RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 19/03494 – N��Portalis DBVH-V-B7D-HPFV
MPF
TRIBUNAL D’INSTANCE D’ANNONAY
08 juillet 2019 RG:11-17-0051
S.A.S. ECORENOVE
C/
[V]
[H]
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
Grosse délivrée
le 05/10/2023
à Me Emmanuelle VAJOU
à Me Laurette GOUYET POMMARET
à Me Laure REINHARD
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère chambre
ARRÊT DU 05 OCTOBRE 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d’Instance d’ANNONAY en date du 08 Juillet 2019, N°11-17-0051
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre
Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère
Mme Séverine LEGER, Conseillère
GREFFIER :
Mme Audrey BACHIMONT, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 22 Juin 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 05 Octobre 2023.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
SAS ECORENOVE
poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité en son siège social
[Adresse 5]
[Localité 10]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Emmanuel MOUCHTOURIS de la SELARL SAINT CYR AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de LYON
INTIMÉS :
Monsieur [D] [V]
né le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 13]
[Adresse 7]
[Localité 1]
Représenté par Me Laurette GOUYET POMMARET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D’ARDECHE
Madame [C] [O] [H]
née le [Date naissance 4] 1973 à [Localité 12] (PORTUGAL)
[Adresse 8]
[Localité 1]
Assignée à étude le 28/10/2019
sans avocat constitué
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
venant aux droits de la Banque SYGMA, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 11]
Représentée par Me Laure REINHARD de la SCP RD AVOCATS & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
PARTIE INTERVENANTE
SELARLU [U] [K]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 9]
Assignée à personne morale le 27/12/2021
sans avocat constitué
ARRÊT :
Arrêt rendu par défaut, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 05 Octobre 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS ET PROCEDURE :
Le 4 novembre 2014, les époux [V] après démarchage ont souscrit auprès de la société Mysun devenue Ecorenove un bon de commande au prix de 34900 euros portant sur une installation photovoltaïque d’une puissance de 6000 kw comprenant vingt-quatre panneaux, l’électricité produite étant exclusivement destinée à la revente à ERDF.
Pour financer l’installation commandée, les époux [V] ont souscrit le même jour auprès de la société Sygma France devenue BNP Paribas Finance un contrat de crédit affecté remboursable en 144 mensualités au taux nominal de 4,70% l’an.
Les panneaux ont été livrés et posés mais la copropriété dont dépend la maison des époux [V] s’est opposée à la réalisation des travaux de raccordement.
Les époux [V] ayant cessé le règlement des échéances du crédit, la société BNP Paribas Finance a prononcé la déchéance du terme et les a assignés devant le tribunal d’instance d’Annonay par acte d’huissier du 12 septembre 2017. Les défendeurs ont appelé en cause la société Ecorenove par acte du 25 janvier 2018.
Par jugement du 8 juillet 2019, le tribunal a prononcé la nullité des relations contractuelles entre la société Ecorenove et les époux [V] et la nullité subséquente du contrat de crédit affecté, constaté que le prêteur avait manqué à ses obligations et fixé le montant du préjudice des emprunteurs au montant du concours bancaire, enjoint à la société Ecorenove de récupérer à ses frais le matériel installé et débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Le tribunal a considéré que le bon de commande ne contenait aucune des mentions imposées par la loi ( mentions précises sur les droits et délais, absence de bordereau de rétractation). Il a estimé que la seule signature du certificat de livraison par les contractants ne valait pas exécution volontaire du contrat en connaissance des vices qui l’affectaient et qu’en débloquant les fonds sans s’assurer de la régularité du bon de commande et de l’exécution des prestations, notamment le raccordement à ERDF, le prêteur avait commis une faute ayant causé un préjudice aux époux [V] et justifiant de les dispenser du remboursement du crédit.
La société Ecorenove a interjeté appel du jugement par déclaration du 27 août 2019.
Par jugement du 3 mars 2020, le tribunal de commerce de Lyon a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société Ecorenove et désigné Maître [K] [U] en qualité de liquidateur.
La société BNP Paribas a produit sa déclaration de créance au passif de la SAS Ecorenove mis en cause son liquidateur, lequel n’a pas constitué avocat.
L’affaire a été fixée à l’audience du 22 juin 2023 et l’ordonnance de clôture est intervenue le 8 juin 2023.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Le liquidateur de la SAS Ecorenove, appelante, régulièrement assigné en intervention forcée, n’a pas constitué avocat.
La société BNP Paribas Personal Finance, intimée et appelante incidente, demande à la cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :
-débouter les consorts [V]-[H] de leurs demandes tendant à l’annulation des contrats
-subsidiairement, en cas d’annulation des contrats, les débouter de leur demande tendant à priver le prêteur de son droit à restitution du capital emprunté,
-les condamner à lui payer la somme de 34 900 euros avec intérêts à compter de la date de mise à disposition des fonds,
-condamner la société Ecorenove à la relever et à la garantir de toute condamnation et fixer à la somme de 34 900 euros sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Ecorenove,
– condamner la partie succombante à payer à BNP Paribas Personal Finance la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’intimée soutient que les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables au contrat du 9 novembre 2014 dès lors que l’installation photovoltaïque commandée était destinée exclusivement à la revente à ERDF. Elle en déduit que les contractants ne peuvent dès lors se prévaloir de ces dispositions pour solliciter la nullité du contrat pour méconnaissance du formalisme du bon de commande. En second lieu, elle considère que la régularité formelle du bon de commande litigieux n’est pas contestable et qu’en tout état de cause, que vaut confirmation et fait obstacle à l’annulation du contrat son exécution volontaire du contrat par les consorts [V], lesquels ont ratifié le contrat en acceptant la livraison et la pose des panneaux et en accomplissant les démarches en vue du raccordement. Subsidiairement, elle plaide qu’elle n’a commis aucune faute dans le contrôle de la régularité formelle du contrat principal ou dans les vérifications préalables au déblocage des fonds. Elle soutient enfin qu’il n’y a aucun lien de causalité entre sa prétendue faute et le préjudice allégué par le prêteur : les panneaux ont bien été installés et seule l’opposition de la copropriété à l’installation de nouveaux compteurs a empêché le raccordement de l’installation au réseau Erdf de sorte qu’ils sont eux-mêmes à l’origine de leur dommage en ayant négligé de s’assurer préalablement de l’accord de la copropriété. A titre très subsidiaire, ils font valoir que les contractants ne subissent aucun préjudice car l’installation fonctionne très bien pour l’autoconsommation d’électricité. Elle estime que la société Ecorenove doit la garantir de toute condamnation prononcée contre elle.
[C] [O] [H], assignée par acte du 12 décembre 2019 délivré à son domicile, n’a pas constitué avocat.
[D] [V], intimé, demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et, y ajoutant,
-l’autoriser, à défaut d’enlèvement du matériel installé par le liquidateur de la SAS Ecorenove dans les deux mois suivant la signification du présent arrêt, à apporter lesdits matériels dans un centre de tri,
– lui allouer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,
-condamner le liquidateur de la SAS Ecorenove et la société BNP Paribas Personal Finance à lui payer la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
A titre subsidiaire,
-prononcer la nullité du contrat principal pour dol et la caducité du contrat de crédit affecté,
-dire que la société BNP Paribas Personal Finance est privée de son droit à restitution du capital emprunté.
A titre subsidiaire, il demande à la cour :
-de prononcer la nullité du contrat principal pour dol et la caducité subséquente du contrat de crédit affecté,
A titre infiniment subsidiaire, de :
-prononcer la résolution du contrat aux torts exlusifs de la société Ecorenove et la caducité subséquente du crédit affecté
-de dire que la société Sygma devenue BNP Paribas Personal Finance a commis une faute sanctionnée par la privation de son droit à restitution du capital emprunté,
-condamner la société Sygma devenue BNP Paribas Personal Finance à lui payer la somme de 387,46 euros au titre des mensualités prélevées,
L’intimé fait valoir que son épouse et lui-même ont été démarchés à leur domicile, qu’ils ne sont pas des professionnels de la revente de l’électricité, que le contrat principal visait expressément les dispositions du code de la consommation et que le crédit proposé pour financer l’opération était précisément un crédit à la consommation. Il affirme que les dispositions protectrices du code de la consommation sont applicables au bon de commande qu’il a signé. Il faitvaloir que le contrat ne respecte pas le formalisme prévu par lesdites dispositions ce qui entraîne sa nullité. Il conteste avoir exécuté volontairement le contrat en connaissance des vices qui l’affectaient. L’installation posée n’ayant jamais pu être raccordée au réseau ERDF du fait de l’opposition de la copropriété à l’installation de nouveaux compteurs, il sollicite à titre subsidiaire la résolution du contrat. Il considère que la nullité du contrat principal entraîne la nullité subséquente du contrat de crédit affecté et qu’il n’est pas redevable du remboursement du capital emprunté et versé à la société Ecorenove dès lors que le prêteur n’a vérifié avant de débloquer les fonds ni la régularité du bon de commande ni l’effectivité de l’exécution par la société Ecorenove de toutes ses prestations.
MOTIFS :
Sur l’appel de la société Ecorenove :
A la suite de son dessaisissement édicté par l’article L. 641-9 du code de commerce, le débiteur en liquidation judiciaire ne peut plus exercer seul des actions en justice relativement à son patrimoine. Seul le liquidateur est habilité à poursuivre l’instance introduite par le débiteur avant le jugement prononçant sa liquidation judiciaire. Le liquidateur , assigné en intervention forcée par la BNP Paribas Personal Finance, n’a pas comparu : à défaut de conclusions du liquidateur, l’appel de la SAS Ecorenove n’est plus soutenu et la cour n’est plus saisie d’aucun moyen régulièrement dirigé contre les chefs du jugement initialement critiqués par la débitrice, la SAS Ecorenove.
Sur le bon de commande du 4 novembre 2019 :
La cour constate que les époux [V] ont signé le 4 novembre 2019 un bon de commande à en-tête de la société MYSUN. Le certificat de livraison signé le 27 février 2015 porte le cachet de la société Ecorenove dans la rubrique intitulée « le vendeur ». Sur ces deux documents figurent le même numéro Siret et la même adresse du siège social. La BNP Paribas Personal Finance fait valoir qu’il s’agit d’un simple changement de dénomination de l’entreprise.
Le tribunal a donc considéré à tort qu’aucun contrat écrit n’avait été formalisé entre la SAS Ecorenove et les époux [V].
Cette disposition du jugement sera infirmée.
Sur l’application des dispositions du droit de la consommation :
L’acquisition de panneaux photovoltaïques et son financement peuvent constituer des actes de commerce par accessoire si l’électricité produite par l’installation n’est pas principalement destinée à un usage personnel.
L’installation photovoltaïque commandée par les époux [V] comprenait vingt-quatre panneaux d’une puissance de 250 kwatt chacun, soit une puissance totale de 6000 kw qui excède largement le seuil de 3000 kw correspondant aux besoins de consommation d’un particulier. Comme le fait justement observer la société BNP Paribas Personal Finance, l’installation commandée le 4 novembre 2019 ne comportait aucun système de stockage de l’électricité produite ce qui confirme qu’elle était destinée à être revendue. Le bon de commande prévoit d’ailleurs trois cases, « injection partielle de la production », « injection totale de la production » et « autoconsommation » : seule la case « injection totale de la production a été cochée ». [D] [V] explique enfin qu’après avoir équipé la maison de panneaux photovoltaïques destinés à produire l’électricité nécessaire à sa propre consommation, laquelle donnait toute satisfaction, il a pris la décision de commander « une installation de même type mais plus importante de façon à revendre l’électricité à ERDF ( conclusions de l’intimé page 29).
L’électricité produite par l’installation commandée le 4 novembre 2019 étant destinée à être entièrement vendue à ERDF, les contrats conclus pour la commander à la société Mysun devenue Ecorenove et pour la financer sont des actes de commerce qui ne relèvent pas des dispositions du code de la consommation.
Les moyens de nullité des contrats soulevés par [D] [V] seront écartés en ce qu’ils sont fondés sur les articles L 111-1, L 121-1, L 121-17, L 121-18 et L 121-18-1 du code de la consommation dans leur version applicable au présent litige.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a prononcé la nullité des relations contractuelles entre la SAS Ecorenove et les époux [V] pour non-respect des prescriptions impératives d’ordre public du code de la consommation ainsi que la nullité subséquente du contrat de crédit affecté.
Sur la nullité pour dol :
[D] [V] soutient que les sociétés AB Services et Ecorenove ont volontairement créé une confusion pour tromper leurs cocontractants et en veut pour preuve la signature d’un bon de commande portant sur le même matériel et au même prix, le premier avec la société AB Services et le second avec la société MYSUN devenue Ecorenove. Il fait valoir qu’il ne s’estimait lié qu’avec la société AB services laquelle leur avait présenté la société MYSUN comme son sous-traitant. Il indique avoir été surpris que des ouvriers de la société Ecorenove se présentent à son domicile pour exécuter les travaux. Il rappelle que la société Ecorenove a fait l’objet de poursuites pénales en 2019 pour pratiques commerciales trompeuses et lui réclame la somme de 10 000 euros en indemnisation de son préjudice moral. Il fait en effet valoir qu’il s’est retrouvé désemparé pour ne pas comprendre laquelle de la société AB services et de la SAS Ecorenove était sa contractante.
La société BNP Paribas Personal Finance conteste toute confusion possible sur l’identité exacte du vendeur de matériel photovoltaïque en l’état du bon de commande le 4 novembre 2014 signé avec la société MYSUN devenue Ecorenove.
Deux bons de commande portant sur la vente au même prix du même matériel ont été signés le même jour par les époux [V], le premier avec la société AB Services, le second avec la société Ecorenove.
Le contrat avec la société AB Services prévoyait un financement par la société Franfinance, et le contrat avec la société Ecorenove avec la société Sygma ( devenue BNP Paribas Personal Finance).
En revanche, [D] [V] ne produit qu’une offre de crédit signée par les acquéreurs le 4 novembre 2014 : ce contrat de crédit affecté est souscrit auprès de la société Sygma ( devenue BNP Paribas Finance ) et porte le cachet de la société Mysun. Il produit aussi une lettre adressée par la société Sygma le 14 janvier 2015 l’informant de l’acceptation du contrat de crédit et précisant que le financement n’interviendrait au profit de la société Mysun Ecorenove qu’après livraison effective du bien ou de la prestation de service.
Aucun contrat de crédit affecté n’ayant été souscrit avec la société Franfinance : en application des conditions générales de vente figurant au dos du bon de commande de la société AB services, le contrat a été résolu de plein droit en cas de rejet du dossier administratif ou de financement.
[D] [V] ne démontre pas qu’il a signé sans en avoir conscience deux bons de commande le même jour avec deux sociétés différentes. Il n’établit pas, au vu du contrat de crédit affecté conclu avec la société Sygma, qu’il a été trompé et avait pu croire de bonne foi qu’il n’avait contracté qu’avec la société AB Services. Il ne rapporte pas la preuve enfin que sans cette erreur commise sur l’identité du vendeur, il n’aurait pas contracté avec la société Mysun devenue Ecorenove.
Il sera donc débouté de sa demande tendant à l’annulation du contrat principal pour dol et à celle, subséquente, du contrat de crédit affecté.
Sur la résolution du contrat :
[D] [V] sollicite au visa de l’article 1184 du code civil la résolution du contrat principal aux torts exclusifs de la société Ecorenove. Il rappelle que l’installation fournie n’a jamais été raccordée au réseau ERDF alors que l’objet du bon de commande était la fourniture d’une installation photovoltaïque en vue de la revente de l’électricité produite à Erdf et que parmi les prestations de service énumérées dans le contrat, le raccordement et la mise en service électrique étaient pris en charge par la société MYSUN. Il estime que le fournisseur a manqué à son obligation de résultat en ne procédant pas au raccordement et à la mise en service des panneaux solaires commandés. L’intimé sollicite de surcroît la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice résultant de l’inexécution contractuelle et évoque la lourde angoisse d’être tenu au remboursement d’un crédit destiné à financer une installation qui n’a jamais été opérationnelle.
La banque BNP Paribas Personal Finance n’a pas contesté l’inexécution du contrat principal invoqué par le contractant.
La résolution du contrat du 4 novembre 2014 conclu entre les époux [V] et la société Ecorenove sera prononcée. En effet, si les vingt-quatre panneaux ont bien été livrés et posés, l’installation, destinée uniquement à la revente de l’électricité produite à ERDF, n’a jamais fonctionné, la prestation de raccordement de l’installation au réseau ERDF n’ayant jamais été exécutée par la société Ecorenove.
En effet, selon les termes du bon de commande du 4 novembre 2014, la société Ecorenove s’était non seulement engagée à fournir les panneaux photovoltaïques et à les poser mais aussi à mettre en service l’installation et à la raccorder au réseau ERDF. Cette prestation de raccordement était essentielle dès lors qu’elle seule permettait d’injecter la totalité de l’électricité produite dans le réseau et que l’objet du contrat était précisément de fournir aux clients, équipés déjà d’une installation photovoltaïque destinée à produire l’électricité destinée à leur propre consommation, avaient acquis une installation photovoltaïque complémentaire, d’une puissance de 6000 kw, dans le seul but de revendre à ERDF l’électricité produite.
En raison de l’interdépendance du contrat principal et du contrat de crédit affecté qui n’en est que l’accessoire, la résolution de ce dernier entraîne la caducité subséquente du contrat de crédit affecté.
[D] [V] sera autorisé, à défaut d’enlèvement du matériel par le liquidateur de la société Ecorenove dans le délai de trois mois suivant la signification du présent arrêt, à porter lesdits matériels dans un centre de tri.
Sur la responsabilité du prêteur :
[D] [V] fait grief au prêteur d’avoir accordé un crédit affecté sans s’assurer que le contrat principal avait été passé par écrit, d’avoir débloqué les fonds au profit de la société Ecorenove alors que le contrat principal avait été conclu avec la société Mysun et sans s’assurer que l’obligation de raccorder l’installation au réseau ERDF avait été exécutée.
La société BNP Paribas Personal Finance affirme qu’elle a octroyé le crédit au vu d’un bon de commande écrit et régulièrement signé par les parties. Elle fait valoir qu’elle a débloqué les fonds sur présentation du certificat de livraison signé par les acquéreurs aux termes duquel ils ont reconnu que la livraison des biens et/ou de la prestation de service avait été pleinement effectuée conformément au contrat conclu avec le vendeur. Elle soutient par ailleurs qu’il n’y a aucun lien de causalité entre sa prétendue faute et le préjudice allégué par le prêteur : les panneaux ont bien été installés et seule l’opposition de la copropriété à l’installation de nouveaux compteurs a empêché le raccordement de l’installation au réseau Erdf de sorte qu’ils sont eux-mêmes à l’origine de leur dommage en ayant négligé de s’assurer préalablement à l’achat de l’installation photovoltaïque de l’accord de la copropriété pour l’installation de deux nouveaux compteurs sur un mur appartenant à la copropriété. Le prêteur considère enfin que les acquéreurs ne subissent aucun préjudice car l’installation fonctionne très bien pour l’autoconsommation d’électricité.
Le certificat de livraison signé le 27 février 2015 par [D] [V] est un imprimé pré-établi dont seules quelques mentions sont renseignées manuscritement.
La première mention du certificat litigieux est la suivante : « Désignation précise du bien ou de la prestation de services dont le financement fait l’objet du contrat de crédit affecté ». Dans cette première rubrique, où la place laissée à la réponse est très réduite, le vendeur a rédigé à la main la seule indication : « photovoltaïque »/
La seconde mention est rédigée en ces termes : « Je soussigné, en sa qualité de vendeur désigné au cadre A ci-dessous, ‘.certifie que la livraison du bien et/ou la fourniture de services au client emprunteur …désigné au cadre B ci-après a été réalisé ( ont été réalisées) conformément à la commande passée par ce dernier ou au contrat de vente conclu par ce dernier ».
[D] [V], après avoir rédigé à la main ses nom, prénom et adresse, a apposé sa signature sous la mention pré-imprimée suivante : « Je reconnais qu’en signant le présent certificat j’atteste sans réserve que la livraison du ou des biens et/ou la fourniture de la prestation de services ci-dessus désignée(s) a ( ont) été pleinement effectuée (s)conformément au contrat principal de vente que j’ai préalablement conclu avec le vendeur ; que cette livraison et/ou fourniture est intervenue le : 27/02/2015 ».
Compte-tenu de ces mentions pré-imprimées et standardisées qui s’apparentent à des clauses de style dans lesquelles aucun détail propre au contrat principal concerné n’est donné hormis la date du 27 février 2015 et le mot « photovoltaïque », le certificat de livraison ne donne aucune information sur le contenu des biens et prestations de services objet du bon de commande du 4 novembre 2014 et sur leur exécution respective. En l’absence des informations nécessaires à l’identification de l’opération en cause, le prêteur n’a donc pas été en mesure à la lecture du certificat de livraison de vérifier que la livraison était complète alors que le 27 février 2015, seule la livraison des panneaux solaires avait été effectuée et que la mise en service et le raccordement au réseau ERDF, prestation expressément mise à la charge du vendeur par le bon de commande, n’avait pas été exécutée. En l’absence d’attestation de livraison lui permettant de s’assurer concrètement de l’exécution complète du contrat principal, le prêteur a commis une faute en libérant les fonds et ne peut valablement opposer à l’emprunteur ce certificat de livraison lequel est trop imprécis sur l’exécution effective par le vendeur de ses obligations pour avoir la moindre valeur probante.
Le lien de causalité entre la faute du prêteur qui a débloqué les fonds au profit du vendeur sans s’assurer préalablement de l’exécution totale de ses obligations et le préjudice subi par les emprunteurs tenus de restituer le capital emprunté alors que l’installation achetée n’a jamais pu être mise en service faute pour le vendeur d’avoir exécuté son obligation de raccordement au réseau ERDF est caractérisé. Si le prêteur n’avait pas débloqué les fonds prématurément avant que le vendeur ait exécuté l’intégralité des obligations qui lui incombaient et tout particulièrement celle de mise en service de l’installation et de raccordement au réseau, il serait toujours en possession du capital emprunté et les emprunteurs à l’abri de tout risque de poursuite. La faute des acquéreurs qui aurait consisté à commander une installation photovoltaïque sans solliciter l’accord préalable de la copropriété, outre qu’elle n’est pas établie, est en tout état de cause inopérante pour exonérer le prêteur de sa responsabilité.
Le préjudice subi par les époux [V] à la suite de la libération prématurée des fonds entre les mains du vendeur est établi dès lors qu’ils sont tenus de restituer le capital emprunté pour financer une installation photovoltaïque produisant de l’électricité destinée exclusivement à être revendue à ERDF, laquelle est impropre à cet usage en l’absence de raccordement au réseau ERDF. La circonstance que cette installation puisse produire de l’électricité destinée à la propre consommation des acquéreurs est inopérante pour justifier de l’absence de préjudice : cette installation de 6000N Kw , surdimensionnée par rapport aux besoins de la consommation personnelle, ferait en outre double emploi avec l’installation photovoltaïque dont ils avaient déjà équipé leur maison afin de produire l’électricité nécessaire à leur consommation.
Le tribunal a évalué à juste titre le préjudice subi par les emprunteurs au montant total du capital emprunté, soit la somme de 34 900 euros. Les emprunteurs n’ayant payé qu’une seule échéance de 387,46 euros, le tribunal à juste titre les a dispensés de payer le reliquat du capital emprunté et condamné la société BNP Personal Finance à leur restituer l’échéance prélevée le 15 mars 2016.
Le jugement sera donc confirmé sur ce point.
Sur l’appel en garantie de la société Ecorenove :
Le tribunal a débouté la sarl BNP Paribas Personal Finance de sa demande tendant à la condamnation de la SAS Ecorenove à garantir l’emprunteur du remboursement du prêt au visa de l’article L 312-56 lequel dispose que si la résolution judiciaire du contrat principal survient du fait du vendeur. En effet, le premier juge a considéré que la faute personnelle du prêteur faisait obstacle à la recevabilité de sa demande de garantie formée contre le fournisseur.
La société BNP Paribas Personal Finance sollicite la fixation de sa créance au passif de la société Ecorenove à hauteur de la somme de 34 900 euros.
Le liquidateur de la société Ecorenove n’ayant pas constitué avocat ne s’est pas prononcé sur les mérites de cet appel en garantie.
La cour relève que cet appel en garantie est fondé sur l’article L312-56 du code de la consommation. En cas de défaillance du vendeur dans l’exécution de ses obligations ayant entraîné la résolution du contrat de vente, la protection du consommateur prévue par cette disposition du code de la consommation permet à l’emprunteur de se faire garantir par le vendeur du remboursement du capital prêté auquel il est tenu.
Cette disposition est étrangère à la relation contractuelle entre les époux [V], la société Ecorenove et la société BNP Paribas Personal Finance . Comme il a été jugé supra et conclu par le prêteur lui-même, le bon de commande du 4 novembre 2014 et le crédit affecté qui en est l’accessoire ne sont pas soumis aux dispositions protectrices du code de la consommation.
Les premiers juges ont donc à raison débouté la société BNP paribas Personal Finance de sa demande de garantie dirigée contre la société Ecorenove.
Sur l’article 700 du code de procédure civile :
Il est équitable de condamner la société BNP Paribas Personal Finance à payer à [D] [V] la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Infirme le jugement partiellement en ce qu’il a constaté qu’aucun contrat écrit n’avait été formalisé entre la société Ecorenove et les époux [V] et en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat principal et la nullité subséquente du contrat de crédit affecté pour non-respect des dispositions du code de la consommation,
Statuant à nouveau sur ces points,
Juge que les époux [V] et la société Ecorenove ont signé un bon de commande écrit le 4 novembre 2014,
Juge que les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables au bon de commande du 4 novembre 2014,
Prononce la résolution pour inexécution du contrat principal et celle subséquente du contrat de crédit affecté,
Confirme pour le surplus le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Autorise [D] [V], à défaut d’enlèvement du matériel par le liquidateur de la société Ecorenove dans le délai de trois mois suivant la signification du présent arrêt, à porter lesdits matériels dans un centre de tri,
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à payer à [D] [V] la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
La condamne aux dépens.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,