Cobranding / Association de marques : 1 juin 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/03283

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Cobranding / Association de marques : 1 juin 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/03283
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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 01/06/2023

N° de MINUTE : 23/532

N° RG 21/03283 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TV7W

Jugement (N° 1120000220) rendu le 17 Mai 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Dunkerque

APPELANTE

SAS Grenelle Distribution

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Xavier Ferrand, avocat au barreau de Dunkerque, avocat constitué assisté de Me Sarah Allouche, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant

INTIMÉS

Monsieur [G] [E]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Madame [R] [O]

née le [Date naissance 1] 1988 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentés par Me Julien Sabos, avocat au barreau de Dunkerque, avocat constitué

SA Cofidis

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DÉBATS à l’audience publique du 08 mars 2023 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023 après prorogation du délibéré du 25 mai 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 16 février 2023

EXPOSE DU LITIGE

Le 26 juillet 2017, M. [E] a contracté avec la SARL Grenelle distribution la fourniture et l’installation d’un système aérovoltaïque comportant 18 modules d’une puissance totale de 4 500 Wc, ainsi qu’un chauffe-eau thermodynamique pour un prix de 29’900 euros TTC, dans le cadre d’un démarchage à domicile, selon bon de commande n° 3803.

Le 18 octobre 2017, M. [E] a contracté auprès de la SARL Grenelle distribution la fourniture et l’installation une centrale photovoltaïque composée de 12 modules d’une puissance totale de 3 000 Wc, d’une pompe à chaleur, d’un chauffe-eau thermodynamique et d’un pack led pour un prix de 29’900 euros TTC, dans le cadre d’un démarchage à domicile, selon bon de commande n° 3575.

Pour financer cette installation, selon offre préalable acceptée le 18 octobre 2017, M. [E] et Mme [O] ont souscrit auprès de la société Cofidis un crédit affecté à une prestation de ‘panneaux solaires’ d’un montant de 29’900 euros, remboursable en 180 mensualités, après un différé d’amortissement de six mois, au taux nominal annuel de 4,66 %.

Par exploit d’huissier en date des 25 et 26 février 2020, M. [E] et Mme [O] ont assigné la société Grenelle distribution et la société Cofidis aux fins d’obtenir l’annulation des contrats de vente et de crédit affecté.

Par jugement contradictoire en date du 17 mai 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Dunkerque a :

– rejeté les exceptions de nullité et d’irrecevabilité soulevées in limine litis par les défenderesses,

– dit n’y avoir lieu à prononcer la caducité du bon de commande signée le 26 juillet 2017,

– prononcé la nullité du contrat de vente signée le 26 juillet 2017 entre M. [E], Mme [O] et la société Grenelle distribution,

– constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société Cofidis, M. [E] et Mme [O] en date du 18 octobre 2017,

– condamné la société Cofidis à restituer à M. [E] et Mme [O] l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du contrat de crédit affecté conclu le 18 octobre 2017,

– condamné la société Grenelle distribution à verser à M. [E] et Mme [O] la somme de 12’782 euros correspondant aux frais de démontage l’installation,

– condamné la société Grenelle distribution à payer la somme de 29’900 euros à la société Cofidis au titre de l’enrichissement sans cause,

– débouté la société Grenelle distribution de sa demande d’indemnisation au titre de la procédure abusive,

– condamné in solidum la société Cofidis et la société Grenelle distribution à payer à M. [E] et Mme [O] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné in solidum la société Cofidis et la société Grenelle distribution aux dépens de l’instance,

– débouté les parties de leurs plus amples demandes,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 17 juin 2021, la SARL Grenelle distribution a relevé appel de l’ensemble des chefs de ce jugement sauf en ce qu’il a débouté M. [E] et Mme [O] de leurs demandes d’indemnisation au titre du préjudice moral, et débouté les autres parties de leurs demandes plus amples.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 9 février 2023, la société Grenelle distribution demande à la cour de :

– infirmer le jugement rendu par le juge des contentieux la protection du tribunal judiciaire de Dunkerque le 17 mai 2021 en toutes ses dispositions,

– débouter M. [E] et Mme [O] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

Statuant à nouveau :

in limine litis sur l’absence de conciliation préalable,

vu les articles 122, 127 et 56 du code de procédure civile,

vu l’article XIV des conditions générales de vente de la société Grenelle distribution,

– juger que M. [E] et Mme [O] devaient, préalablement la saisine de la juridiction, mettre en ‘uvre la conciliation préalable fixée par l’article XIV des conditions générales de vente de la société Grenelle distribution qui constitue une fin de non-recevoir,

– constater que l’acte introductif de la présente instance ne comporte aucune description des diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige,

en conséquence,

– juger irrégulière l’assignation délivrée le 25 février 2020 et les demandes de M. [E] et Mme [O],

– déclarer irrecevables l’action et par voie de conséquence les demandes de M. [E] et Mme [O] à l’encontre de la société Grenelle distribution,

à titre subsidiaire : sur la validité des contrats

– vu l’article L.111-1 du code de la consommation, 1137 et suivants du code civil et 1181 et suivants du code civil,

– prononcer la caducité du bon commande du 26 juillet 2017,

– juger que la société Grenelle distribution a parfaitement rempli l’ensemble de ses obligations et notamment son obligation précontractuelle d’information,

– juger que le contrat de vente du 18 octobre 2017 respecte l’ensemble des dispositions applicables aux opérations de démarchage,

– juger que la société Grenelle distribution n’a commis aucune man’uvre frauduleuse au préjudice de M. [E] et Mme [O],

– juger que M. [E] et Mme [O] ont en réalité commis une erreur sur la valeur, laquelle est insusceptible d’entraîner la nullité du contrat de vente du 18 octobre 2017,

– juger que M. [E] et Mme [O] ont couvert l’éventuelle nullité du contrat de vente et ce faisant, en ont confirmé la validité,

en conséquence,

– débouter M. [E] et Mme [O] de l’ensemble de leurs demandes,

– juger qu’ils restent tenus d’exécuter l’ensemble des obligations par eux souscrites, notamment l’exécution du contrat de crédit du 18 octobre 2017,

à titre subsidiaire : en cas d’annulation des contrats,

– ordonner à la société Grenelle distribution de procéder à la dépose de l’installation posée au domicile de M. [E] et Mme [O] et à la remise en état de leur toiture,

subsidiairement sur ce point :

– dire qu’en cas de refus d’une nouvelle intervention de la société Grenelle distribution par M. [E] et Mme [O], ceux-ci conserveront à leur charge le coût de la dépose et la remise en état,

– confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux la protection du tribunal judiciaire de Dunkerque en ce qu’il a débouté M. [E] et Mme [O] de leurs demandes indemnitaires, puisque injustifiée et non fondées tant dans leur principe que dans leur quantum,

– débouter M. [E] et Mme [O] de l’ensemble de leurs demandes,

– débouter la société Cofidis de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de la société Grenelle distribution lesquelles sont au surplus fondées sur une convention de crédit vendeur manifestement inapplicable puisque ne concernant pas la société Projexio,

en tout état de cause :

– condamner M. [E] et Mme [O] à payer à la société Grenelle distribution la somme de 10’000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

– condamner M. [E] et Mme [O] à payer à la société Grenelle distribution la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Xavier Ferrand, avocat, conformément dispositions de l’article 699 procédure civile.

Aux termes de leurs conclusions notifiées par voie électronique le 15 novembre 2021, M. [E] et Mme [O] demandent à la cour de :

Vu les articles L.111-1 un et suivants du code de la consommation,

vu les articles L.311-20 et L.311-21du code de la consommation,

vu l’article 564 du code de procédure civile,

à titre principal,

– déclarer irrecevable la prétention nouvelle tendant à l’irrecevabilité de la procédure pour défaut de conciliation préalable,

– confirmer le jugement du 17 mai 2021, sauf en ce qu’il déboute partiellement M. [E] et Mme [O] de leurs demandes relatives au préjudice subi et en ce qu’il ne précise pas le sort du capital prêté par la société Cofidis,

statuant à nouveau,

– condamner la société Grenelle distribution à payer à M. [E] et Mme [O] la somme de 15’782 euros au titre du préjudice économique et du préjudice moral,

– débouter la société Cofidis de sa demande de restitution du capital compte tenu de sa faute commise en libérant les fonds de façon prématurée et en ne vérifiant pas la régularité du contrat, objet de la prestation principale facturée,

subsidiairement, vu les articles 1137 et suivants du code civil,

– prononcer la nullité pour dol des bons commande du 26 juillet 2017 et 18 octobre 2017 conclu entre M. [E] et Mme [O] d’une part et la société Grenelle distribution d’autre part,

en tout état de cause,

– condamner solidairement la société Cofidis et la société Grenelle distribution au paiement d’une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de l’instance d’appel, outre les entiers dépens de celle ci.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 26 novembre 2021, la société Cofidis demande à la cour de :

– infirmer le jugement dont appel sur les conséquences de la nullité des conventions,

statuant à nouveau,

– condamner solidairement M. [E] et Mme [O] et la société Grenelle distribution à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté d’un montant de 29’900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées,

à titre subsidiaire, si la cour venait à confirmer le jugement en ce qu’il a dispensé M. [E] et Mme [O] de rembourser le capital,

– confirmer le jugement sur le principe de la responsabilité de la société Grenelle distribution,

statuant à nouveau,

– condamner la société Grenelle distribution à rembourser à la société Cofidis le capital et les intérêts, soit la somme de 43’185,79 euros au taux légal à compter l’arrêt à intervenir,

à titre plus subsidiaire,

– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

à titre infiniment subsidiaire, si la cour réformait le jugement et déboutait M. [E] et Mme [O] de l’intégralité de leurs demandes, condamner solidairement ces derniers à poursuivre l’exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d’amortissement,

– en tout état de cause, condamner la société Grenelle distribution à relever et garantir M. [E] et Mme [O] de toute condamnation qui pourrait être mise à leur charge au profit de la société Cofidis,

– condamner la société Grenelle distribution à relever et garantir la SA Cofidis de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge au profit de M. [E] et Mme [O],

– condamner tout succombant à payer à la société Cofidis la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner tout succombant aux entiers dépens.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l’exposé de leurs moyens.

La clôture de l’affaire a été rendue le 16 février 2023, et l’affaire fixée pour être plaidée à l’audience du 8 mars 2023.

MOTIFS

Sur l’irrégularité de l’assignation et l’irrecevabilité des demandes

La société Grenelle distribution fait valoir d’une part, que M. [E] et Mme [O] n’ont pas, préalablement à la saisie de la juridiction, mis en oeuvre la conciliation préalable fixée par l’article XIV des conditions générales du contrat, ce qui constitue une fin de non-recevoir et que d’autre part, l’acte introductif d’instance ne comporte aucune description des diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, en sorte qu’il convient de le déclarer irrégulier, et de déclarer l’action irrecevable.

M. [E] et Mme [O] font valoir que la demande d’irrecevabilité de leur action est nouvelle en appel dès lors que cette demande n’avait pas été formée devant le premier juge, mais seulement que l’assignation soit déclarée irrégulière. Par ailleurs, ils ajoutent que les dispositions de l’article L.612-4 du code de la consommation interdit toute clause obligeant le consommateur à recourir obligatoirement à une médiation préalablement à la saisine du juge, et que la sanction de l’absence de conciliation préalable est seulement la possibilité pour le juge de proposer une mesure de conciliation ou de médiation.

Tout d’abord, la demande d’irrecevabilité pour défaut de conciliation préalable n’est pas nouvelle en appel, le premier juge ayant rejeté ‘les exceptions de nullité et d’irrecevabilité soulevées in limine litis par les défenderesses’. Dès lors, la demande d’irrecevabilité des demandes formée par la société Grenelle distribution est recevable.

L’article XIV des conditions générales du contrat de vente prévoit que ‘Toute contestation portant sur l’exécution du présent contrat ou sur l’interprétation des obligations qui en découlent, devra obligatoirement et préalablement à tout action judiciaire contentieuse, donner lieu à une tentative de conciliation préalable par-devant au conciliateur ou médiateur accepté par les parties, le cas échéant, désigné par le tribunal à leur frais.’

Cette clause fixe la mise en ‘uvre d’une tentative de conciliation préalable comme une phase obligatoire de résolution des litiges qui pourraient découler du contrat de vente conclu entre les parties, et ce avant toute saisine d’une juridiction, et constitue, sur le fondement des articles 122 et 124 du code de procédure civile une fin de non-recevoir.

Cependant, il résulte de l’article L.612-4 du code de la consommation qu’est interdite toute clause ou convention obligeant le consommateur, en cas de litige, à recourir obligatoirement à une médiation préalablement à la saisine du juge.

Il n’est pas contestable que M. [E] et Mme [O] sont des consommateurs au sens de l’article 612-4 précité. Cette clause ne saurait donc être appliquée, en sorte qu’ils ne peuvent être déclarés irrecevables en leur action au motif qu’ils n’ont pas préalablement à la saisine du tribunal, saisi un conciliateur ou un médiateur, ou n’en ont pas fait désigner un par le tribunal.

Aux termes de l’article 54 du code de procédure dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, applicable à compter du 1er janvier 2020, soit lors de la délivrance de l’assignation le 25 et 26 février 2020 :

‘ (…) A peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L’objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l’organe qui les représente légalement ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier ;

5° Lorsqu’elle doit être précédée d’une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, les diligences entreprises en vue d’une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d’une telle tentative ;

6° L’indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire.’

Selon l’article 750-1 du code de procédure civile, issu du décret susvisé et applicable à la date de l’exploit introductif d’instance en date des 25 et 26 février 2020 :

‘A peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office, la demande en justice doit être précédée, au choix des parties, d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros ou lorsqu’elle est relative à l’une des actions mentionnées aux articles R. 211-3-4 et R. 211-3-8 du code de l’organisation judiciaire. (…)’

Or, en l’espèce, le litige introduit devant le juge des contentieux de la protection est supérieur à 5 000 euros, et l’action des consorts [E] n’est pas comprise dans les actions mentionnées par les article R211-3-4 et R.211-3-8 visé à l’article 750-1 du code du code de procédure civile.

Dès lors que l’action ne devait pas être précédée d’une tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative, la mention des diligences entreprises en vue d’une résolution amiable du litige ou la justification de la dispense d’une telle tentative n’était pas exigée à peine de nullité.

Confirmant le jugement, il y a lieu de rejeter les exceptions de nullité et d’irrecevabilité soulevées par la société Grenelle distribution.

Sur la nullité du bon de commande

– sur la caducité du bon de commande du 26 juillet 2017

M. [E] et Mme [O] produisent un bon de commande n° 3803 daté du 26 juillet 2017 et les sociétés Grenelle distribution et Cofidis, un bon de commande n° 3575 daté du 18 octobre 2017.

M. [E] prétend n’avoir signé que le bon de commande du 26 juillet 2017 et s’étonne de l’existence d’un bon de commande en date du 18 octobre 2017. Il sollicite néanmoins l’annulation des deux contrats.

La société Grenelle distribution fait valoir que M. [E] a signé un premier bon de commande le 26 juillet 2017 et qu’après une seconde étude de son dossier, elle lui a indiqué qu’une installation photovoltaïque ‘classique’ serait plus adaptée, et que c’est dans ces conditions qu’un second bon de commande a été signé entre les parties le 18 octobre 2017 portant sur des équipements différents. La société Grenelle distribution fait valoir que le premier contrat est caduc car il n’a jamais été exécuté et a été remplacé par le second, et que le contrat du 18 octobre 2017 est parfaitement valable.

La cour observe que le bon de commande du 18 octobre 2017 comporte, dans la case ‘signature du client’ une signature parfaitement identique à celle apposée sur le bon de commande du 26 juillet 2017, que M. [E] ne conteste pas être la sienne ; que ce dernier a ainsi manifestement signé le bon de commande du 18 octobre 2017 ; que compte tenu de la date du contrat de crédit soit le 18 octobre 2017, ce contrat est l’accessoire du contrat de vente du 18 octobre 2017, ce dont M. [E] ne disconvient pas, le contrat du 26 juillet 2017 n’ayant pas été financé par un quelconque organisme de crédit ; que M. [E] a signé des attestations de livraisons des équipements commandés le 18 octobre 2017, comprenant une pompe chaleur, qui est bien mentionnée sur le bon de commande du 18 octobre 2017, et non sur le bon de commande du 26 juillet 2017, et il n’est pas démontré que les équipements commandés ne correspondraient pas au contrat de vente du 18 octobre 2017, mais correspondraient à celui du 26 juillet 2017.

Au regard de ces éléments, il est manifeste que le contrat du 26 juillet 2017 n’a jamais été exécuté par les parties, ni financé ; que le contrat en date du 18 octobre 2017 conclu entre les parties a été financé par la société Cofidis et exécuté par la société Grenelle distribution ; dès lors, le contrat du 18 octobre 2017 a manifestement remplacé celui du 26 juillet 2017, en sorte que ce contrat premier contrat est caduc et se trouve de ce fait anéanti.

Il convient par conséquent de n’examiner que la validité du bon de commande du 18 octobre 2017.

– sur la nullité du bon de commande du 18 octobre 2017

En vertu de l’article L.221-9 du code de la consommation, les contrats hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat écrit daté dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat. Il comprend toutes les informations prévues par l’article L.221-5. Le contrat doit être accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L.221-5.

Selon l’article L.221-5 du code de la consommation ‘Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 221-25 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 221-28, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat. (…)’

Selon l’article L.111-1 du code de la consommation, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,

2° le prix du bien ou du service en application de l’article L.112-1 à L.112-4,

3° en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;

5° s’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique, et le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et autres conditions contractuelles ;

6° la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre 1er du livre VI. (…)’

En vertu de l’article L.242-1du code de la consommation, les dispositions de l’article L.221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

Le bon de commande litigieux porte sur la livraison et la pose une centrale photovoltaïque composée de 12 modules d’une puissance unitaire de 250 Wc et d’une puissance totale de 3 000 Wc d’un montant de 19 550 TTC, d’une pompe à chaleur d’un montant de 1 350 euros TTC d’un chauffe-eau thermodynamique de 270 litres d’un montant de 9 000 euros et de Led, pour un prix global de 29’900 euros TTC. La société Grenelle distribution s’engage par ailleurs à accomplir toutes les démarches administratives et de raccordement jusqu’à l’obtention du contrat de rachat d’électricité.

D’une part, le bon de commande n’est pas conforme aux dispositions d’ordre public de code de la consommation relatives aux démarchage à domicile, prescrites à peine de nullité en ce qu’il ne comporte pas l’ensemble des caractéristiques essentielles des biens offerts à la vente. La marque est une caractéristique essentielle pour le consommateur qui lui permet d’être renseigné sur les qualités et performances du produit offert à la vente et de faire des comparaisons avec des produits d’autres marques. Or, les marques des panneaux photovoltaïques, de l’onduleur, de la pompe à chaleur ne sont pas mentionnées.

De plus, le bon de commande ne prévoit pas le délai de livraison.

La société Grenelle distribution fait valoir que l’article IV des conditions générales prévoit que ‘le délai de livraison figurant au recto est donné à titre indicatif et ne peut dépasser une limite de 200 jours à compter de la prise d’effet du contrat’.

Toutefois, alors que le contrat conclu implique des opérations à la fois matérielles de livraison et d’installation du matériel commandé, mais également des démarches administratives et de raccordement, cette mention est insuffisante pour répondre aux exigences de l’article L. 111-1, 3°du code de la consommation, dès lors qu’il n’est pas distingué entre le délai de pose des modules, et autres matériels et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et qu’un tel délai global, particulièrement imprécis, ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations.

Dès lors, le bon de commande litigieux contrevient manifestement aux dispositions du code de la consommation, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté, ni discuté, par la société Cofidis.

La société Grenelle distribution fait valoir que M. [E] a confirmé la nullité invoquée dans le mesure où il a exécuté volontairement le contrat, en n’exerçant pas leur droit de rétractation, en acceptant la livraison des marchandises, en réceptionnant sans réserve l’installation, en demandant le versement des fonds à la banque, en remboursant les échéances du crédit. et qu’il a signé sous la mention suivant laquelle il reconnait ‘être d’accord avec les conditions générales de vente et reconnait avoir pris connaissance des articles L.121-21 et L121-26 du code de la consommation’.

Il est rappelé que si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et qui a pour finalité la protection des intérêts de l’acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, il résulte des dispositions de l’article 1882 du code civil dans sa version applicable à la date de conclusion du contrat, que la confirmation tacite d’un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l’affectant et qu’il ait eu l’intention de le réparer.

La renonciation à se prévaloir de la nullité du contrat par son exécution doit, dès lors que la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, être caractérisée par sa connaissance préalable de la violation des dispositions destinées à le protéger.

Or, en l’espèce, force est de constater que la preuve de la connaissance des vices affectant le bon de commande n’est pas rapportée.

Le rappel des dispositions du code de la consommation, figurant parmi de longues conditions générales écrites en petits caractères, ne sauraient suffire à établir que l’acquéreur a agi en toute connaissance de cause et renoncé à invoquer les vices de forme du contrat de vente alors que, pour que la confirmation soit valable, il faut que son auteur ait pris conscience de la cause de nullité qui affecte l’acte et que la connaissance certaine de ce vice ne peut résulter, pour un consommateur profane, du seul rappel des dispositions du code de la consommation relatives aux mentions du bon de commande prévues à peine de nullité.

En conséquence, aucun de ses actes postérieurs à la signature du bon de commande ne saurait être considéré comme une confirmation tacite de la nullité par l’acheteur.

Réformant le jugement entrepris, il convient de prononcer la nullité du bon de commande en date du 18 octobre 2017 n° 3575.

L’annulation prononcée entraînent en principe la remise des parties en l’état antérieur à la conclusion des contrats.

La restitution du prix de vente par la société Grenelle distribution à M. [E] est de droit.

La désinstallation du matériel et la remise en état, à ses frais, sont des obligations qui incombent à la société Grenelle Distribution de par l’effet de l’anéantissement du contrat.

Elle sera donc condamnée à désinstaller le matériel au domicile de M. [E] et Mme [O], et à procéder à la remise en état de la toiture de leur immeuble, à ses frais.

M. [E] et Mme [O] seront par conséquent déboutés de leur demande de condamnation de la société Grenelle distribution à leur payer la somme de 12 782 euros correspondant au devis de remise en état (pièce De M. [E] n° 11).

Sur l’annulation du crédit accessoire

En application du principe de l’interdépendance des contrats constatée par l’article L.312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il y a lieu de confirmer le jugement et de constater la nullité de plein droit du crédit accessoire de crédit du 18 octobre 2017 conclu entre M. [E] et Mme [O] et la société Cofidis, en application des dispositions susvisées.

Sur les conséquences de l’annulation du contrat accessoire de crédit

Les annulations prononcées entraînent en principe la remise des parties en l’état antérieur à la conclusion des contrats. Ainsi, l’annulation du contrat de prêt en conséquence de celle du contrat de vente qu’il finançait emporte, pour l’emprunteur, l’obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, peu important que ce capital ait été versé directement au vendeur par le prêteur, sauf si l’emprunteur établi l’existence d’une faute du prêteur et d’un préjudice consécutif à cette faute. Elle emporte également pour le prêteur l’obligation de restituer les sommes déjà versées par l’emprunteur.

Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution peut être privé de tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

En l’espèce, le bon de commande était manifestement affecté de vices de forme au regard des dispositions du code de la consommation, et la banque, professionnelle dispensatrice de crédits affectés, a commis une faute en ne vérifiant pas sa régularité avant le déblocage des fonds, faute que la société Cofidis admet expressément avoir commise aux termes de ses conclusions.

Toutefois, de par l’effet de plein droit de l’annulation du contrat de vente prononcée, la société Grenelle distribution qui ne fait l’objet d’aucune procédure collective et est in bonis, doit restituer les prix de vente à M. [E], lequel correspond au capital emprunté, de sorte que M. [E] et Mme [O] ne subissent pas de préjudice et ne sauraient en conséquence être dispensés de rembourser le capital emprunté.

Aussi, il convient de réformer le jugement et condamner M. [E] et Mme [O] à restituer à la société cofidis le montant du capital emprunté de 29 900 euros, dont à déduire l’ensemble des sommes qu’ils ont versées en exécution du contrat de crédit affecté.

Sur le dommages et intérêts complémentaires

Selon l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a estimé que M. [E] et Mme [O] ne rapportaient pas la preuve de ce que leur niveau de vie avait été réduit, ni que l’installation photovoltaïque présenterait un caractère inesthétique et occasionnerait des désordres, ni encore de ce qu’ils subiraient un préjudice moral, et les a débouté de leurs demandes de dommages et intérêts de ces chefs. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes de la société Cofidis à l’encontre de la société Grenelle Distribution

Sur la base d’une convention de partenariat signée avec la société venderesse, la société Cofidis demande à titre subsidiaire, si la cour confirmait la dispense de remboursement du capital par les emprunteurs, de condamner la société Grenelle distribution à lui payer la somme de 43 185,79 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir.

Les emprunteurs n’ayant pas été dispensés de rembourser le capital emprunté, la demande subsidiaire en paiement de la société Cofidis à l’encontre de la société Grenelle distribution est sans objet.

La banque sollicite, en tout état de cause, à être garantie par venderesse de toutes condamnations qui seraient éventuellement mise en à sa charge. Cependant, l’organisme de crédit à lui-même commis des fautes dans le déblocage des fonds, en sorte qu’il n’est pas fondé à obtenir la garantie de la société Grenelle distribution.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Il résulte des dispositions de l’article 1240 du code civil et de l’article 32-1 du code de procédure civile que le droit d’agir en justice ne constitue un abus susceptible d’ouvrir droit à des dommages et intérêts qu’en cas d’intention de nuire, de faute lourde ou de fraude.

La société Grenelle distribution ne rapporte pas la preuve que M. [E] et Mme [O] dont l’action prospère partiellement ont commis une faute en engageant la procédure. Confirmant le jugement entrepris, sa demande est par conséquent rejetée.

Sur les demandes accessoires

Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.

La société Cofidis et la société Grenelle distribution qui succombent principalement seront condamnées à payer à M. [E] et Mme [O] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens d’appel en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire ;

Confirme le jugement sauf en ce qu’il a :

– dit n’y avoir lieu à prononcer la caducité du bon de commande signée le 26 juillet 2017,

– prononcé la nullité du contrat de vente signée le 26 juillet 2017 entre M. [E], Mme [O] et la société Grenelle distribution,

– condamné la société Grenelle distribution à verser à M. [E] et Mme [O] la somme de 12’782 euros correspondant aux frais de démontage l’installation,

– condamné la société Grenelle distribution à payer la somme de 29’900 euros à la société Cofidis titre de l’enrichissement sans cause,

L’infirmant de ces chefs et y ajoutant ;

Constate que le bon de commande n° 3803 en date du 26 juillet 2017 est caduc ;

Prononce la nullité du bon de commande n°3575 conclu le 18 octobre 2017 entre M. [E] et la société Grenelle distribution ;

Rappelle que la restitution du prix de vente par la société Grenelle distribution à M. [E] est de droit ;

Condamne la société Grenelle distribution à désinstaller le matériel au domicile de M. [E] et Mme [O], et à procéder à la remise en état de la toiture de leur immeuble, et ce à ses frais ;

Déboute M. [E] et Mme [O] de leur demande de condamnation de la société Grenelle distribution à leur payer la somme de 12 782 euros correspondant au devis de remise en état ;

Condamne M. [E] et Mme [O] à rembourser à la société Cofidis le montant du capital emprunté de 29 900 euros, dont à déduire l’ensemble des sommes qu’ils ont versées en exécution du contrat de crédit ;

Déboute la société Cofidis de ses demandes à l’encontre de la société Grenelle distribution ;

Condamne in solidum la société Cofidis et la société Grenelle distribution à payer à M. [E] et Mme [O] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la société Cofidis et la société Grenelle distribution aux dépens d’appel en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

Le greffier

Gaëlle PRZEDLACKI

Le président

Yves BENHAMOU

 


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