Détournement de Savoir-faire : 7 septembre 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/04756

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Détournement de Savoir-faire : 7 septembre 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/04756
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7 septembre 2023
Cour d’appel de Lyon
RG n°
20/04756

N° RG 20/04756 – N° Portalis DBVX-V-B7E-ND5C

Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 25 septembre 2017

RG : 2016j264

Société DEBEAUX

C/

S.A.S. QUALITY LOGISTIC CARGO

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 07 Septembre 2023

APPELANTE :

Société DEBEAUX au capital social de 300 000 euros, inscrite au RCS de AUBENAS sous le numéro B 390 439 420, représentée par son dirigeant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Eric ANDRES de la SELARL ANDRES & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

S.A.S. QUALITY LOGISTIC CARGO au capital de 550.000 euros, immatriculée au Registre de Commerce et des Sociétés de Romans sous le numéro 823 923 297, représentée par son dirigeant légal en exercice et domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES – LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Thierry CHAUVIN, avocat au barreau de VALENCE

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 01 Juillet 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 24 Mai 2023

Date de mise à disposition : 07 Septembre 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Patricia GONZALEZ, présidente

– Marianne LA-MESTA, conseillère

– Aurore JULLIEN, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Debeaux exerçant une activité de transport routier de marchandises, a embauché M. [O] [F] le 12 novembre 2012, en qualité de responsable d’exploitation de l’agence de [Localité 6] (69).

A compter du 23 mars 2015, M. [F] a été promu directeur de l’agence de [Localité 3] (13) et un avenant comportant une clause de non-concurrence rémunérée et limitée dans le temps (six mois) et dans l’espace (régions PACA et Rhône Alpes) a été signé.

Le 11 février 2016, M. [F] a démissionné de ses fonctions en précisant qu’il souhaitait être libre de tout engagement au 31 mars 2016. Par courrier en date du 12 février 2016, la société Debeaux a demandé à M. [F] à titre exceptionnel de se déplacer deux jours par semaine sur une période de deux mois sur le site de [Localité 6]. M. [F] a refusé et son licenciement a été prononcé pour faute grave le 31 mars 2016.

La société Debeaux aurait appris que M. [F] travaillait au sein d’une entreprise concurrente, la Sas Quality Logistic Cargo (ci-après « la société QLC »).

Le 4 mai 2016, deux lettres de mise en demeure ont été adressées par la société Debeaux à M. [F] et à la société QLC en rappelant la violation de l’obligation contractuelle de non-concurrence.

La société Debeaux a saisi le conseil des prud’hommes de Lyon aux fins d’obtenir la restitution de la contrepartie de la clause de non-concurrence et le paiement de la clause pénale prévue au contrat de travail. Par jugement du 12 octobre 2017, le conseil des prud’hommes de Lyon a reconnu la violation par M. [F] de sa clause de non-concurrence et l’a condamné à régler à la société Debeaux les sommes dues à ce titre. Un appel contre cette décision a été interjeté.

Par acte d’huissier du 2 août 2016, la société Debeaux a assigné la société QLC devant le tribunal de commerce de Lyon en cessation d’une concurrence déloyale et en indemnisation de préjudices à hauteur de 80.000 euros.

Par jugement contradictoire du 25 septembre 2017, le tribunal de commerce de Lyon a :

– dit que la société QLC, en recrutant M. [F], n’a commis aucune faute à l’égard de la société Debeaux,

– débouté la société Debeaux de l’ensemble de ses demandes,

– condamné la société Debeaux à verser à la société QLC la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que les dépens devront être supportés par la société Debeaux.

La société Debeaux a interjeté appel par acte du 2 octobre 2017.

Par arrêt du 5 septembre 2019, la cour d’appel de Lyon a, avant dire droit, sursis à statuer dans l’attente d’une décision irrévocable rendue à la suite de la saisine de la chambre sociale de cette cour sur appel du jugement du conseil de prud’hommes de Lyon du 12 octobre 2017, prononcé la radiation administration de l’affaire et dit que l’affaire sera remise à la diligence des parties sur justification de l’intervention de cette décision irrévocable.

Par arrêt du 13 mai 2020, la chambre sociale de la cour d’appel de Lyon a notamment confirmé le jugement du 12 octobre 2017 sauf à préciser que M. [F] doit restituer la somme de 3.187,59 euros en brut et sauf en ce qui concerne le montant de l’indemnité contractuelle et les dépens. Aucun pourvoi en cassation n’a été formé.

Par courrier du 13 juillet 2020, la société Debeaux a sollicité le report de l’affaire au rôle.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 25 février 2021 fondées sur les articles 1382 et suivants du code civil, la société Debeaux demande à la cour de :

– infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

– dire que la société QLC a violé la clause de non-concurrence contenue dans l’avenant au contrat de travail du 23 mars 2015 de M. [F],

– constater la commission d’actes de concurrence déloyale par la société QLC,

en conséquence,

– condamner la société QLC à lui payer la somme de 80.000 euros à titre de dommages-intérêts,

– condamner la société QLC à mettre un terme au contrat de travail de M. [F] dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, avec astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la signification,

– condamner la société QLC à publier à ses frais la décision à intervenir, dans le mois de sa signification au sein de la revenue l’Officiel des Transporteurs avec astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la signification,

– condamner la société QLC à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 15 janvier 2018 fondées sur les articles 1240 et suivants du code civil, la société QLC demande à la cour de :

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

– condamner la société Debeaux à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles en cause d’appel,

– condamner la même aux entiers dépens de l’instance avec droit de recouvrement.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 1 juillet 2021, les débats étant fixés au 24 mai 2023.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il est précisé que le litige n’est pas soumis au nouveau droit des contrats issu de l’ordonnance du 10 février 2016 puisque le contrat litigieux est antérieur au 1er octobre 2016.

Sur les actes de concurrence déloyale

La société Debeaux fait valoir sur le fondement de la responsabilité délictuelle que :

– elle était liée à M. [F] par un seul contrat de travail comportant depuis son avenant du 23 mars 2015 une clause de non concurrence ; par arrêt du13 mai 2020, la chambre sociale de la cour d’appel de Lyon a retenu la violation par M. [F] de sa clause de non concurrence en rejoignant les effectifs de la société QLC,

– la question du versement de la contrepartie financière de la clause de non concurrence est indifférente, mais elle a bien été versée à M. [F] mensuellement,

– la signature en connaissance de cause par un employeur d’un contrat de travail avec un salarié encore engagé aux termes d’un contrat avec un autre employeur est un acte de concurrence déloyale et le maintien du contrat de travail d’un salarié lié à son précédent employeur par une clause de non concurrence dont le nouvel employeur a connaissance est également un acte de concurrence déloyale,

– M. [F] a notifié sa démission le 11 février 2016, le préavis devant se terminer conformément à la convention collective le 11 mai 2016 ; soumise à la même convention collective, la société QLC ne pouvait pas l’ignorer et a donc volontairement embauché M. [F] pendant sa période de préavis le 4 avril 2016 ; par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 4 mai 2016, la société Debeaux a mis en demeure le nouvel employeur de cesser sa collaboration avec M. [F], ce qu’il n’a pas fait, caractérisant sa mauvaise foi et un acte de concurrence déloyale,

– la postériorité à l’embauche de la connaissance de la clause de non concurrence par le nouvel employeur est indifférente ; la société QLC avait connaissance de la clause de non concurrence liant M. [F] à son précédent employeur depuis la lettre recommandée qui lui avait été adressée le 4 mai 2016, puis la transmission du contrat de travail contenant la clause le 1er juin 2016 ; elle n’a néanmoins pas rompu le contrat de travail, caractérisant sa mauvaise foi et un acte de concurrence déloyale,

– M. [F] était également soumis par son contrat de travail à une clause de non sollicitation pour une durée d’un an à compter de son départ ; son nouvel employeur en avait connaissance ; la société QLC et M. [F] ont violé cette clause en tentant de débaucher le 2 novembre 2016 M. [R], ce qui constitue un acte de concurrence déloyale tant pour débauchage, dans un contexte de pénurie de personnel qualifié dans le secteur, que pour violation manifeste de la clause de non sollicitation.

La société QLC réplique que :

– M. [F] a notifié sa démission le 11 février 2016 ; la société Debeaux l’a ensuite licencié pour faute grave par lettre notifiée le 31 mars 2016 au lieu de simplement signifier la rupture de son préavis, ce qui implique la naissance d’un nouveau contrat de travail les liant après le 11 février 2016 ; ce nouveau contrat de travail ne contenait pas de clause de non concurrence, privant de fondement les demandes de la société Debeaux,

– à titre subsidiaire, la société Debeaux ne peut pas se prévaloir d’une clause de non concurrence dont elle n’a pas respecté les termes, soit le paiement de la contrepartie financière à la date convenue au mois d’avril 2016, et non le 11 mai 2016 ; M. [F] pouvait donc se considérer libéré de son obligation de non concurrence,

– également à titre subsidiaire, la preuve de sa connaissance, lors de l’embauche, de la clause de non concurrence liant M. [F] à son précédent employeur incombe à ce dernier qui ne la rapporte pas ; or, M. [F] a déclaré dans son contrat de travail conclu le 4 avril 2016 avec son nouvel employeur qu’il était ‘libre de toute obligation envers son précédent employeur’ ; la société QLC n’a appris l’existence de la clause de non concurrence litigieuse que le 10 mai 2016,

– concernant la sollicitation qu’elle conteste, elle relève que M. [R] n’est pas salarié de la société Debeaux, mais est selon son attestation salarié de la société TFM, filiale de la société Transalliance, depuis 2011, donc étranger aux parties ; la teneur du simple contact téléphonique n’est pas démontrée ; elle ignorait cet appel de M. [F] à M. [R] ; elle connaît personnellement M. [R] et n’avait donc pas besoin de l’entremise de M. [F].

En outre, elle conteste tout détournement du client ‘société CHEP’, qui était déjà indirectement l’un de ses clients et non un client exclusif de la société Debeaux ; le client CHEP n’était pas d’une importance stratégique pour la société Debeaux ; elle n’a pas débauché M. [F] dans un objectif de détournement de clientèle, preuve étant l’infériorité du salaire qu’elle lui verse par rapport à celui qu’il recevait de son précédent employeur.

Sur ce,

L’article 1382 ancien devenu 1240 du code civil dispose que : ‘Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.’

En l’espèce, l’avenant au contrat à durée indéterminée du 23 mars 2015 de M. [F] en son article 16B stipulait une clause de non concurrence limitée à une période de 6 mois et aux régions PACA et Rhône-Alpes à compter de la date de départ effectif du salarié avec versement en contrepartie d’une indemnité globale mensuelle égale à 25% de son salaire mensuel forfaitaire.

La violation de cette clause par M. [F] a été reconnue par une décision définitive puisque l’arrêt rendu en 2020 par la chambre sociale de la cour d’appel de Lyon qui a autorité de la chose jugée a admis la validité de la clause de non concurrence qui a pris effet le 31 mars 2016 et a retenu sa violation par M. [F].

L’argumentation de la société intimée sur l’existence d’un nouveau contrat de travail dénué d’une telle clause est dès lors totalement inopérante et il en est de même de son argumentation sur l’absence de validité de la clause, compte tenu des termes de la décision susvisée.

Le jugement du tribunal de commerce qui a fondé son argumentation sur l’absence de clause de non concurrence en raison de la ‘création’ d’un nouveau contrat de travail ne peut en conséquence qu’être infirmé.

Toutefois, la seule violation de la clause par le salarié n’implique pas à elle-seule la faute de la société QLC.

Il n’est pas contesté, de manière liminaire, que les deux sociétés exercent une activité de transport routier de marchandises et qu’elle se retrouvent dès lors en situation de concurrence.

La cour rappelle que commet une faute délictuelle l’employeur, qui, sciemment, recrute un salarié en pleine connaissance de l’obligation de non-concurrence souscrite par ce dernier au bénéfice de son ancien employeur, sans qu’il soit nécessaire d’établir à son encontre l’existence des man’uvres déloyales. Ainsi la seule connaissance de la situation du salarié suffit à établir l’existence de la concurrence déloyale.

Il résulte du contrat de travail du 4 avril 2016 liant M. [F] à la société Quality logistic cargo que le salarié a déclaré être libre de tout engagement envers son ancien employeur et la connaissance par ce nouvel employeur de la clause de non concurrence ne peut se déduire du seul fait que la convention collective applicable était la même que dans le précédent contrat de travail contrairement à ce qu’affirme l’appelante.

Par contre, il ressort des productions que la société Debeaux a avisé son adversaire de l’existence de cette clause par courrier du 4 mai 2016 et a remis ensuite, sur demande adverse, les justificatifs de sorte que l’intimée a ensuite sciemment maintenu le contrat de travail en violation de la clause malgré la preuve de la clause de non concurrence.

Or, il n’importe pas que l’employeur ait eu connaissance de la clause postérieurement à l’embauche et le maintien du contrat de travail en connaissance de cause constitue un acte de concurrence déloyale ; c’est vainement par ailleurs que la société intimée a opposé les arguments de son salarié sur un défaut de validité de la clause, alors que l’employeur ne l’avait pas levée et que celle-ci prenait effet immédiatement.

Par ailleurs, la société appelante ne se prévaut pas du détournement du client CHEP de sorte que les arguments de l’intimée à ce titre sont inopérants, l’appelante limitant son argumentation à la seule violation de la clause de non-concurrence ainsiq qu’à la violation d’une clause de non-sollicitation.

L’article 16A de l’avenant au contrat de travail du 23 mars 2015 de M. [F] stipule que :

‘NON SOLLICITATION.

M. [O] [F] s’interdit, pendant une période d’un (1) an à compter de la date de son départ effectif de la société :

– de proposer un emploi à toute personne qui était, au moment de ce départ effectif ou au cours des douze (12) mois précédents, un salarié de la Société DEBEAUX, ou de tenter, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, de persuader ou d’inciter cette personne à accepter un autre emploi ou à quitter la société DEBEAUX, d’embaucher, ou de faire embaucher par un tiers avec qui le Salarié est en relations d’affaires, toute personne qui était, au moment de ce départ effectif ou au cours des douze (12) mois précédents, un salarié de la Société DEBEAUX,

– de solliciter directement ou indirectement les fournisseurs de la Société, avec lesquels le Salarié était en relation d’affaires au moment de ce départ effectif ou au cours des douze (12) mois précédents.’

L’appelante se prévaut ainsi d’une attestation de M. [H] [R] faisant état d’un appel de M. [F] du 2 décembre 2016 avec proposition d’un déjeuner avec son patron, ce qui a été refusé par le témoin. Cette attestation est cependant inopérante en ce qu’il indique être salarié d’une société TFM, filiale de Transalliance depuis le 11 septembre 2011, ce qui n’établit aucun lien avec la société appelante, et ne détaille nullement les propos reçus dont la cour ne peut apprécier la pertinence.

En définitive, les faits de concurrence déloyale sont établis par l’embauche du salarié en violation de la seule clause de non-concurrence.

Sur le préjudice financier et les autres sanctions

La société Debeaux fait valoir que :

– M. [F] occupait un poste stratégique en son sein ; le risque de détournement de clientèle, d’autres salariés, de réseaux commerciaux ou de diffusion du savoir-faire de l’entreprise et de son organisation dans les six mois après son départ lui causent un préjudice particulièrement lourd pouvant affecter son chiffre d’affaires, dont elle demande réparation à hauteur de 80.000 euros de dommages et intérêts,

– le fondement illicite du contrat de travail de M. [F] le liant à la société QLC, ainsi que l’irrégularité des conditions de son embauche, doivent entraîner par application de l’adage ‘Fraus omnia corrumpit’ sa cessation immédiate sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 30e jour, quand bien même la période de six mois de non concurrence est révolue,

– la sanction de publicité de la décision aux frais de la société QLC dans la revue l’Officiel des Transporteurs apparaît justifiée dans ce secteur extrêmement concurrentiel.

La société QLC réplique que :

– la société Debeaux ne produit aucun élément de nature à justifier ni la réalité de son préjudice, ni son quantum,

– la clause de non concurrence étant convenue pour une durée de six mois à compter de la date de départ effectif de M. [F] de la société Debeaux, elle s’est donc éteinte au plus tard le 30 septembre 2016 ; aucune fraude de sa part n’a été démontrée ; par conséquent, la demande de rupture du contrat de travail est sans objet même si le contrat a été initialement conclu en fraude de la clause de non concurrence, la société intimée et M. [F] étant depuis plusieurs années libres d’être liés par un contrat de travail.

Sur ce,

La cour rappelle que la reconnaissance de l’existence de faits de concurrence déloyale implique l’existence d’un préjudice indemnisable.

En l’espèce, l’appelante demande de manière elliptique le paiement d’une somme de 80.000 euros en réparation de son préjudice sans produire d’éléments chiffrés sur son activité au cours de la période considérée.

M. [F] occupait un poste de directeur de l’agence de [Localité 3] (13) et assurait notamment la direction du site, son développement, le contrôle et l’animation des structures d’exploitation, affrètement, commercial du site. Ses fonctions le mettaient ainsi en contacte avec la clientèle et il avait accès au process de l’entreprise. Toutefois, la société appelante qui fait valoir un lourd préjudice et un chiffre d’affaires très fortement impacté ne rapporte pas la preuve de telles conséquences ni du montant qu’elle réclame.

Compte tenu de l’ensemble des éléments susvisés, la cour évalue le préjudice de l’appelante à la somme de 20.000 euros.

S’agissant des autres mesures sollicitées, celle visant à mettre fin au contrat n’est pas une sanction justifiée alors que les effets de la clause de non concurrence ont rapidement cessé et que le salarié et le nouvel employeur était libres d’être liés par un contrat de travail.

S’agissant de la demande de mesures de publicité de la décision, elles n’apparaissent pas être une sanction proportionnée aux faits de concurrence déloyale limités retenus dans le cadre du présent litige. Cette demande sera en conséquence rejetée.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Les dépens de première instance et d’appel sont à la charge de la société Quality logistic cargo qui versera à son adversaire une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile que l’équité commande de fixer à la somme de 7.000 euros pour l’ensemble de la procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de l’appel,

Infirme le jugement déféré dans sa totalité.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la société Quality logistic cargo a commis des actes de concurrence déloyale à l’encontre de la société Debeaux.

Condamne la société Quality logistic cargo à payer à la société Debeaux la somme de 20.000 euros en indemnisation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale.

Déboute la société Debeaux de ses demandes aux fins de condamner la société QLC à mettre un terme au contrat de travail de M. [F] dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir sus astreinte et à supporter des frais de publicité du présent arrêt.

Condamne la société Quality logistic cargo aux dépens de première instance et d’appel et à payer à la société Debeaux une indemnité de 7.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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