Cobranding / Association de marques : 6 juillet 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/01063

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Cobranding / Association de marques : 6 juillet 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/01063
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 2

ARRÊT DU 06 JUILLET 2023

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/01063 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHC2Q

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Janvier 2023 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 20/04597

APPELANTE

S.A.S. NOT SO DARK

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Benjamin MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

INTIMÉE

Madame [W] [P]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Antoine BENECH, avocat au barreau de PARIS, toque : P0540

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 84 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 31 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame LAGARDE Christine, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Paule ALZEARI, présidente

Christine LAGARDE, conseillère

Didier MALINOSKY, Magistrat Honoraire

Greffière lors des débats : Mme Alicia CAILLIAU

ARRÊT :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

– signé par Marie-Paule ALZEARI, présidente et par Alicia CAILLIAU, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Not So Dark (anciennement Order Now et ci-après la ‘Société’) a pour principale activité « la restauration rapide sur place à emporter ».

Elle exploitait principalement l’enseigne Como Kitchen.

Mme [W] [P] est cheffe de cuisine, elle a créé la marque ‘[W]’s’ et a dirigé le groupe de sociétés [W]’s dont l’activité principale était la préparation et la fourniture de plats cuisinés.

À la suite de difficultés financières, le 2 octobre 2019, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre des sociétés [W]’s, puis décidé, par jugement du 31 janvier 2020 de la cession partielle des actifs des sociétés.

Pendant cette procédure Mme [P] a été approchée par la Société et des échanges ont eu lieu entre les parties sur les modalités d’une future collaboration.

Par courrier du 17 février 2020, Mme [P] a pris acte de la rupture de son contrat de travail et le 6 juillet 2020, a saisi le conseil de prud’hommes de Paris aux fins de voir requalifier sa prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en conséquence de condamner la Société à lui payer un rappel de salaire et des indemnités de rupture.

Par jugement du 27 janvier 2023, le juge départiteur du conseil de prud’hommes de Paris a rendu la décision suivante :

« DIT que les parties étaient liées par un contrat de travail ;

DIT que le conseil de prud’hommes est compétent pour statuer sur les demandes ;

MET en demeure la SAS NOT SO DARK de conclure au fond ;

En application des dispositions de l’article 84 du code de procédure civile, le délai d’appel est de quinze jours à compter de la notification du jugement.

RÉSERVE les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens de l’instance ».

Selon déclaration du 14 février 2023, la Société a interjeté appel de cette décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions transmises par RPVA le 14 février 2023, la Société demande à la cour de :

« – INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Paris du 27 janvier 2023 en ce qu’il a :

o Dit que les parties étaient liées par un contrat de travail

o Dit que le Conseil de Prud’hommes était compétent pour statuer les demandes ;

o Rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la Société NOT SO DARK, au profit du Tribunal de commerce de Paris.

– ET STATUANT A NOUVEAU :

Se déclarer incompétent pour statuer sur les demandes de Madame [P] au profit du Tribunal de commerce de Paris ;

Inviter Madame [P] à saisir le Tribunal de commerce de PARIS, juridiction compétente pour connaître du litige opposant Madame [P] à la Société NOT SO DARK.

Débouter Madame [P] de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner Madame [P] à payer à la Société la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner Madame [P] aux entiers dépens ».

Par dernières conclusions transmises par RPVA le 10 mai 2023, Mme [P] demande à la cour de :

« CONFIRMER le jugement du 27 janvier 2023 en ce qu’il a :

– JUGER Madame [W] [P] recevable en ses demandes ;

– CONSTATER l’existence du contrat de travail entre Madame [W] [P] et la société NOT SO DARK ;

– JUGER le Conseil de prud’hommes de Paris compétent pour statuer sur les demandes de Madame [W] [P] ;

En conséquence :

CONDAMNER la société NOT SO DARK au versement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER la société NOT SO DARK aux entiers dépens de l’instance ».

Pour un plus ample exposé des faits de la cause et des prétentions des parties, il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code procédure civile.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Sur la compétence du conseil de prud’hommes

La Société fait valoir que :

– aucun accord entre les parties n’a été trouvé s’agissant des conditions financières de la participation de Mme [P] à la direction de l’activité des cuisines de la Société et elle ne peut tirer aucune conséquence des propositions qui lui ont été faites, en l’absence d’accord sur les conditions essentielles d’un contrat de travail ;

– aucune pièce ne caractérise une prestation de travail qui s’inscrit dans le cadre de la mission qu’il lui avait été proposée, à savoir diriger et contrôler les activités de cuisine de la Société ;

– les échanges entre Mme [P] et les associés de la Société sont dénués de tout lien de subordination ;

– elle n’a jamais donné d’ordre ou de directive à Mme [P] qui, de sa propre initiative, s’est impliquée dans la gestion de la Société avant de prendre ou non la décision de s’y associer, elle était libre de son emploi du temps, notamment afin de gérer la cessation de son autre activité ;

– elle ne disposait d’aucun pouvoir disciplinaire à l’encontre de Mme [P] qui n’était pas intégrée au sein d’un service organisé, qui exerçait son activité de manière indépendante et sans lui rendre de compte, n’avait pas de bureau au sein des locaux et n’a eu aucun contact avec les autres salariés.

Mme [P] soutient que :

– elle était salariée de la Société, et les parties avaient trouvé un accord définitif sur un poste de “Chef Exécutif” et un contrat de travail durant le mois de novembre 2019 et à compter du 17 décembre 2019, elle a exécuté les missions définies dans son contrat de travail ;

– elle était liée à la Société par un lien de subordination, la Société lui donnait plusieurs tâches à réaliser et insistait sur l’exécution rapide de certaines d’entre elles, comme le développement de nouvelles marques et ses prestations étaient évaluées ;

– bien qu’elle disposait d’une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps en raison de son statut de cadre dirigeant, la Société conservait un contrôle sur son emploi du temps ;

– elle était intégrée au sein d’un service organisé, la Société lui ayant crée une adresse professionnelle, fourni un téléphone et un ordinateur de travail, donné accès aux locaux, fourni une carte de paiement et donné accès au compte Amazon pro de la Société, imposé des outils de travail qu’elle ne maîtrisait pas et l’a présentée à des investisseurs, ses partenaires commerciaux et aux autres salariés.

Sur ce,

Selon l’article L.1411-1 du code du travail, « le conseil de prud’hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu’ils emploient.

Il juge les litiges lorsque la conciliation n’a pas abouti ».

En droit, le contrat de travail n’étant défini par aucun texte, il est admis qu’il est constitué par l’engagement d’une personne à travailler pour le compte et sous la direction d’une autre moyennant rémunération, le lien de subordination juridique ainsi exigé se caractérisant par le pouvoir qu’a l’employeur de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son salarié.

La qualification de contrat de travail étant d’ordre public et donc indisponible, il ne peut y être dérogé par convention. Ainsi, l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité, l’office du juge étant d’apprécier le faisceau d’indices qui lui est soumis pour dire si cette qualification peut être retenue.

En application de l’article L. 8221-6 I code du travail, « sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription :

1° Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales ;

(‘)

II.-L’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les personnes mentionnées au I fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci. »

Aux termes de l’article L. 8221-6-1 du même code, « est présumé travailleur indépendant celui dont les conditions de travail sont définies exclusivement par lui-même ou par le contrat les définissant avec son donneur d’ordre ».

Les dispositions précitées édictent une présomption de non salariat qui peuvent être levées lorsque ces personnes fournissent directement ou par personne interposée des prestations à un donneur d’ouvrage dans les conditions qui les placent dans un lien de subordination comparable à celui existant entre un salarié et son employeur.

En l’espèce, il n’est pas contesté qu’aucun contrat de travail n’a été signé entre les parties, et qu’aucune rémunération n’a été versée à Mme [P] qui fait valoir l’existence d’un contrat de travail entre le 17 décembre 2019 et le 17 février 2020.

Ainsi, la présomption de l’article L. 8221-6-1 s’applique à Mme [P] qui était dirigeante de la société [W]’s Cakes et dont la société faisait l’objet d’une procédure collective à l’époque des pourparlers initiés entre les parties, la cessation partielle des actifs de sa société ayant été décidée par jugement du tribunal de commerce de Bobigny le 31 janvier 2020.

Il est établi en outre, que les parties avaient envisagé de travailler ensemble dans le cadre d’une association en capital et d’un contrat de travail.

À cette fin, il était initialement proposé d’associer Mme [P] à hauteur de 5 % du capital avec un apport de cette dernière de 110’000 euros en capital et de régulariser un contrat de travail moyennant une rémunération annuelle de 140’000 euros bruts.

Les projets qui ont été adressés le 17 décembre 2019 et le 11 janvier 2020, s’agissant du projet « contrat chef exécutif » et du projet « contrat BSPCE » n’ont pas été signés, les parties demeurant en désaccord.

Les projets de contrat de travail définissaient les missions à accomplir de la façon suivante :

« Mme [P] exercera la fonction de chef exécutif, catégorie cadre supérieur, niveau 3, échelon C, selon la classification conventionnelle actuellement en vigueur.

Elle disposera de responsabilités étendues et d’une très large autonomie afin de mener à bien ses différentes missions dont elle rendra compte régulièrement auprès du président ainsi qu’à toute personne désignée par le président de la société.

Mme [P] sera notamment chargée de diriger et de contrôler les activités des cuisines de la société en vue d’assurer le rendement du service et la qualité des repas servis au sein des restaurants livrés à la clientèle.

Cette mission implique notamment la réalisation des tâches suivantes :

‘ Assurer la conception des recettes, cartes, menus, des fiches techniques et plus généralement superviser/coordonner l’ensemble des activités relatives aux cuisines de la Société.

‘ Établir et contrôler les politiques et procédures de la cuisine permettant de garantir la qualité des mets ;

‘ Veiller à la définition et à l’application des normes d’hygiène, de salubrité, de santé et de sécurité au travail ;

‘ Participer à la gestion les ressources financières relative à cette activité (élaboration des budgets, contrôle des coûts de fonctionnement, gestion des inventaires, approvisionnements, négociations avec les fournisseurs, etc.) et superviser l’approvisionnement des produits ;

‘ Participer à la gestion des ressources humaines du personnel embauché au sein des cuisines (recrutement du personnel, formation, répartition du travail, élaboration des horaires, évaluation du rendement, etc…(…) ».

Il ressort des pièces produites aux débats que par mail du 15 décembre 2019, le président de la Société a annoncé l’arrivée de Mme [P] « courant janvier » en la présentant comme futur « chef exécutif » venant renforcer la « team ». Il y est précisé qu’elle va « rejoindre l’aventure Como Kitchen  pour reprendre les rênes de la production ».

Il y est mentionné en outre l’agrandissement du laboratoire de [Localité 7], la recherche d’un laboratoire de production et la signature d’un nouveau Dark  Kitchen à [Localité 5].

Le 22 décembre 2019, elle était présentée comme « chef executive chez Como Kitchen » à un partenaire.

Le 7 janvier 2020, une adresse mail professionnelle a été créée pour Mme [P], et s’il n’est pas contesté qu’elle n’y a reçu aucun message et n’en a émis aucun, elle a donné le 9 janvier 2020 cette adresse mail à un prestataire dans le cadre de ses démarches de présentation de produits.

Le 28 janvier 2020, il lui a été remis en outre une carte de paiement et un téléphone, ce qui établit qu’elle appartenait à tout le moins à compter du 7 janvier 2020, à un service organisé.

Par mail du 17 décembre 2019, le président de la Société (M. [E] [C]) a adressé à son associé (M. [G] [N]) et à Mme [P] un mail débutant par « Hello, suite à  notre réunion de travail, il faut qu’on s’appelle pour prendre une décision s’agissant des points ci-dessous ».

Il demandait ce qui devait être fait au niveau du laboratoire, si la centrale d’achat était centralisée ou externalisée, demandait qui devait s’en occuper, et posait des questions sur le recrutement nécessaire et les inspirations s’agissant des nouvelles marques.

Force est de constater que ces interrogations illustrent des décisions d’ordre stratégiques ou opérationnelles à arrêter entre des ‘décideurs’ et ne reflètent pas des échanges entre un employeur et sa salariée.

Le 17 décembre 2019, Mme [P] a transmis une offre proposée par une société concernant la prestation de location de cuisine, mais force est de constater que cette mission n’est pas une de celle énumérée d’un contrat de travail et constitue davantage la participation d’un futur associé à l’expansion de la société qu’il rejoint.

S’il ressort du mail du 18 décembre 2019 que Mme [P] devait commencer « à prendre le lead » sur différents éléments, dont notamment « la conception du menu salade bar », la « conception du menu cocotte », et pour ces deux menus, la liste des plats les composants, ces missions étant indiquées dans le contrat de travail, force est de constater que le 24 décembre, Mme [P] a adressé aux associés de la Société la « carte sandwich gourmet  2017  », ce qui ne saurait s’analyser en l’exécution d’une prestation de travail, s’agissant de la simple communication d’un document préexistant.

Entre le 22 et le 26 décembre 2019, Mme [P] et le président de la Société ont échangé sur la logistique pour les modalités de livraison, s’agissant des recours à des « free lance », du volume de camions pour les livraisons et le coût des camions et des coursiers. Ces mails présentent des questions, des réponses, et des appréciations pour arrêter une décision s’agissant de la nécessité d’augmenter ou non le volume du camion, d’augmenter la durée de la location aux fins d’en diminuer son coût, d’avoir recours, s’agissant des livreurs à des free lances avec un contrat de partenariat ou à des salariés, discussions entrant dans les choix stratégiques de la Société.

Par mail du 7 janvier 2020, suite à une réunion, l’associé (clem), c’est à dire M.  [N], a fixé des objectifs à atteindre à Mme [P] ([W]) et au président M. [C] ([K]) dans les termes suivants :

« Voici un petit résumé de notre réunion d’hier.

Même si les timings sont challenging,, il est impératif de les respecter pour assurer la croissance des prochains mois.

Organigrammes coming soon ».

Les différents objectifs du mois de janvier à atteindre ont été dévolus à ‘[K]’, ‘[Y]’ et ‘[W]’, et les objectifs qui y sont mentionnés ne concernent pas les missions énumérées dans le projet de contrat de travail sur lequel les parties ne se sont pas accordées.

La seconde partie de ce mail, portant sur « Brand creation », fait état de ce que « [W] » doit faire la « proposition d’une carte » pour le vendredi 10 janvier, un « sourcing packaging+samples » pour « [Y] et [W] » le lundi 13 janvier, des « testing V1 et V2 pour les 15 et 17 janvier pour [W]/[Y]/[K] », des « marketing Package » (photos, descriptions, insta) [W] et [Y] », la rédaction de fiches techniques et process pour Mme [P] et la formation du personnel de Dark Boulogne ([W], [F]’).

Les seules missions qui s’apparentent à celles figurant dans le projet de contrat de travail sont celles relatives à la « proposition d’une carte, à la rédaction de fiches techniques et process et à la formation du personnel de Dark Boulogne, les autres missions, qu’elle partageait d’ailleurs avec les deux associés, étant davantage celles dévolues à un associé/futur associé dans le cadre d’actes préparatoires à cette association.

L’échange de sms avec M. [G] lui disant « faut que tu sortes la nouvelle marque [W] » s’inscrit dans la suite de messages adressés à une date non précisée mais se présentant de la façon suivante :

« Working on the deck

Will wrap it tonight

And then $$$$

ca prouve qu’on est sur le bon play

Faut que tu sortes la nouvelle marque [W]

Rapido

C clé

Critique même

Et que tu set up le labo que vous avez trouvé

moi je vous fuel le plane rapido ».

Mme [P] a répondu « on peut faire la nouvelle marque d qu’on a le lab ».

Si ce message est présenté sous forme impérative, il s’inscrit dans un échange dont le style est insuffisant à le qualifier de directives données sous peine de sanction en cas d’inexécution.

Il ressort en outre des sms échangés le 9 janvier 2020 entre un agent immobilier et Mme [P], que cette dernière, suite à une visite, a demandé la transmission de plans et de règlements de copropriété et a communiqué son adresse mail professionnelle et celle de « son associé » « AH » ([E]  [C]). Les échanges de sms sur ce point entre ce dernier et Mme [P] le 13 janvier 2020 sont des échanges d’information sur le bien s’agissant de la surface, de la disponibilité et des possibilités de visite, Mme [P] proposant de faire une vidéo.

S’il est démontré aux termes d’échanges de sms des 14, 20 et 24 janvier 2020, que Mme [P] a recherché des prestataires pour la fournitures d’ingrédients et s’est rendue à des rendez-vous pour ce faire et a demandé de lui apporter des échantillons, force est de constater cependant que cette recherche de prestataires en vue de la présentation de produits est insuffisante à renverser la présomption de non salariat.

Il en est de même de la participation de Mme [P] à un événement le 26 janvier 2020 à « l’international sous vide Day au Ritz à [Localité 6] » en compagnie de M. [C].

S’il n’est pas contesté que Mme [P] « (avait) hâte de pouvoir commencer », tel qu’elle le formule dans son sms du 22 décembre 2019, les différentes discussions et démarches précisées ci dessus caractérisent davantage des démarches d’ordre préparatoire à un rapprochement des parties dans le cadre d’un contrat d’associés dont la nature et les conditions n’étaient pas rigoureusement définis.

Il est établi en outre que Mme [P] organisait son emploi du temps comme elle le souhaitait, et que tant les visites organisées, que les réunions et la participation à un « événement » ont en tout état de cause été fixées avec son accord.

Dès lors, il résulte des considérations qui précèdent, et ce sans qu’il soit nécessaire de suivre davantage les parties dans le détail de leur argumentation, ni de reprendre l’ensemble des échanges par sms et mails, ni de répondre à des conclusions que les constatations précédentes rendent inopérantes, que les éléments apportés par Mme [P] sont insuffisants à démontrer l’existence d’un lien de subordination caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, de sorte qu’elle échoue à renverser la présomption de non salariat.

Le conseil de prud’hommes doit donc être déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris et sera infirmé sur ce point.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Mme [P] qui succombe, doit être condamnée aux dépens de la procédure d’appel et déboutée en sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

À l’opposé, il sera fait application de l’art 700 du code de procédure civile au profit de l’appelante.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, publiquement et en dernier ressort

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit que le conseil de prud’hommes est incompétent pour statuer sur les demandes au profit du tribunal de commerce de Paris ;

Condamne Mme [W] [P] aux dépens de la procédure d’appel et la déboute de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [W] [P] à payer à la société Not So Dark la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente,

 


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