Jeux et Paris > Litiges : 17 novembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/09941

·

·

Jeux et Paris > Litiges : 17 novembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/09941
Ce point juridique est utile ?

17 novembre 2022
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
19/09941

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT AU FOND

DU 17 NOVEMBRE 2022

N° 2022/ 281

Rôle N° RG 19/09941 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BEOWG

Société civile SOFICOMA

C/

Société d’Economie Mixte LA FRANCAISE DES JEUX

LA REPUBLIQUE FRANCAISE

AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Joseph MAGNAN

Me Maud DAVAL-GUEDJ

Me Eric SEMELAIGNE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 23 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2017F01139.

APPELANTE

Société civile SOFICOMA prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 2]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Mathieu POINTUD, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

La Française des Jeux société anonyme représentée par son président directeur général, dont le siège est sis [Adresse 3]

représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Me Vanessa BENICHOU, avocat au barreau de PARIS, et Me Daniel VILLEY, avocat au barreau de PARIS

La République Francaise représentée par l’Agence des Participations de l’Etat sise [Adresse 1]

représenté et assistée de Me Eric SEMELAIGNE, avocat au barreau de MARSEILLE

L’Agent Judiciaire de l’Etat, domicilié [Adresse 4]

représenté et assisté de Me Eric SEMELAIGNE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 04 Octobre 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laure BOURREL, Président

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président

Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022,

Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

À l’époque des faits à l’origine de la présente instance, la société La Française des jeux (FDJ) était une société anonyme d’économie mixte détenue à hauteur de 72% par l’Etat.

Son capital était fermé, sa détention étant réservée à certaines catégories d’actionnaires énumérées à l’article 2 des statuts comme étant :

– l’Etat,

– les associations d’anciens combattants, oeuvres ou sociétés mutuelles à but social ainsi que toutes personnes physiques ou morales autorisées à émettre des représentations de dixièmes de billets de la Loterie nationale,

– un ou plusieurs fonds communs de placements dont les parts sont exclusivement réservées aux personnes physiques ayant la qualité de salariés de la FDJ (…),

– une société civile ou commerciale dont le capital sera détenu exclusivement par des personnes physiques ou morales ayant la qualité de courtiers mandataires, agréés par la FDJ,

– les personnes n’appartenant pas aux catégories précédentes, que l’assemblée générale nomme en qualité d’administrateurs et pour la durée du mandat.

Les courtiers mandataires constituaient une partie du réseau de distribution des jeux commercialisés par la FDJ.

Rassemblés au sein de la société Soficoma, ils détenaient 3% du capital de la FDJ et étaient liés à la FDJ par un contrat.

L’évolution contentieuse des relations entre la FDJ et les courtiers mandataires a conduit la FDJ à résilier l’ensemble des contrats par lettres du 22 mai 2014, avec un préavis de 18 à 30 mois selon l’ancienneté du courtier mandataire, les derniers préavis ayant pris fin le 21 novembre 2016, date à laquelle la société Soficoma ne comptait plus aucun courtier mandataire.

L’article 15 b) des statuts de la FDJ stipulait que :

‘La détention des actions de la société étant exclusivement réservée aux personnes visées à l’article 2 des présents statuts, pour le cas où un actionnaire viendrait à ne plus remplir les conditions de capacité visées audit article 2, il s’oblige irrévocablement, dès la constatation par le conseil d’administration de la société de la perte de ces conditions de capacité, à céder immédiatement ses actions dans les conditions ci-après.

Le conseil d’administration est tenu, dans les trois mois de la constatation de la perte par un actionnaire des conditions de capacité visées à l’article 2 des statuts, de faire racheter les actions par une ou plusieurs personnes désignées par lui, moyennant un prix fixé chaque année par l’assemblée générale ordinaire et qui ne peut être inférieur à la valeur nominale des titres augmentée de leur part dans les réserves nettes constatées par le bilan de l’année écoulée.’

Le 15 décembre 2016, le conseil d’administration de la FDJ a constaté la perte par la société Soficoma des conditions prévues à l’article 2 des statuts et décidé de faire acquérir les actions de cette société par la FDJ au prix déterminé par l’assemblée générale des actionnaires du 25 mai 2016 dans un délai maximum de trois mois, soit pour un prix total de 15 647 940 euros.

La société Soficoma a fait connaître son refus de céder ses titres, invoquant la nullité de l’article 15 b) des statuts.

Par courrier du 16 mars 2017, la FDJ a mis en demeure la société Soficoma de lui communiquer les coordonnées du compte bancaire à créditer du prix de cession et de lui retourner l’ordre de mouvement dûment complété et signé.

Le 18 mai 2017, face au refus réitéré de la société Soficoma, la FDJ a consigné le prix de cession à la caisse des dépôts et consignation suivant signification du 22 mai 2017.

Par acte du 23 mai 2017, la FDJ a fait assigner la société Soficoma devant le tribunal de commerce de Marseille aux fins de faire constater la perte par cette dernière de sa qualité d’actionnaire et d’être autorisée à faire retranscrire la cession à son profit des 6000 titres de Soficoma.

La société Soficoma s’est opposée aux demandes et a fait assigner en intervention forcée par acte du 10 janvier 2018 la République française, représentée par l’agence des participations de l’Etat, en annulation des décisions des assemblées générales des 27 mai 2015, 25 mai 2016 et 15 juin 2017 pour abus de droit de vote et subsidiairement en indemnisation de son préjudice résultant de la cession de ses actions à un prix inférieur à leur valeur.

Par jugement du 23 mai 2019, le tribunal de commerce de Marseille a joint les instances et a :

– constaté la perte par la société Soficoma des conditions de capacité pour demeurer actionnaire de la société La Française des jeux compte tenu de la résiliation des contrats de courtier-mandataire intervenue le 22 mai 2014 et de l’expiration du dernier préavis le 21 novembre 2016,

– vu l’article 15 b) des statuts de la société La Française des jeux, dit et jugé que la société Soficoma était tenue de céder les 6000 actions à la société La Française des jeux au prix de

15 647 940 euros dans le délai de trois mois suivant la réunion du conseil d’administration de la société La Française des jeux du 15 décembre 2016 ayant constaté la perte de ses conditions de capacité pour demeurer actionnaire de la société La Française des jeux,

– déclaré valable l’engagement de cession contenu dans les statuts de la société La Française des jeux,

– constaté la perte par la société Soficoma de sa qualité d’actionnaire de la société La Française des jeux à compter de la date de consignation des fonds auprès de la caisse des dépôts et consignations soit à compter du 18 mai 2017,

– autorisé la société La Française des jeux à retranscrire dans ses registres le transfert par la société Soficoma à la Française des jeux de ces 6000 actions,

– pris acte de l’intervention volontaire de l’agent judiciaire de l’Etat et reçu cette intervention,

– débouté la société Soficoma de toutes ses demandes, fins et conclusions formulées à l’encontre de l’agent judiciaire de l’Etat,

– condamné la société Soficoma à payer à la société La Française des jeux la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Soficoma à payer à l’agent judiciaire de l’Etat la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Soficoma aux dépens,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

– rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du jugement.

Le tribunal a retenu à cet effet :

– sur la qualification juridique de l’article 15 b) de la FDJ :

que la clause ne désigne aucun bénéficiaire et n’a pour seul objet que de retirer la qualité d’actionnaire à celui ne remplissant plus les conditions pour le demeurer, et non de transférer un patrimoine entre un cédant et un cessionnaire ; qu’elle stipule une double obligation, l’actionnaire ayant perdu sa qualité s’obligeant à vendre et la société s’obligeant à racheter les titres lorsque les conditions sont réunies ; que l’article 15 b) ne peut donc être qualifié de promesse unilatérale de vente ; que la clause répond au contraire à la définition d’une clause d’éviction ;

– sur le caractère irrévocable de l’obligation de cession :

qu’en acquérant les actions de la FDJ la société Soficoma a adhéré aux statuts qu’elle a signés; qu’elle est tenue par toutes les clauses statutaires qui s’imposent à elle ; que la clause existait dès la création de la société ; que la société Soficoma s’est irrévocablement obligée à céder immédiatement ses actions dès la constatation par le conseil d’administration de la perte de ses conditions de capacité ;

– sur la prétendue renonciation par la FDJ à la mise en oeuvre de l’article 15 b) des statuts :

que la société Soficoma fait valoir que la FDJ s’est abstenue, pour des raisons politiques, de faire application de l’article 15b) des statuts à l’égard des émetteurs de billets qui avaient perdu leur capacité à être actionnaire depuis 2008 et qu’en procédant ainsi, la FDJ a renoncé sans équivoque à la mise en oeuvre de l’article 15 b) ;

que cependant le conseil d’administration et l’assemblée générale de la FDJ n’ont jamais constaté que les émetteurs de billets avaient perdu leur autorisation d’émettre et ont justifié leur maintien au capital par des motifs précis ; que la FDJ a analysé le statut des émetteurs de billets et effectué un acte positif en s’interrogeant sur le bien-fondé du maintien de cette catégorie d’actionnaire dans son capital au regard de l’article 15 b) des statuts ; qu’elle a ainsi démontré sa volonté de faire application des dispositions statutaires, de même que dans ses échanges avec la société Soficoma ; que la renonciation au bénéfice d’une clause d’un contrat ne se présume pas ; qu’une simple abstention ou inaction ne saurait caractériser une renonciation non équivoque ;

– sur la perte par la société Soficoma des conditions de capacité pour demeurer actionnaire :

que par application des articles 2 et 15 b) des statuts, la société Soficoma a perdu ses conditions de capacité pour demeurer actionnaire à la fin des derniers préavis de résiliation des contrats, marquant la fin du statut de courtier mandataire ;

– sur l’obligation de cession des 6000 actions détenues par la société Soficoma :

que conformément aux dispositions de l’article 1134 ancien du code civil, les termes des statuts lient les associés entre eux, revêtent une force obligatoire et doivent recevoir effet ;

que le prix de vente fixé découle de la formule de calcul prévue à l’article 15 b) et de la valorisation de l’action résultant de la 4ème résolution de l’assemblée générale mixte eu 25 mai 2016 et des délibérations du conseil d’administration du 15 décembre 2016 ;

que la société Soficoma est en conséquence dans l’obligation de céder ses actions pour le prix de 15 647 940 euros ;

– sur le bien-fondé de la consignation du prix d’acquisition entre les mains de la CDC :

qu’après mise en demeure du 16 mars 2017 et notification par la société Soficoma de son refus de céder ses titres la FDJ a versé le montant du prix de cession des titres à la CDC le 18 mai 2017 soit à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la mise en demeure, satisfaisant ainsi à son obligation de payer le prix des actions conformément aux dispositions de l’article 1345-1 du code civil ;

– sur la nullité alléguée de l’engagement de cession en raison de la dépendance de son exécution à la réalisation d’une condition purement potestative :

que la FDJ est une société d’économie mixte disposant d’un statut particulier compte tenu de son objet social et de son actionnariat ; que la société Soficoma a signé les statuts en ayant pleinement connaissance que la perte du statut de courtier mandataire l’évincerait de l’actionnariat ; que la perte de cette capacité pouvait découler de la fin des contrats de courtier mandataire à l’initiative de la FDJ mais également des courtiers mandataires ; que l’article 2 des statuts n’est en conséquence pas une clause potestative ;

– sur la nullité alléguée de l’engagement de cession pour indétermination du prix :

qu’aux termes de l’article 15 b) des statuts le transfert des titres intervient ‘moyennant un prix fixé chaque année par l’assemblée générale ordinaire et qui ne peut être inférieur à la valeur nominale des titres augmentée de leur part dans les réserves nettes constatées par le bilan de l’année écoulée’ ; que la société Soficoma a voté annuellement jusqu’en 2014 la valeur de l’action ainsi déterminée ; que le prix de vente découle de la formule de calcul résultant de la 4ème résolution de l’assemblée générale mixte du 25 mai 2016 et est repris par décision du conseil d’administration du 15 décembre 2016 ;

que l’article 1591 du code civil invoqué par la société Soficoma ne trouve pas à s’appliquer, la clause visée relevant d’un régime juridique propre, celui des cessions forcées d’origine légale ou statutaire prévue à l’article 1843-4 du code civil, auquel renvoie l’article L.227-18 du code de commerce ;

que le prix de cession est déterminé non pas arbitrairement mais par la collectivité des actionnaires selon une méthode de calcul objective définie par les statuts et une valorisation de l’action approuvée annuellement par l’assemblée générale ;

– sur l’illégalité alléguée de la décision du conseil d’administration de la FDJ du 15 décembre 2016 :

que l’article 15 b) des statuts confère au conseil d’administration la mission de constater la perte de la qualité d’actionnaire et de faire procéder au rachat de titres sous condition à la valeur fixée par l’assemblée générale ; que l’article 15 a) prévoit le rachat des titres par la société ; que compte tenu du caractère fermé du capital de la FDJ, le rachat des titres par des tiers non actionnaires est statutairement impossible ; que l’assemblée générale mixte du 18 juin 2018 dans sa 9ème résolution a régularisé a posteriori les actes passés par le conseil d’administration à l’unanimité des actionnaires, concernant le rachat des titres Soficoma ;

– sur l’abus du droit de vote reproché à l’Etat français :

que les décisions prises par l’assemblée générale concernant la fixation du prix des actions n’ont pas impacté le fonctionnement de la société ni nui a son image ou à sa valeur ; qu’elles ne sont pas contraires à l’intérêt social et à l’intérêt des minoritaires ; qu’elles résultent de la stricte application des statuts ; que la Soficoma a toujours approuvé annuellement cette méthode de valorisation jusqu’en 2014 et que ce même calcul a servi de base lorsqu’elle a acquis ses actions; que la preuve de l’abus de majorité n’est pas rapportée ; que la société Soficoma doit être déboutée de ses demandes en annulation de l’assemblée générale et en dommages et intérêts.

La société Soficoma a interjeté appel de cette décision le 20 juin 2019.

Par conclusions déposées et notifiées le 2 septembre 2022, la société Soficoma demande à la cour, vu les articles 1174, 1591, 1843-4, 1240 du code civil, L.225-35, L.225-96 et L.225-205 et suivants du code de commerce, de :

– Réformer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Marseille en ce qu’il a :

– dit et jugé que la société Soficoma était tenue de céder les 6000 actions à la société La Française des jeux au prix de 15 647 940 euros dans le délai de trois mois suivant la réunion du conseil d’administration de la société La Française des jeux du 15 décembre 2016 ayant constaté la perte de ses conditions de capacité pour demeurer actionnaire de la société La Française des jeux,

– constaté la perte la société Soficoma de sa qualité d’actionnaire de la société La Française des jeux à compter de la date de consignation des fonds auprès de la caisse des dépôts et consignations soit à compter du 18 mai 2017,

– autorisé la société La Française des jeux à retranscrire dans ses registres le transfert par la société Soficoma à la Française des jeux de ces 6000 actions,

– débouté la société Soficoma de toutes ses demandes, fins et conclusions formulées à l’encontre de l’agent judiciaire de l’Etat,

– condamné la société Soficoma à payer à la société La Française des jeux la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Soficoma à payer à l’agent judiciaire de l’Etat la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Soficoma aux dépens,

– rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du jugement,

Et, statuant à nouveau :

À l’encontre de La Française Des Jeux, de :

– Rejeter l’ensemble des demandes de la société La Française des Jeux,

– Juger que les statuts de La Française Des Jeux n’autorisent pas, dans le cadre de la mise en ‘uvre de l’article 15 b), le conseil d’administration à faire racheter par La Française Des Jeux

ses propres actions,

– Juger qu’aucun texte législatif ou réglementaire n’autorise le conseil d’administration de La

Française Des Jeux à faire racheter par cette dernière ses propres actions dans le cadre de la mise en ‘uvre de l’article 15 b),

– Juger que la décision de l’assemblée générale du 18 juin 2018, prise aux termes de sa neuvième

résolution, ne ratifie pas, ni explicitement ni implicitement la décision du conseil d’administration du 15 décembre 2016,

– Juger que la décision de l’assemblée générale du 18 juin 2018 n’autorise pas le conseil

d’administration à procéder au rachat par La Française Des Jeux de ses propres actions de manière rétroactive,

– Juger qu’aucune décision de l’assemblée générale de La Française Des Jeux n’autorise le conseil d’administration à acheter un nombre déterminé d’actions en vue de les annuler,

– Juger que le conseil d’administration de La Française Des Jeux n’avait ni le pouvoir ni la compétence pour prendre la décision de faire racheter par La Française des Jeux ses propres

actions,

– Juger que les vices entachant la décision du conseil d’administration de La Française Des Jeux

ne sont pas régularisables,

– Juger, en conséquence, que la décision du conseil d’administration de La Française Des Jeux

du 15 décembre 2016 est inopposable à Soficoma en raison du défaut de pouvoir et de compétence du conseil d’administration pour adopter une telle décision,

– Juger, en conséquence, que Soficoma n’est pas tenue de céder à La Française Des Jeux les actions qu’elle détient au capital de cette dernière,

– Juger que le délai fixé par l’article 15 b) pour que le conseil d’administration désigne

valablement un acquéreur éligible des titres détenus par Soficoma est arrivé à son terme le 15 mars 2017,

– Juger que, dans ce délai, le conseil d’administration n’a pas désigné d’acquéreur autorisé à détenir des actions de la société La Française Des Jeux,

– Juger, en conséquence, que la faculté de désigner un acquéreur des titres détenus par

Soficoma ne peut être mise en ‘uvre en raison de la forclusion résultant de l’intervention du terme du délai de trois mois prévu pour procéder à une telle désignation,

– Juger, en conséquence, qu’aucun actionnaire existant ni aucune personne autorisée à détenir

des actions de La Française Des Jeux ne peut plus être désigné par le conseil d’administration

en raison de l’écoulement du délai prévu par une telle désignation,

– Juger, en conséquence, que l’engagement de Soficoma de vendre ses actions à un prix fixé par l’assemblée générale à une personne désignée par le conseil d’administration est caduc depuis le 15 mars 2017,

– Juger, en conséquence, que Soficoma demeure actionnaire de La Française Des Jeux et ne peut plus faire l’objet de la mise en ‘uvre de l’article 15 b) des statuts,

– Juger, en outre, que la décision de l’assemblée générale de la FDJ du 4 novembre 2019 a, en

tout état de cause, régularisé la situation de Soficoma en supprimant l’article 15 b) des statuts;

– Débouter La Française Des Jeux de l’ensemble de ses demandes,

À défaut, de :

– Juger que l’article 1843-4 dans sa version antérieure au 3 août 2014 est applicable à l’article 15 b) des statuts de la Française des Jeux,

– Juger que l’article 15 b) des statuts de La Française Des Jeux ne prévoit pas de méthode de calcul du prix de vente des actions, et que le prix de cession visé par l’article 15 b) des statuts est indéterminable,

– Dire et juger qu’en application des dispositions de l’article 1843-4 dans sa version postérieure

au 3 août 2014, le prix de vente des actions de Soficoma ne peut être déterminé qu’à dire d’expert,

– Débouter La Française Des Jeux de l’ensemble de ses demandes,

En tout état de cause, de :

– Rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires,

– Condamner la société La Française des Jeux à payer à la société civile Soficoma la somme de 20000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la société La Française des Jeux aux entiers dépens.

À l’encontre de la République Française, dans l’hypothèse où la cour ferait droit aux demandes de la société La Française Des Jeux, de :

– Juger que La République Française a abusé de son droit de vote lors du vote des résolutions n° 4 des assemblées générales des 27 mai 2015, 25 mai 2016 et 15 juin 2017,

– Juger, en conséquence, que sont nulles les décisions de l’assemblée générale de la société La Française des Jeux adoptées aux titres des résolutions n° 4 des assemblées générales des 27 mai 2015, 25 mai 2016 et 15 juin 2017,

– Ordonner, en conséquence, la convocation d’une nouvelle assemblée générale en vue de voter sur une résolution fixant la valeur de l’action La Française des Jeux,

– Au préalable, désigner un mandataire aux fins de voter en lieu et place de La République Française à l’assemblée générale ainsi convoquée,

– Au préalable, désigner tel expert qu’il plaira afin de procéder à l’évaluation des actions composant le capital de la société La Française des Jeux,

– Juger que le fait pour Soficoma de vendre sa participation au capital de La Française Des Jeux à un prix décoté de 85 % par rapport à la valeur vénale cause un préjudice à Soficoma,

– Condamner La République Française à réparer l’intégralité du préjudice résultant de la cession

par Soficoma de ses actions dans le capital de la société La Française des Jeux à un prix inférieur à leur valeur vénale ;

– Désigner tel expert qu’il plaira afin de procéder à l’évaluation des titres de la société La Française des Jeux et constater le préjudice subi par Soficoma imputable à La République

Française ;

En tout état de cause :

– Rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires,

– Condamner La République Française à payer la somme de 15000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner La République Française aux entiers dépens.

Par conclusions déposées et notifiées le 22 septembre 2022, la Française des jeux demande à la cour, vu les articles 1345 et 1345-1 du code civil, les articles 2 et 15 b) des statuts de FDJ dans leur rédaction en vigueur avant le 4 novembre 2019, de :

– Débouter la société Soficoma de l’ensemble de ses prétentions et demandes ;

– Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 23 mai 2019 en ce qu’il a :

– jugé que la société Soficoma était tenue de céder ses 6000 actions à FDJ au prix de

15 647 940 euros dans le délai de trois mois suivant la réunion du conseil d’administration de FDJ du 15 décembre 2016 ;

– constaté la perte par la société Soficoma de sa qualité d’actionnaire de FDJ à compter de la date de consignation des fonds auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations, soit à compter du 18 mai 2017 ;

– autorisé FDJ à retranscrire dans ses registres le transfert, par la société Soficoma, à FDJ, de ces 6000 actions ;

– condamné la société Soficoma à payer à FDJ la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Y ajoutant, condamner la société Soficoma à verser à FDJ la somme de 60000 euros sur le

fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– La condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions déposées et notifiées le 9 mars 2022, l’Agent judiciaire de l’Etat et la République française représentée par l’Agence des participations de l’Etat demandent à la cour de :

– Mettre hors de cause la République française représentée par l’Agence des participations de l’Etat en application de l’article 38 de la loi du 3 avril 1955,

– Confirmer le jugement entrepris,

À titre principal,

– Dire et juger que l’Etat français n’a commis aucun abus de majorité,

À titre subsidiaire,

– Dire et juger que l’Etat français n’a commis aucune faute au sens de l’article 1240 du code civil,

– Dire et juger que Soficoma n’a subi aucun préjudice dans la fixation du prix de ses actions FDJ,

En tout état de cause,

– Débouter Soficoma de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– Condamner Soficoma à payer la somme de 3000 euros à l’Agence des participations de l’Etat au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner Soficoma à payer à l’agent judiciaire de l’Etat la somme de 10000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner Soficoma aux dépens soustraits au profit de Maître Eric Semelaigne sur son affirmation de droit.

La procédure a été clôturée le 27 septembre 2022.

MOTIFS :

La société Soficoma ne conteste pas qu’à la suite de la résiliation de l’ensemble des contrats des courtiers mandataires et à la date d’expiration du dernier préavis le 21 novembre 2016, son capital n’était plus détenu par des courtiers mandataires de sorte qu’elle ne remplissait plus les conditions édictées par l’article 2 des statuts de la FDJ, en vigueur à cette date, pour être actionnaire de cette société.

L’article 15 b) des statuts de la FDJ était rédigé comme suit :

‘La détention des actions de la société étant exclusivement réservée aux personnes visées à l’article 2 des présents statuts, pour le cas où un actionnaire viendrait à ne plus remplir les conditions de capacité visées audit article 2, il s’oblige irrévocablement, dès la constatation par le conseil d’administration de la société de la perte de ces conditions de capacité, à céder immédiatement ses actions dans les conditions ci-après.

Le conseil d’administration est tenu, dans les trois mois de la constatation de la perte par un actionnaire des conditions de capacité visées à l’article 2 des statuts, de faire racheter les actions par une ou plusieurs personnes désignées par lui, moyennant un prix fixé chaque année par l’assemblée générale ordinaire et qui ne peut être inférieur à la valeur nominale des titres augmentée de leur part dans les réserves nettes constatées par le bilan de l’année écoulée.’

La nullité de l’engagement de cession ainsi stipulé n’est plus soutenue, dans ses dernières écritures, par la société Soficoma, qui ne remet pas non plus en cause le caractère irrévocable de l’engagement de cession ainsi contracté par chaque actionnaire.

Ainsi que l’a retenu à juste titre le tribunal, la clause stipulée à l’article 15 b) n’a pour seul objet que de retirer la qualité d’actionnaire à celui ne remplissant plus les conditions pour le demeurer, et non de transférer un patrimoine entre un cédant et un cessionnaire, aucun bénéficiaire n’étant précisément désigné et aucun dispositif d’option d’achat n’étant évoqué.

Elle organise un mécanisme d’éviction d’un actionnaire découlant de la survenance d’un événement objectif. Elle s’analyse ainsi en une clause d’éviction et non pas en une promesse unilatérale de vente.

La société Soficoma n’est donc pas fondée à soutenir que son engagement de cession en cas de perte des conditions de capacité énoncées à l’article 2 est une promesse de vente dont l’option ne peut être levée que pendant une période déterminée à peine de caducité.

Aux termes du second alinéa de l’article 15 b) le conseil d’administration est tenu, dans les trois mois de la constatation de la perte par un actionnaire des conditions de capacité visées à l’article 2 des statuts, de faire racheter les actions par une ou plusieurs personnes désignées par lui.

Les statuts mettent ainsi à la charge du conseil d’administration une obligation de résultat.

Compte tenu du bref délai imparti, du fait que le cessionnaire désigné ne peut être que l’une des personnes visées à l’article 2 et de l’absence d’obligation pour ces personnes d’accepter d’acquérir les actions de l’actionnaire disqualifié, le conseil d’administration peut être amené à faire racheter les actions par la société elle-même, ce qui n’est pas expressément exclu par l’article 15 b) et ne contrevient pas à l’article 2 puisqu’une telle acquisition ne peut être réalisée qu’à charge pour la société de céder ou annuler ces actions.

Le fait que l’achat par la SA FDJ de ses propres actions intervienne dans ce cas hors le cadre défini par les articles L225-206 I à L.225-217 du code de commerce ne constitue pas une cause de nullité de la décision du conseil d’administration ou de la cession dont les effets sont maintenus, mais oblige la société, en application de l’article L.225-14, à céder les actions dans le délai d’un an à compter de leur acquisition et à défaut de les annuler à l’expiration de ce délai.

Or la société FDJ s’est conformée aux dispositions précitées puisque l’assemblée générale extraordinaire a voté le 18 juin 2018, sous la condition suspensive qu’il soit fait droit aux demandes de la FDJ dans le cadre de la présente instance, l’annulation des actions acquises de la société Soficoma et la réduction corrélative de capital.

La société Soficoma n’est pas fondée en ses moyens tendant à lui faire déclarer inopposable la décision du conseil d’administration du 15 décembre 2016.

Sera également écarté l’argument selon lequel l’éviction prévue à l’article 15 b) des statuts n’aurait aucun caractère automatique puisque la FDJ se serait sciemment abstenue d’en faire application à l’égard d’une autre catégorie d’actionnaires, les anciens émetteurs de dixièmes de billets de loterie, ayant perdu les conditions de capacité énoncées à l’article 2.

Le caractère impératif de la clause d’éviction résulte des termes mêmes de l’article 15 b) des statuts et s’impose à la société elle-même.

Le fait que les anciens émetteurs de dixièmes de billets n’ont pas fait l’objet de la procédure d’éviction lorsqu’ils ont cessé leur activité résulte du fait que la perte par cette catégorie d’actionnaires des conditions de capacité visées à l’article 2 des statuts était sujette à débats ainsi qu’il résulte des procès-verbaux de délibération du conseil d’administration des 15 octobre et 17 décembre 2008, et n’a donc pas été constatée par le conseil d’administration.

La société Soficoma, dont la perte des conditions de capacité est au contraire évidente et non contestée, ne saurait se prévaloir de ce cas particulier pour échapper à l’application de la clause d’éviction.

L’article 15 b) des statuts et la décision du conseil d’administration du 15 décembre 2016 ont valablement produit effet à l’égard de la société Soficoma qui a définitivement perdu sa qualité d’actionnaire à la date de consignation du prix de cession, et ne saurait se prévaloir d’un quelconque effet rétroactif à son égard de la modification des statuts de la FDJ intervenue en 2019.

C’est par ailleurs à tort que la société appelante soutient que l’article 15 b) des statuts de la FDJ ne prévoit pas de méthode de calcul du prix de vente des actions, que le prix de cession visé par l’article 15 b) des statuts est indéterminable et ne pouvait être déterminé qu’à dire d’expert en application des dispositions de l’article 1843-4 du code civil.

Il sera précisé que la cession litigieuse étant intervenue après l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, et les effets légaux d’un contrat étant régis par la loi en vigueur à la date où ils se produisent, la version de l’article 1843-4 applicable est celle issue de cette ordonnance et non pas la version antérieure.

Il résulte des termes de l’article 1843-4 II, que le recours à expert pour déterminer la valeur des droits sociaux n’est prévu, dans les cas où les statuts prévoient la cession des droits sociaux d’un associé ou le rachat de ces droits par la société, que lorsque leur valeur n’est ni déterminée, ni déterminable.

Selon l’article 15 b), les titres de l’actionnaire évincé sont cédés moyennant un prix fixé chaque année par l’assemblée générale ordinaire et qui ne peut être inférieur à la valeur nominale des titres augmentée de leur part dans les réserves nettes constatées par le bilan de l’année écoulée, cette stipulation précise permettant de déterminer le prix de cession contrairement à ce qu’affirme l’appelante.

Le conseil d’administration a ainsi fixé le prix de rachat des actions de la société Soficoma à la somme de 2607,99 euros par action, correspondant au prix fixé par l’assemblée générale du 25 mai 2016 dans sa 4ème résolution adoptée dans ces termes :

‘conformément à l’article 15 des statuts, l’assemblée générale ordinaire fixe la valeur de l’action à 2607,99 euros avant distribution des dividendes, sur la base des capitaux propres de la Française des Jeux figurant au bilan de l’exercice clos le 31 décembre 2015, corrigés de la charge d’impôts future sur les provisions réglementées.’

La FDJ produit le détail du calcul de la valeur de l’action, telle que retenue par l’assemblée générale du 25 mai 2016, qui s’établit comme suit :

– capital social : 76 400 000

– réserve légale : 7 640 000

– réserve statutaire : 138 996 272, 42

– réserve facultative : 104 998 923,25

– résultat de l’exercice : 139 625 795,16

– provisions réglementées nettes de la charge d’impôt future : 87 010 675,14 – 33 064 056,55

=> base valeur de l’action avant distribution : 521 597 609, 42 euros pour 200 000 actions (soit 2607,99 euros par action).

Elle produit également l’extrait du bilan 2015 justifiant de l’exactitude des montants ci-dessus retenus.

Elle souligne que l’assemblée générale se prononçait chaque année sur le prix de l’action en se conformant à la méthode décrite dans les statuts et indépendamment de tout éventuel processus d’éviction.

Le prix fixé par le conseil d’administration dans sa décision du 15 décembre 2016 n’est en conséquence pas sérieusement contestable.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a dit et jugé que la société Soficoma était tenue de céder les 6000 actions à la société La Française des jeux au prix de 15 647 940 euros dans le délai de trois mois suivant la réunion du conseil d’administration de la société La Française des jeux du 15 décembre 2016 ayant constaté la perte de ses conditions de capacité pour demeurer actionnaire de la société La Française des jeux, constaté la perte la société Soficoma de sa qualité d’actionnaire de la société La Française des jeux à compter de la date de consignation des fonds auprès de la caisse des dépôts et consignations soit à compter du 18 mai 2017, autorisé la société La Française des jeux à retranscrire dans ses registres le transfert par la société Soficoma à la Française des jeux de ces 6000 actions.

Aux termes de l’article 38 de la loi n°55-366 du 3 avril 1955, toute action portée devant les tribunaux de l’ordre judiciaire tendant à faire déclarer l’Etat créancier ou débiteur pour des causes étrangères à l’impôt et au domaine doit, sauf exception prévue par la loi, être intentée à peine de nullité par ou contre l’agent judiciaire de l’Etat.

La société Soficoma a fait assigner en première instance la République française, représentée par l’agence des participations de l’Etat.

Malgré l’intervention volontaire, devant le tribunal de commerce de Marseille, de l’agent judiciaire de l’Etat afin de régularisation de la procédure irrégulièrement introduite par la société Soficoma à l’encontre d’une partie dépourvue du pouvoir de représenter l’Etat français, et malgré le rappel par les premiers juges du mandat exclusif de l’agent judiciaire de l’Etat, la société Soficoma a persisté dans son action mal dirigée en intimant devant la cour d’appel, outre l’agent judiciaire de l’Etat, la République française représentée par l’agence des participations de l’Etat.

Il sera fait droit à la demande de mise hors de cause présentée par cette partie.

La société Soficoma demande à la cour de juger que La République française a abusé de son droit de vote lors du vote des résolutions n° 4 des assemblées générales des 27 mai 2015, 25 mai 2016 et 15 juin 2017 et de juger en conséquence que ces décisions sont nulles.

Les résolutions incriminées sont les suivantes :

– AGO du 27 mai 2015 :

Conformément à l’article 15 des statuts, l’assemblée générale ordinaire fixe la valeur de l’action à 2521,37 euros avant distribution des dividendes, sur la base des capitaux propres de la Française des jeux figurant au bilan de l’exercice clos le 31 décembre 2014, corrigés de la charge d’impôt future sur les provisions réglementées.

– AGO du 25 mai 2016 :

Conformément à l’article 15 des statuts, l’assemblée générale ordinaire fixe la valeur de l’action à 2607,99 euros avant distribution des dividendes, sur la base des capitaux propres de la Française des jeux figurant au bilan de l’exercice clos le 31 décembre 2015, corrigés de la charge d’impôt future sur les provisions réglementées.

– AGO du 15 juin 2017 :

Conformément à l’article 15 des statuts, l’assemblée générale ordinaire fixe la valeur de l’action à 2274,39 euros avant distribution des dividendes, sur la base des capitaux propres de la Française des jeux figurant au bilan de l’exercice clos le 31 décembre 2016, corrigés de la charge d’impôt future sur les provisions réglementées.

Il appartient à la société Soficoma de démontrer qu’en votant ces résolutions, le représentant de l’Etat a porté atteinte à l’intérêt social et agi dans l’unique dessein de favoriser la majorité au détriment des associés minoritaires.

Ainsi que l’a retenu le tribunal, le vote annuel par les actionnaires, indépendamment de toute procédure d’éviction, d’une résolution relative à la fixation de la valeur de l’action n’est que la stricte application de l’article 15 b) des statuts et le montant fixé respecte la valeur plancher déterminée suivant la méthode énoncée audit article.

Le vote annuel intervenu dans ces conditions ne peut en conséquence être considéré comme contraire à l’intérêt social et ne caractérise aucunement l’unique dessein de favoriser l’actionnaire majoritaire au détriment des autres associés.

La société Soficoma, qui a elle-même voté la résolution relative à la fixation de la valeur de l’action lors des assemblées générales annuelles de 2010 à 2014 ainsi qu’il ressort des PV d’AG versés aux débats, ne s’est jamais émue, antérieurement à la présente instance, d’une prétendue opacité du calcul de la valeur soumise au vote, et ne justifie pas avoir sollicité des précisions sur ce calcul, dont la conformité aux stipulations de l’article 15 b) des statuts est aisément vérifiable par les actionnaires qui disposent des comptes sociaux soumis à leur approbation au cours de la même assemblée, à partir des postes de bilans relatifs au capital social, aux réserves légale, statutaire et facultative, au résultat de l’exercice, aux provisions réglementées.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté la société Soficoma de ses demandes d’annulation des résolutions n° 4 des assemblées générales des 27 mai 2015, 25 mai 2016 et 15 juin 2017.

En l’absence de démonstration par la société appelante, d’une faute commise par l’Etat à l’occasion du vote de ces 3 résolutions, le jugement sera également confirmé en ce qu’il a débouté la société Soficoma de sa demande d’indemnisation du préjudice qu’elle allègue, étant relevé que l’appelante fonde son action en responsabilité sur la théorie de l’abus de majorité, sans rechercher la responsabilité de l’Etat en qualité de dirigeant de fait de la FDJ.

Contrairement à ce qu’affirme l’appelante, le préjudice qu’elle prétend avoir subi du fait de son éviction et du rachat de ses actions à un prix qu’elle estime inférieur à leur valeur vénale ne relève pas de la responsabilité de l’Etat actionnaire puisque cette éviction résulte :

– de la résiliation par la FDJ des contrats des courtiers mandataires, dans des conditions qui ont fait l’objet de contentieux déjà jugés et qui ne peuvent être remises en cause dans le cadre de la présente instance,

– de la constatation par le conseil d’administration, organe distinct de l’Etat actionnaire, de la perte par la société Soficoma de ses conditions de capacité à demeurer actionnaire et de la mise en oeuvre par ce même organe de la procédure d’éviction prévue par les statuts,

– de la fixation par l’assemblée générale de la valeur de l’action conformément à l’article 15 b) des statuts.

Partie succombante, la société Soficoma sera condamnée aux dépens, ainsi qu’au paiement d’une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit des parties intimées, comme il sera dit au dispositif.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Prononce la mise hors de cause de la République française représentée par l’agence des participations de l’Etat,

Condamne la société Soficoma à payer à titre d’indemnités pour frais irrépétibles d’appel :

– la somme de 5000 euros à la société La Française des jeux,

– la somme de 5000 euros à l’agent judiciaire de l’Etat,

– la somme de 3000 euros à l’agence des participations de l’Etat,

Condamne la société Soficoma aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x