Ordre des licenciements : 16 janvier 2019 Cour d’appel de Versailles RG n° 17/03638

·

·

Ordre des licenciements : 16 janvier 2019 Cour d’appel de Versailles RG n° 17/03638
Ce point juridique est utile ?

16 janvier 2019
Cour d’appel de Versailles
RG n°
17/03638

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80B

17e chambre

ARRÊT N°

RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

DU 16 JANVIER 2019

N° RG 17/03638

AFFAIRE :

Jean-François X…

C/

SAS METRIXWARE, en plan de redressement

SCP BT.S.G., prise en la personne de Me Véronique Y…, agissant en qualité de mandataire judiciaire de METRIXWARE

SELARL Z… F…, prise en la personne de MeFrancisque Z…, agissant en qualité de commissaire à l’exécution du plan de METRIXWARE

AGS CGEA IDF OUEST

Décision déférée à la cour: jugement rendu le 23 avril 2015 par le conseil de prud’hommes – formation paritaire – de Nanterre

Section : encadrement

N° RG : 12/01683

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

SCP A… PH., B… P.

Me Johann C…

SCP HADENGUE & ASSOCIES

Me Véronique Y…

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE JANVIER DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre:

Monsieur Jean-François X…

[…]

comparant en personne,

assisté de Me Philippe A… de la SCP A… PH., B… P., avocat au barreau de REIMS

APPELANT

****************

SAS METRIXWARE, en plan de redressement

[…]

comparante en la personne de Julie Dumortier, présidente, intervenant régulièrement,

assistée de Me Johann C…, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R139

SCP BT.S.G., prise en la personne de Me Véronique Y…, agissant en qualité de mandataire judiciaire de METRIXWARE

[…]

non comparante – non représentée

SELARL Z… F…, prise en la personne de Me Francisque Z…, agissant en qualité de commissaire à l’exécution du plan de METRIXWARE

Désignation par ordonnance du tribunal de commerce de Nanterre du 16novembre 2016

[…]

représentée de Me Johann C…, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R139

INFIMES

****************

Association AGS CGEA IDF OUEST

[…]

représenté par Me Hubert G… de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98 substituée par Me Marion D…, avocate au barreau de Versailles

PARTIE INTERVENANTE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 novembre 2018, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Evelyne SIRE-MARIN, Présidente, chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Président,

Madame Evelyne SIRE-MARIN, Président,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marine GANDREAU,

Par jugement du 23 avril 2015, le conseil de prud’hommes de Nanterre (section encadrement) a:

– dit non fondées les demandes de M. Jean-François X…,

– débouté M. X…,

– condamné M. X… aux dépens.

Par déclaration adressée au greffe le 26 mai 2015, M. X… a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de radiation a été prononcée le 23 mars 2017 pour défaut de diligences des parties et l’affaire a été réinscrite au rôle le 22 mai 2017.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil, M. X… demande à la cour de :

– dire recevable et bien fondé son appel interjeté à l’encontre du jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre (section encadrement) en date du 23 avril 2015, lequel l’a débouté de l’intégralité de ses prétentions,

en conséquence,

– l’infirmer en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

– dire le licenciement pour motif économique intervenu sans cause réelle et sérieuse et pris en violation de l’ordre des départs,

en conséquence, à titre principal,

– condamner la société Metrixware à lui payer les sommes et indemnités suivantes :

. 285 120 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 190 080 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’ordre des départs,

. 15 840 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

. 1 584 euros à titre de congés payés sur préavis,

. 1 098 euros au titre du droit individuel à la formation,

– condamner la société Metrixware à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 de la procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

très subsidiairement,

– fixer sa créance sur la société Metrixware aux sommes et indemnités suivantes :

. 285 120 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 190 080 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’ordre des départs,

. 15 840 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

. 1 584 euros à titre de congés payés sur préavis,

. 1 098 euros au titre du droit individuel à la formation,

dans cette hypothèse,

– dire l’arrêt à intervenir commun à :

. Me Y…, es qualité de mandataire liquidateur de la SAS Metrixware,

. Me Z…, es qualité de commissaire à l’exécution du plan de la SAS Metrixware,

. le CGEA AGS Ile-de-France Ouest, […] , prise en la personne de son représentant légal,

– fixer sa créance sur la SAS Metrixware à la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– dire que les dépens seront passés en frais privilégiés de justice sur l’actif de la SAS Metrixware.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil, la SAS Metrixware demande à la cour de :

– constater que la SAS Metrixware a établi un plan de sauvegarde de l’emploi proportionnel à ses moyens alors qu’elle était en procédure de redressement judiciaire,

– constater notamment que la SAS Metrixware a développé tous les efforts pour rechercher des postes de reclassement interne et externe,

– juger notamment que la SAS Metrixware a dûment contacté la fédération Syntec afin de se conformer à ses obligations conventionnelles,

– constater, à titre principal, l’irrecevabilité de la demande de dommages et intérêts pour violation des critères d’ordre,

– constater, à titre subsidiaire, que la SAS Metrixware n’a commis aucune faute ni irrégularité au regard des critères d’ordre dans le cadre du licenciement de M. X…,

et, en conséquence :

– confirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Nanterre en date du 23 avril 2015,

– débouter M. X… de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

– condamner M. X… à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700de la procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Me Z… commissaire de l’exécution du plan et de Me Y… régulièrement convoqués n’étaient ni présents ni représentés à l’audience.

Par conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil, L’UNEDIC AGS CGEA d’île de France Ouest demande à la cour de :

– constater que la SAS Metrixware est redevenue in bonis,

en conséquence :

– mettre l’AGS hors de cause au titre de la présente instance,

à titre subsidiaire,

– confirmer les jugements entrepris en ce qu’ils ont retenu que les licenciements reposaient sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu’ils ont débouté les salariés de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

à titre plus subsidiaire,

– ramener à de plus justes proportions la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– débouter les salariés de leurs demandes de dommages et intérêts pour non respect des critères d’ordre, et à tout le moins ramener le quantum à de plus justes proportions,

en tout état de cause,

– mettre hors de cause l’AGS s’agissant des frais irrépétibles de la procédure,

– dire et juger que la demande qui tend à assortir les intérêts au taux légal ne saurait prospérer postérieurement à l’ouverture de la procédure collective en vertu des dispositions de l’article L.622-28 du code du Commerce,

– fixer l’éventuelle créance allouée au salarié au passif de la société,

– dire que le CGEA, en sa qualité de représentant de l’AGS, ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L 3253-6, L 3253-8 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-15, L 3253-19 à 21 et L 3253-17 du code du travail,

– dire et juger que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le Mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

SUR CE LA COUR,

La SAS Metrixware a pour activité principale l’édition de logiciels.

M. Jean-François X… a été engagé par la SAS Metrixware, en qualité de directeur technique, par contrat à durée indéterminée en date du 17 juin 1996.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective SYNTEC.

Par jugement du 28 avril 2011, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la SAS Metrixware et a désigné Me Z… en qualité d’administrateur judiciaire et Me Y… en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 16 septembre 2011, ce même tribunal a arrêté le plan de redressement et a désigné Me Z… en qualité de commissaire à l’exécution du plan.

La période d’observation a été fixée pour une période de six mois, soit jusqu’au 28 octobre 2011.

Par ordonnance du 23 mai 2011, le juge commissaire a autorisé 26 licenciements prévus par le plan de sauvegarde de l’emploi, sur les 55 salariés en fonction dans l’entreprise en 2011.

M. X… a été licencié pour motif économique, par lettre du 15 juillet 2011 ainsi libellée :

« (…) Les difficultés actuelles, qui ont conduit le Tribunal de Commerce de Nanterre à ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société et qui justifient le projet de restructuration et la réduction des effectifs, résultent de la combinaison de deux principaux facteurs:

– la baisse significative du chiffre d’affaires Licence dans l’attente du lancement des nouveaux produits

et,

– un niveau de charges d’exploitation disproportionné eu égard au niveau d’activité

Outre la faiblesse de son chiffre d’affaires, les résultats de la société ont été impactés par l’absorption de la société Scort et les coûts de développement des nouveaux produits.

Par ailleurs, avec un niveau de charges fixes (plus de 7.000 K euros) supérieur à son chiffre d’affaires (5.915 K euros) fin 2010, l’activité de Metrixware apparaît structurellement déficitaire.

Depuis sa fusion avec la société Scort, la société a procédé à trois réorganisations fonctionnelles successives :

– une première réorganisation le 6 juillet 2010, qui n ‘a donné lieu à aucun licenciement,

– une deuxième réorganisation le 5 janvier 2011, donnant lieu à la mise en ‘uvre d’un plan de licenciement collectif portant sur 9 postes,

– une troisième réorganisation le 14 mars 2011, qui n’a donné lieu à aucun licenciement.

Ces réorganisations fonctionnelles n’ont toutefois pas permis de réduire suffisamment les charges d’exploitation de l’entreprise pour permettre à l’entreprise d’atteindre l’équilibre.

L’impact de la baisse du niveau d’activité a accru les difficultés liées aux charges d’exploitation.

C’est dans ces conditions que la SAS Metrixware a été contrainte de régulariser une déclaration de cessation des paiements et a sollicité l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire.

La procédure de redressement judiciaire implique que l’entreprise ne constitue pas un nouveau passif à l’occasion de la poursuite de l’activité.

Or le chiffre d’affaires prévisionnel de la société pour la période d’avril à décembre 2011 ne s’élèverait qu’à 5.679 K euros.

Le montant estimé de la perte d’exploitation pour le 2eme trimestre 2011 est de 396 K euros.

Cette situation nécessite que toute mesure d’économie soit réalisée sans délai afin de rétablir l’équilibre.

Compte tenu des pertes enregistrées, du niveau d’activité, de la diminution de la charge de travail qui en résulte et d’une impossible amélioration financière en l’absence de toute opération de restructuration, afin d’assurer la survie de l’entreprise, il est apparu indispensable d’adapter l’effectif à l’évolution du volume de l’activité et au niveau des ressources de l’entreprise.

La réduction des effectifs présente un caractère urgent, inévitable et indispensable à la pérennité même de l’entreprise qui doit apporter la preuve de sa viabilité dans le délai imparti par le Tribunal de Commerce.

C’est pourquoi, la société est contrainte d’engager une procédure de licenciement collectif pour motif économique accompagnée d’un Plan de Sauvegarde de l’Emploi sur 26 postes.

Les 10 et 12 mai 2011, la Délégation Unique du Personnel a été consulté sur le plan de licenciement envisagé et les mesures proposées au Plan de Sauvegarde de l’Emploi.

Par ordonnance en date du 23 mai 2011, Monsieur le Juge Commissaire a autorisé le licenciement des 26 salariés prévus dans le plan de licenciement collectif soumis au Délégation Unique du Personnel, conformément aux articles L.631-17 et R.631-26 du Code du Commerce.

Le plan de licenciement prévoit la suppression de 1 poste de Rédacteur Technique.

La suppression de ce poste est justifiée par :

Le rédacteur technique est en charge de l’écriture de toutes les documentations relatives aux produits développés par Metrixware.

Le recentrage des besoins sur deux produits uniquement, dont l’un d’eux nécessite très peu de documentation (continuité d’une solution existante et donc la documentation existante est utilisable). L’activité de rédaction sera prise en charge par les responsables Techniques des COBOS et Reptide.

Il apparaît que tous les postes de la catégorie professionnelle à laquelle vous appartenez doivent être supprimés.

Les sociétés Scort Espagne et Metrixware Maghreb ont été interrogées sur les possibilités de reclassement. Aucune des sociétés ne nous a répondu à ce jour.

Aucune solution de reclassement interne n’ayant pu être trouvée malgré l’ensemble des recherches de reclassement effectuées, nous nous voyons contraints, par la présente lettre, de vous notifier à titre conservatoire, votre licenciement pour motif économique.

Nous vous précisons néanmoins qu’à la suite des recherches de reclassement que nous avons effectuées auprès d’entreprises extérieures du secteur géographique et/ou du secteur d’activité, que nous avons reçu à ce jour plusieurs propositions de postes.

Vous trouverez, ci-joint, la liste des postes proposés. Si d’autres propositions nous parvenaient, nous ne manquerons pas de vous les communiquer.

Des journées de présentation de ces entreprises vont être organisées par Metrixware. Nous ne manquerons pas de revenir à ce sujet. »

Il a été mis fin à la procédure de redressement ouverte à l’encontre de la SAS Metrixware par l’adoption d’un plan de continuation homologué par le tribunal de commerce de Nanterre le 16septembre 2011 qui avait, au préalable, reçu un avis favorable de la délégation unique du personnel.

Le 24 février 2012, M. X… a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre aux fins de contester son licenciement.

M. X… considère que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Il estime à cet égard que l’employeur a méconnu son obligation légale de reclassement en interne et en externe et que les mesures de reclassement n’ont été l’objet d’aucun effort financier tant de l’entreprise que du groupe auquel elle appartient.

Le salarié considère par ailleurs que l’employeur n’a pas saisi la Commission paritaire de l’Emploi tel que prévu par l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 10 février 1969, et n’a donc pas respecté son obligation conventionnelle de reclassement.

Par ailleurs, M. X… forme une demande indemnitaire car il considère qu’il y a eu violation de l’ordre des licenciements. Selon lui, l’employeur a modifié unilatéralement l’intitulé des postes lors de la restructuration du 14 mars 2011 et a créé 22 catégories professionnelles pour 52salariés dans le but de pouvoir mieux les licencier, faussant ainsi l’ordre des départs.

La SAS Metrixware fait observer qu’elle a reçu l’avis favorable de la Délégation Unique du Personnel (DUP), de l’inspection du travail et du juge commissaire concernant le PSE (plan de sauvegarde de l’emploi).

Elle réplique que le financement de la convention de cellule de reclassement est conforme aux usages dans le cadre d’un redressement judiciaire.

Elle expose que le reclassement en interne des salariés tout comme au niveau du groupe, n’a pas été possible compte tenu des difficultés économiques de l’entreprise.

Sur le reclassement en externe, la SAS Metrixware affirme justifier de ses recherches par l’envoi de lettres de recherche de postes de reclassement à plus de 80 sociétés.

Sur la saisine de la Commission Territoriale de l’Emploi, l’employeur indique que celle-ci a été valablement saisie.

Sur les manquements à l’ordre des licenciements, la SAS Metrixware expose que la demande est irrecevable comme ne pouvant pas se cumuler avec une demande d’indemnité pour absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.

L’employeur estime par ailleurs que l’ordonnance du juge commissaire ayant autorisé les licenciements est devenue définitive, de sorte que le caractère économique du licenciement tout comme la suppression d’emploi ne peuvent plus être contestés.

Enfin, il considère que la demande doit être rejetée car les catégories professionnelles fondant l’ordre des licenciements ont été décidées en été 2010 avec les représentants du personnel à une époque où la situation de la société n’était pas encore problématique.

Sur la demande de licenciement sans cause réelle et sérieuse :

L’article L.1233-3 du code du travail dans sa version en vigueur lors du licenciement du 15juillet2011 de M. X… prévoyait que «Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.»

En application de l’article L. 1233-4 du code du travail, dans sa version en vigueur lors du licenciement disposait: «Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient.

Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.»

Par ailleurs, aux termes des articles L. 1233-61, L. 1233-62, L. 1233-63, L. 1235- 10 et L. 1235- 11 du code du travail : «Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, lorsque le projet de licenciement concerne dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, l’employeur établit et met en ‘uvre un plan de sauvegarde de l’emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre.

Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile.».

En cas deredressementjudiciaire, le motiféconomiquene peut pas être remis en cause lorsque l’ordonnancedujuge-commissaireautorisant leslicenciementsest devenue définitive, sauf si elle a été obtenue par fraude. Toutefois, même si l’ordonnanceest définitive, le salarié licencié peut contester la validité des mesures individuelles prises à son égard devant le juge judiciaire qui reste compétent pour statuer sur le contentieux auquel peut donner lieu l’exécution des mesures contenues dans un PSEvalidé ou homologué, telles que lenon-respect des préconisations du PSEen matière de reclassement ou l’application de l’ordre des licenciements.

Ainsi, les salariés licenciés pour motif économique ont un droit propre à faire valoir que leur licenciement est nul en application de l’article L. 1235-10 du code du travail, sauf en cas de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire de l’entreprise et peuvent, même lorsque leur licenciement a été autorisé par l’inspecteur du travail, contester la validité du plan social devant la juridiction judiciaire en sollicitant notamment leur réintégration.

Cependant, lorsque le PSE a été établi, comme en l’espèce, dans le cadre d’une procédure collective, son insuffisance n’entraîne pas la nullité des licenciements, mais les prive de cause réelle et sérieuse.

En l’espèce, M. X… ne conteste ni la réalité et le sérieux de la cause économique du licenciement, ni le respect de la procédure de consultation des institutions représentatives du personnel lors de l’élaboration du PSE, ni la conformité de la lettre de licenciement à l’article L.1232-6 du code, du travail selon lequel l’employeur est tenu d’énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement.

Le salarié, comme il le peut dans le cadre restreint d’une procédure collective, querelle l’employeur à propos du non-respect de son obligation légale de reclassement et de l’absence de saisine de la commission paritaire de l’emploi.

Sur l’obligation de reclassement :

Sur le plan de sauvegarde de l’emploi :

Le salarié reproche à la SAS Metrixware de n’avoir fait aucun effort particulier notamment financier au titre des mesures d’accompagnement des licenciements, visant en cela la cellule de reclassement financée par l’état, la convention de reclassement personnalisée financée par le salarié à travers son droit à préavis ou les aides à la formation qui auraient été trop peu élevées.

Il est constant que l’employeur doit préparer, dans le cadre du plan de sauvegarde de l’emploi, un plan visant au reclassement des salariés, s’intégrant au plan social et comportant de nombreuses mesures possibles (article L. 1233-62) en fonction des moyens dont dispose l’entreprise pour maintenir les emplois ou faciliter les reclassements (article L.1235-10 alinéa 2).

En l’espèce, il convient d’observer que la SAS Metrixware a fait l’objet, par jugement du 28avril2011, d’ une procédure de redressement judiciaire, et que le plan de redressement a été arrêté par jugement du 16 septembre 2011.

Aux termes de l’article L. 1233-28 du code du travail applicable à la date des licenciements:«L’employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique de dix salariés ou plus dans une même période de trente jours réunit et consulte, selon le cas, le comité d’entreprise ou les délégués du personnel, dans les conditions prévues par le présent paragraphe ».

Il ressort des pièces produites aux débats et plus précisément du procès-verbal de réunion du 12mai 2011 que la délégation unique du personnel (DUP) de Metrixware a a été consultée et a rendu un avis favorable sur les mesures du plan de sauvegarde de l’emploi, tout en les considérant insuffisantes (pièce 6 de l’employeur).

L’existence d’une procédure collective dont a été l’objet la SAS Metrixware, qui voyait donc ses capacités financières très réduites, se traduit dans le contenu du plan de sauvegarde de l’emploi de mai 2011, prévoyant le licenciement de 26 salariés sur les 55 salariés en fonction dans l’entreprise (pièce 1 du salarié).

Il apparaît qu’une indemnité de 1 000 euros par salarié était prévue par le PSE pour faire face à d’éventuels frais de déménagement et de réinstallation, y compris en cas de mobilité en Espagne ou en Algérie, que le salarié pouvait adhérer à la convention de reclassement personnalisée prévue pour une durée de 12 mois, qu’une allocation temporaire dégressive était prévue, ainsi que la prise en charge de frais de déplacements pour recherche d’emploi, ainsi qu’un budget total de formation de reconversion professionnelle de 15 000 euros financés par l’entreprise.

Au regard des pertes d’exploitation de la SAS Metrixware, soit 2 254 000 euros en 2010 et 602000 euros en 2011 (pièce n°23 de l’employeur), à la suite de sa fusion avec la société Scort, Metrixware se révélait structurellement déficitaire. Ces mesures étaient donc proportionnées aux moyens dont disposait l’entreprise pour maintenir les emplois ou faciliter les reclassements.

Sur la recherche de reclassement en interne :

Selon l’article L. 1233-62 en vigueur lors du licenciement, le plan de sauvegarde de l’emploi doit prévoir des mesures telles que :«1° Des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d’emplois ou équivalents à ceux qu’ils occupent ou, sous réserve de l’accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure….».

Il appartient au juge du contrat de travail d’apprécier si l’employeur a exécuté de bonne foi son obligation de reclassement du salarié sur des emplois équivalents de l’entreprise ou, s’il n’en existe pas, du groupe auquel appartient l’entreprise.

Il résulte des documents produits aux débats, qu’en raison des difficultés économiques et financières avérées dues notamment à l’importance des charges fixes liées au personnel, la SAS Metrixware a dû, dès le 10 mai 2011 soit pendant la période d’observation fixée par le Tribunal de Commerce jusqu’au 28 octobre 2011, engager un projet de licenciement économique visant à supprimer 26 emplois, lesquels ont été autorisés par le juge commissaire le 23 mai 2011.

L’effectif de l’entreprise était de 55 salariés, selon le PSE, qui précise que tout reclassement interne était impossible, compte-tenu du nombre de licenciements (26) et en l’absence d’emplois équivalents disponibles dans l’entreprise et de création de nouveaux postes (pièce 6 de l’employeur ); ce point a été porté à la connaissance de la délégation unique du personnel lors de sa consultation 12 mai 2011.

Par ailleurs, la SAS Metrixware, appartient à un Groupe de sociétés ne comprenant qu’une seule autre société, sa filiale à 100 %, la société de droit espagnol Scort Espana.

Il n’est pas contesté que cette société n’emploie qu’un seul salarié pour gérer les contrats de 3clients et n’occupe pas de locaux de travail.

Il n’est pas plus contesté que la SAS Metrixware Maghreb située en Algérie, n’est pas une filiale de la SAS Metrixware car elle appartient exclusivement à M. E…, ancien dirigeant de de la SAS Metrixware, comme le spécifie expressément le PSE.

La SAS Metrixware a inclus cependant Metrixware Maghreb dans son périmètre de reclassement interne, sans obtenir de réponse de cette dernière sur les possibilités de reclassement.

En raison de la situation de redressement judiciaire de l’entreprise et de la structure du groupe, la société établit qu’il n’existait pas de postes disponibles à proposer aux salariés.

L’absence de mesures de reclassement interne ne peut être critiquée au regard des moyens de la SAS Metrixware.

Sur la recherche de reclassement en externe :

En revanche le PSE préconisait des mesures de reclassement externes.

A cet égard, il est reproché à l’employeur de n’avoir pas adressé de recherches de postes personnalisées aux autres sociétés.

Selon les documents produits aux débats (pièces 13 et 16 de l’employeur), la SAS Metrixware a adressé des lettres de recherches de postes à 83 sociétés extérieures au groupe (E-Front, le Groupe Umanis, le Groupe Astek et le Groupe Generix, le groupe Dassault…) en précisant les compétences professionnelles, la formation, l’ancienneté dans l’entreprise et le domicile de chacun des salariés de la SAS Metrixware concernés par une mesure de licenciement. L’employeur produit également les courriels adressés à chacun des salariés licenciés concernant plusieurs réunions organisées dans ses locaux pour présenter aux salariés les postes à pourvoir dans les sociétés démarchées.

Par ailleurs, en application du PSE (page 13), une convention de cellule de reclassement a été conclue entre la SAS Metrixware et l’État confiée à la société Archi-Med (pièces 25 à 28 de l’employeur). Il n’est pas contesté que les salariés licenciés ont été reclassés pour 38% en CDI et pour 15% en CDD dans les 8 à 12 mois de la mise en place de cette structure.

Confirmant le jugement, la cour estime que les recherches de reclassement des salariés telles qu’elles ont été réalisées par la SAS Metrixware respectent ses obligations légales de reclassement et les prescriptions du PSE.

Sur la saisine de la Commission Paritaire de l’Emploi :

Au terme des articles 2 et 5 de l’accord national interprofessionnel du 10 février 1969, relatif à la sécurité de l’emploi, lorsqu’un projet de licenciement économique collectif porte sur plus de 10 salariés appartenant au même établissement, la direction de cette entreprise doit en informer la Commission Paritaire de l’Emploi de la branche professionnelle concernée.

Celle-ci est saisie en cas de problèmes de reclassement non résolus par l’entreprise.

Il résulte d’un accord signé le 30 octobre 2008 entre les partenaires sociaux de la branche Syntec, que ces derniers ont décidé de confier le secrétariat de la Commission Paritaire de l’Emploi de la branche à la Fédération Syntec, afin de mettre en ‘uvre des solutions de reclassement. Selon cet accord collectif, cette saisine est obligatoire lorsque, comme en l’espèce, le licenciement porte sur plus de 10 salariés.

Le 12 mai 2011, un courrier d’information et de demande de postes de reclassement en externe avec le détail des profils disponibles a été adressé par la SAS Metrixware à la Fédération Syntec (pièce 7 de l’employeur).

Il est établi que l’employeur a adressé cette saisine obligatoire à la Fédération Syntec, qui gère le secrétariat de la Commission Paritaire de l’Emploi, et non pas directement à la commission.

Cependant les deux structures se trouvent à la même adresse, et il n’est pas contesté que la Commission Paritaire de l’Emploi a bien été saisie par l’intermédiaire de la Fédération Syntec.

La SAS Metrixware a donc respecté l’obligation de saisine de la Commission Paritaire de l’Emploi.

Il convient, donc confirmant le jugement, de dire que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse et de la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la violation de l’ordre des départs :

M. X… demande l’indemnisation de son préjudice du fait de la construction artificielle par l’employeur de 22 catégories professionnelles pour les 55 salariés de l’entreprise, ce qui a eu pour conséquence de supprimer tout ordre de départ pour de nombreux salariés licenciés, puisque certains salariés étaient seuls dans leur catégorie.

Selon la SAS Metrixware, la demande est irrecevable d’une part car l’autorité de l’ordonnance du juge-commissaire est attachée au motif économique de licenciement tel que défini par l’article L.1233-3 du code du travail d’autre part car le préjudice résultant pour un salarié de l’inobservation des règles relatives à l’ordre des licenciements ne se distingue pas du préjudice résultant pour lui de l’absence de cause réelle et sérieuse de licenciement.

Selon l’employeur, les dommages-intérêts pour inobservation des règles de l’ordre des licenciements ne peuvent donc se cumuler avec une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Sur la recevabilité de la demande :

Concernant l’autorité de l’ordonnance du juge commissaire :

L’autorité de l’ordonnance du juge-commissaire autorisant l’administrateur judiciaire à procéder pendant la période d’observation à des licenciements pour motif économique présentant un caractère urgent, inévitable et indispensable, n’est attachée qu’à l’existence d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification du contrat de travail consécutive à des difficultés économiques, à une mutation technologique ou à une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise, en application de l’article 63 du décret du 27 décembre 1985 qui en précise le contenu, outre l’indication du nombre des salariés dont le licenciement est autorisé ainsi que des activités professionnelles concernées ; cette autorité ne saurait s’étendre à la question de la situation individuelle des salariés au regard de l’exécution de l’obligation de reclassement qui pèse sur l’employeur et qui relève de la compétence du juge prud’homal.

Si, en pareil cas, la suppression de son emploi ne peut plus être discutée par le salarié, il est bien-fondé à contester notamment le respect de l’ordre des départs prévu dans le PSE par son employeur.

Concernant la demande de dommages-intérêts pour non-respect de l’ordre des départs :

Par ailleurs, il est constant qu’en cas de licenciement pour motif économique le manquement de l’employeur à son obligation de respecter les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements cause nécessairement à l’intéressé un préjudice distinct de celui réparant l’absence de cause réelle et sérieuse de licenciement, sous réserve pour le salarié d’en rapporter la preuve.

Si l’inobservation des règles relatives à l’ordre des licenciements n’a pas pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse, elle constitue pour le salarié une illégalité qui entraîne un préjudice pouvant aller jusqu’à la perte injustifiée de son emploi.

Cependant, il ne peut être alloué au salarié licencié pour cause économique une indemnité pour inobservation des critères de classement des licenciements en plus de celle réparant l’intégralité du préjudice subi par suite de la perte injustifiée de son emploi.

Dès lors qu’en l’espèce le salarié a été débouté de sa demande pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, il est fondé à demander des dommages et intérêts pour violation de l’ordre des licenciements.

La demande de dommages et intérêts pour violation de l’ordre des licenciements, est donc recevable.

Sur le fond :

Il est constant qu’en application de l’article L. 1233-5 du code du travail, un ordre des licenciements doit être établi même lorsque les licenciements sont consécutifs à une procédure de redressement judiciaire et que l’absence de définition des critères ou leur inobservation dans la mise en ‘uvre des licenciements caractérisent un non-respect de cet ordre.

Il appartient à l’employeur de justifier qu’il a respecté cet ordre et notamment qu’il a défini des critères et les a mis en ‘uvre.

L’ordre des départs est un élément figurant dans le PSE et prend en compte les critères suivants, auxquels sont attribués des points, les charges de famille, l’ancienneté dans l’entreprise, l’âge et le handicap des salariés et les qualités professionnelles.

Il s’agit de critères objectifs et vérifiables conformes à l’article L. 1233-5 du code du travail.

Le découpage des catégories professionnelles regroupant les salariés qui exercent au sein de l’entreprise des fonctions de même nature a été approuvé par la délégation unique du personnel, qui a émis un avis favorable à ce propos, le 10 mai 2011 (pièce 6 de l’employeur).

M. X…, qui n’indique pas à quelle catégorie professionnelle il devait être rattaché, ne démontre pas en quoi les catégories professionnelles retenues ont faussé l’ordre des départs prévu dans le PSE ou que l’ordre des départs n’a pas été respecté.

Il n’est pas non plus établi que l’employeur n’a pas pris en compte l’ensemble des critères ci-dessus, qui étaient affectés d’une péréquation sur la base d’éléments objectifs, à savoir des compétences professionnelles propres au secteur de l’informatique, décrites dans le PSE et donc connus des salariés

Confirmant le jugement, la cour rejette la demande de dommages et intérêts pour violation de l’ordre des licenciements.

Sur le droit individuel à la formation :

Dès lors qu’au soutien de cette demande le salarié ne présente à la cour aucun moyen de droit et de fait, il convient, ajoutant au jugement, de débouter le salarié de cette demande.

Il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais par elles exposés non compris dans les dépens.

Il convient de rejeter les autres demandes, fins et conclusions.

M. X… sera condamné aux dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute M. X… de sa demande au titre du droit individuel à la formation,

Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette les autres demandes, fins et conclusions,

Condamne M. X… aux dépens de l’instance.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l’avis donné aux parties à l’issue des débats en application de l’article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Clotilde Maugendre, président et Madame Marine Gandreau, greffier.

Le greffier, Le président,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x