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10 mai 1999
Cour de cassation
Pourvoi n°
97-40.901
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la SCP Bleunven Gassier, société civile professionnelle, dont le siège est …, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
en cassation d’un arrêt rendu le 17 janvier 1997 par la cour d’appel de Toulouse (chambre sociale), au profit de Mme Monique X…, demeurant …,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l’audience publique du 16 mars 1999, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Bouret, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Carmet, Boubli, Ransac, Chagny, conseillers, M. Frouin, Mmes Barberot, Lebée, M. Richard de la Tour, Mme Andrich, MM. Rouquayrol de Boisse, Funck-Brentano, Leblanc, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Bouret, conseiller, les observations de Me Copper-Royer, avocat de la SCP Bleunven Gassier, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de Mme X…, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur les moyens réunis :
Attendu que Mme X…, employée de la société Bleunven Gassier, a été convoquée à un entretien préalable un licenciement économique au cours duquel lui a été proposé une convention de conversion qu’elle a signée le 9 juillet 1994 ; que le 19 juillet 1994 l’employeur a constaté la rupture du contrat de travail du fait de cette signature ; que la salariée a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de dommages-intérêts ;
Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt attaqué (Toulouse, 17 janvier 1997) de l’avoir condamné à payer des dommages-intérêts à la salariée pour violation de l’ordre des licenciements alors, selon le moyen, de première part, que Mme X… a fondé son action sur “la réalité et le sérieux du motif économique de la rupture de son contrat de travail” et non sur le respect de l’ordre des licenciements ; qu’en retenant que la SCP Bleunven-Gassier n’avait pas appliqué à la salariée les critères envisagés pour fixer cet ordre des licenciements, la cour d’appel a modifié l’objet du litige et violé l’article 4 du nouveau Code de procédure civile ; qu’elle a, dans le même temps, fondé sa décision sur des faits qui n’étaient pas dans le débat et qu’elle a violé l’article 7 du nouveau Code de procédure civile ; qu’elle n’a pas respecté davantage le principe de la contradiction, en s’abstenant de provoquer les observations des parties sur ce moyen soulevé d’office ;
que la cour d’appel a violé l’article 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors de deuxième part, que si le salarié qui a adhéré à une convention de conversion peut contester la légitimité de la rupture de son contrat de travail, il n’est pas recevable à contester l’ordre des licenciements ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que le motif économique était réel mais elle a considéré que la SCP Bleunven-Gassier n’avait pas appliqiué à Mme X… les critères envisagés pour fixer l’ordre des licenciements ; qu’en accueillant la demande de Mme X…, en retenant ce chef, la cour d’appel de Toulouse a violé les articles L. 321-6 et L. 511-1 du Code du travail ;
alors de troisième part, que, dans ses conclusions, la SCP Bleunven-Gassier s’attachait à la polyvalence de Mme X…, seule agent de sa catégorie concernée par la mesure de licenciement, aux caractéristiques de son emploi, à ses qualités professionnelles, tous critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements ; qu’en faisant abstraction de ces éléments déterminants, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision, au regard de l’article L. 321-1 du Code du travail ; que, dans le même temps, elle n’a pas répondu aux conclusions de la SCP Bleunven-Gassier ni satisfait aux exigences de
l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors de quatrième part, que la circonstance que l’employeur, dans le cadre d’un licenciement économique, n’ait pas respecté les critères reconnus pour fixer l’ordre des licenciements ouvre droit non à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mais à des dommages-intérêts déterminés conformément au droit commun de la responsabilité civile ;
qu’en se bornant à allouer 100 000 francs de dommages-intérêts à Mme X… pour “licenciement abusif” sans préciser autrement la nature de la condamnation et les éléments caractérisant tant la responsabilité de la SCP Bleunven-Gassier que l’étendue du dommage éprouvé par la salariée, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1382 et suivants du Code civil et 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 321-1, L. 321-6, L. 322-3 et L. 511-1 alinéa 3 du Code du travail que les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements doivent être mis en oeuvre à l’égard des salariés qui adhèrent à une convention de conversion et dont le licenciement a été décidé ; que l’inobservation des règles relatives à l’ordre des licenciements constitue pour la salariée une illégalité qui entraîne pour celui-ci un préjudice dont la réparation est comprise dans sa demande de dommages-intérêts consécutive à un licenciement pour motif économique ; que le moyen tiré de l’obligation d’établir et respecter les critères de l’ordre des licenciements est donc dans le débat quand le juge statue sur un licenciement pour motif économique ;
Et attendu que la cour d’appel, dont l’arrêt relève que l’employeur n’avait pas appliqué l’ordre des licenciements à l’égard de la salariée qui avait de ce fait subi un préjudice, a ainsi, abstraction faite de l’expression licenciement abusif, erronée mais surabondante, légalement justifiée sa décision ; que les moyens ne sont pas fondés ;