Exclusivité : 15 septembre 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 20/05945

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Exclusivité : 15 septembre 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 20/05945
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15 septembre 2022
Cour d’appel d’Amiens
RG n°
20/05945

ARRET

S.A. NOVATEAM

C/

S.A.S. LUTETIA

COUR D’APPEL D’AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 15 SEPTEMBRE 2022

N° RG 20/05945 – N° Portalis DBV4-V-B7E-H5ZP

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE COMPIEGNE EN DATE DU 24 NOVEMBRE 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A. NOVATEAM, agissant poursuites et diigences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Eric POILLY substituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat postulant au barreau d’AMIENS, vestiaire : 101, et ayant pour avocat plaidant Me Gaël GRIGNON DUMOULIN, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIMEE

S.A.S. LUTETIA, agissant poursuites et diigences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Christian LUSSON de la SCP LUSSON ET CATILLION, avocat postulant au barreau d’AMIENS, vestiaire : 21, et ayant pour avocat plaidant Me Nicolas SIMON, avocat au barreau de PARIS

DEBATS :

A l’audience publique du 07 Avril 2022 devant :

Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi, la Présidente a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 07 Juillet 2022.

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions de l’article 785 du Code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Madame Vanessa IKHLEF

PRONONCE :

Le délibéré a été prorogé par voie électronique au 15 septembre 2022.

Le 15 septembre 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ; Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre a signé la minute avec Madame Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

Par acte d’huissier de justice du 23 juillet 2019, la société Novateam SA De CV a fait assigner la SAS Lutetia devant le tribunal de commerce de Compiègne, afin de la voir condamnée, sous bénéfice de l’exécution provisoire, à lui payer :

– la somme de 46.656,60 € au titre du solde des commissions restant dues, sur les affaires :

* Felder Foods, pour un montant de 25.706 €;

* Bir Alimentos, pour un montant de 7.950,60 €;

* et Bafar, pour un montant de 13.000 €;

– la somme de 118.232,67 €, au titre de commissions de l’article L.134-7 du code de commerce, sur les affaires :

* Ariztia, pour un montant de 42.780 €;

* et Pilgrim’s pride, pour un montant de 75.452,67 €;

– la somme de 1.275.130,15 €, à titre d’indemnité de cessation de contrat d’agent commercial, en application de l’article L.134-12 du code de commerce;

– la somme de 200.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du caractère abusif de la rupture et d’actes de concurrence déloyale;

– outre les intérêts légaux sur l’indemnité de cessation de contrat et sur le solde de commissions de 46.656,60 € à compter de la date de rupture du contrat, soit le 30 septembre 2018, avec application de l’article 1154 du code civil, dès que les conditions légales seront réunies;

– la somme de 8.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

La SA Novateam SA De CV se prévalait de l’existence d’un contrat d’agent commercial conclu le 1er septembre 2014, aux termes duquel la SAS Lutetia, sise à [Adresse 4]), spécialisée dans la fabrication de machines pour l’industrie agro-alimentaire, a confié à la société de droit mexicain Novateam SA de CV, anciennement dénommée LHT Conseil et Trading un mandat exclusif de vendre en son nom et pour son compte des équipements et procédés destinés à l’industrie agro-alimentaire, notamment des systèmes intégrés de décongélation, injecteurs, malaxeurs, attendrisseurs, steakers et cellules de fumage, au Mexique, en Amérique centrale (Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Nicaragua, Panama) et dans les pays andins (Colombie, Equateur, Bolivie et Pérou), de la rupture de contrat notifiée par la SAS Lutetia, le 24 mai 2018, et d’une mise en demeure adressée par lettre recommandée avec avis de reception du 9 mai 2019 par la société Novateam à la SAS Lutetia de lui régler sous quinzaine des indemnités et arriérés de commissions, outre des dommages et intérêts en réparation d’un préjudice de désorganisation consécutif à des faits de débauchage de son équipe commerciale restée vaine,

Suivant jugement contradictoire du 24 novembre 2020, le tribunal de commerce de Compiègne a :

– dit la société Novateam SA De CV recevable et bien fondée en qualification de contrat d’agent commercial;

– dit la société Novateam SA De CV recevable et bien fondée en sa demande en paiement au titre du solde de factures;

– condamné la SAS Lutetia à payer à la société Novateam la somme de 46.656,60 € au titre du solde des commissions restant dues;

– dit la société Novateam recevable et bien fondée en sa demande en paiement au titre de l’article L.134-7 du code de commerce;

– condamné la SAS Lutetia à payer à la société Novateam la somme de 118.232,67 € au titre des commissions de l’article L.134-7 du code de commerce;

– dit n’y avoir lieu à fournir un extrait comptable des balances clients (pièce n°23);

– dit la société Novateam recevable mais mal fondée en sa demande indemnitaire au titre de l’article L.134-12 du code de commerce;

– débouté la société Novateam de sa demande indemnitaire au titre de l’article L.134-12 du code de commerce;

– dit la société Novateam recevable mais mal fondée en sa demande de dommages et intérêts;

– débouté la société Novateam de sa demande en dommages et intérêts;

– condamné la SAS Lutetia aux dépens, liquidés pour frais de greffe à la somme de 73,22 € TTC, dont TVA à 20%, et à payer à la société Novateam la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– ordonné l’exécution provisoire.

Par declaration au greffe du 24 novembre 2020, la société Novateam SA De CV a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions responsives et récapitulatives remises le 6 avril 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, la société Novateam SA de CV demande à la cour de:

in limine litis,

– rejeter l’exception d’incompétence et de sursis à statuer soulevées par la SAS Lutetia comme étant irrecevables et infondées;

Au fond,

– la dire recevable et bien fondée en son appel;

en conséquence,

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :

* a dit n’y avoir lieu à fournir un extrait comptable des balances clients (pièce n°23);

* l’a déboutée de sa demande d’indemnité de cessation de contrat d’agence au titre de l’article L.134-12 du code de commerce;

* l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et rupture abusive du contrat;

et statuant à nouveau,

– juger que la rupture du contrat d’agence par la SAS Lutetia a revêtu un caractère abusif et spoliateur;

– juger que la SAS Lutetia s’est rendue responsable d’actes de concurrence déloyale ayant consisté au débauchage de son équipe commerciale;

– annuler le prétendu solde de tout compte de février 2019 versé sous la pièce adverse 6.1;

– condamner la SAS Lutetia à lui payer les sommes de :

* 1.275.130,15 €, à titre d’indemnité de cessation de contrat d’agent commercial, en application de l’article L.134-12 du code de commerce;

* 200.000 €, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du caractère abusif de la rupture et des actes de concurrence déloyale qui l’ont entourée;

* 37.000 €, au titre de la répétition des frais d’installations déduits du montant des commissions en raison de la nullité dont est affecté le prétendu solde de tout compte, en application de l’article 1235 ancien du code civil;

* les intérêts légaux sur l’indemnité de cessation de contrat et sur le solde des commissions de 46.656,60 € à compter de la date de rupture du contrat, soit le 30 septembre 2018, avec application de l’article 1154 du code civil dès que les conditions légales seront réunies ;

– dire et juger les pièces adverses n° 19, 33 Bis, 43, 63, 64 et 65 comme des pièces établies à soi-même, dépourvues de force probante au sens de l’article 1353 du code civil;

– dire et juger que la SAS Lutetia devra fournir un extrait comptable des balances clients listé à la pièce n°23 certifié par un commissaire aux comptes, permettant à la société Novateam de calculer sa commission au titre de l’article 7.3 du contrat d’agence du 1er septembre 2014, sur la période du mois septembre 2018 à avril 2020, le tout sous astreinte de 500 € par jour de retard dans les 15 jours de la signification de la décision à intervenir ;

– confirmer le jugement en ce qu’il a :

* qualifié le contrat d’agent commercial ;

* condamné la SAS Lutetia à payer à la société Novateam SA De CV les indemnités de 46.656,60 € au titre du solde des commissions restant dues, et de 118.232,67 euros au titre des commissions de l’article 7 du contrat d’agence;

en tout état de cause,

– juger mal fondé l’appel incident formé par la SAS Lutetia, en conséquence de l’en débouter;

– juger irrecevable et inopérante la demande de sursis à statuer afin de poser une question préjudicielle à la CJUE ;

– juger irrecevable la demande d’annulation du contrat d’agence pour cause de dol, comme étant une prétention nouvelle en appel, en application de l’article 564 du code de procédure civile;

– débouter la SAS Lutetia de l’ensemble de ses fins, demande reconventionnelle et prétentions à l’encontre de la société Novateam;

– condamner la SAS Lutetia à lui payer une indemnité de 18.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions d’intimée et d’appel incident remises le 7 avril 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, la SAS Lutetia demande à la cour de:

– la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident ;

en conséquence,

in limine litis,

– se déclarer incompétente pour la demande de dommages-intérêts de 200.000 € fondée nouvellement en cause d’appel sur les articles 1242, 1382, 1384 et 1984 du code civil par la société Novateam et de renvoyer cette dernière à mieux se pourvoir devant la juridiction étrangère compétente ;

– déclarer irrecevable cette demande comme nouvellement formée devant la cour selon 1’article 564 du code de procédure civile;

à titre principal,

– infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

* qualifié le contrat conclu entre les parties de contrat d’agent commercial et soumis ce dernier à l’application du droit français;

* dit recevable et bien fondée la société Novateam en sa demande de paiement de solde de commissions ;

* condamné la SAS Lutetia à lui payer la somme de 46.656,60 €;

* dit recevable et bien fondée la société Novateam en sa demande de paiements au titre de l’article L.134-7 du code de commerce;

* condamné la SAS Lutetia à lui payer la somme de 118.232.67 €;

* condamné à payer 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

* débouté la société Novateam de sa demande indemnitaire au titre de l’article L.134-12 du code de commerce ;

* débouté la société Novateam de sa demande de dommages-intérêts ;

* dit n’y avoir lieu à fournir un extrait comptable des balances clients listés à la pièce n°23 de la société Novateam et ainsi rejeté la demande de cette dernière ;

et statuant à nouveau,

– rejeter la demande de qualification en contrat d’agent commercial du contrat conclu entre les parties ;

– débouter la société Novateam SA De CV de sa demande de ce chef et en conséquence de sa demande indemnitaire au titre de l’article L.134-12 du code de commerce ;

– retenir et qualifier le contrat conclu entre les parties de contrat de courtage ;

– déclarer irrecevables et infondées les demandes de la société Novateam tendant au paiement de solde de commissions et au titre de l’article L.134-7 du code de commerce ;

– condamner la société Novateam SA De CV à lui payer la somme de 46.656,60 € avec intérêts au taux légal à compter de la date du règlement par la SAS Lutetia avec anatocisme selon l’article 1154 du code civil ;

– condamner la société Novateam SA De CV à lui payer la somme de 118.232,67 € avec intérêts au taux légal à compter de la date de règlement par la SAS Lutetia avec anatocisme selon l’article 1154 du code civil ;

– condamner la société Novateam SA De CV à lui payer la somme de 439.529,98 € avec intérêts au taux légal à compter de la date de la signification de l’arrêt d’appel au titre de ses manoeuvres déloyales intentionnelles dolosives sur la base de l’article 1116 (ancien) du code civil et de la violation de ses obligations au titre de l’article 1134 (ancien) du code civil ;

à titre subsidiaire,

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

* soumis le contrat conclu entre les parties à l’application du droit français;

* dit recevable et bien fondée la société Novateam SA De CV en sa demande de paiement de solde de commissions et condamné la SAS Lutetia à payer la sommee de 46.656,60 €;

* dit recevable et bien fondé la société Novateam SA De CV en sa demande de paiement au titre de l’article L.134-7 du code de commerce et condamné la SAS Lutetia à payer la somme de 118.232,67 €;

* condamné la SAS Lutetia à payer 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

* débouté la société Novateam SA De CV de sa demande indemnitaire au titre de l’article L.134-12 du code de commerce ;

* débouté la société Novateam SA De CV de sa demande de dommages-intérêts ;

* dit n’y avoir lieu à fournir un extrait comptable des balances clients listés à la pièce n°23 de la société Novateam SA De CV et ainsi rejeté la demande de cette dernière ;

si par impossible la cour venait à qualifier le contrat conclu entre les parties de contrat d’agent commercial,

– déclarer irrecevable, en application de la directive européenne 86/653 du 18 décembre 1986 relative aux agents commerciaux et de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), la demande de la société Novateam SA De CV d’appliquer l’article L.134-12 du code de commerce audit contrat;

– débouter la société Novateam de toutes ses demandes d’indemnités fondées sur ledit article L.134-12 du code de commerce ;

en tout état de cause, en vertu du TUE, du TFUE et de la jurisprudence de la CJUE,

– renvoyer devant la CJUE la question préjudicielle suivante, ou adaptée comme il plaira à la cour : ‘La directive 86/653/CEE du Conseil relative à la coordination des droits des Etats membres concernant les agents commerciaux indépendants est-elle à interpréter, eu égard à sa finalité qui consiste à uniformiser les conditions de concurrence à 1 ‘intérieur de l’Union européenne et à faciliter les échanges entre Etats membres, en ce sens qu’elle ne permet pas à un Etat membre d’adopter une législation qui ne restreint pas le bénéfice du statut d’agent commercial aux seules personnes physiques ou morales établies et exerçant leur activité sur le territoire d’un Etat membre de l’Union européenne ”;

– surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la CJUE;

– déclarer irrecevables et infondées les demandes de la société Novateam SA De CV :

* de paiement de solde de commissions ;

* de paiement au titre de l’article L.134-7 du Code de commerce;

– condamner la société Novateam SA De CV à lui payer la somme de 46.656,60 € avec intérêts au taux légal à compter de la date du règlement par la SAS Lutetia avec anatocisme selon l’article 1154 du code civil ;

– condamner la société Novateam SA De CV à lui payer la somme de 118.232,67 € avec intérêts au taux légal à compter de la date de règlement par la SAS Lutetia avec anatocisme selon l’article 1154 du code civil ;

– condamner la société Novateam SA De CV à lui payer la somme de 439.529,98 € avec intérêts au taux légal à compter de la date de la signification de l’arrêt d’appel au titre de ses manoeuvres déloyales intentionnelles dolosives sur la base de l’article 1116 (ancien) du code civil et de la violation de ses obligations au titre de l’article 1134 (ancien) du code civil ;

à titre infiniment subsidiaire,

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

* dit recevable et bien fondé la société Novateam SA De CV en sa demande de paiement de solde de commissions;

* condamné la SAS Lutetia à payer la sommee de 46.656,60 €;

* dit recevable et bien fondé la société Novateam SA De CV en sa demande de paiement au titre de l’article L.134-7 du code de commerce;

* condamné la SAS Lutetia à payer la somme de 118.232,67 €;

* condamné la SAS Lutetia à payer 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

* débouté la société Novateam SA De CV de sa demande indemnitaire au titre de l’article L.134-12 du code de commerce ;

* débouté la société Novateam SA De CV de sa demande de dommages-intérêts ;

* dit n’y avoir lieu à fournir un extrait comptable des balances clients listés à la pièce n°23 de la société Novateam SA De CV et ainsi rejeté la demande de cette dernière ;

si par extraordinaire, la cour venait à estimer que le contrat conclu entre les parties devait être (i) qualifié de contrat d’agent commercial, (ii) soumis au droit français sans qu’il soit nécessaire de renvoyer à la CJUE pour question préjudicielle,

– déclarer que la faute grave de la société Novateam SA De CV est constitutive d’un dol;

– prononcer la nullité du contrat en litige conformément à l’article 1116 du code civil (ancien);

– débouter la société Novateam SA De CV de toutes ses demandes, fins, moyens et conclusions;

à titre plus infiniment subsidiaire,

– déclarer :

* que les agissements fautifs de la société Novateam constituent une faute grave qui la prive de toute indemnité au titre de l’article L.134-12 du code de commerce en application de l’article L.134-13 du code de commerce ;

* et au surplus que l’absence de préjudice de l’agent et davantage pour le mandant, en application de l’article 17.3 de la Directive européenne 86/653 du 18 décembre 1986, la prive de toute indemnité au titre de l’article L.134-12;

– débouter la société Novateam SA De CV de toutes ses demandes d’indemnité;

– débouter la société Novateam SA De CV de toutes ses demandes, fins, moyens et conclusions;

à titre encore plus infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, la cour venait à estimer que (i) le contrat conclu entre les parties devait être qualifié de contrat d’agent commercial, soumis au droit français sans qu’il soit nécessaire de renvoyer à la CJUE pour question préjudicielle, (ii) les agissements de la société Novateam n’étaient pas constitutifs d’un dol et que le contrat n’était pas nul (iii), que la faute grave de la société Novateam ne la privait pas de toute indemnité au titre de l’article L.134-12 du code de commerce en application de l’article L.134-13 du code de commerce et (iv) que les conditions de l’article 17.3 de la Directive européenne 86/653 du 18 décembre 1986 pour une telle indemnité étaient remplies,

– déterminer souverainement le montant de cette indemnité sur la base des chiffres certifiés fournis par la SAS Lutetia et prenant en compte les agissements de la société Novateam et les circonstances de l’espèce;

– déclarer irrecevable et infondée la société Novateam SA De CV en ses demandes :

* de paiement de solde de commissions ;

* de paiement au titre de l’article L.134-7 du code de commerce;

– condamner la société Novateam SA De CV à lui payer la somme de 46.656,60 € avec intérêts au taux légal à compter de la date du règlement par la SAS Lutetia avec anatocisme selon l’article 1154 du code civil ;

– condamner la société Novateam à lui payer la somme de 118.232,67 € avec intérêts au taux légal à compter de la date de règlement par la SAS Lutetia avec anatocisme selon l’article 1154 du code civil ;

– condamner la société Novateam à lui payer la somme de 439.529,98€ avec intérêts au taux légal à compter de la date de la signification de l’arrêt d’appel au titre de ses manoeuvres déloyales intentionnelles dolosives sur la base de l’article 1116 (ancien) du code civil et de la violation de ses obligations au titre de l’article 1134 (ancien) du code civil ;

en tout état de cause,

– débouter la société Novateam SA De CV de ses conclusions, fins, demandes et prétentions à l’encontre de la SAS Lutetia;

– condamner la société Novateam SA De CV à lui payer la somme de 18.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et

d’appel selon l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 avril 2022, l’affaire ayant été fixée pour plaider à l’audience du même jour.

SUR CE

– sur la nature du contrat litigieux

Avant de procéder à l’examen de l’appel principal de la société Novateam SA De CV portant sur sa demande d’indemnisation sur le fondement de l’article L.134-12 du code de commerce dont les dispositions sont applicables aux agents commerciaux, d’une part, et de production de l’extrait comptable des balances clients sur lesquels des projets étaient en cours avant la date de cessation du contrat pour établir le montant de ses commissions au titre de l’article L.134-7, et ce au mépris des dispositions des articles L.134-4 et R.134-3 du code de commerce, il convient d’examiner l’appel incident de la SAS Lutétia qui conteste la qualification de contrat d’agent commercial soumis au droit français, soit les articles L.134-1 et suivants du code de commerce, et bénéficiant de la protection du régime instauré par la directive européenne 86/653 du 18 décembre 1986 relative aux agents commerciaux retenue par le tribunal, alors que, selon elle, le jugement n’a pas fait application des critères légaux pour déterminer la nature du contrat n’a pas démontré en quoi la société Novateam réalisait l’activité d’un agent commercial, et que le régime instauré par la directive ne s’applique qu’au marché intérieur, de sorte que son application à un agent oeuvrant dans un Etat tiers a été écartée par la Cour de Justice de l’Union Européenne puisque une telle application est de nature à produire des effets contraires à ceux recherchés par les traités européens et la directive 86/653 ( CJUE 16 février 2017, C-507/15 Agro Foreign Trade).

Le développement consacré par la SAS Lutetia au contexte de la relation et les indices graves et concordants de la déloyauté éhontée et intentionnelle constitutive d’un dol, et a minima d’une faute grave de la société Novateam, qui, selon elle, lui a fait signer son modèle de contrat en omettant à ce stade toute information précontractuelle, notamment sur les conditions de sortie du contrat, en violation du droit français dont elle va revendiquer l’application et la protection, sachant qu’elle a tout intérêt à obtenir l’application de la loi française bien plus protectrice que la loi mexicaine, abusant ainsi la confiance de ses compatriotes, et les arguments en réponse de la société Novateam SA De CV feront l’objet d’un examen ci-après lorsqu’il sera statué sur les demandes indemnités indemnitaires de la société Novateam SA De CV d’une part, et la demande reconventionnelle de la SAS Lutetia du fait des manoeuvres dolosives de son cocontractant et de la violation de ses obligations, d’autre part.

La société Novateam SA De CV verse aux débats un contrat rédigé en anglais qui a été signé par les parties le 01er septembre 2014, intitulé ‘Exclusive Agency Agreement’, (pièce n°1), dont l’existence n’est pas contestée par la SAS Lutétia qui produit une traduction en français (pièce n°3) incluant l’avenant du 01er août 2015 de la SAS Lutetia et correspondant à la pièce n°5 de la société Novateam De CV, ces deux pièces étant intitulées ‘ Contrat de représentation exclusive’. Aucune autre traduction du contrat rédigé en langue anglaise n’est produite aux débats par l’une ou l’autre des parties, qui viendrait en modifier les termes, de sorte que doivent être prises en considération ce contrat en langue anglaise et sa traduction pour l’interprétation de la qualification du contrat.

L’article L.134-1 du code de commerce dispose que ‘l’agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs d’industriels, de commerçants ou d’autres agents commerciaux. Il peut être une personne physique ou une personne morale.’

Il est, par ailleurs, admis, que l’application du statut d’agent commercial ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties dans le contrat, ni de la dénomination qu’elles ont données à leurs conventions, mais des conditions dans lesquelles l’activité est effectivement exercée (Cass.com 10 décembre 2003 n°01-11.923 P), de sorte que le terme ‘représentant’ repris dans le contrat et traduit par ‘agent’ est sans incidence sur la nature du contrat liant les parties.

Aux termes du paragraphe ‘1″ du contrat ‘1.1 La SOCIETE [Lutetia SAS] désigne par la présente le REPRESENTANT [Novateam SA De CV] comme son unique représentant au Mexique, en Amérique Centrale (Costa-Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Nicaragua, Panama) et dans les pays andins (Colombie, Equateur, Bolivie, Pérou) (ci-après dénommé le ‘Territoire’).

A l’exception des clients directs de la SOCIETE tels que : Costa-Rica : (Alimentas Prosalud) Equateur : (Ocean Fish SA – Pronaca) Guatemala : (Frigorifico de Guatemala Frisa) Mexique : (Empacadora Penaranda – Empacadora Frape).

1.2 Le REPRESENTANT s’engage à agir aux fins de promouvoir la vente de produits dans les conditions stipulées au sous-alinéa 2.1.’

Les sous-alinéa 2.1 et 2.2 stipulent ‘ 2.1 A compter du 1er septembre 2014, la SOCIETE confie au REPRESENTANT sa représentation exclusive concernant la vente des produits suivants (ci-après dénommés les ‘Produits’)

2.1.1 Intégralité des fournitures utilisées lors de projets dans le domaine des systèmes de massage, enceintes de cuisson, cuiseurs sous vide, injecteurs/attendrisseurs et systèmes et technologies de décongélation.

2.1.2. Outils à main et accessoires associés aux Produits décrits plus haut et dans le domaine des produits et/ou fournitures de la SOCIETE.

2.1.3 Pièces détachées et entretien.

2.2 Le REPRESENTANT n’est pas, directement ni indirectement, autorisé à représenter/vendre d’autres produits concurrents des Produits, et le REPRESENTANT ne saurait prendre part à aucune activité concurrente des Produits.’

Le paragraphe ‘3″ ‘Obligations du REPRESENTANT’ énonce ‘3.1 Le REPRESENTANT s’engage, sur le Territoire, à agir au nom et pour le compte de la SOCIETE en ce qui concerne les produits.

3.2 Les conditions de vente, y compris les conditions de livraison, les prix et les modalités de paiement etc. ne sauraient être modifiés par le REPRESENTANT sans le consentement écrit de la société.

3.3 Le REPRESENTANT s’engage à tenir la SOCIETE informée de tout élément d’importance pour les activités de la SOCIETE sur le Territoire, comme par exemple les conditions du marché et de la concurrence.’

Selon le paragraphe ‘4″ ‘obligation de la SOCIETE’, ‘4.1 La société s’engage à ne confier à aucune autre personne et/ou société sa représentation concernant la vente des Produits sur le Territoire.

4.2 La SOCIETE s’engage à informer le REPRESENTANT de toutes les demandes de renseignements concernant les Produits et provenant de clients domiciliés sur le Territoire

4.3 La SOCIETE s’engage à communiquer gratuitement au REPRESENTANT toutes les brochures, prospectus et autres documents nécessaires aux négociations commerciales.’

Le paragraphe ‘5″ ‘Commission’ prévoit ‘5.1 La commission versée par la SOCIETE au REPRESENTANT en vertu du présent contrat correspond à 20% après remise sur les machines et les pièces détachées avec un minimum de 10%, du prix portuaire/aéroportuaire européen FAB des Produits au titre de l’article 2…/…

5.3 La commission sera versée, en fonction de chaque facture du client réglée à la SOCIETE, au REPRESENTANT dans un délai maximal de 10 jours ouvrables après la réception des paiements suivants par la SOCIETE et dans le devise stipulée dans le contrat signé entre la SOCIETE et le client sur le Territoire.’

La SAS Lutetia fait valoir qu’aux termes du contrat, la société Novateam ne disposait d’aucun pouvoir de négociation les conditions contractuelles et/ou d’un pouvoir de signature, condition sine qua non pour que le statut d’agent commercial puisse être retenu; que cette société n’a jamais eu d’autonomie pour faire autre chose que présenter les produits de la société Lutetia comme un apporteur d’affaires et ne remplit donc pas les conditions d’exercice d’un contrat d’agent commercial; que la preuve en est que les offres qu’elle soumettait étaient signées par le directeur commercial de la société Lutetia et ne représentaient donc qu’une simple transmission d’informations ne constituant pas l’exercice de mission d’un agent commercial; que la prospection commerciale et la mise en relation ne suffisent pas à qualifier un contrat de contrat d’agent commercial; que la cour ne pourra que déclarer que le contrat qui liait les parties n’est pas un contrat d’agent commercial mais au mieux un contrat de courtage et en conséquence ne pourra que refuser de faire application du statut d’agent commercial et donc des dispositions des articles L.134-1 et suivants du code de commerce.

La société Novateam SA De CV soutient que la CJUE, par un arrêt du 4 juin 2020, a rappelé les trois conditions pour être qualifié d’agent commercial : être un intermédiaire indépendant, être lié contractuellement de façon permanente au commettant, exercer une activité consistant soit à négocier la vente ou l’achat de marchandises pour le commettant soit à négocier et à conclure des opérations au nom et pour le compte de celui-ci; qu’elle a rappelé que les tâches principales d’un agent consistent à apporter de nouveaux clients au commettant et à développer les opérations avec les clients existants; que la négociation consiste à l’accomplissement de ces tâches qui peut être assuré par l’agent au moyen d’actions d’informations et de conseil ainsi que de discussions qui sont de nature à favoriser la conclusion des opérations de vente des marchandises pour le compte du commettant sans que l’agent commercial dispose de la faculté de modifier les prix desdites marchandises; que la société Lutetia ne peut dénier la qualification commerciale au prétexte que l’article 3.2 du contrat interdisait à la société Novateam de modifier ses conditions de vente sans son consentement écrit; qu’il est parfaitement normal que la politique commerciale relève de l’autorité de la société Lutetia et que cette dernière ait le dernier mot en matière de fixation des prix à la clientèle; que la négociation trouve son aboutissement dans l’expression d’un accord qui est naturellement ratifié par le mandant, même si l’agent commercial n’avait pas expressément le pouvoir de conclure le contrat envisagé; que la société Novateam présentait l’offre de la société Lutetia à la clientèle, en discutait les conditions de vente, les prix, les volumes et remises qui étaient autorisées contractuellement jusqu’à 10% (article 5.2 du contrat); qu’elle disposait donc d’une marge de manoeuvre dans la discussion des conditions de vente, ce qui sous l’empire de la jurisprudence contra legem de la Cour de cassation suffit à remplir la condition de la négociation.

Il est admis qu’il résulte de l’arrêt de la CJUE, arrêt du 4 juin 2020, Trendsetteuse, C-828/18, qu’il n’est pas nécessaire pour le mandataire de disposer de la faculté de modifier les conditions des contrats conclus par le commettant pour être agent commercial’; que la CJUE interprétant l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 86/653/CEE du Conseil du 18 décembre 1986, énonce dans cet arrêt, que les tâches principales d’un agent commercial consistent à apporter de nouveaux clients au commettant et à développer les opérations avec les clients existants et que l’accomplissement de ces tâches peut être assuré par l’agent commercial au moyen d’actions d’information et de conseil ainsi que de discussions, qui sont de nature à favoriser la conclusion de l’opération de vente des marchandises pour le compte du commettant, même si l’agent commercial ne dispose pas de la faculté de modifier les prix desdites marchandises, qu’il résulte de la généralité de ces termes qu’il n’est pas nécessaire de disposer de la faculté de modifier les conditions des contrats conclus par le commettant pour être agent commercial. (cass.com. 12 mai 2021, 19-17.042)

Ainsi, contrairement à ce que soutient la SAS Lutétia, le fait pour la société Novateam SA De Cv de ne pas disposer du pouvoir de modifier les conditions de vente comme stipulé à l’article 3.2 du contrat, et en particulier les conditions de livraison, les prix et les modalités de paiement, n’est pas condition sine qua non pour que le statut d’agent commercial puisse être retenu.

Par ailleurs, comme le relève, à juste titre, la société Novateam SA De CV, l’achat et la revente des produits de la société Lutétia dont elle se prévaut qui empêcherait la société Novateam SA De CV de revendiquer la qualité d’agent commercial n’ont pas été effectués par cette dernière, l’achat ayant été effectué par la société LHT & Trading SA DE CV et pas par la société Novateam ainsi que l’établissent les pièces 30 et 41 vantées par la SAS Lutetia concernant pour l’une une facture de Lutetia à la société LHT Conseil & Trading SA De CV et pour l’autre des échanges d’emails qui mentionnent pour objet ‘RE:Socorro-2849.3 – LHT Commissions’.

Il ressort, en revanche, des stipulations contractuelles que la société Novateam SA De CV disposait d’un mandat exclusif et permanent de représenter la SAS Lutétia auprès de la clientèle située sur le territoire du Mexique, d’Amérique Centrale et Andine pour commercialiser ses produits et recueillir les commandes au nom et pour le compte de cette dernière, ce qui s’analyse en un pouvoir de négociation de contrat de vente au sens de l’article L.134-1 du code de commerce, comme le retient, à bon droit, la société Novateam SA De CV.

Le fait pour la SAS Lutetia d’avoir gardé la maîtrise et la détermination des conditions des contrats, en particulier de l’objet, du prix, des conditions de livraison, n’exclut pas la possibilité pour la société Novateam SA De CV de négocier les quantités des produits, le montant de l’acompte à verser, des remises autorisées par le contrat à hauteur de 10% sur les prix, ce qui caractérise une autonomie de représentation suffisante pour lui conférer le statut d’agent commercial.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point

– sur la loi applicable au contrat d’agent commercial

La société Novateam SA De CV sollicite le paiement de la somme de 1.275.130,15 € à titre d’indemnité de cessation de contrat d’agent commercial en application de l’article L.134-12 du code de commerce.

Le tribunal l’a déboutée de sa cette demande en considérant que l’intention de ne pas renouveler le contrat de quatre ans qui les liait jusqu’à présent ne permet pas de qualifier en rupture une fin normale d’un contrat dans les formes convenues; que surabondamment , elle ne justifie pas de la notification par laquelle elle entend faire valoir ses droits à rupture du contrat selon le second alinéa de l’article L.134-12, tel que la charge lui incombe, ni ne justifie d’un préjudice, le contrat étant dénoncé dans les formes et délais requis. Dans le cadre de l’examen de la nature du contrat, il a effectivement remarqué que les parties en cause ont désigné expressément les juridictions françaises et le droit français, que le tribunal de commerce de Compiègne est implicitement désigné comme étant celui dans le ressort duquel se trouve le siège de la SAS Lutetia.

En cause d’appel, la SAS Lutetia s’oppose au paiement de la somme réclamée au titre de l’indemnité prévue à l’article L.134-12 à la société Novateam SA De CV. Elle fait valoir que la loi française sur les agents commerciaux, n’a pas vocation à s’appliquer à un agent commercial exerçant son activité hors de l’Union Européenne; qu’une clause de choix de loi applicable doit répondre à certains critères et connaît de nombreuses exceptions en matière internationale et spécifiquement en droit européen, notamment en matière d’agence commerciale, comme l’a rappelé la CJUE dans son arrêt Ingmar du 09 novembre 2000 qui définit que la directive n°86/653 relative à la coordination des droits des Etats membres concernant les agents commerciaux indépendants devait recevoir application ‘alors même que le commettant est établi dans un pays tiers et que, en vertu d’une clause du contrat, ce dernier est régi par la loi de ce pays.’; que le principe du choix de loi ne relève pas d’une liberté incontrôlée qui s’imposerait aux parties et interdirait aux juridictions de les examiner.

La société Novateam SA De CV réplique qu’en matière internationale, les parties sont libres de choisir la loi applicable au contrat en application du principe de l’autonomie de la volonté; qu’en l’espèce les parties ont désigné la loi française pour régir leur relation contractuelle; que la loi française sur le statut des agents commerciaux ne pose pas comme condition pour être applicable que l’agent commercial exerce son activité en France ou dans le marché de l’Union Européenne.

L’article L. 134-12 du code de commerce dispose qu”En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

L’agent commercial perd le droit à réparation s’il n’a pas notifié au mandant, dans un délai d’un an à compter de la cessation du contrat qu’il entend faire valoir ses droits.’

Il est constant que le contrat d’agent commercial a été conclu entre la SAS Lutetia, société de droit français, le mandant, d’une part, et la société Novateam SA De CV, société de droit mexicain, l’agent, qui exerce son activité exclusivement dans des pays situés en Amérique centrale et en Amérique du Sud, soit hors de l’Union Européenne.

Il n’est pas contesté qu’aucune indemnité n’est prévue par le droit mexicain en cas de cessation des relations entre le commettant et son agent commercial.

La société Lutetia soutient à cet égard que c’est donc par opportunisme que la société Novateam sollicite l’application du droit français relatif aux agents alors même qu’elle n’exerce nullement son activité sur le territoire européen et n’y a aucune activité; qu’elle n’applique d’ailleurs pas le droit français avec les ‘sous agents’ qu’elle utilise.

En l’espèce, aux termes des stipulations contractuelles, paragraphe ‘9 Compétence et droit applicable 9.1 Tout litige résultant du présent Contrat et ne trouvant aucune issue amiable entre les parties sera réglé sans recours devant les tribunaux en application du Règlement de procédure du tribunal d’arbitrage de Rennes (France). Le lieu d’arbitrage sera situé à [Localité 5], et les procédures seront formulées en français.

9.2 Toutefois, le REPRESENTANT est autorisé à poursuivre la SOCIETE devant le tribunal compétent en l’espèce/sur le lieu de domiciliation de la SOCIETE.

9.3 Le présent Contrat sera régi par la loi française.’

Il est ainsi établi que les parties ont entendu soumettre leurs relations contractuelles et le règlement de leurs différends à la loi française et aux juridictions françaises.

Pour la SAS Lutetia, les dispositions de la loi française ne s’appliquent pas au présent litige. Elle se prévaut des dispositions de la Directive 86/653 relative à la coordination des droits des Etats membres concernant les agents commerciaux indépendants et des principes fixés par la jurisprudence de la CJUE, et plus particulièrement l’arrêt Ingmar du 09 novembre 2000 C-381/98, et l’arrêt Agro Foreign Trade du 16 février 2017 C-507/15

Elle indique que dans l’arrêt Ingmar, la CJUE a précisé que la fonction que remplissent les dispositions de la directive 86/653 ‘exige en effet qu’elles trouvent application dès lors que la situation présente un lien étroit avec la Communauté, notamment lorsque l’agent commercial exerce son activité sur le territoire d’un Etat membre, quelle que soit la loi à laquelle les parties ont entendu soumettre le contrat.’

Elle souligne que dans l’arrêt Agro Foreign Trade, il s’agissait de savoir si la loi belge précisant que ‘toute activité d’un agent commercial ayant son établissement principal en Belgique relève de la loi belge et de la compétence des tribunaux belges’ sans pour autant exclure son application à tout agent situé en dehors de la Belgique, pouvait, in fine, priver l’agent commercial établi en Turquie d’invoquer la protection offerte par la directive et partant de tout droit à indemnité; que dans cet arrêt, la CJUE rappelle que la directive n°86/653 vise à protéger les agents commerciaux dès lors que la situation en cause présente un lien étroit avec l’Union européenne’; que par conséquent, la protection offerte par cette directive bénéficie à tout agent commercial qui exerce son activité sur le territoire de l’UE et ce indépendamment de la loi applicable choisie par les parties au contrat; qu’a contrario, la CJUE juge que les dispositions protectrices de la directive n’ont pas vocation à s’appliquer impérativement à un agent commercial qui exerce ses activités en dehors de l’UE (et ce même si son mandant est établi dans l’UE) dans la mesure où une telle situation ne présente pas de lien suffisamment étroit avec l’UE; que l’agent turc n’a donc pas bénéficié du régime protecteur du droit belge par les parties; que le principe dégagé par la CJUE dans l’arrêt Agro Foreign Trade est que si les lois nationales issues de la directive 86/653 sont des lois de police dans leurs ordres internes respectifs, elles ne le sont pas dans l’ordre juridique international et européen, et ce y compris en présence d’une clause de choix de loi qui aurait pour effet de contourner les objectifs de la directive et des traités européens ce qui constituerait par ailleurs un abus de droit; que cette loi française choisie par les parties qui n’est d’ordre public que dans l’ordre juridique interne, n’a pas vocation à s’appliquer en l’absence de lien étroit avec le territoire de l’Union européenne, y compris en présence d’une clause contraire.

Elle ajoute que la CJUE, dans sa décision du 04 juin 2020 Transdetteuse SARL c./ DCA Sarl C-828/18 relative au pouvoir de négociation, a indiqué qu’il s’agissait d’une notion autonome du droit de l’Union qui doit être interprétée de manière uniforme sur le territoire de cette dernière et que les différentes versions linguistiques de la directive n’impliquaient pas que l’agent commercial dispose de la faculté de fixer le prix des marchandises; que ce faisant elle indique que le droit de l’Union se doit être cohérent et uniforme, quelle que soit la version linguistique et donc l’Etat membre qui l’applique; qu’en application de ces principes et de la décision CJUE du 16 février 2017, il est nécessaire d’avoir une position commune sur l’inapplicabilité de la protection du droit européen à un agent non-européen agissant dans un Etat tiers.

Elle déclare que dans son arrêt du 4 juin 2020, la CJUE insiste sur le fait que l’interprétation qui doit être donnée à la directive 86/653 ne peut aller ‘à l’encontre des objectifs de cette directive ; qu’il serait totalement contraire aux finalités recherchées par la directive 86/653 et le TUE de faire bénéficier d’une protection un opérateur économique tiers agissant sur les marchés d’Etats tiers, alors même que cette directive a pour but la construction du seul marché intérieur; que dans un tel cas, ce régime mis en place pour ‘protéger le marché commun’ deviendrait alors ‘protecteur’ d’opérateurs tiers au détriment du mandant, opérant lui dans le marché commun, et donc au détriment du marché commun, ce qui est en violation complète des objectifs du TUE et TFUE et constitutif d’un abus de droit; qu’une telle application aboutirait également à créer une distorsion de concurrence préjudiciable pour les mandants européens face à leurs concurrents non européens en leur faisant supporter un coût très élevé que les mandants des Etats tiers ne supportent pas; qu’à l’inverse, la CJUE, en précisant qu’il ne peut être dérogé au régime instauré par la directive 86/653 pour les agents oeuvrant au sein du marché intérieur, nonobstant une clause de choix de loi prévoyant le droit d’un Etat tierce, a équilibré les conditions du marché au sein du marché intérieur pour tous les mandants qu’ils soient européens ou non, puisque tous supportent ainsi les mêmes coûts.

S’appuyant sur la consultation du professeur [J] [I], qui afin d’éclairer le point de droit européen posé et la problématique de l’applicabilité d’une loi de transposition produisant des effets contraires à ceux recherchés par la directive, invite à saisir la CJUE d’une question préjudicielle , la SAS Lutetia formule une demande en ce sens.

La société Novateam SA De CV réplique qu’en matière internationale, les parties sont libres de choisir la loi applicable au contrat en application du principe de l’autonomie de la volonté; qu’en l’espèce, elles ont choisi la loi française en tant que droit applicable; que la directive européenne, et par voie de conséquence, la loi française a vocation à s’appliquer à tous les agents commerciaux qu’ils exercent leur activité en France ou à l’étranger, sans restriction aucune; que ce choix d’appliquer la loi française à un contrat d’agent international est libre et ne heurte aucune ordre public et encore moins l’ordre public communautaire; que la Directive n’a pas pour objet de limiter le champ d’application des lois nationales des pays de l’Union mais de fixer des normes minimales de protection des agents commerciaux dont l’activité s’exerce dans le marché de l’Union; qu’elle ne contient pas de règle de conflit de lois.

Elle fait valoir que l’arrêt de la CJUE (affaire C-507/15 Agro Foreign Trade & Agency Ltd c/Petersime NV) vanté par la SAS Lutetia traitait d’une question propre à la législation belge, à savoir si le droit belge, qui avait été choisi par les parties au contrat en cause, pouvait limiter l’application des dispositions de la Directive Européenne 86/653 uniquement au cas dans lesquels l’agent commercial exerce ses activités dans les états membres de l’Union; que la réponse de la Cour a été affirmative; que donc, si selon la CJUE les législations des pays de l’Union peuvent limiter le champ d’application territorial de la protection accordée aux agents commerciaux qui exercent leurs activités à l’intérieur de l’Union, a fortiori elles peuvent étendre le champ territorial de la protection accordée aux agents qui exercent leurs activités en dehors des pays de l’Union; que la législation française ne limite pas le champ des dispositions des articles L.134 et suivants du code de commerce aux agents commerciaux exerçant ses activités dans les état membres de l’Union; que la Directive a pour but d’imposer aux Etats membres de l’Union des normes de protection minimale aux agents commerciaux exerçant dans le marché de l’Union; qu’elle ne contient pas de règle de conflit de lois.

Elle précise que le droit applicable au contrat d’agence commerciale doit être déterminé par les règles de conflit de lois applicables dans l’Etat de la juridiction compétente; que le droit applicable peut être désigné soit, comme en l’espèce, par une clause de choix du droit applicable conclue entre les parties, soit par les règles relatives audit choix qui sont applicables en l’absence de choix posé par les parties; que par conséquent, en principe, si le droit applicable au contrat d’agence est le droit d’un Etat membre, les dispositions nationales transposant la directive 86/653 sont applicables, ce qui ne veut pas dire que la directive exige des Etats membres de limiter l’application de ses dispositions uniquement aux cas dans lesquels l’agent commercial exerce ses activités dans les Etats membres de l’Union; que les Etats membres de l’Union ne peuvent déroger aux dispositions impératives de protection de la Directive européenne 86/653 au détriment de l’agent commercial, ce qui laisse aux Etats membres de l’Union toute latitude d’adopter des dispositions plus protectrices des agents commerciaux; que cette directive n’a pas pour objectif, comme le soutient la SAS Lutetia, d’empêcher un état membre de l’Union de disposer d’une législation sur les agents commerciaux qui renforce cette protection et/ou en étend le champ d’application territorial.

Elle critique la consultation par la SAS Lutetia du professeur [I] qu’elle verse aux débats en ce que son auteur présuppose que le fait que la loi française n’ait pas limité le champ d’application du régime protecteur des agents commerciaux aux seuls agents commerciaux établis dans un état membre de l’Union européenne pourrait être assimilée à une forme de sur transposition de la Directive 86/653/CEE; qu’une sur transposition consiste à élargir le champ d’application en adoptant des dispositions législatives, réglementaires, complémentaires ou en introduisant des exigences supplémentaires, ou à introduire des objectifs à atteindre et des échéances à respecter; que cela n’est pas le cas de la directive européenne transposée en droit français qui consacre les droits fondamentaux de l’agent commercial dans les différents droits des pays de l’Union; que le raisonnement du professeur [I] qui consiste à partir de l’hypothèse de la Directive qui est celle de l’ordre public de protection de l’agent commercial exerçant à l’intérieur de la Union pour en déduire a contrario l’hypothèse opposé d’un ordre public interdisant la protection d’un agent exerçant à l’extérieur de l’union est proprement absurde; que la législation communautaire n’a pas vocation à régir la situation des agents ayant une activité en dehors de l’Union et encore moins de protéger les mandants de l’Union ou de régler une éventuelle distorsion de concurrence entre les mandants établis dans l’Union et les mandants établis en dehors de l’Union; que l’absence d’autolimitation de la loi française sur les agents commerciaux ne saurait être assimilés à une sur transposition dès lors qu’il ne s’agit pas d’une norme plus contraignante que celle qui résulterait de la stricte application de la Directive; qu’en effet la Directive n’a pas vocation à régir les agents commerciaux qui exercent en dehors de l’Union; qu’or la question d’harmonisation des conditions de concurrence ne se pose qu’à l’intérieur du marché de l’Union et ne pose nullement entre un pays membre de l’Union et un pays non membre; que le fait pour une législation de laisser aux parties le libre choix de la loi applicable aux situations non régies par la Directive ne peut avoir pour effet de créer une distorsion de concurrence à l’intérieur du marché de l’Union puisque les parties peuvent, dans l’hypothèse où l’agent n’exerce pas dans un pays de l’Union, librement décider d’échapper au champ d’application de la Directive en élisant la Loi de leur choix; que dans ces conditions, il est faux de soutenir que l’attribution aux agents commerciaux qui exercent leurs activités en dehors de l’Union d’une protection comparable à celle des agents qui exercent leurs activités à l’intérieur de l’Union est susceptible de rompre l’équilibre des droits et obligations entre les agents et les commettants dès lors que ces derniers sont libres de choisir la loi applicable à leur relation; que c’est nier le principe de l’autonomie de la volonté, qui est la règle en matière de droit international privé que de vouloir faire échec à la loi choisie par les parties alors que celle-ci ne contrevient pas à l’ordre public international.

Elle précise que la Cour de cassation a rappelé à maintes reprises que la loi du 25 juin 1991 n’est pas une loi de police applicable dans l’ordre international’; que le principe de la loi d’autonomie est rappelé à l’article 5 alinéa 1er de la convention de la Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux contrats d’intermédiaire et à la représentation en vigueur en France depuis le 01er mai 1992; que l’application de cette convention conduit, au cas d’espèce, à appliquer la Loi française, sans qu’aucune Loi de police ne puisse lui faire obstacle.

La société Novateam SA De CV s’oppose à la saisine de la CJUE de la question préjudicielle telle que rédigée, la double négation employée ne pouvant entraîner qu’une réponse négative de cette juridiction.

Si, comme le souligne la société Novateam SA De CV, un décret du 23 décembre 1958 prévoyait déjà une indemnisation compensatrice de préjudice subi en cas de résiliation du contrat, sauf faute de l’agent dont le champ d’application n’était pas limité aux agents exerçant en France, les dispositions légales dont elle sollicite l’application sont celles des articles 134-1 et suivants du code de commerce dont il est établi qu’elles sont issues de la loi n°91-593 du 25 juin 1991 relative aux rapports entre les agents commerciaux qui transpose la Directive Européenne 86/653 du 16 décembre 1986 relative à la coordination des droits des Etats membres concernant les agents commerciaux indépendants des systèmes juridiques des Etats.

La directive européenne 86/653 prévoit, en ses articles 17 et 18, le principe du droit à indemnité de l’agent du fait de la cessation du contrat (transposé en droit interne français à l’article 12 de la loi de 1991 codifié à l’article L.134-12 du code de commerce) ‘chaque Etat membre prévoit dans son ordre juridique le principe du droit de l’agent commercial ou de ses héritiers d’obtenir, après la cessation du contrat, sous certaines conditions, une indemnité de clientèle.’»

Il n’est pas contesté que la directive européenne 86/653 a vocation à s’appliquer aux agents commerciaux exerçant leur activité dans l’Union Européenne, même si les parties ont choisi une loi autre que celle d’un pays de l’Union Européenne; qu’en revanche, elle n’a pas vocation à s’appliquer aux agents commerciaux exerçant en dehors de l’Union.

Dans son arrêt Ingmar précité, la CJUE a énoncé «’qu’il est essentiel dans l’ordre juridique communautaire qu’un commettant établi dans un pays tiers, dont l’agent commercial exerce son activité à l’intérieur de la Communauté, ne puisse éluder ces dispositions [de la directive] par le simple jeu d’une clause de choix de loi. La fonction que remplissent les dispositions en cause exige en effet qu’elles trouvent application dès lors que la situation présente un lien étroit avec la Communauté, notamment lorsque l’agent commercial exerce son activité sur le territoire d’un Etat membre, quelle que soit la loi à laquelle les parties ont entendu soumettre le contrat.’»

La Cour a conclu que «’les articles 17 et 18 de la directive, qui garantissent certains droits à l’agent commercial après la cessation du contrat d’agence, doivent trouver application dès lors que l’agent commercial a exercé son activité dans un Etat membre et alors même que le commettant est établi dans un pays tiers et que, en vertu d’une clause du contrat, ce contrat est régi par la loi de ce pays.’»

Dans un arrêt du 16 février 2017 (C-507/15 Agro Foreign Trade) la Cour de justice de l’Union européennne est venue préciser le champ d’application territorial de la directive n°86/653 dans un litige opposant une société de droit turc agissant en qualité d’agent commercial d’une société de droit belge en vertu d’un contrat d’agence commerciale soumis au droit belge et à la compétence exclusive des tribunaux de Gand. L’agent commercial exerçait son activité en Turquie et disposait pour ce faire des droits exclusifs de ventes des produits de son mandant sur ce territoire.

Après rupture de la relation contractuelle par le mandant, l’agent l’a assigné devant le tribunal de Gand pour obtenir sa condamnation au paiement de diverses sommes dont notamment une indemnité compensatoire du préjudice résultant de la résiliation du contrat.

La question posée était de déterminer si la loi belge qui prévoyait que ‘toute activité d’un agent commercial ayant son établissement principal en Belgique relève de la loi belge et de la compétence des tribunaux belges’ tranposant la directive tout en réduisant le champ d’application territorial aux agents commerciaux établis en Belgique, était applicable en l’espèce, et pouvait empêcher l’agent turc d’invoquer la protection offerte par ladite directive en cas de résiliation de son contrat par son mandant. Ainsi la condition de domiciliation de l’agent commercial en Belgique pouvait-elle, in fine, priver l’agent turc de tout droit à indemnité, et ce alors même que la loi belge n’excluait pas son application à tout agent établit en dehors de la Belgique. La Cour de justice de l’Union européenne a répondu par l’affirmatif.

La CJUE énonce qu”il n’est pas nécessaire, aux fins d’uniformiser les conditions de concurrence à l’intérieur de l’Union entre les agents commerciaux, d’offrir aux agents commerciaux qui sont établis et exercent leurs activités en dehors de l’Union une protection comparable à celle des agents qui sont établis et/ou exercent leurs activités à l’intérieur de l’Union.’

Elle considère que les dispositions protectrices de la directive n’ont pas vocation à s’appliquer impérativement à un agent commercial qui exerce ses activités en dehors de l’UE (et ce même si son mandant est établi dans l’UE) dans la mesure où une telle situation ne présente pas de lien suffisamment étroit avec l’UE; que l’agent turc n’a donc pas bénéficié du régime protecteur du droit belge par les parties.

Il n’est pas contesté que la Directive européenne 86/563 a instauré un régime protecteur des agents commerciaux.

Ainsi, selon la CJUE, la directive européenne n°86/653 vise à protéger les agents commerciaux dès lors que la situation en cause présente un lien étroit avec l’Union européenne. Elle doit recevoir application ‘alors même que le commettant est établi dans un pays tiers et que, en vertu d’une clause du contrat, ce dernier est régi par la loi de ce pays.’ La protection offerte par cette directive bénéficie à tout agent commercial qui exerce son activité sur le territoire de l’UE et ce, indépendamment de la loi applicable choisie par les parties au contrat (CJUE 9 novembre 2000, C-381/98 Ingmar), en revanche, un agent commercial établi et exerçant son activité hors territoire de l’UE ne dispose pas impérativement de cette protection dès lors que la loi nationale transposant la directive limite le champ d’application territorial aux agents commerciaux établis sur son territoire (CJUE 16 février 2017, Agro Foreign Trade & Agency).

L’espèce soumise à la cour diverge toutefois des affaires soumises à la CJUE.

En effet, le commettant est domicilié dans un Etat membre de l’UE tandis que l’agent commercial est domicilié dans un Etat tiers et exerce son activité dans un Etat tiers, et les parties ont choisi la loi française et son statut protecteur de l’agent commercial qui ne limite pas son champ d’application territorial.

Or, La convention de la Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux contrats d’intermédiaires et à la représentation, à laquelle la France est partie, permet aux parties de désigner la loi applicable à leurs relations contractuelles même s’il s’agit de la loi d’un état non contractant.

Le principe de l’autonomie de la volonté est énoncé à l’article 5 de cette convention qui dispose que «’La loi interne choisie par les parties régit le rapport de représentation entre le représenté et l’intermédiaire.’»

Certes le droit à indemnité de l’agent commercial est une loi de police sur le territoire de l’Union européenne qui fait obstacle à l’autonomie de la volonté sur le territoire de l’Union européenne, tel n’est pas le cas dès lors que l’agent commercial exerce hors de l’Union européenne.

Dans sa transposition de la directive européenne, la loi française n’a pas limité son champ d’application territorial à son territoire ou’, de manière plus étendue au territoire de l’ensemble des autres Etats membres de l’Union européenne.

Il résulte toutefois du caractère non impératif du statut protecteur des agents commerciaux issu de la directive européenne pour des agents commerciaux domiciliés et exerçant leur activité dans un Etat tierce, tel qu’il résulte de l’interprétation de la directive européenne donnée par la CJUE ne fait pas, pour autant, obstacle à ce que les parties conviennent d’un droit à indemnité au bénéfice d’un agent commercial domicilié et exerçant hors territoire de l’Union européenne lorsqu’une clause du contrat le prévoit, au nom du principe de l’autonomie de la volonté en droit international privé.

Le juge devant, en vertu du principe d’autonomie de la volonté, devant se conformer au choix des parties et appliquer la loi définie par ces dernières pour régir leur contrat, à savoir les dispositions des articles L. 134-1 et suivant du code de commerce, et plus particulièrement celles de l’article L.134-12 qui prévoit le droit à indemnité de l’agent commercial en cas de cessation du contrat, sans qu’il soit nécessaire de renvoyer à la CJUE pour question préjudicielle.

Il convient, dans ces conditions, de débouter la SAS Lutetia de sa demande tendant à ce que soit posée une question préjudicielle.

Les demandes de la société Novateam SA de CV sur le fondement des dispositions des articles L.134-1 et suivants du code de commerce sont par conséquent recevables.

Sur la demande en nullité du contrat pour faute grave de la société Novateam SA De CV constitutive d’un dol et sur la faute lourde de la SA Novateam SA De CV

La SAS Lutetia explique qu’elle a été trompée par la société Novateam SA De CV qui, pour obtenir une participation au budget de développement commercial, a menti sur le coût réel de ces frais’; que le contrat signé le 01er septembre 2014 intégrait un coût salarial de 2.840 € par mois pour M. [N] [P]’; qu’au cours de la procédure de première instance, la société Novateam SA De CV a produit le contrat qui la liait à ce dernier, désigné comme dédié à l’activité Lutetia et qui prenait aussi effet au 01er septembre 2014, qui prévoyait pour l’année 2016 le paiement mensuel d’une somme de 35000 pesos, soit à peine 1.300 € (avec un taux de conversion moyen de 1 euro = 0,05 pesos pour l’époque)’; qu’il est évident que cette rémunération était inférieure en 2014 et 2015, voire inexistante puisqu’aucun contrat n’est produit’; que ce n’est qu’au cours de la procédure que la société Lutetia a eu connaissance des mensonges et des man’uvres de son représentant dont elle avait été victime ab initio’; que la faute de la société Novateam SA De CV est constituée par la fourniture d’informations financières mensongères destinées à emporter le consentement de la société Lutetia, couplée à de nombreuses omissions et actions de la société Novateam’; que si elle avait eu connaissance des frais, initialement censés faire partie du budget, facturés en sus, du montant réel des frais à supporter, ajoutés au taux exorbitant de commission, elle n’aurait pas contracté’; que ce mandat n’est pas «’d’intérêt commun’» car il permet à la société Novateam, simple auxiliaire, de se rémunérer plus que le fabricant sur le cours du contrat, et bien plus encore si elle était éligible à une indemnité de fin de contrat.

Elle soutient que si la cour décidait que ces agissements ne constituent pas un dol, ils constituent une faute grave qui prive la SA Novateam de toute indemnité au titre de l’article L. 134-12 du code de commerce.

La société Novateam SA De DV réplique que la demande de nullité du contrat d’agence pour dol est une demande nouvelle en cause d’appel’; qu’elle est donc irrecevable.

Elle soutient, au fond, qu’il s’agit d’allégations à son encontre infondées et dépourvues de justification’; qu’elle démontre qu’elle réglait un salaire mensuel net de charges salariales et patronales respectivement de 50.000 pesos pour M. [P] et de 35.000 pesos pour Mme [O], tous deux dédiés exclusivement à la vente des produits de la SA Lutetia, soit un coût mensuel pour ces deux salariés de 9.300 €, sans les charges patronales et salariales’; que la participation mensuelle de 2.000 € aux frais est très modeste’; que l’augmentation à 3.000 € démontre que cette dernière avait parfaitement conscience de la nécessité et de l’utilité d’une telle participation pour l’exécution du contrat’; qu’en ce qui concerne les salons, la société Novateam n’a répercuté sur la société Lutetia que la moitié des frais supportés, ce qui avait été convenu entre les parties et exécuté par elle.

Elle ajoute que la société Lutetia se complaît à réécrire les faits a posteriori pour accréditer un dol imaginaire alors qu’elle a accepté en toute connaissance de cause les conditions de rémunération de la société Novateam’; qu’elle invente une obligation d’information précontractuelle à la charge de l’agent commercial qui n’existe pas et se contente de soutenir que la société Novateam aurait été déloyale, la déloyauté ayant consisté à lui faire signer un contrat d’agent commercial sans l’avoir informée au préalable de son régime juridique’; qu’il appartenait à la société Lutetia de s’informer ou de se faire conseiller sur ce point.

L’article 564 du code de procédure civile dispose qu’«’A peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait’».

L’article 565 de ce code énonce que «’Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.’»

Selon l’article 566, «’Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.’»

Il ressort du jugement dont appel que la SAS Lutetia n’a pas sollicité des premiers juges la nullité du contrat pour dol.

Cette demande de nullité du contrat pour dol en cause d’appel ne tend pas aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, et ne constitue pas davantage l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions soumises au premier juge, la SAS Lutetia n’ayant jamais formé une telle demande en première instance puisqu’elle sollicitait le débouté de la société Novateam de l’ensemble de ses demandes et sa condamnation au paiement de dommages intérêts en réparation d’un préjudice commercial, le fait d’indiquer dans ses écritures que «’ La société Lutetia, si elle avait eu connaissance de ces éléments [qui ont vicié son consentement], elle n’aurait jamais contracté avec la société Novateam et certainement pas dans ces conditions.’»

S’agissant des mensonges et man’uvres dolosives, l’erreur sur le coût salarial évoqué par la SAS Lutetia, la présentation d’un budget intentionnellement mensonger pour tromper le consentement de son cocontractant et l’inciter à signer le contrat en lui faisant notamment croire qu’il ne supportera qu’un tiers du budget, à titre exceptionnel, le taux exorbitant, selon elle, de commission ne constitue ni la survenance ni la révélation d’un fait postérieurs dès lors qu’elle indique dans ses conclusions d’appel en avoir eu connaissance au cours de première instance, ce qui lui permettait d’opposer aux prétentions de la société Novateam sa prétention tendant à la nullité du contrat d’agent commercial.

Il en est de même du fait que la société Novateam a rédigé le contrat d’agent commercial, et plus particulièrement les clauses relatives à l’attribution de compétence «’aux tribunaux selon les règles de procédure d’arbitrage du tribunal de Rennes’» et à la loi française bien plus protectrice que la loi mexicaine. En effet, outre le fait que l’agent commercial n’est tenu à aucune obligation d’information précontractuelle à l’égard de son mandant, comme l’indique, justement la société Novateam SA De CV, il appartenait à la SAS Lutetia, société de droit français, de s’informer sur le contenu de la loi française en matière de contrat d’agent commercial, et notamment sur les conditions de sortie du contrat. Aucune faute constitutive d’un dol ne peut donc être reprochée à la société Novateam SA De CV à cet égard.

En tout état de cause, à supposer que la SAS Lutetia ait eu connaissance des mensonges et des man’uvres de la société Novateam SA De CV et partant la déloyauté intentionnelle constitutive d’un dol, en cours de procédure, elle disposait alors de toute latitude de saisir les premiers juges d’une demande de nullité du contrat d’agent commercial pour faute grave constitutive d’un dol, ce qu’elle n’a pas fait.

Dès lors sa demande de nullité pour dol formée en cause d’appel est une prétention nouvelle qu’il convient de déclarer irrecevable.

Aucune pièce probante ne vient davantage étayer un comportement déloyal de la part de la société Novateam SA De CV constitutif d’une faute grave résultant des agissements qu’elles dénoncent pour illustrer le dol, qui la priverait de son droit à indemnité, aucune mauvaise foi ou comportement déloyal de sa part n’étant démontrée tant lors de la conclusion du contrat, qu’au cours de son exécution, le différend sur le solde de tout compte entre les parties, sa demande d’indemnité lors de la cessation du contrat, le règlement de factures de la société Novateam par son dirigeant et propriétaire sur son compte personnel au Panama, les diverses procédures engagées identiques démontrant les mêmes man’uvres déloyales n’y suffisant pas.

Dès lors, la société Novateam SA De Cv est fondée à se prévaloir de son droit à indemnité au titre de l’article L.134-12 du code de commerce.

Sur le reliquat des commissions restant dû

L’article L. 134-9 du code de commerce dispose que «’la commission est acquise dès que le mandant a exécuté l’opération ou devrait l’avoir exécuté en vertu de l’accord conclu avec le tiers ou bien encore dès que le tiers a exécuté l’opération.

Le commission est acquise au plus tard lorsque le tiers a exécuté sa part de l’opération ou devrait l’avoir exécutée si le mandant avait exécuté sa propre part. Elle est payée au plus tard le dernier jour du mois qui suit le trimestre au cours duquel elle était acquise.

Selon l’article L.134-10 de ce code’ «’ le droit à la commission ne peut s’éteindre que s’il est établi que le contrat entre le tiers et le mandant ne sera pas exécuté et si l’inexécution n’est pas due à des circonstances imputables au mandant.’

Les commissions que l’agent commercial a déjà perçues sont remboursées si le droit y afférent est éteint.»

Le tribunal a fait droit à la demande de la société Novateam SA De CV au titre des commissions sur les affaires suivantes’:

Bafar pour une vente d’un montant de 324.928 € représentant une commission d’un montant de 67.000 € dont un solde restant dû de 13.000 € (facture de commission n°603)

Felder Foods pour une vente d’un montant total de 662.730 € représentant une commission d’un montant de 128.530 € dont un solde restant dû de 25.706 € (facture de commission n°357 et n°468)

Bir Alimentos pour une vente d’un montant total de 139.500 € représentant une commission d’un montant de 26.502 € dont un solde restant dû de 7.950 € (facture de commission n°577).

La SAS Lutetia indique n’avoir jamais contesté ces montants et a confirmé qu’elle procéderait aux règlements en question dès qu’elle recevrait les paiements correspondants des clients conformément au contrat’; que ces montants n’ont toujours pas été réglés, ce qui est démontré par les extraits de compte clients.

Aux termes de l’article R.134-3 du code de commerce, «’Le mandant remet à l’agent commercial un relevé des commissions dues, au plus tard le dernier jour du mois suivant le trimestre au cours duquel elles sont acquises. Ce relevé mentionne tous les éléments sur la base desquels le montant des commissions a été calculé.

L’agent commercial a le droit d’exiger de son mandant qu’il lui fournisse toutes les informations, en particulier un extrait des documents comptables nécessaires pour vérifier le montant des commissions qui lui sont dues.’»

Le paragraphe 5.3 du contrat de représentation exclusive stipule «’La commission sera versée, en fonction de chaque facture de client réglée à la SOCIETE, au REPRESENTANT dans un délai maximal de dix jours ouvrables après la réception des paiements suivants par la SOCIETE et dans la devise stipulée dans le contrat signé entre la SOCIETE et le client sur le Territoire.’»

La production par la SAS Lutetia des extraits de comptes clients litigieux faisant état d’un justificatif d’un solde dû par ces derniers non certifiés par un commissaire aux comptes ne suffisent pas à démontrer la réalité de ce solde.

La SAS Lutetia ne justifie d’ailleurs d’aucune mesure en vue du recouvrement des sommes qui lui resteraient dues.

S’agissant plus particulièrement de l’extrait de compte du client Bir Alimentos qui est nul en raison d’un avoir que la SAS Lutetia a dû émettre du fait d’une intervention que le client a dû faire réaliser à cause de la mauvaise communication des informations par la société Novateam à la SAS Lutetia, selon ses dires, les pièces 19 (exemple d’avoir émis par Lutetia sur le compte client Bir-Alimentos) et 49 (note du client Bir Alimentos avec traduction libre) ne permettent pas d’imputer à la société Novateam SA De CV une mauvaise communication des informations par l’agent commercial à son mandant, étant observé que la SAS Lutetia ne précise pas en quoi la communication d’informations aurait été mauvaise.

Il convient, dans ces conditions, confirmant le jugement entrepris, de condamner la SAS Lutetia à payer à la société Novateam SA De CV la somme de 46.656,60 € au titre du solde des commissions restant dues.

Sur le droit à commission au titre de l’article L.134-6 et 7 du code de commerce

Aux termes de l’article L. 134-5 du code de commerce, «’Tout élément de la rémunération variant avec le nombre ou la valeur des affaires constitue une commission au sens du présent chapitre.

Les articles L. 134-6 à L. 134-9 s’appliquent lorsque l’agent est rémunéré en tout ou partie à la commission ainsi définie.

Dans le silence du contrat, l’agent commercial a droit à une rémunération conforme aux usages pratiqués, dans le secteur d’activité couvert par son mandat, là où il exerce son activité. En l’absence d’usages, l’agent commercial a droit à une rémunération raisonnable qui tient compte de tous éléments qui ont trait à l’opération.’»

Selon l’article L.134-6 de ce code «’Pour toute opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d’agence, l’agent commercial a droit à la commission définie à l’article L. 134-5 lorsqu’elle a été conclue grâce à son intervention ou lorsque l’opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour les opérations du même genre.

Lorsqu’il est chargé d’un secteur géographique ou d’un groupe de personnes déterminé, l’agent commercial a également droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat d’agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe.’»

L’article L. 134-7 dispose que «’Pour toute opération commerciale conclue après la cessation du contrat d’agence, l’agent commercial a droit à la commission lorsque l’opération est principalement due à son activité au cours du contrat d’agence et a été conclue dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat, soit lorsque, dans les conditions prévues à l’article L. 134-6, l’ordre du tiers a été reçu par le mandant ou par l’agent commercial avant la cessation du contrat d’agence.’»

Le tribunal a fait droit à la demande de la société Novateam SA De CV au titre des commissions sur les affaires suivantes’:

Ariztia pour un montant de 42.780 €

Pilgrim’s Pride pour un montant de 75.452,67 €’, et condamné la SAS Lutetia à payer à la société Novateam SA De CV la somme de 118.232,67 €.

Le paragraphe 7.3 du contrat de représentation exclusive stipule «’ Suite à la résiliation du présent contrat, le REPRESENTANT peut prétendre à une commission associée à toutes les transactions

7.3.1 impliquant des négociations commerciales menées par le REPRESENTANT et ayant donné lieu à un contrat, ou

7.3.2 lorsque le REPRESENTANT a exécuté les travaux préparatoires de la transaction et que le Projet est réputé avoir vu le jour principalement en raison de la participation du REPRESENTANT pendant la durée du présent Contrat.’»

La SAS Lutetia fait valoir qu’il n’y a pas aucun besoin de réserver le client Aritztia qui est situé au Chili, pays qui ne fait pas partie du territoire défini dans le contrat de représentation signé entre les parties’; qu’il s’agit d’un client direct historique de la société Lutetia qui lui commande directement depuis plus de 20 ans’; que son interlocuteur commercial a toujours été M. [D], directeur commercial de la société Lutetia avant, pendant et après le contrat et ce de manière continue sans aucun travail de la société Novateam’; que la facture Novateam est en outre datée du 3 juillet 2019, soit presqu’un an après la résiliation du contrat au 31 août 2018, fort opportunément quelques jours avant que la société Novateam n’assigne la société Lutetia.

La société Novateam SA De CV réplique qu’elle avait obtenu que son mandat soit étendu sur le territoire du Chili dès le début de l’année 2017, comme le prouvent les échanges de courriels entre les parties et les démarches accomplies par l’agent dans ce territoire en exécution d’un mandat verbal, étant précisé que la preuve du mandat peut être faite par tous moyens’; que la SAS Lutetia avait l’obligation légale de fournir un avenant à la société Novateam qui le lui avait demandé, conformément à l’article L.134-2 du code de commerce’; que concernant Ariztia, elle a effectué un travail de prospection spécifique depuis janvier 2017, qui s’est concrétisé par plusieurs visites sur zones et la réalisation de 5 devis, d’août 2017 à mai 2018′; que la passation de cette commande est intervenue le 07 août 2018 et confirmée le 03 janvier 2019′; que le client Ariztia ne figurait pas dans le contrat comme un client réservé à la société Lutetia qui n’a jamais élevé la moindre opposition lorsque la société Novateam lui a rendu compte de ses tournées au Chili’; que ce client figurait déjà en prospect dans son rapport en date de juillet 2017 pour deux équipements, qui ont finalement bien été commandés le 07 août 2018, soit avant la fin du contrat d’agence.

Selon l’article L. 134-2 du code de commerce «’chaque partie a le droit, sur sa demande, d’obtenir de l’autre partie un écrit signé mentionnant le contenu du contrat d’agence, y compris celui de ses avenants.’»

Il est admis que le contrat d’agence commerciale peut être prouvé par de simples échanges de correspondances.

En l’espèce, la société Novateam SA De CV verse aux débats des échanges de courriels entre les parties ( courriel de Novateam à Lutetia en date du 03 février 2018 où Novateam confirme sa zone géographique des zones du contrat et le Chili «’suite à notre accord verbal», courriels de Novateam à Ariztia entre le 11 février et le 23 mai 2018 avec copie à la SAS Lutetia M. [B] [D], courriel de Novateam à Lutetia du 29 août 2017 où M. [P] indique à M. [D] «’/”comme tu le sais nous travaillons avec [L] le chili depuis novembre 2016 date à laquelle tu nous as confié la zone pour Lutetia (dans le contrat depuis janvier 2017)

Depuis cette date nous avons 2 tournées (février et juin ), et [A] est venu renforcé l’équipe et une de ses missions est le développement commercial du Chili.

Tu trouveras en PJ les offres faites sur la zone, en plus de ces offres nous avons du 7 au 15 septembre une tournée au Chili avec des visites chez Agrosuper, Ariztia,’), courriel de Ariztia à Novateam du 31 juillet 2018) ainsi que les rapports d’activités Novateam juillet 2017 et décembre 2017.

Si effectivement le Chili ne faisait pas partie du Territoire couvert par le contrat d’agence commerciale, ces éléments suffisent à rapporter la preuve que le territoire de prospection de la société Novateam pour le compte de la SAS Lutetia s’est trouvé étendu au Chili au début de l’année 2017, aucune justification d’une réaction de M. [D] aux emails ci-dessus dont il était destinataire pour s’opposer à cette extension de zone n’étant au demeurant produite.

Les pièces versées aux débats par la société Novateam, dont la SAS Lutetia ne conteste pas qu’il s’agit de devis adressés par Novateam à Ariztia entre août 2017 et mai 2018, un ordre d’achat Ariztia d’août 2018 et la confirmation d’ordre d’achat Aritzia de janvier 2019, suffisent également à établir la commande passée par la société Aritzia à la société Lutetia par l’intermédiaire de la société Novateam SA De CV.

Il s’ensuit que la société Novateam SA De CV est fondée à solliciter le règlement de sa commission pour un montant non sérieusement discuté de 42.780 €.

La société Novateam SA De CV sollicite également une commission d’un montant de 75.452,67 € sur les affaires réalisées avec le client Pilgrim’s Pride (factures n°622 commission sur acompte et n°623 pour solde de commission).

La SAS Lutetia indique qu’elles ont été émises le 21 décembre 2018, bien tardivement après la résiliation et en toute hypothèse préalablement au règlement amiable intervenu par le solde de tous comptes de mars 2019′; que les parties ont décidé de ne pas en tenir compte dans leur règlement amiable puisque ces montants ont été soldés dans les discussions relatives au solde de tous comptes, librement négocié au bénéfice de la société Novateam comme le démontre la comparaison entre le premier projet de solde de tous comptes proposé et celui signé’; qu’il n’est pas démontré que ces commandes seraient intervenues dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat, et en quoi elles seraient principalement dues à son activité au cours du contrat’; que le client a pris contact directement avec la société Lutetia comme le montre son message qui interroge Lutetia, alors que le contrat est résilié et que l’existence d’un représentant était inconnue du client en charge de cette demande, sur l’existence d’un distributeur ici au Mexique et si on peut acheter directement à Lutetia en France.

Toutefois, par la production des pièces 19 (devis de Novateam à Pilgrims’Pride de décembre 2015 à mai 2018) 29 ( rapport d’activité Novateam décembre 2017) 42 (courriels de Novateam ([N] [P]) à Pilgrim’s Pride ([K] [R]) du 18 janvier, 28 mars 2018 sur les essais d’équipement chez le client, 46 (courriel de Novateam ([N] [P]) à Pilgrim’S Pride ([K] [R]) du 25 mai 2018, 37 (courriel de [N] [P] à [X] [M] du 18 septembre 2018 ( commandes Pilgrims et Ariztia), 43 (courriel d'[E] [U] Pilgrims’S Pride à [N] [P] du 03 août 2018), la société Novateam rapporte la preuve que les deux commandes passées en septembre et octobre 2018, soit quelques mois après la rupture du contrat intervenue en mai 2018 l’ont été grâce à l’intervention de l’agent commercial, de sorte que cette dernière est fondée à solliciter la commission sur la commande de 2 tumblers T7 dans l’usine Los Cues intervenue en octobre 2018′, soit la somme de 75.452,67 €.

Les termes du courriel de [E] [U] à Lutetia, le 03 septembre 2018, soit 4 jours après l’email adressé par M. [U] à Novateam ne remettent pas en cause l’intervention de Novateam dans la commande du matériel, objet de la commission réclamée.

A cet égard, il y a lieu d’observer que la SAS Lutetia ne conteste pas que la vente à la société Pilgrim’s Pride de 3 tumblers T7 en septembre 2018 pour l’usine Citra et pour laquelle la société Novateam a été commissionnée.

Il y a lieu dans ces conditions, confirmant le jugement dont appel, de condamner la SAS Lutetia à payer à la société Novateam SA De CV la somme de 118.232,67 € au titre des commissions de l’article L. 134-7 du code de commerce.

Sur la communication sous astreinte des extraits de comptes clients sous astreinte

Par la production d’une attestation du commissaire aux comptes, M. [F] [Y], portant sur le chiffre d’affaires «’Ventes de machines’» réalisé par la société Lutetia au titre des exercices 2019 et 2020 dans les pays couverts par le contrat Novateam du 31 mai 2021, de celle de ce même commissaire aux comptes du 21 février 2022 de la répartition du chiffre d’affaires enregistré au cours de l’exercice de 12 mois clos le 31 décembre 2019 (pièce n°58), et de celle du 23 février 2022 portant sur le chiffre d’affaires «’Ventes de machines’» réalisé au Chili par la société Lutetia au titre des exercices 2019 et 2020 la SAS Lutetia justifie de l’exécution de son obligation d’information.

Il convient, en conséquence, confirmant le jugement déféré, de débouter la société Novateam SA De CV de sa demande de communication sous astreinte.

Sur l’indemnité prévue à l’article L. 134-12 du code de commerce

L’article L.134-12 du code de commerce dispose que «’En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

L’agent commercial perd le droit à réparation s’il n’a pas notifié au mandant, dans un délai d’un an à compter de la cessation du contrat, qu’il entend faire valoir ses droits.’»

Il est admis que l’indemnité compensatrice est une créance légale d’ordre public économique dont le mandant n’est exonéré que dans les trois cas limitativement énuméré par l’article L.134-13 à savoir la faute lourde de l’agent commercial, la cessation du contrat à l’initiative de l’agent à moins qu’elle ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l’âge, l’infirmité ou la maladie de l’agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée, la cession à un tiers des droits et obligations qu’il détient en vertu du contrat d’agence selon un accord avec le mandant.

Dès lors, la société Novateam SA De CV n’a pas à justifier de son droit à indemnité.

Comme retenu ci-avant la preuve d’une faute grave de la société Novateam SA De CV invoquée en l’espèce par la SAS Lutetia pour s’opposer au versement de l’indemnité compensatrice n’est pas rapportée.

Comme le souligne, justement, la SAS Lutetia, la détermination du montant de l’indemnité relève des juges du fond.

Celui-ci correspond généralement à deux années de rémunération calculée sur la moyenne des trois dernières années. Toutefois cette pratique ne s’impose pas au juge.

En l’espèce, la société Novateam SA De CV sollicite la somme de 1.275.130,15 € à ce titre et produit à l’appui de sa demande la pièce 10 intitulée liste certifiée des factures Novateam à Lutetia en 2017 et 2018 et calcul de l’indemnité à hauteur du montant réclamé.

Ces documents qui émanent de la société Novateam ne présentent pas de valeur probante suffisante de la rémunération perçue en ce que ce faisant elle se fournit une preuve à elle-même.

En revanche, le compte du client Lutetia certifié par le commissaire aux comptes de la société Novateam SA De CV faisant état d’une rémunération perçue entre le 27 mars 2017 et le 21 mars 2019 d’un montant de 1.101.490,36 € suffit à établir la réalité des commissions versées au cours de cette période. Il n’y a toutefois pas lieu de prendre en compte les commissions versées postérieurement à la cessation du contrat d’agence commerciale.

Par ailleurs, la SAS Lutetia justifie également par l’attestation de son commissaire aux comptes du 24 juillet 2020 que le chiffre d’affaires moyen par année de la société Novateam SA De CV s’élève à la somme de 219.764,99 €. Il y a lieu d’observer toutefois que ce calcul porte sur toutes les commandes couvertes par le contrat sur la durée de 4 années ( du 01er septembre 2014 au 31 août 2018) et qu’ont été déduits «’le prix des machines de démonstration dont le règlement n’a pas été effectué par la société Novateam ainsi qu’une partie seulement des frais d’installation (puisque pour certaines années les archives sont encore en cours de revue) sans autre explication, ni détail quant aux sommes déduites, ni justification de celles-ci.

Il convient, dans ces conditions, de prendre en compte le montant de la rémunération versée entre le 27 mars 2017 et le 28 février 2018 en considérant qu’elle représente le chiffre d’affaires réalisé au cours des deux années précédentes soit 459.336,08 € pour une année en l’absence d’autres éléments comptables et de fixer , eu égard à la faible durée du contrat, 3 ans et 8 mois, le montant de l’indemnité compensatrice à la somme de 459.336,08 €.

Il convient, infirmant le jugement entrepris, de condamner la SAS Lutetia à payer à la société Novateam SA De CV la somme de 459.336,08 € à titre d’indemnité en application de l’article L.134-12 du code de commerce.

Sur les intérêts

Les intérêts légaux sur le solde des commissions de 46.656,60 € court à compter de 09 mai 2019, date de la mise en demeure qui seront capitalisés en application de l’article 1154 du code civil dès que les conditions légales seront remplies.

Les intérêts légaux sur la somme de 459.336,08 € court à compter du présent arrêt compte tenu de son caractère indemnitaire, qui seront capitalisés en application de l’article 1154 du code civil dès que les conditions légales seront remplies.

Sur la demande en paiement de la société Novateam SA De CV au titre de la répétition des frais d’installation déduits du montant des commissions en raison de la nullité dont est affecté le prétendu solde de tout compte en application de l’article 1235 ancien du code civil

La société Novateam SA De CV sollicite la condamnation de la SAS Lutetia au paiement d’une somme de 37.000 €.

Elle se réfère pour ce faire à la pièce 6-1 de la société mandante dont elle sollicite la nullité.

Cette pièce est intitulée «’solde de tous comptes final signé des parties’».

Il s’agit effectivement d’un document sur trois feuillets revêtus sur le premier et le dernier du cachet de la société Novateam SA De CV et d’une signature précédée de la mention «’Bon pour accord’».

Il fait état d’un montant total dû par la SAS Lutetia de 307.784 dont à déduire la somme de 37.000 € intitulée «’ coût installation’» .

La société Novateam prétend qu’il est entaché de nullité, son consentement aurait été vicié par contrainte économique.

Elle ne verse toutefois aucun élément probant de ce que la SAS Lutetia aurait forcé le consentement de son cocontractant sous la menace de ne pas régler ses arriérés de commissions comme elle le prétend.

Il convient de la débouter de sa demande de nullité de cette pièce.

La société Novateam SA De CV a donc librement consenti à prendre en charge et à ce qu’il vienne s’imputer sur le montant des commissions elles-mêmes et pas sur l’assiette du droit à commission.

Il convient en conséquence de débouter la société Novateam SA De CV de sa demande de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Novateam SA De CV

La société Novateam SA De CV renouvelle sa demande en cause d’appel de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du caractère abusif de la rupture et des actes de concurrence déloyale qui l’ont entourée.

La SAS Lutetia soulève in limine litis et avant toute défense au fond, l’incompétence de la cour, et de manière plus générale des juridictions françaises, au profit du juge mexicain, pour la demande de dommages et intérêts de la société Novateam qu’elle présente en cause d’appel nouvellement fondée sur les articles 1242, 1382, 1384 et 1984 du code civil.

La société Novateam SA De CV réplique que cette exception d’incompétence relève de la seule compétence du conseiller de la mise en état et non du juge du fond, elle est irrecevable dans la mesure où elle est soulevée pour la première fois en cause d’appel.

Elle précise qu’il y a bien deux demandes distinctes dont le fondement est différent’: l’une fondée sur l’article L. 134-12 du code de commerce et l’autre sur le caractère abusif entourant les circonstances de la rupture, ce qui relève de la responsabilité quasi délictuelle.

Certes la société Novateam SA De CV n’a pas précisé en première instance le fondement juridique de sa demande de dommages et intérêts, elle a cependant indiqué qu’elle sollicitait une somme de 200.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du caractère abusif de la rupture et des actes de concurrence déloyale qui l’ont entourée.

Il se déduit de la formulation de cette demande son fondement quasi délictuel, peu important qu’elle invoque nouvellement en appel la responsabilité du fait du commettant qui reste quasi délictuelle, de sorte que le fondement n’est pas nouveau en cause d’appel, lequel se distingue de l’indemnisation de la rupture du contrat sur le fondement des dispositions de l’article L. 134-12 du code du commerce quand bien même les textes n’auraient-ils pas été expressément visés.

La demande n’est donc pas nouvelle en cause d’appel au sens de l’article 564 du code de procédure civile.

La SAS Lutetia est donc irrecevable en son exception d’incompétence de la cour soulevée pour la première fois en cause d’appel alors qu’elle conclut au fond devant les premiers juges ainsi qu’il résulte du jugement dont appel.

Au soutien de sa demande, la société Novateam SA De CV explique que la rupture du contrat d’agence par la SAS Lutetia n’a été motivée que par la volonté de spolier la société Novateam de l’ensemble de son action commerciale sur le territoire entier dont l’importance des affaires en cours et la progression du chiffre d’affaires ont suscité l’envoie de la société Provisur, nouveau propriétaire de la société Lutetia’; que la rupture a été entourée de man’uvres déloyales de la part de la société Lutetia qui, par le truchement du groupe Provisur, a débauché au Mexique l’équipe commerciale de la société Novateam constituée des deux salariés en charge de la représentation des produits de la société Lutetia auprès de la clientèle d’Amérique Latine, Mme [C] [O] et M. [N] [P]’; que par ces agissements déloyaux la société Lutetia s’est appropriée l’expérience, le savoir-faire ainsi que le réseau commercial de la société Novateam et s’est ménagée l’assurance de la relation avec la clientèle et des affaires en cours’; que par ce comportement gravement fautif, la société Lutetia a désorganisé la société Novateam qui se voit privée de deux de ses collaborateurs les plus productifs ayant réalisé sur 4 années plus de 9 millions d’euros sur les produits et solutions Lutetia’; que ces deux collaborateurs auraient pu continuer à générer du chiffre d’affaires et donc dégager de la marge pour les autres mandants de la société Novateam s’ils n’avaient pas été débauchés par la société Lutetia, via sa société mère la société Provisur’; que le principe d’autonomie juridique de sociétés d’un même groupe cède quand il existe une confusion, ce qui est le cas pour les salariés repris par Provisur qui se présentent auprès de la clientèle comme étant Provisur/Lutetia et dans une continuité évidente des rapports qu’ils avaient avec la clientèle lorsqu’ils travaillaient pour la société Novateam.

Elle ajoute que c’est la société Lutetia et non la société Provisur qui facture la clientèle démarchée et prospectée par le anciens collaborateurs de la société Novateam’; que le véritable bénéficiaire de l’activité commerciale déployée par les anciens collaborateurs de la société Novateam est la société Lutetia qui en est le donneur d’ordre’; que c’est à ce titre que la société Lutetia doit être déclarée responsable du débauchage des salariés de la société Novateam par la société Provisur qui n’a agi qu’au nom et pour le compte de sa filiale dans l’intérêt exclusif de cette dernière.

La SAS Lutetia réplique que la société Novateam procède par affirmations sans aucune pièce, sans rien démontrer’; qu’elle prétend nouvellement en appel que la société Lutetia serait le commettant et la société Provisur son préposé’; que la société Lutetia n’emploie pas la société Provisur et n’a aucune autorité sur cette dernière qui n’est aucunement sa subordonnée.

Force est de constater que les pièces 6 A à E visées par la société Novateam pour démontrer, selon elle, que la rupture a été entourée de man’uvres déloyales de la part de la société Lutetia qui, par le truchement du groupe Provisur, a débauché au Mexique l’équipe commerciale de la société Novateam constituée des deux salariés en charge de la représentation des produits de la société Lutetia auprès de la clientèle d’Amérique Latine, Mme [O] et M. [P], qui consistent en les démissions de [N] [P] et [C] [O], deux copies d’écran LinkedIn de [N] [P] et deux copies d’écran LinkedIn de [C] [O], ne rapportent pas la preuve de l’existence des man’uvres déloyales consistant dans le débauchage des deux anciens salariés de la société Novateam SA De CV.

Par ailleurs, comme l’a rappelé, à bon droit, le tribunal, la notion de groupe ne contient aucune notion juridique, le groupe n’étant pas en lui-même une personne morale.

Il n’est pas contesté que la société Provisur et la société Lutetia sont deux personnes morales distinctes, indépendantes l’une de l’autre.

Or, la société Novateam SA De CV ne verse aux débats aucune pièce probante de ce que la société Provisur aurait agi en qualité de préposé de la société Lutetia, ni de l’existence d’un quelconque lien de subordination entre ces deux sociétés.

Il convient, dans ces conditions, confirmant le jugement entrepris, de débouter la société Nonateam SA De CV de sa demande de dommages et intérêts.

Sur la demande en dommages et intérêts du fait des man’uvres dolosives de la société Novateam et de la violation de ses obligations

La SAS Lutetia sollicite la condamnation de la société Novateam SA De CV au paiement de la somme de 439.529,98 € à ce titre.

Au soutien de sa demande, la SAS Lutetia fait valoir que la société Novateam SA De CV a intentionnellement trompé le consentement de sa cocontractante par ses man’uvres et mensonges et en violation de son obligation de bonne foi et de loyauté ce qui constitue en soi une faute.

Toutefois le fait que la société Novateam SA De CV ait elle-même rédigé le contrat conclu entre les parties et plus particulièrement les clauses relatives à l’attribution de compétence «’aux tribunaux selon les règles de procédure d’arbitrage du tribunal de Rennes’» et à l’application de la loi française plus protectrice que la loi mexicaine en ce qu’elle prévoit une indemnité au profit de l’agent commercial en cas de rupture du contrat, ne démontre pas l’emploi de man’uvres dolosives et mensongères du seul fait que ces clauses lui soient plus favorables, ce d’autant que la SAS Lutetia se devait de s’informer sur le contenu de la loi qu’elle choisissait dans l’hypothèse où elle en aurait ignoré le contenu.

A supposer un comportement blâmable de la société Novateam SA De CV qui lorsqu’elle est attraite devant une juridiction française (pour violation de son contrat et de ses obligations de loyauté et de non concurrence) ne comparaît pas, ni ne se manifeste, selon la SAS Lutetia, ce comportement n’est pas davantage la manifestation de man’uvres dolosives et mensongères ou d’un manquement à son obligation de bonne foi et loyauté tant lors de la formation que de l’exécution du contrat d’agence commerciale signé entre ces deux sociétés le 01er septembre 2014.

La présentation d’un budget intentionnellement mensonger pour tromper le consentement de son cocontractant et l’inciter à signer le contrat en lui faisant notamment croire qu’il ne supportera qu’un tiers du budget, à titre exceptionnel, le taux exorbitant, selon elle, de commission, «’la cupidité et la stratégie machiavélique de la société Novateam’visant à engranger le plus possible avant de présenter sa demande indemnitaire mécaniquement gonflée’» reprochés par la SAS Lutetia, ne sont pas davantage établis, pas plus que le comportement de cette société une fois réglé le solde de tous comptes réglé qui consisterait à réclamer sans aucune mise en demeure ou contact amiable préalable une indemnité astronomique, la société Novateam étant en droit de se prévaloir de l’indemnité pour rupture du contrat d’agence commerciale.

Il convient, dans ces conditions, de débouter la SAS Lutetia de sa demande de ce chef.

Sur les autres demandes

La SAS Lutetia qui succombe pour partie en cause d’appel, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

Par ailleurs, il paraît inéquitable de laisser à la charge de la société Novateam SA De CV ses frais irrépétibles exposés en cause d’appel non compris dans les dépens qu’il convient d’évaluer à la somme de 9.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en sus de l’indemnité de procédure allouée en première instance justement évaluée en équité à la somme de 4.000 € qui sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe

DECLARE irrecevable l’exception d’incompétence soulevée par la SAS Lutetia’;

DEBOUTE la SAS Lutetia de sa demande de renvoi préjudiciel devant la Cour de Justice de l’Union européenne’;’

DECLARE irrecevable la demande de la SAS Lutetia de nullité du contrat d’agence commerciale pour dol’;

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu’il a débouté la société Novateam SA De CV’de sa demande indemnitaire sur le fondement de l’article L.134-12 du code de commerce;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant

CONDAMNE la SAS Lutetia à payer à la société Novateam SA De CV la somme de 459.336,08 € à titre d’indemnité en application de l’article L.134-12 du code de commerce’augmentée des intérêts au taux légal à compter de ce jour;

CONDAMNE la SAS Lutetia aux intérêts au taux légal sur la somme de de 46.656,60 € court à compter de 09 mai 2019,

ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil’;

DEBOUTE les parties de toutes autres demandes;

CONDAMNE la SAS Lutetia à payer à la société Novateam SA De CV la somme de 9.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile’;

CONDAMNE la SAS Lutetia aux dépens d’appel.

Le Greffier,La Présidente,

 


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