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7 juin 2006
Cour de cassation
Pourvoi n°
04-16.908
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant, tant sur le pourvoi principal des sociétés Ebel international limited et Ebel international France, que sur le pourvoi incident de la société Ebel ;
Donne acte à la société MG I Luxury group de son intervention volontaire aux droits de la société Ebel ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Ebel, aux droits de laquelle est la société MG I Luxury group, est titulaire, afin de désigner des produits horlogers, de la partie française d’une marque internationale nominale “Ebel” n° 144.053, et d’une marque semi-figurative reprenant ce terme, enregistrée sous le n° 447.734, ainsi que de la marque internationale “Ebel” n° 517.146 couvrant des produits de parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions à usage cosmétique, produits de maquillage, porte-clefs, lunettes optiques et lunettes de soleil, stylos, agendas, articles de maroquinerie, vêtements, prêt-à-porter, foulards, châles, cravates, ceintures, chapellerie et briquets ; que la société Ebel international limited (la société Ebel international), dont la société Ebel international France est une filiale, a demandé à l’Institut national de la propriété industrielle l’enregistrement de la marque nominale “Ebel technological institute” pour couvrir des produits ou services de contrôle de qualité, d’analyse chimique, de recherche en cosmétologie, d’instituts, laboratoires, salons de beauté, de coiffure et de soins, de recherche en dermatologie, de recherche scientifique et industrielle, d’étude de projet technique, de création graphique et publicitaire, de conception de logiciels, de dessins industriels et de photocomposition ; qu’elle a en outre déposé la marque semi-figurative “Ebel international” pour désigner des cosmétiques, parfums, imprimés, brochures, catalogues, matériels d’enseignement et d’instruction, ainsi que des services de gestion des affaires dans le domaine des cosmétiques, de la santé, des produits de beauté, de l’éducation et de la formation dans ces domaines ; qu’elle a également ouvert les sites internet “ebelinternational” et “ebelparis” ; que la société Ebel international a poursuivi la société Ebel en déchéance de ses droits sur la marque n° 517.146 ; que celle-ci a reconventionnellement réclamé l’annulation des enregistrements de marques adverses, et la condamnation des sociétés Ebel international et Ebel international France (les sociétés Ebel international) pour contrefaçon et atteinte à son nom commercial, à son enseigne et à la renommée de ses marques ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que les sociétés Ebel international font grief à l’arrêt d’avoir dit qu’elles ont commis des actes de contrefaçon de la marque semi-figurative “Ebel” n° 447.734, d’avoir, en conséquence, prononcé, pour les produits de la classe 3, la nullité partielle de la marque française “Ebel international” n° 3.070.766, et d’avoir condamné la société Ebel international à verser des dommages-intérêts à la société Ebel, alors, selon le moyen :
1 / que sont interdits, s’il peut en résulter un risque de confusion, l’imitation d’une marque pour des produits ou services identiques ou “similaires à ceux désignés dans l’enregistrement” ; qu’en retenant en l’espèce la similitude de l’ensemble des produits d’horlogerie et de bijouterie de la classe 14 visés à l’enregistrement de la marque “Ebel” n° 447.134 avec tous ceux de cosmétique et parfumerie de la classe 3, après avoir cependant constaté que ces deux catégories de produits n’étaient similaires que s’ils présentaient un caractère de luxe, et qu’à défaut, ils étaient différents, et relevé de façon inopérante que les montres exploitées par la société Ebel constituent de véritables bijoux et sont des montres de haute joaillerie, la cour d’appel a violé l’article L. 713-3 du Code de la propriété intellectuelle ;
2 / qu’en statuant ainsi, sans constater en outre que, dans la marque “Ebel international”, seraient exclusivement visés des produits de cosmétique et de parfumerie de luxe, ou que les produits exploités par les sociétés Ebel présenteraient un tel caractère, la cour d’appel n’a, sur ce point encore, pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l’article L. 713-3 du Code de la propriété intellectuelle ;
3 / que le risque de confusion doit être apprécié globalement ; que cette appréciation globale implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte, et notamment le degré de similitude des signes et celui des produits, le faible degré de similitude de l’un pouvant atténuer le degré élevé de similitude de l’autre ; qu’en l’espèce, après avoir apprécié successivement la similitude des produits en cause et celle des signes en présence, la cour d’appel n’a retenu l’existence d’un risque de confusion qu’en se fondant sur la similitude des signes sans apprécier le degré de chacune des similitudes qu’elle avait relevées entre, d’une part, les produits et, d’autre part, les signes, ni prendre en compte ceux-ci de façon interdépendante ; qu’en statuant ainsi, elle a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 713-3 du Code de la propriété intellectuelle tel qu’il doit s’interpréter à la lumière de l’article 4 1 b) de la directive n° 89/104/CE du conseil du 21 décembre 1988 ;
Mais attendu, en premier lieu, que l’arrêt retenant que, si une similitude ne saurait être retenue entre des montres banales et des produits de cosmétique ou de parfumerie, en l’espèce, en raison du caractère luxueux des montres Ebel, le consommateur moyen, familiarisé à la tendance générale de diversification des maisons de luxe, s’est habitué à attribuer la même provenance à des produits qui, pour être différents, n’en ont pas moins en commun leur caractère de luxe et leur destination, qui est d’apporter à la femme ou à l’homme une parure et un surcroît de séduction, de sorte qu’il leur attribue la même provenance, il résulte de ces motifs que la cour d’appel a caractérisé la similitude des produits par le rapprochement dans l’esprit du consommateur entre le caractère luxueux particulier des montres en question et la fonction générale de luxe et de parure des produits cosmétiques ou de parfumerie, ce dont il ne se déduit pas que la similitude se limiterait aux produits de cette seconde catégorie présentant un caractère particulièrement luxueux, de sorte que la cour d’appel n’a pas constaté que ces produits ne seraient similaires que dans la mesure où les cosmétiques visés seraient eux-mêmes particulièrement luxueux, et n’était pas tenue de se livrer à la recherche, inopérante, prétendument omise ;
Et attendu, en second lieu, que, n’ayant relevé que de grandes similitudes visuelles, phonétiques et intellectuelles entre les signes, puis retenu la similitude des produits désignés, la cour d’appel n’avait pas à se livrer, pour l’appréciation du risque de confusion, à un examen inutile de l’interdépendance de facteurs entièrement convergents ;
D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le troisième moyen du pourvoi principal :
Attendu que les sociétés Ebel international font encore grief à l’arrêt d’avoir dit que la société Ebel international, en faisant usage de la marque “Ebel international”, a engagé sa responsabilité envers la société Ebel, et de l’avoir condamnée à ce titre à verser des dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1 / que si un nom commercial ou une enseigne peuvent constituer une antériorité faisant obstacle à l’adoption d’une marque, c’est à la condition que ceux-ci soient connus sur l’ensemble du territoire national ; qu’en retenant en l’espèce qu’en faisant usage de la marque “Ebel international” n° 3.070.766, la société Ebel international aurait créé un risque de confusion avec le nom commercial et l’enseigne Ebel, et aurait ainsi engagé sa responsabilité sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, sans constater que le nom commercial et l’enseigne Ebel auraient été antérieurement connus sur l’ensemble du territoire national, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 711-4-c) du Code de la propriété intellectuelle ;
2 / que si un nom commercial ou une enseigne connus sur l’ensemble du territoire national peuvent constituer une antériorité faisant obstacle à l’adoption d’une marque, c’est à la condition encore qu’il existe un risque de confusion, ce qui suppose que le nom commercial ou l’enseigne soit utilisé pour une activité portant sur des produits ou services identiques ou similaires à ceux pour lesquels cette marque est exploitée ;
qu’en retenant en l’espèce qu’en faisant usage de la marque “Ebel international” n° 3.070.766, la société Ebel international aurait créé un risque de confusion avec le nom commercial et l’enseigne Ebel, tout en se bornant à cet égard à se référer à son appréciation sur le caractère contrefaisant de ladite marque, appréciation aux termes de laquelle elle avait retenu que les produits d’horlogerie de la société Ebel et les produits de cosmétique et de parfumerie de cette marque n’étaient similaires que lorsque ces deux types de produits présentaient un caractère de luxe, mais n’avait pas constaté que l’usage de la société Ebel international sur sa marque porterait sur des produits présentant un tel caractère, la cour d’appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 711-4-c) du Code de la propriété intellectuelle ;