant très peu visibles et le choix des coloris étant complètement différent.
La demande de nullité du modèle français n° n° 20165060-002 de la société FONDERIE SAINT LUC ne peut donc prospérer et le jugement doit être confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.
S’agissant du modèle n° 20165060-003
Le modèle n°20165060-003 déposé par la société FONDERIE SAINT LUC se compose de la même structure déjà décrite d’un billet de banque avec sa valeur fiduciaire, les bandes sur les côtés, le fil de sécurité, un portrait présent sur le côté droit en filigrane et une représentation de cinq monuments européens célèbres ( la Tour Eiffel, la Sagrada Familia, le Colisée, la Porte de Brandebourg et la tour de Bélem).
Le modèle opposé par la société OBERTHUR FIDUCIAIRE se présente également comme un billet d’aspect fiduciaire avec une valeur nominale, des éléments de sécurité, un visage en filigrane et une représentation de six monuments européens célèbres ( Big Ben, le Manneken Pis, la Tour Eiffel, la Sagrada Familia, le Colisée, la Porte de Brandebourg et la tour de Bélem).
Sur ce, après avoir procédé à une comparaison globale entre le modèle tel qu’il est déposé et le modèle antérieurement divulgué qui est opposé, pris dans leur ensemble constitué par la combinaison de leurs éléments caractéristiques, et non par l’examen de chacun des éléments qui les composent pris isolément, la cour considère qu’il n’existe pas d’identité entre le modèle et la création divulguée, au regard de différences qui ne sont pas insignifiantes, s’agissant tant des codes couleurs employés, des valeurs faciales apposées différemment, ainsi que des deux marques reproduites soit d’un côté «BILLET ROYAL» et de l’autre «O EURO SOUVENIR».
En conséquence, l’antériorité invoquée n’est pas destructrice de nouveauté.
En revanche, la cour considère, en tenant compte du degré d’attention de l’utilisateur averti, tel que précédemment défini, que le modèle déposé produit la même impression d’ensemble que l’antériorité opposée, puisque s’y retrouvent notamment l’essentiel des même mentions et dessins à la même place (valeur fiduciaire en bas à droite, visage en filigrane sur le côté droit, fil de sécurité) mais aussi la même combinaison de monuments européens célèbres (le modèle en cause en reprenant 4 identiques positionnés de manière centrale, dans le même agencement avec un effet de contre-plongée, une ignorance des proportions réelles pour aboutir au même enchevêtrement élancé vers le haut, avec les 12 étoiles en filigrane.
En conséquence, il convient de prononcer la nullité du modèle n° 20165060-003 déposé par la société FONDERIE SAINT LUC le 7 octobre 2016 et d’infirmer le jugement de ce chef.
Sur les demandes au titre la contrefaçon de marque
Sur la nullité de la marque européenne
La société FONDERIE SAINT LUC soutient que la marque déposée par la société EURO VENDING COMPANY est nulle car elle ne permet pas au public concerné de distinguer ses services de ceux de ses concurrents puisque servant nécessairement à désigner le produit objet du commerce. Elle dénonce ainsi la volonté des appelantes de monopoliser des termes d’usage courant pour en interdire l’usage à d’autres acteurs économiques. Elle stigmatise la contradiction de l’argumentation des appelantes qui plaide le caractère essentiel du terme «0 €uros» pour alléguer des faits de contrefaçon mais revendique le terme «0 €uros souvenir» pour revendiquer son caractère distinctif. Elle conteste enfin que cette marque ait acquis un caractère distinctif par un usage intensif.
La société EURO VENDING COMPANY soutient que la marque «0 €URO SOUVENIR» est distinctive, c’est-à-dire apte à identifier l’origine des produits qu’elle désigne et ne constitue pas la dénomination générique ou habituelle pour désigner les produits de l’imprimerie, les cartes et les dessins. Elle considère que cette marque est une juxtaposition inhabituelle dans sa structure car sa construction grammaticale n’est pas française, de sorte que cette structure surprend le public, ce qui participe à sa distinctivité.
La société EURO VENDING COMPANY ajoute que dans le cas où la marque serait jugée descriptive, la marque « 0 €uro Souvenir » a conquis sa distinctivité par son usage intensif dans les Etats francophones où elle est susceptible d’être descriptive.
En vertu de l’article L.711-2 du code de la Propriété Intellectuelle « Sont dépourvus de caractère distinctif :
a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ;
b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quanti té, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ;
c) Les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle… »
Et, l’article 7 du règlement CE 2017/10001 précité du 14 juin 2017 intitulé « Motifs absolus de refus» dispose que :
«1. Sont refusés à l’enregistrement:
a) les signes qui ne sont pas conformes à l’article 4;
b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif;
c) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, à désigner l’espèce, la qualité, la quanti té, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci;
d) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications devenus usuels
dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce;
e) les signes constitués exclusivement:
i) par la forme, ou une autre caractéristique, imposée par la nature même du produit;
ii) par la forme, ou une autre caractéristique du produit, nécessaire à l’obtention d’un résultat technique;
iii) par la forme, ou une autre caractéristique du produit, qui donne une valeur substantielle au produit; »
La cour rappelle que le caractère distinctif d’un signe s’apprécie par rapport aux produits et services désignés dans l’enregistrement et par rapport à la perception qu’en a le public pertinent en se plaçant à la date du dépôt.
En l’espèce, la marque verbale de l’Union européenne «0 €uros Souvenir» a été déposée le 10 septembre 2014 sous le N° 13048954 par la société EURO VENDING COMPANY en classes 9, 14 et 16 pour désigner notamment les distributeurs de billets, les objets d’art en métaux précieux, les médailles, monnaies et les produits de l’imprimerie et articles de papeterie.
La validité de la marque ne pouvant être appréciée au regard de l’activité du déposant, la société FONDERIE SAINT LUC ne peut être suivie lorsqu’elle soutient que le signe «0 €uros Souvenir» désigne nécessairement un billet souvenir présentant une valeur faciale nulle.
Sur ce, la cour considère que la marque «0 €uros Souvenir» considérée dans son ensemble, n’est pas descriptive des produits visés à l’enregistrement, ne se référant pas à leurs caractéristiques, ou à leur valeur, et ne constitue pas davantage la dénomination générique ou habituelle pour désigner ceux-ci pour le public pertinent, soit le consommateur d’attention moyenne, et lui permet en conséquence de rattacher ses produits à une entreprise déterminée.
De plus, si elle combine effectivement les termes «0 €uros» et «souvenirs», soit des termes du langage courant, l’expression «0 €uros» reprenant certes une valeur monétaire, leur association et leur juxtaposition dans cet ordre, permettent d’écarter tout risque de monopolisation de termes nécessaires ou usuels.
C’est en conséquence à juste titre que les premiers juges ont débouté la société FONDERIE SAINT LUC de sa demande d’annulation de la marque en cause, le jugement dont appel étant confirmé de ce chef.
Sur la contrefaçon de marque
La société EURO VENDING COMPANY soutient que le public pertinent pour apprécier la contrefaçon est composé de revendeurs puis de consommateurs. Elle affirme ensuite que la comparaison visuelle, phonétique et conceptuelle des signes établit une similitude, l’absence du terme « souvenir » qui termine la marque dans le signe contrefaisant étant sans effet, car les termes distinctifs 0 €uro sont repris. Elle ajoute que dans la mesure où les produits en cause sont identiques, le risque de confusion est établi.
La société FONDERIE SAINT LUC conteste toute usage à titre de marque du terme «zéro euro» sur son billet, mais constate qu’il y figure uniquement, à titre d’indication, la valeur faciale du produit afin de souligner que sa valeur fiduciaire est effectivement nulle et se conformer aux recommandations de la Banque centrale européenne. Elle ajoute que sa propre marque « Billet Royal» figurant en outre de manière particulièrement visible en travers de son produit, excluant tout risque de confusion et souligne qu’en tout état de cause la marque revendiquée n’est pas reproduite et que les billets en cause présentent des différences notables.
Selon l’article 6 de la directive n° 2008/95/CE du 22 octobre 2008 : « 1. Le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d’interdire à un tiers l’usage, dans la vie des affaires:
a) de son nom et de son adresse;
b) d’indications relatives à l’espèce, à la qualité, à la quanti té, à la destination, à la valeur, à la provenance géographique, à l’époque de la production du produit ou de la prestation du service ou à d’autres caractéristiques de ceux-ci;
c) de la marque lorsqu’elle est nécessaire pour indiquer la destination d’un produit ou d’un service, notamment en tant qu’accessoires ou pièces détachées, pour autant que cet usage soit fait conformément aux usages honnêtes en mati ère industrielle ou commerciale.»
Puis, l’article 14 du règlement CE 2017/10001 précité du 14 juin 2017 dispose que :
« Limitation des effets de la marque de l’Union européenne
1. Une marque de l’Union européenne ne permet pas à son titulaire d’interdire à un tiers l’usage, dans la vie des affaires:
a) de son nom ou de son adresse, lorsque le ti ers est une personne physique;
b) de signes ou d’indications qui sont dépourvus de caractère distinctif ou qui se rapportent à l’espèce, à la qualité, à la quanti té, à la destination, à la valeur, à la provenance géographique, à l’époque de la production du produit ou de la prestation du service ou à d’autres caractéristiques de ceux-ci;
c) de la marque de l’Union européenne pour désigner ou mentionner des produits ou des services comme étant ceux du titulaire de cette marque, en particulier lorsque l’usage de cette marque est nécessaire pour indiquer la destination d’un produit ou d’un service, notamment en tant qu’accessoire ou pièce détachée.»
Enfin, selon l’article 9 du règlement CE 2017/1001 du 14 juin 2017:
« 1. La marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif (‘) Le titulaire (‘) est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires, d’un signe pour des produits ou services lorsque : (…)
b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque ;
3. Il peut notamment être interdit, si les conditions énoncées au paragraphe 1 sont remplies :
– d’apposer le signe sur les produits ou sur leur conditionnement. »
En l’espèce, la cour considère que les produits commercialisés par la société FONDERIE SAINT LUC sont similaires à ceux visés à l’enregistrement et notamment les produits de l’imprimerie.
Puis, le signe contesté n’étant pas la reproduction à l’identique de la marque invoquée, faute de reproduire sans modification ni ajout tous les éléments la composant, il convient de rechercher s’il existe, entre les signes en présence, un risque de confusion, incluant le risque d’association, lequel doit être apprécié de manière globale, à la lumière de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, le risque étant d’autant plus élevé que la marque antérieure possède un caractère distinctif important, soit intrinsèquement, soit en raison de sa connaissance par une partie significative du public concerné par les produits ou services en cause. Pour déterminer le caractère distinctif de la marque, il convient d’apprécier globalement son aptitude plus ou moins grande à identifier les produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc son aptitude à distinguer ces produits ou services de ceux des autres entreprises; le caractère distinctif et la renommée de la marque antérieure constituent des facteurs pertinents pour l’appréciation, non pas de la similitude de la marque et du signe en conflit, mais de l’existence d’un lien entre eux dans l’esprit du public.
Il convient donc de comparer les signes en litige avant de procéder à l’appréciation du risque de confusion pouvant exister entre eux pour le consommateur.
La marque verbale opposée est composée de l’association d’un chiffre «0» et de deux mots «€uro» et «Souvenir», pour former ensemble «0 €uros Souvenir» .
La société EURO VENDING COMPANY reproche à la société FONDERIE SAINT LUC l’usage du signe semi figuratif «0 ZERO EURO» sur les billets souvenirs saisis.
Les deux signes en cause ont donc en commun les termes «0» et le mot «euro».
Cependant, visuellement, les signes se différencient, le signe contesté ne reprenant pas le terme «souvenir» et figurant en outre un «0» de manière stylisée et le chiffre «zéro» en toutes lettres, le terme «euro» étant en outre retranscrit différemment.
Phonétiquement, les deux signes se distinguent en ce que le signe contesté sera marqué par la répétition à deux reprises du terme «0», mentionné en chiffre puis en lettres, tandis que la marque déposée ne présente pas cette répétition et se termine par le terme «souvenir» absent sur les billets de la société FONDERIE SAINT LUC, soit des rythmes et sonorités très différents.
Enfin, conceptuellement, les deux signes se différencient, la marque opposée évoquant un souvenir à 0 euro, alors que le signe contesté décrit une valeur faciale nulle pour distinguer ce produit d’un véritable billet fiduciaire.
Ainsi, la comparaison globale et objective des signes en cause permet de retenir qu’ils ne présentent pas la même impression d’ensemble, leurs différences visuelles, phonétiques et conceptuelles étant prépondérantes et excluant tout risque de confusion pour le consommateur concerné.
Cette analyse est encore renforcée par la prise en compte de leurs éléments distinctifs et dominants. Ainsi, comme il a été vu, c’est l’association des termes «0 €uro Souvenir» qui permet à la marque opposée de présenter un caractère distinctif, le seul terme «0 €uros» étant purement descriptif d’une valeur monétaire nulle. Or, le signe contesté ne reprend nullement cette association, le terme souvenir étant absent et tendant uniquement à rappeler que ce billet n’a pas de valeur fiduciaire.
Il résulte en conséquence de la comparaison globale des signes en présence, en tenant compte de l’ensemble des critères pertinents au cas d’espèce, que leurs dissemblances sur les plans visuel, phonétique et conceptuel n’entraînent aucun risque de confusion pour le consommateur concerné par les produits désignés, d’attention moyenne, normalement informé, raisonnablement attentif et avisé, qui ne pourra se méprendre sur leur origine respective, et ne sera pas conduit, au vu des différences relevées, à penser que ces signes proviennent d’une même entreprise ou d’entreprises liées économiquement, ou à percevoir le signe contesté comme la déclinaison de la marque antérieure.
En conséquence, il convient de débouter la société EURO VENDING COMPANY de l’ensemble de ses demandes au titre de la contrefaçon de la marque «0 €uro Souvenir» et de confirmer le jugement déféré de ce chef.
Sur les actes de concurrence déloyale et parasitaire
Les sociétés EURO VENDING COMPANY et EURO BANKNOTE MEMORY soulignent que la société FONDERIE SAINT LUC copie l’ensemble des caractéristiques techniques et esthétiques de leurs produits, dont le design n’est dicté, selon elles, par aucune nécessité en ce compris le code imprimeur de la société OBERTHUR FIDUCIAIRE dont la société EURO BANKNOTE MEMORY est le distributeur exclusif. Elles précisent que l’apposition de sa marque, comme au cas d’espèce, par le copieur d’un dessin ou d’une marque est un acte de concurrence déloyale et parasitaire distinct, car le risque de confusion persiste. Elles dénoncent également les propos dénigrants tenus, selon elles, par la société FONDERIE SAINT LUC auprès de clients ou de tiers ainsi que la violation de l’interdiction d’utiliser le fond vert des billets de 100€ faite par la Banque de France. Elles ajoutent que si l’idée de fabriquer un billet souvenir de qualité fiduciaire n’est pas protégeable, son interprétation personnalisée, matériellement formalisée et représentant une valeur économique réelle, au regard notamment des investissements consacrés, est protégée au titre du parasitisme, les souvenirs qu’elles commercialisent étant devenu des objet de collection reconnus et ayant acquis, à ce titre, une réelle notoriété.
La société OBERTHUR FIDUCIAIRE invoque également des actes distincts de concurrence déloyale et parasitaire commis à son détriment par la société FONDERIE SAINT LUC qui, outre les caractéristiques esthétiques de ses souvenirs, a copié également des éléments de sécurité et une numérotation de série similaire. À titre subsidiaire, elle invoque également des agissements déloyaux et parasitaires commis par sa concurrente. Enfin, elle critique le tribunal en soulignant que les billets souvenirs en cause ont bien été présentés au public.
La société FONDERIE SAINT LUC rappelle d’abord n’avoir jamais offert à la vente les billets en cause qui ont, tous, fait l’objet d’une saisie douanière. Elle conteste, par ailleurs, toute concurrence déloyale par risque de confusion retenant que les deux produits se distinguent immédiatement et indubitablement, en premier lieu, du seul fait de la différence de couleur flagrante, outre la présence très visible de sa propre marque Billet Royal. Elle ajoute que les billets EURO VENDING COMPANY sont vendus dans des distributeurs spécifiques parfaitement reconnaissables ainsi que sur des présentoirs tout aussi reconnaissables.
Elle conteste de même tout parasitisme rappelant qu’elle officie depuis 2009 sur le marché des objets souvenirs, qu’elle est reconnue sur le marché et a développé sa propre clientèle à laquelle elle proposait déjà des médailles souvenirs et ne s’inscrit donc nullement dans le sillage de sa concurrente, mais répond à un besoin spécifique exprimé par ses clients. Elle retient également que les appelantes ne justifient nullement des investissements allégués.
La cour rappelle que la concurrence déloyale et le parasitisme sont pareillement fondés sur l’article 1240 du code civil mais sont caractérisés par application de critères distincts, la concurrence déloyale l’étant au regard du risque de confusion, considération étrangère au parasitisme qui requiert la circonstance selon laquelle, à titre lucratif et de façon injustifiée, une personne morale ou physique copie une valeur économique d’autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d`un savoir-faire, d`un travail intellectuel et d`investissements.
Ces deux notions doivent être appréciées au regard du principe de la liberté du commerce et de l’industrie qui implique qu’un produit qui ne fait pas l’objet d’un droit de propriété intellectuelle, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit ou par l’existence d’une captation parasitaire, circonstances attentatoires à l’exercice paisible et loyal du commerce.
L’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté d’usage, l’originalité, la notoriété de la prestation copiée.
À titre liminaire, la cour constate que si, effectivement, les billets souvenirs de la société FONDERIE SAINT LUC n’ont jamais pu être commercialisés puisqu’ils ont tous fait l’objet d’une saisie par les services des douanes à leur arrivée sur le territoire français en provenance de Chine, ils ont cependant été mis au contact du public puisque la société intimée a annoncé leur lancement notamment sur sa page Facebook le 7 septembre 2016 et que les quantités conséquentes saisies (soit 10.000 billets avec la mention Cité de Carcassonne et 10.000 billets avec la mention Saint Malo) impliquent que ces billets ont été proposés à la vente et ont fait l’objet de commandes, la société FONDERIE SAINT LUC admettant avoir dû rembourser les clients avec lesquels elle était en partenariat.
Par ailleurs, si les idées sont effectivement de libre parcours, les sociétés appelantes ne pouvant revendiquer un monopole sur l’exploitation des billets souvenirs à l’aspect fiduciaire, il n’en demeure pas moins que s’agissant du billet «cité de Carcassonne», et du verso du billet «Saint Malo», indépendamment des caractéristiques techniques propres à un billet revendiquant l’apparence d’un vrai billet de banque, la société FONDERIE SAINT LUC, concurrente directe, a repris, sans que cela soit justifié par une quelconque nécessité technique, les caractéristiques du billet conçu par la société OBERTHUR FIDUCIAIRE et commercialisé par la société EURO BANKNOTE MEMORY, s’agissant tant des positionnements des diverses mentions, du graphisme mais aussi du choix des illustrations quasiment identiques, intégrées et positionnées de la même manière sur les billets, ainsi qu’une numérotation des séries similaire à celle antérieurement choisie par la société OBERTHUR FIDUCIAIRE. Cette reprise quasi à l’identique des caractéristiques techniques et esthétiques du billet en cause, même si elles ne sont pas protégeables au regard du droit d’auteur, génère un risque évident de confusion, nonobstant le choix d’un code couleur différent, dans ce marché de niche et, ce, d’autant que les autres exemplaires de billets souvenirs produits par la société FONDERIE SAINT LUC démontrent une grande diversité dans leur apparence, à tout le moins par le choix de leurs illustrations. À cet égard, l’apposition de la marque « Billet royal» par l’intimée n’est pas nature à écarter ce risque de confusion, ni davantage le fait que la société EURO BANKNOTE MEMORY commercialise des billets dans des distributeurs spécifiques, qui ne sont pas opposés en l’espèce.
Ce risque de confusion est d’autant plus avéré au regard de la notoriété du produit copié, les sociétés appelantes versant aux débats plusieurs coupures de presse annonçant le lancement de ce produit et son succès auprès de certaines communes touristiques.
En outre, pour la conception et le lancement des ces billets, la société EURO BANKNOTE MEMORY démontre avoir concédé des investissements au titre des années 2014 et 2015 à hauteur de 21.485,80€ HT pour la publicité et 12.715,87€ HT pour le coût des prototypes, les autres dépenses invoquées ne pouvant être rattachées aux produits en cause. Il est ainsi justifié que la conception et le lancement de ce produit est le fruit d’un savoir-faire et d’investissements caractérisant une valeur économique individualisée, dont la société FONDERIE SAINT LUC a tenté de tirer profit de manière indue. La société OBERTHUR FIDUCIAIRE ne verse, quant à elle, aux débats aucune pièce justifiant d’investissements ou de sa participation à la création de cette valeur économique individualisée et ne peut prospérer en ses demandes présentées au titre de la concurrence parasitaire.
Les sociétés appelantes ne démontrent par ailleurs nullement que la société FONDERIE SAINT LUC aurait violé l’interdiction d’utiliser le fond vert des billets de 100€ faite par la Banque de France et ne peuvent revendiquer un préjudice à ce titre, ni que l’intimée aurait tenu des propos dénigrants à leur égard.
Enfin, il doit nécessairement être tenu compte de l’absence de toute commercialisation des billets, de sorte qu’il ne peut être revendiqué aucun préjudice commercial mais uniquement un préjudice moral subi par la société EURO BANKNOTE MEMORY qui les commercialise et par la société OBERTHUR FIDUCIAIRE qui les a conçus, préjudice qui doit, lui-même, être relativisé puisque la publicité faite autour de ces produits a été extrêmement limitée.
Au vu de cet ensemble d’éléments, il convient de condamner la société FONDERIE SAINT LUC à verser à la société EURO BANKNOTE MEMORY une somme de 2.000 euros en réparation du préjudice subi pour les actes de concurrence déloyale et parasitaire et à la société OBERTHUR FIDUCIAIRE une somme de 1.500€ en réparation du préjudice subi par les actes de concurrence déloyale.
Le jugement dont appel est en conséquence infirmé de ce chef.
La société EURO VENDING COMPANY, titulaire de la marque «0 €uro Souvenir», qui ne commercialise pas les billets et ne justifie d’aucun investissement humain, financier ou matériel spécifique pour leur création, leur lancement, leur conception, (se contentant d’invoquer des «frais pour développer l’activité de la société EURO BANKNOTE MEMORY» sans autres précisions) doit être déboutée de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire, et le jugement dont appel confirmé de ce chef.
Dans la mesure où les billets n’ont jamais été commercialisés, il convient de rejeter les demandes des sociétés appelantes tendant à voire ordonner la publication ou l’affichage de la présente décision.
En tant que de besoin, il convient d’interdire à la société FONDERIE SAINT LUC de proposer à la vente tout billet souvenir reprenant le visuel présent sur les deux faces du billet «Cité de Carcassonne» et sur le verso du billet Saint Malo saisis par les douanes et d’ordonner la destruction, aux frais de la société FONDERIE SAINT LUC, des billets objet de la saisie douanière, sans qu’il n’y ait lieu à astreinte, au regard des faits de l’espèce.
Sur les demandes reconventionnelles de la société FONDERIE SAINT LUC
La société FONDERIE SAINT LUC dénonce une volonté de lui nuire de la part des sociétés appelantes qui ont, selon elle, tout fait pour empêcher ou retarder son entrée sur le marché des billets souvenirs et faisant, en outre, traîner les procédures, lui occasionnant un préjudice matériel faute d’avoir pu commercialiser les billets saisis ou d’autres modèles mais aussi moral au regard de la lourdeur de la procédure douanière et pénale à laquelle elle a été confrontée du fait des accusations de contrefaçon proférées par la société EURO VENDING COMPANY.
Elle dénonce en outre la nouvelle stratégie commerciale adoptée par la société EURO BANKNOTE MEMORY qui cherche, désormais, à l’imiter en baissant le nombre minimal de billets commandés nécessaires pour faire appel à ses services et en démarchant ses clients.
Les sociétés appelantes contestent avoir causé le moindre préjudice à la société FONDERIE SAINT LUC rappelant avoir été diligentes tant dans le cadre de la procédure douanière que dans le cadre de la procédure devant le tribunal judiciaire, la société OBERTHUR FIDUCIAIRE constatant en tout état de cause qu’aucune demande n’est formée contre elle dans le dispositif des conclusions de l’intimée. Elles ajoutent que le préjudice invoqué n’est pas constitué.
Sur ce, la cour rappelle que l’accès au juge étant un droit fondamental et un principe général garantissant le respect du droit, ce n’est que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles que le fait d’agir en justice ou d’exercer une voie de recours légalement ouverte est susceptible de constituer un abus. Or, la société FONDERIE SAINT LUC ne démontre pas la faute commise par les sociétés appelantes qui aurait fait dégénérer en abus leur droit d’agir en justice, la cour ayant en outre fait partiellement droit à leurs demandes.
Par ailleurs, dans la mesure où il a été retenu que la société FONDERIE SAINT LUC avait commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire, elle ne peut reprocher aux sociétés appelantes d’avoir entamé toutes les démarches légales et utiles visant à l’empêcher de commercialiser les billets en cause, ni revendiquer aucun préjudice à ce titre.
Enfin elle ne démontre aucun comportement fautif de la part des sociétés appelantes dans leur décision de diminuer le nombre minimum de produits pour pouvoir passer commande, ni dans le démarchage de ses clients, avec lesquels elle ne justifie d’aucune exclusivité.
C’est en conséquence à juste titre que le tribunal l’a déboutée de ses demandes, le jugement dont appel étant confirmé de ce chef.
Sur les autres demandes
La société FONDERIE SAINT LUC, succombant, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel, en ce non compris les frais de saisie contrefaçon, qui pourront être recouvrés par la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES et l’AARPI TEYTAUD-SALEH, chacune pour leur part respective, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés en première instance et en appel, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant infirmées.
Enfin, l’équité et la situation des parties commandent de condamner la société FONDERIE SAINT LUC à verser à la société EURO VENDING COMPANY et à la société OBERTHUR FIDUCIAIRE chacune, une somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a :
– débouté les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leurs demandes sur le fondement du droit d’auteur ;
– débouté les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leurs demandes sur le fondement du droit des marques ;
-débouté les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leur demande d’annulation mais uniquement pour le dessin et modèle ° 20165060-002 déposé par la société FONDERIE SAINT LUC le 7 octobre 2016:
– débouté la société EURO VENDING COMPANY de ses demandes sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire ;
– débouté la société FONDERIE SAINT LUC de sa demande d’annulation de la marque « 0 €uro Souvenir » ;
– débouté la société FONDERIE SAINT LUC de ses demandes sur le fondement de la procédure abusive ;
– débouté la société FONDERIE SAINT LUC de ses demandes de publication ;
L’infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute les sociétés EURO VENDING COMPANY et EURO BANKNOTE MEMORY de leur demande tendant à écarter des débats la pièce 0 de la société FONDERIE SAINT LUC,
Prononce la nullité des modèles n° 20165060-001 et n° 20165060-003 déposés par la société FONDERIE SAINT LUC le 7 octobre 2016,
Dit que la présente décision sera inscrite au Registre national des dessins et modèles à la requête de la partie la plus diligente,
Condamne la société FONDERIE SAINT LUC à verser à la société EURO BANKNOTE MEMORY en réparation du préjudice subi du faits des actes de concurrence déloyale et parasitaire une somme de 2.000€,
Condamne la société FONDERIE SAINT LUC à verser à la société OBERTHUR FIDUCIAIRE EURO BANKNOTE MEMORY en réparation du préjudice subi du faits des actes de concurrence déloyale une somme de 1.500€,
Interdit à la société FONDERIE SAINT LUC de proposer à la vente tout billet souvenir reprenant le visuel présent sur les deux faces du billet «Cité de Carcassonne» et sur le verso du billet Saint Malo saisis par les douanes le 28 septembre 2016, sous astreinte de 100€ par infraction constatée, l’astreinte commençant à courir un mois après la signification de la présente décision et pendant une durée de trois mois,
Ordonne la destruction aux frais de la société FONDERIE SAINT LUC des billets objets de la saisie douanière du 28 septembre 2016,
Déboute les sociétés EURO VENDING COMPANY, EURO BANKNOTE MEMORY et OBERTHUR FIDUCIAIRE de leurs autres demandes,
Condamne la société FONDERIE SAINT LUC aux dépens de première instance et d’appel, qui pourront être recouvrés par la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES et l’AARPI TEYTAUD-SALEH, chacune pour leur part respective, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
Condamne la société FONDERIE SAINT LUC à verser à la société EURO VENDING COMPANY et à la société OBERTHUR FIDUCIAIRE chacune, une somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente