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L’élément de l’art antérieur n’est destructeur de nouveauté pour un brevet que s’il renferme tous les moyens techniques essentiels de l’invention dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique.
L’antériorité, qui est un fait juridique dont l’existence, la date et le contenu doivent être prouvés par tous moyens par celui qui l’invoque, doit être unique et être révélée dans un seul document dont la portée est appréciée globalement. Sa divulgation doit être certaine dans son objet et dans sa date.
En application de l’article L. 611-11 du code de la propriété intellectuelle, une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique, lequel est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet, en ce compris le contenu de demandes de brevets français, européen ou international désignant la France, qui ont une date de dépôt antérieure et qui n’ont été publiées qu’à une date postérieure.
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 1
ARRET DU 20 SEPTEMBRE 2023
(n°109/2023, 14 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 21/10148 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYQL
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2021 – Tribunal Judiciaire de Paris – 3ème chambre – 1ère section – RG n° 19/06012
APPELANTE
S.A.S. STANDARD FORMS FRANCE
Société au capital de 300 000 euros
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de TOURS sous le numéro 480 174 127
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151
Assistée de Me Jean-Pierre STOULS de la SELARL STOULS ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1141
INTIMEE
S.A.S. JAMET HOLDING
Société au capital de 382 041 euros
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés D’ANGERS sous le numéro 301 167 276
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Assistée de Me Justine JASNAULT substituant Me Anne-Laure LE BLOUC’H de la SELAS ORATIO AVOCATS, avocates au barreau d’ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 31 mai 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre et Déborah BOHÉE, conseillère chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.
Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre
Mme Françoise BARUTEL, conseillère
Mme Déborah BOHÉE, conseillère.
Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON
ARRÊT :
Contradictoire
par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DES FAITS ET DU LITIGE
La société JAMET HOLDING ( ci-après société JAMET), constituée en 1974, exerce une activité d’agence de publicité, elle conçoit et fabrique des supports de communication dédiés aux entreprises, la publicité sur les lieux de vente (PLV) étant sa principale activité, notamment dans le secteur automobile.
La société JAMET fait valoir qu’elle est titulaire du brevet français n°01 16102 déposé à l’INPI le 13 décembre 2001 et délivré le 12 mars 2004 intitulé « Dispositif de présentation d’informations », qui porte sur un panneau de présentation d’informations techniques et commerciales destiné au secteur automobile, permettant de proposer à la vente des véhicules neufs ou d’occasion par l’accrochage d’une pancarte sur le pare-soleil et/ou le rétroviseur intérieur des véhicules au sein de laquelle est insérée une affichette technique.
La société JAMET affirme qu’une société concurrente, la société STANDARD FORMS FRANCE ( ci-après société STANDARD FORMS), commercialisait sur son site internet un produit dénommé « porte-affichette VN/VO » qui reproduirait, selon elle, l’ensemble des caractéristiques des revendications de son brevet.
Par courrier recommandé avec demande d’avis de réception du 13 mai 2018, la société JAMET a mis en demeure la société STANDARD FORMS de cesser la commercialisation de ces porte-affichettes.
Elle a fait constater la vente de ces produits sur le site internet de la société STANDARD FORMS selon procès verbal du 21 novembre 2018.
Cette mise en demeure n’ayant été suivie d’aucun effet, la SAS JAMET a, par acte d’huissier du 24 avril 2019, fait assigner la société STANDARD FORMS devant le tribunal judiciaire de Paris, en contrefaçon de brevet.
Dans un jugement rendu le 20 mai 2021, dont appel, le tribunal judiciaire de Paris a :
– débouté la SAS STANDARD FORMS FRANCE de sa demande reconventionnelle de nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 du brevet FR 01 16102 ;
– dit qu’en commercialisant des porte-affichettes VN/VO, référencés M7731, la SAS STANDARD FORMS FRANCE a commis des actes de contrefaçon par reproduction des revendications 1,2,3,4,5,6 et 7 du brevet FR 01 16102 au préjudice de la SAS JAMET ;
– fait interdiction à la SAS STANDARD FORMS FRANCE d’importer, fabriquer, faire fabriquer, commercialiser, offrir à la vente et vendre tout produit reproduisant les revendications 1, 2,3,4,5,6 et 7 du brevet FR 01 16102, sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée, ladite astreinte commençant à courir quinze jours après la signification du jugement, et pour une durée de six mois ;
– ordonné, aux frais de la SAS STANDARD FORMS FRANCE le retrait des circuits commerciaux des porte-affichettes VN/VO, référencés M7731, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de quinze jours à compter de la signification du jugement, ainsi que la destruction de ces produits, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à compter du jour où le jugement aura acquis force de chose jugée ;
– ordonné à la SAS STANDARD FORMS FRANCE de communiquer à la SAS JAMET, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, l’astreinte prenant effet quinze jours à compter de la signification de la présente décision, et pendant six mois, tous les éléments comptables et financiers, certifiés par un expert-comptable, relatifs aux volumes des ventes des porte-affichettes VN/VO référencés M7731, et aux chiffres d’affaires, les marges brutes et les bénéfices réalisés du fait de la vente de ces produits, pour la période d’avril 2002 au jour du jugement,
– dit que le tribunal se réserve la liquidation des astreintes ;
– condamné la SAS STANDARD FORMS FRANCE à payer à la SAS JAMET 5.000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation définitive de son préjudice matériel et moral imputable à la contrefaçon ;
– renvoyé les parties à la détermination amiable du préjudice subi par la SAS JAMET sur la base des éléments comptables communiqués et à défaut par voie judiciaire après nouvelle assignation ;
– dit n’y avoir lieu à publication judiciaire ;
– condamné la SAS STANDARD FORMS FRANCE aux dépens ;
– condamné la SAS STANDARD FORMS FRANCE à payer à la SAS JAMET 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
– ordonné l’exécution provisoire du jugement, sauf en ce qui concerne la mesure de destruction.
La société STANDARD FORMS a interjeté appel de ce jugement le 31 mai 2021.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 25 février 2022, par lesquelles la société SAS STANDARD FORMS, appelante et intimée incidente, demande à la cour de:
Vu les dispositions des articles L613-3 et L615-1 du code de la propriété intellectuelle,
– faire droit à l’appel principal de la SAS STANDARD FORMS FRANCE ;
– infirmer le jugement du 20 mai 2021 en ce qu’il :
– déboute la SAS STANDARD FORMS FRANCE de sa demande reconventionnelle de nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 du brevet FR 01 16102 ;
– dit qu’en commercialisant des portes affichettes VN/VO, référencés M7731, la SAS STANDARD FORMS FRANCE a commis des actes de contrefaçon par reproduction des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 du brevet FR 01 16102 au préjudice de la SAS JAMET ;
– fait interdiction à la SAS STANDARD FORMS FRANCE d’importer, fabriquer, faire fabriquer, commercialiser, offrir à la vente et vendre tout produit reproduisant les revendications 1, 2,3,4,5,6 et 7 du brevet FR 01 16102, sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée, ladite astreinte commençant à courir quinze jours après la signification du jugement, et pour une durée de six mois ;
– ordonne, aux frais de la SAS STANDARD FORMS FRANCE le retrait des circuits commerciaux des porte-affichettes VN/VO, référencés M7731, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de quinze jours à compter de la signification du jugement, ainsi que la destruction de ces produits, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à compter du jour où le jugement aura acquis force de chose jugée ;
– ordonne à la SAS STANDARD FORMS FRANCE de communiquer à la SAS JAMET, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, l’astreinte prenant effet quinze jours à compter de la signification de la présente décision, et pendant six mois, tous les éléments comptables et financiers, certifiés par un expert-comptable, relatifs aux volumes des ventes des porte-affichettes VN/VO référencés M7731, et aux chiffres d’affaires, les marges brutes et les bénéfices réalisés du fait de la vente de ces produits, pour la période d’avril 2002 au jour du jugement ;
– dit que le présent tribunal se réserve la liquidation des astreintes ;
– condamne la SAS STANDARD FORMS FRANCE à payer à la SAS JAMET 5.000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation définitive de son préjudice matériel et moral imputable à la contrefaçon ;
– renvoie les parties à la détermination amiable du préjudice subi par la SAS JAMET sur la base des éléments comptables communiqués et à défaut par voie judiciaire après nouvelle assignation ;
– condamne la SAS STANDARD FORMS FRANCE aux dépens ;
– condamne la SAS STANDARD FORMS FRANCE à payer à la SAS JAMET 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– déboute la société STANDARD FORMS FRANCE du surplus de ses demandes.
Statuant à nouveau,
– débouter la SAS JAMET de toutes ses prétentions comme irrecevables et mal fondées ;
– prononcer la nullité du brevet 01 16102 et en toutes ses revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 ;
– constater que la SAS STANDARD FORMS n’a commis aucun acte de contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7 du brevet 01 16102 par fabrication et / ou détention et / ou exploitation, et / ou offre à la vente et / ou commercialisation d’un dispositif reproduisant les caractéristiques couvertes par lesdites revendications ;
– débouter en conséquence la SAS JAMET de toutes ses demandes au titre de la contrefaçon ;
– autoriser la SAS STANDARD FORMS à publier l’arrêt à intervenir dans cinq journaux ou périodiques de leur choix, aux frais de la SAS JAMET et fixer à 3.000 euros le coût de chaque insertion ;
– débouter la SAS JAMET de son appel incident ;
– subsidiairement, débouter intégralement la SAS JAMET de toutes ses prétentions indemnitaires comme injustifiées ;
– condamner la SAS JAMET à payer à la SAS STANDARD FORMS la somme de 20.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile;
– condamner la SAS JAMET en tous les dépens dont distraction au profit de Maître Edmond FROMANTIN Avocat, sur son affirmation de droit.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 29 mars 2022, par lesquelles la société SAS JAMET HOLDING, intimée et appelante incidente, demande à la cour de:
Vu les articles L611-10 et suivants et L615-1 du code de la propriété intellectuelle
Vu le jugement rendu le 20 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris (RG 19/06012)
– confirmer le jugement rendu le 20 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il a :
– débouté la SAS STANDARD FORMS FRANCE de sa demande reconventionnelle de nullité des revendications 1,2,3,4,5,6 et 7 du brevet FR 01 16102 ;
– dit qu’en commercialisant des porte-affichettes VN/VO, référencés M7731, la SAS STANDARD FORMS FRANCE a commis des actes de contrefaçon par reproduction des revendications 1,2,3,4,5,6 et 7 du brevet FR 01 16102 au préjudice de la SAS JAMET ;
– ordonné, aux frais de la SAS STANDARD FORMS FRANCE le retrait des circuits commerciaux des porte-affichettes VN/VO, référencés M7731, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de quinze jours à compter de la signification du jugement, ainsi que la destruction de ces produits, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à compter du jour où le jugement aura acquis force de chose jugée ;
– condamné la société STANDARD FORMS FRANCE à verser à la société JAMET une somme de 10 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance ;
-infirmer le jugement rendu le 20 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il a :
– fait interdiction à la SAS STANDARD FORMS d’importer, fabriquer, faire fabriquer, commercialiser, offrir à la vente et vendre tout produit reproduisant les revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 du brevet FR 01 16102, sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée, ladite astreinte commençant à courir quinze jours après la signification du jugement, et pour une durée de six mois, mais seulement en ce qu’il a limité la durée de l’astreinte à six mois ;
– ordonné à la SAS STANDARD FORMS de communiquer à la SAS JAMET, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, l’astreinte prenant effet quinze jours à compter de la signification de la présente décision, et pendant six mois, tous les éléments comptables et financiers, certifiés par un expert-comptable, relatifs aux volumes des ventes des porte-affichettes VN/VO référencés M7731, et aux chiffres d’affaires, les marges brutes et les bénéfices réalisés du fait de la vente de ces produits, pour la période d’avril 2002 au jour du jugement mais seulement en ce qu’il a limité la durée de l’astreinte à six mois ;
– condamné la SAS STANDARD FORMS à payer la SAS JAMET 5.000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation définitive de son préjudice matériel et moral imputable à la contrefaçon ;
– renvoyé les parties à la détermination amiable du préjudice subi par la SAS JAMET sur la base des éléments comptables communiqués et à défaut par voie judiciaire après nouvelle assignation;
– dit n’y avoir lieu à publication judiciaire, ;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes mais seulement lorsqu’il déboute la société JAMET de ses demandes ;
Et statuant à nouveau,
– faire interdiction à la société STANDARD FORMS, directement ou indirectement par toute personne physique ou morale interposée, de fabriquer, faire fabriquer, présenter, vendre offrir à la vente, utiliser, importer, détenir, tout produit objet du brevet n° 01 16102 et ce sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée passé un délai de 15 jours à compter de la signification dudit jugement ;
– ordonner la confiscation et la destruction de tous les produits contrefaisants et ce sous astreinte de 500 € par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la signification dudit jugement ;
– dire et juger que la cour se réservera la liquidation de ces astreintes ;
– condamner la société STANDARD FORMS à verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice économique par subi par la société JAMET ;
– dire et juger que ce préjudice sera fixé à dire d’expert ;
– en conséquence, désigner tel expert il plaira à la présente juridiction, lequel recevra pour mission :
‘ d’entendre les parties et tout sachant ;
‘ de se faire remettre par les parties l’ensemble des éléments comptables, financiers et états des ventes, outre toutes pièces qu’il estimera utiles ;
‘ de déterminer l’entier préjudice subi par la société JAMET du fait des actes de contrefaçon dont elle est victime, intégrant le manque à gagner et la perte soufferts par la victime mais aussi les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que la société STANDARD FORMS a retirés de la contrefaçon ;
‘ de donner à la cour tous les éléments lui permettant de se prononcer sur l’entier préjudice subi par la société JAMET ;
– dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise, condamner la société STANDARD FORMS FRANCE à verser à la société JAMET, à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice économique, une somme qui ne saurait être inférieure à celle de 40.000 € ;
– condamner la société STANDARD FORMS à verser à la société JAMET, en réparation du préjudice moral qu’elle a subi, une somme qui ne saurait être inférieure à celle de 30.000 € ;
– ordonner la publication de la décision à intervenir dans cinq revues ou journaux professionnels ou non, aux frais de la société STANDARD FORMS, le coût de chaque insertion ne pouvant excéder la somme de 3.000 € ;
– débouter la société STANDARD FORMS de toutes ses prétentions contraires ;
– condamner la société STANDARD FORMS à verser à la société JAMET la somme de 20.000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– la condamner aux entiers dépens d’appel.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées.
Présentation du brevet
Il résulte de la description du brevet qu’il concerne «un dispositif de présentation d’informations du type constitué d’un panneau et d’au moins un organe de suspension ou d’accrochage du panneau à un support de nature quelconque, tel que le rétroviseur intérieur d’un véhicule, l’organe de suspension ou d’accrochage et le panneau étant obtenus par découpage d’un flan unique.»
Le brevet rappelle que l’art antérieur concerne des dispositifs de ce type appelés ‘panneaux-cintres’, largement utilisés dans le domaine de l’automobile, ces dispositifs étant constitués d’un simple panneau surmonté d’un crochet s’étendant dans le même plan que le panneau, le panneau étant généralement accroché à l’intérieur du véhicule sur l’organe de liaison du rétroviseur intérieur au pare-brise.
Rappelant qu’il est demandé aujourd’hui, par les utilisateurs, la possibilité de fixer un tel dispositif sur la bordure supérieure d’un pare-soleil pour permettre le plaquage du dispositif contre le pare-brise, le brevet indique que le but de l’invention est de proposer un dispositif de présentation d’informations obtenu par découpage d’un flan unique, dont la conception permet indifféremment la fixation du dispositif de manière amovible, notamment sur un pare-soleil et/ou sur le rétroviseur intérieur d’un véhicule, par la présence, sur le panneau, de deux organes de suspension, séparés l’un de l’autre par un encochage.
Les revendications du brevet sont les suivantes :
1. Dispositif (1) de présentation d’informations, du type constitué d’un panneau (2) et d’au moins un organe (3) de suspension ou d’accrochage du panneau (2) à un support (5) de nature quelconque, tel que le rétroviseur intérieur d’un véhicule, l’organe (3) de suspension ou d’accrochage et le panneau (2) étant obtenus par découpage d’un flan unique, caractérisé en ce que le dispositif (1) comporte, ménagé sur un même bord du panneau (2), au moins deux organes (3) de suspension séparés l’un de l’autre par un encochage (4) pour permettre indifféremment la fixation de manière amovible du dispositif (1) notamment à un pare-soleil ou au rétroviseur intérieur d’un véhicule.
2. Dispositif selon la revendication 1, caractérisé en ce que chaque organe (3) de suspension affecte la forme d’une gouttière dont la concavité est agencée pour s’appliquer à un recouvrement partiel le long d’un bord du support (5), tel que la bordure du rétroviseur ou du pare-soleil.
3. Dispositif selon la revendication 2, caractérisé en ce que le fond de l’encochage (4) est situé à un niveau sensiblement inférieur au bord (3A) libre de chaque gouttière formant organe (3) de suspension.
4. Dispositif selon l’une des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que chaque organe (3) de suspension affecte la forme d’un U renversé obtenu par pliage ou formage du flan.
5. Dispositif selon l’une des revendications 1 à 4, caractérisé en ce que le panneau (2) est formé de deux volets dont l’un est muni des organes (3) de suspension ou d’accrochage, lesdits volets étant reliés entre eux par une ligne (6) de pliage pour former une chemise de protection d’une fiche informative insérée entre lesdits volets.
6. Dispositif selon les revendications 1 à 5, caractérisé en ce que le flan est en un matériau transparent.
7. Dispositif selon l’une des revendications 1 à 6, caractérisé en ce que le flan est en un matériau imprimable et/ou effaçable à l’eau.
Sur la nullité du brevet FR 01 1602
La société STANDARD FORMS soutient que le brevet opposé est nul pour défaut de nouveauté et oppose à ce titre une première antériorité constituée par le porte affichette prétendu contrefacteur du brevet FR 01 16102 qui constitue, selon elle, une divulgation antérieure au 13 décembre 2001, date de dépôt dudit brevet, puisqu’il est visible dans son catalogue de prix au 1er janvier 2002 et qu’il est indiqué dans la lettre du fabricant VISUAL COMMUNICATION dudit dispositif M7731 en date du 5 mars 2002 une nouvelle tarification de ce dispositif, ce qui suppose donc qu’il y avait bien un précédent tarif, à tout le moins en 2001. Elle ajoute qu’il est attesté par M. [Z] [I], ancien gérant de la société VISUAL COMMUNICATION, que le produit ou support référencé M7731 visible dans le constat de JAMET a été commercialisé en 2000 de sorte qu’elle apporte une preuve certaine de la divulgation du dispositif antérieurement au 13 décembre 2001 et que le tribunal n’aurait pas dû l’écarter. Elle précise opposer, en cause d’appel, une nouvelle antériorité de toutes pièces, soit un porte affichette n° 1101059/11 10 60 commercialisé par la société de droit allemande AHB à tout le moins depuis 1997 comme en atteste son catalogue, soit 4 ans minimum avant le dépôt du brevet de la société JAMET, de nature à détruire la nouveauté du brevet 01 16102, et dans tous les cas, de nature à détruire l’activité inventive dudit brevet.
La société JAMET conteste les deux antériorités qui sont opposées au titre du prétendu défaut de nouveauté de son brevet. Elle constate que ce n’est qu’à compter du mois d’avril 2002, soit plusieurs mois après le dépôt du brevet en cause, que la société STANDARD FORMS a mis en vente le «présentoir affichette VN/VO» qui constitue, en outre, la copie conforme de son dispositif de sorte que l’appelante ne justifie pas de ce que son dispositif d’affichage était accessible au public et, partant, compris dans l’état de la technique avant le mois d’avril 2002, date à laquelle elle l’a affiché pour la première fois dans son catalogue. Elle retient que l’absence d’identification formelle du produit litigieux ou d’éléments de preuve corroborant les dires de M. [I], ancien gérant de la société VISUEL COMMUNICATION et fournisseur de STANDARD FORMS, permettent de douter de l’exactitude des faits énoncés dans l’attestation qui lui est opposée et qu’en tout état de cause, comme le tribunal l’a indiqué dans sa décision, ce témoignage est contredit par les mentions présentés dans le catalogue de l’appelante d’avril 2002 présentant la référence M7731 comme une «nouveauté 2002».
S’agissant du porte-affichette de la société AHB, le société JAMET soutient qu’il ne constitue pas une antériorité de toutes pièces, le produit étant décrit comme une« pochette pour affiche pour miroir intérieur » soit destiné au seul support constitué par un rétroviseur intérieur, alors que son dispositif est conçu pour une fixation sur tout support, tel que la bordure supérieure du rétroviseur mais, aussi, celle du pare-soleil et destiné à l’y maintenir, plaqué contre la vitre du véhicule. Elle en déduit que le dispositif de la société AHB ne répond pas à la toute première revendication du brevet n° FR 01 16102 alors qu’elle constitue la plus forte expression du caractère inventif du dispositif breveté et que cette antériorité ne peut être retenue car ne divulguant aucunement les caractéristiques de l’invention opposée. Elle en conclut que son brevet ne peut être annulé pour défaut de nouveauté.
En application de l’article L. 611-11 du code de la propriété intellectuelle, une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique, lequel est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet, en ce compris le contenu de demandes de brevets français, européen ou international désignant la France, qui ont une date de dépôt antérieure et qui n’ont été publiées qu’à une date postérieure.
Il s’ensuit que l’élément de l’art antérieur n’est destructeur de nouveauté que s’il renferme tous les moyens techniques essentiels de l’invention dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique : l’antériorité, qui est un fait juridique dont l’existence, la date et le contenu doivent être prouvés par tous moyens par celui qui l’invoque, doit être unique et être révélée dans un seul document dont la portée est appréciée globalement. Sa divulgation doit être certaine dans son objet et dans sa date.
Le brevet FR 01 16102 ayant été déposé le 13 décembre 2001, l’état de la technique à prendre en considération doit être antérieur à cette date.
La société STANDARD FORMS oppose en premier lieu à titre d’antériorité le porte affichette référencé VN/VO M7731 argué de contrefaçon qui constitue, selon elle, une divulgation antérieure au 13 décembre 2001.
Cependant, comme l’ont constaté les premiers juges, ce dispositif n’a été proposé à la vente pour la première fois par la société STANDARD FORMS que dans son catalogue d’avril 2002 et est présenté d’ailleurs à ce titre comme une «nouveauté 2002». Ainsi, il ne figure sur aucun des catalogues antérieurs de l’appelante.
En outre, si ce catalogue mentionne des tarifs au 1er janvier 2002, il n’est nullement justifié que ce catalogue aurait été mis à la disposition du public avant le mois d’avril 2002.
La société STANDARD FORMS se prévaut également d’une attestation de M. [Z] [I], ancien gérant de la société VISUAL COMMUNICATION, datée du 10 janvier 2020, aux termes de laquelle il déclare avoir vendu à la société STANDARD FORMS dans l’année 2000 un produit référencé M7731, conforme à celui figurant dans le procès verbal de constat établi par la société JAMET, qui faisait, selon lui, partie de la gamme de sa société depuis de nombreuses années.
Cependant, cette attestation à elle seule, non corroborée par tout autre élément attestant de la divulgation de ce produit au public, ne peut suffire à caractériser l’existence d’une antériorité de toute pièce susceptible de détruire la nouveauté du brevet en cause. En outre, en tout état de cause, si M. [I] affirme avoir vendu ce produit à la société STANDARD FORMS en 2000, il n’a cependant été proposé à la vente qu’à compter d’avril 2002 par celle-ci, ce qui conduit à relativiser la portée de ses propos. Enfin, il n’est produit aucun document commercial de la société VISUAL COMMUNICATION attestant de cette divulgation antérieure, ni davantage de la commercialisation ou de la diffusion auprès du public de ce produit par des concurrents de la société STANDARD FORMS pour les années 2000 ou 2001.
Il n’est donc pas justifié de ce que ce produit a été rendu accessible au public avant la date du dépôt du brevet opposé.
C’est en conséquence, à juste titre, que le tribunal a considéré que ce produit ne pouvait constituer une antériorité de toute pièce susceptible de détruire la nouveauté du brevet opposé par la société JAMET.
En cause d’appel, la société STANDARD FORMS oppose une nouvelle antériorité constituée par un porte affichette référencé 1101059/11 10 60 commercialisé par la société allemande AHB depuis 1997.
Il n’est pas contesté par la société JAMET que le produit ainsi opposé a bien été divulgué antérieurement au 13 décembre 2001, ayant été proposé à la vente dans un catalogue daté de 1997.
Cependant, comme le relève la société JAMET, la présentation commerciale du produit permet de constater que ce porte-affichette est destiné à une suspension sur un rétroviseur intérieur et non à un pare-soleil. En outre, la comparaison entre le présentoir breveté et le produit commercialisé par la société AHB permet de retenir que, s’ils sont constitués identiquement d’un panneau en plastique transparent découpé dans un flanc unique muni de deux organes de suspension, leur conception diffère en ce que la partie destinée à l’accrochage dans le produit AHB ne se situe pas dans le prolongement / la continuité de la face destinée à la présentation des documents, le panneau ayant fait l’objet d’un pliage entre cette face destinée à la présentation et la partie destinée à l’accrochage, à la différence du produit breveté dont le dispositif de fixation se situe sur le même flanc que la partie destinée à présenter les informations. Or, ces différences de conception influent sur l’aspect, l’utilisation et la destination possible de ces produits et n’aboutissent pas, ainsi, au même résultat technique tel que revendiqué dans la partie descriptive du brevet, soit la fixation du dispositif de présentation d’informations sur la bordure supérieure d’un pare-soleil pour permettre le placage de ce dispositif contre le pare-brise.
Ainsi, si le dispositif en cause comporte deux organes de suspension séparés l’un de l’autre par un encochage, il ne permet pas, conformément à la revendication 1 du brevet, «indifféremment
1: Mise en gras ajoutée par la cour.
la fixation de manière amovible du dispositif notamment à un pare-soleil ou au rétroviseur intérieur du véhicule».
De même, le dispositif de la société AHB n’antériorise pas la revendication 2 qui décrit un «Dispositif selon la revendication 1, caractérisé en ce que chaque organe de suspension affecte la forme d’une gouttière dont la concavité est agencée pour s’appliquer à un recouvrement partiel le long d’un bord du support, tel que la bordure du rétroviseur ou du pare-soleil», le pliage de la bordure portant l’organe de suspension ne permettant pas cette agencement le long d’un pare-soleil.
La revendication 3 dépendante de la revendication 2 n’est pas davantage antériorisée par ce dispositif.
Il en est de même des revendications 4 à 7 dépendantes de la revendication 1, outre que la revendication 5 n’est nullement reproduite, puisque le dispositif commercialisé par la société AHB n’est pas constitué par une ligne de pliage mais par deux lignes de pliage.
En conséquence, faute pour le dispositif AHB de renfermer tous les moyens techniques essentiels de l’invention dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique, il ne peut constituer une antériorité de toute pièce de nature à détruire la nouveauté du brevet opposé.
Si, dans ses conclusions (bas de la page 15), la société STANDARD FORMS soutient que ce dispositif est « dans tous les cas, de nature à détruire l’activité inventive dudit brevet», force est de constater que cette prétention n’est étayée ni en droit ni en fait, l’appelante n’arguant ni ne démontrant que l’invention opposée est dépourvue d’activité inventive comme découlant d’une manière évidente de l’état de la technique, pour un homme du métier qui n’est au demeurant pas défini, examen auquel la cour ne peut se livrer d’office, sauf à violer le principe du contradictoire.
En conséquence, c’est à juste titre que le tribunal a débouté la société STANDARD FORMS de sa demande reconventionnelle en nullité du brevet, le jugement déféré étant confirmé de ce chef.
Sur la contrefaçon
La société STANDARD FORMS soutient essentiellement que la société JAMET ne démontre pas que toutes les revendications de son brevet sont contrefaites par le porte-affichette qu’elle a commercialisé rappelant qu’elle ne peut, pour cela, essayer de faire passer le préambule des revendications du brevet pour des parties caractérisantes susceptibles de protection et donc susceptibles d’être contrefaites. Elle ajoute que le procès-verbal de constat du 21 novembre 2018 ne permet pas de vérifier quels sont les moyens techniques caractérisant le porte-affichette argué de contrefaçon.
La société JAMET soutient que le produit distribué par la société STANDARD FORMS reprend l’ensemble des revendications énoncées par le brevet n° 01 16102, comme cela ressort du constat d’huissier, portant sur le modèle produit, mais aussi des propres pièces de la société STANDARD FORMS, de sorte que les faits de contrefaçon sont constitués.
L’article L.615-1 du code de la propriété intellectuelle prévoit que : ‘Toute atteinte portée aux droits du propriétaires du brevet, tels qu’ils sont définis aux articles L.613-3 à L.613-6 constitue une contrefaçon. La contrefaçon engage la responsabilité de son auteur.’
En outre, l’article L.613-3 du code de la propriété intellectuelle dispose : ‘Sont interdites à défaut du consentement du propriétaire du brevet :
a) La fabrication, l’offre, la mise dans le commerce, l’utilisation ou bien l’importation ou la détention aux fins précitées du produit objet du brevet ;
b) L’utilisation d’un procédé objet du brevet ou, lorsque le tiers sait ou lorsque les circonstances rendent évident que l’utilisation du procédé est interdite sans le consentement du propriétaire du brevet, l’offre de son utilisation sur le territoire français ;
c) L’offre, la mise dans le commerce ou l’utilisation ou bien l’importation ou la détention aux fins précités du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet.’
En l’espèce, il résulte du procès verbal de constat internet établi le 21 novembre 2018 à la requête de la société JAMET que sur le site marchand exploité par la société STANDARD FORMS a été mis en vente un porte affichette «VN/VO M7731» présenté comme un modèle multi-fonctions à accrocher au rétroviseur ou au pare-soleil d’un véhicule. Il a en outre été procédé à l’acquisition de ce dispositif le 9 novembre 2018, un exemplaire original ayant été remis à la cour.
Or, l’examen de ce porte affichette permet de constater qu’il reproduit l’ensemble des revendications du brevet FR 01 16102.
Il s’agit en effet, comme l’a justement constaté le tribunal, d’un dispositif de présentation d’informations, constitué d’un panneau et d’au moins un organe de suspension ou d’accrochage du panneau à un support, cet organe et le panneau étant obtenus par découpage d’un flan unique, ce dispositif comportant, sur un même bord du panneau, deux organes de suspension séparés par un encochage pour permettre la fixation du dispositif de manière amovible sur l’un des composants du véhicule, pare-soleil ou rétroviseur intérieur (revendication 1). Chaque organe de suspension présente la forme d’une gouttière dont la concavité est agencée pour s’appliquer à un recouvrement partiel le long d’un bord du support, tel que la bordure du rétroviseur ou du pare-soleil (revendication 2), le fond de l’encochage étant situé à un niveau inférieur au bord libre de chaque gouttière (revendication 3), tandis que chaque organe de suspension présente la forme d’un U renversé obtenu par pliage ou formage du flan (revendication 4). Le panneau est formé de deux volets dont l’un est muni des organes de suspension ou d’accrochage, lesquels sont reliés entre eux par une ligne de pliage pour former une chemise de protection d’une fiche informative insérée entre les volets (revendication 5). Enfin, le flan, constitué d’un matériau transparent (revendication 6), est imprimable et/ou effaçable à l’eau (revendication 7).
Il y a seulement lieu, pour la cour, d’ajouter que la société STANDARD FORMS elle-même oppose le dispositif qu’elle a commercialisé comme antériorité de toute pièce du brevet opposé, de sorte qu’elle apparaît mal fondée à plaider l’absence de contrefaçon de ce dispositif.
Par conséquent, la société STANDARD FORMS FRANCE a commis des actes de contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 du brevet FR 01 16102 et le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
Sur le préjudice de la société JAMET
La société STANDARD FORMS estime que la société JAMET n’a fourni aucun élément attestant de son prétendu préjudice alors que le dispositif incriminé est commercialisé au prix de 8 euros et ne peut justifier les réclamations indemnitaires exorbitantes formulées. Elle retient qu’en tout état de cause le tribunal ne pouvait lui ordonner de communiquer tous les éléments comptables et financiers, certifiés par un expert-comptable, pour la période d’avril 2002 au jour du jugement, soit une période en partie couverte par la prescription quinquennale.
La société JAMET revendique d’abord un préjudice économique suite à la commercialisation par la société STANDARD FORMS de produits copiant ses produits brevetés à un prix inférieur. Elle ajoute qu’en faisant l’économie des frais de recherche et en profitant d’une politique commerciale qu’elle a développée, la société STANDARD FORMS a bénéficié d’une compétitivité indue. Elle souligne que la communication de pièces ordonnées par le tribunal n’a été que partiellement satisfaite, la société STANDARD FORMS ne communiquant ses chiffres que pour une période de cinq ans, en invoquant une prescription qui n’est pas applicable selon elle. Elle ajoute que cette contrefaçon commise par un concurrent direct sur un secteur restreint dévalorise son image de marque et les efforts qu’elle déploie en matière de conception, de recherche, d’innovation et de développement.
En vertu de l’article L.615-7 du code de la propriété intellectuelle, «Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.»
Et selon l’article L. 615-7-1 du même code, « En cas de condamnation civile pour contrefaçon, la juridiction peut ordonner, à la demande de la partie lésée, que les produits reconnus comme produits contrefaisants et les matériaux et instruments ayant principalement servi à leur création ou fabrication soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement de ces circuits, détruits ou confisqués au profit de la partie lésée.
La juridiction peut aussi ordonner toute mesure appropriée de publicité du jugement, notamment son affichage ou sa publication intégrale ou par extraits dans les journaux ou sur les services de communication au public en ligne qu’elle désigne, selon les modalités qu’elle précise.
Les mesures mentionnées aux deux premiers alinéas sont ordonnées aux frais du contrefacteur.»
Sur ce, il convient de constater qu’en dehors de sa plaquette tarifaire au 1er janvier 2018, la société JAMET ne verse aux débats aucune pièce financière ou comptable attestant du volume de ses ventes ou de la marge réalisée sur les produits protégés par le brevet.
La société STANDARD FORMS a, quant à elle, communiqué une attestation de son expert comptable reprenant les volumes vendus du dispositif contrefaisant depuis cinq années avant l’assignation, soit d’avril 2015 à avril 2019, soit 21.941 produits, achetés pour un prix de 65.013,99€, générant un chiffre d’affaires de 187.611€, soit une marge brute de 65,3%, et un bénéfice net de 7.100,37€.
La société JAMET ne démontre nullement que la commercialisation de ce dispositif s’est poursuivie après la délivrance de l’assignation et ne peut être suivie quand elle revendique un préjudice courant depuis 2002, date de la première commercialisation de ce dispositif par la société STANDARD FORMS, la demande de brevet n’ayant été rendue publique que le 20 juin 2003. En outre, il ressort des pièces versées aux débats que la société STANDARD FORMS, qui n’est pas le fabricant du produit, n’a eu connaissance de l’existence du brevet qu’à la réception de la lettre de mise en demeure adressée par la société JAMET le 13 mai 2018.
Il doit également être tenu compte du nombre conséquent de produits commercialisés, à un prix moindre, ventes qui ont nécessairement contribué à dévaloriser les produits commercialisés par la société JAMET, concurrente directe, sur un marché restreint, soit celui de la vente de PLV pour le secteur automobile.
Aussi, tenant compte distinctement des conséquences économiques négatives de la contrefaçon subies par la société JAMET, du préjudice moral subi mais aussi des bénéfices réalisés par le contrefacteur, la cour dispose d’éléments suffisants pour apprécier les préjudices économique et moral ainsi subis par la société STANDARD FORMS qui seront justement réparés par l’octroi, à titre définitif, d’une somme de 20.000€, sans qu’il n’y ait lieu d’ordonner une expertise.
En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce sens.
Au vu des faits de contrefaçon ainsi retenus, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a fait interdiction à la société STANDARD FORMS la poursuite des actes en cause et a ordonné le retrait des circuits commerciaux de ces portes affichettes VN/VO référencés M7731, sans qu’il n’y ait lieu de modifier la durée de l’astreinte, la société JAMET ne démontrant nullement que les faits de contrefaçon se sont poursuivis.
Il n’y a pas lieu à ce que la cour se réserve la liquidation de l’astreinte.
Le préjudice étant ainsi suffisamment réparé, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de publication présentée, le jugement querellé étant confirmé de ce chef.
Sur la demande reconventionnelle de la société STANDARD FORMS
La société STANDARD FORMS qui succombe dans ses prétentions doit être déboutée de sa demande tendant à voir publier la présente décision.
Sur les autres demandes
La société STANDARD FORMS, succombant, sera condamnée aux dépens d’appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés à l’occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
Enfin, l’équité et la situation des parties commandent de condamner la société STANDARD FORMS à verser à la société JAMET une somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a :
– condamné la SAS STANDARD FORMS FRANCE à payer à la SAS JAMET 5.000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation définitive de son préjudice matériel et moral imputable à la contrefaçon ;
– renvoyé les parties à la détermination amiable du préjudice subi par la SAS JAMET sur la base des éléments comptables communiqués et à défaut par voie judiciaire après nouvelle assignation,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la société JAMET HOLDING de sa demande d’expertise,
Condamne la société STANDARD FORMS à verser à la société JAMET HOLDING une somme de 20.000€ en réparation définitive de ses préjudices matériel et moral résultant de la contrefaçon,
Dit qu’il n’y a pas lieu à ce que la cour se réserve la liquidation de l’astreinte,
Déboute la société STANDARD FORMS FRANCE de sa demande publication de la présente décision,
Condamne la société STANDARD FORMS FRANCE aux dépens d’appel,
Condamne la société STANDARD FORMS FRANCE à verser à la société JAMET HOLDING une somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE