COUR D’APPEL
D’ANGERS
CHAMBRE A – CIVILE
IG/IM
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 19/02172 – N° Portalis DBVP-V-B7D-ESZS
Jugement du 25 Septembre 2019
Tribunal d’Instance d’ANGERS
n° d’inscription au RG de première instance 18/516
ARRET DU 17 OCTOBRE 2023
APPELANTE :
SASU SVH ENERGIE venant aux droits de la société GSE INTEGRATION, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Audrey PAPIN substituant Me Philippe LANGLOIS de la SCP ACR AVOCATS, avocat postulant au barreau d’ANGERS, et Me Pauline LEBAS, avocat plaidant au barreau de PARIS – N° du dossier 71190421
INTIMÉE EN INTERVENTION FORCÉE
S.E.L.A.R.L. ATHENA prise en la personne de Me [D] [N] en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société SVH ENERGIE
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Audrey PAPIN substituant Me Philippe LANGLOIS de la SCP ACR AVOCATS, avocat postulant au barreau d’ANGERS, et Me Pauline LEBAS, avocat plaidant au barreau de PARIS – N° du dossier 71190421
INTIMES :
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE exerçant sous l’enseigne CETELEM
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Guillaume QUILICHINI de la SCP PROXIM AVOCATS, avocat postulant au barreau d’ANGERS, et Me Aurélie DEGLANE, avocat plaidant au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT – N° du dossier 2019537
Madame [U] [O]
née le 30 Novembre 1973 à [Localité 7]
[Adresse 8]
[Localité 11]
Monsieur [I] [O]
né le 01 Mai 1977 à [Localité 7]
[Adresse 8]
[Localité 11]
Représentés par Me Sophie DUFOURGBURG, avocat postulant au barreau d’ANGERS, et Me Grégory ROULAND, avocat plaidant au barreau de PARIS – N° du dossier 19116
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 12 Juin 2023 à 14 H 00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme GANDAIS, conseillère qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
Mme GANDAIS, conseillère
Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
Greffière lors des débats : Mme LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 17 octobre 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Isabelle GANDAIS, conseillère, en remplacement de la présidente empêchée, et par Christine LEVEUF, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
Dans le cadre d’un démarchage à domicile, Madame [U] [O] a signé le 10 avril 2017, un bon de commande auprès de la SAS SVH Energie, portant sur une installation photovoltaïque comprenant la pose de 12 panneaux solaires, un onduleur, une batterie et un ballon thermodynamique pour un prix de 28 690 euros.
Pour financer cette acquisition, Mme [O] a souscrit le 27 avril 2017, auprès de la SA BNP Paribas Personal Finance un crédit affecté d’un montant de 28 690 euros remboursable en 144 mensualités, précédées d’un différé de paiement de 6 mois, incluant les intérêts au taux nominal de 4,70 % l’an.
Suivant actes d’huissier en date des 12 et 13 mars 2018, Mme [O] et son époux, M. [I] [O] ont fait assigner la société venderesse et le prêteur devant le tribunal d’instance d’Angers aux fins de voir principalement annuler les contrats de vente et de crédit et constater une faute du prêteur le privant de son droit à restitution du capital.
Suivant jugement en date du 25 septembre 2019, le tribunal a :
– mis hors de cause la société SVH Energie immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 508’676’053,
– reçu l’intervention volontaire de la société SVH Energie, immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 833’656’218,
– dit sans objet les demandes formées par les sociétés SAS SVH Energie et SA BNP Paribas Personal Finance tendant à voir déclarer M. [I] [O] irrecevable en ses demandes,
– déclaré irrecevables les demandes formées par la SA BNP Paribas Personal Finance et la SAS SVH Energie à l’encontre de M. [I] [O],
– prononcé la nullité du contrat conclu le 10 avril 2017 entre la SAS SVH Energie d’une part et Mme [U] [O] d’autre part, formalisé selon le bon de commande n°49945,
– condamné la SAS SVH Energie à procéder, à ses frais, au démontage et à la reprise de l’intégralité du matériel vendu, ainsi qu’à procéder, à ses frais, à la remise en état de la couverture de la maison d’habitation de Mme [U] [O] dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement,
– condamné la SAS SVH Energie à restituer à Mme [O] la somme de 28 690 euros correspondant au prix de vente prévu au contrat de vente du 10 avril 2017 formalisé selon bon de commande n°49945,
– constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté souscrit le 27 avril 2017 par Mme [U] [O] auprès de la SA BNP Paribas Personal Finance,
– condamné Mme [U] [O] à rembourser à la SA BNP Paribas Personal Finance le montant du capital emprunté, soit 28 690 euros après déduction des échéances déjà versées à la SA BNP Paribas Personal Finance avec intérêts au taux légal à compter du jour où la SAS SVH Energie lui aura, elle-même, restitué ladite somme,’
– rejeté la demande de la SAS SVH Energie tendant à voir dire que le contrat de vente passé entre elle et Mme [U] [O] a été confirmé au sens des dispositions de l’article 1338 du code civil,
– rejeté la demande de Mme [U] [O] tendant à se voir dispensée de la restitution du capital prêté à la SA BNP Paribas Personal Finance,
– débouté les parties de leurs autres demandes,
– condamné in solidum la SA BNP Paribas Personal Finance et la SAS SVH Energie à payer à Mme [U] [O] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté la demande formée par la SAS SVH Energie au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté la demande formée par la SA BNP Paribas Personal Finance au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que la SA BNP Paribas Personal Finance et la SAS SVH Energie devront supporter l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement prévus à l’article L 111-8 du code des procédures civiles d’exécution, et ce, en application de l’article R 631-4 du code de la consommation,
– condamné in solidum la SA BNP Paribas Personal Finance et la SAS SVH Energie aux dépens,
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement.
Le tribunal, après avoir constaté que les contrats de vente et de crédit affecté litigieux ne portaient la signature que de Mme [O], a retenu que M. [O] n’était pas partie à ces conventions et que les sociétés venderesse et de crédit se trouvaient dès lors irrecevables en leurs demandes à son encontre, faute d’intérêt à agir. Ensuite, le juge, observant que la demanderesse sollicitait alternativement ou cumulativement la résolution et l’annulation du contrat principal sans rendre une demande subsidiaire par rapport à l’autre, a procédé en premier à une analyse des moyens liés aux conditions de formation du contrat. Ainsi, il a considéré qu’au regard des informations prescrites par l’article L111-1 du code de la consommation, le bon de commande encourait la nullité pour son imprécision en ce qu’il ne comportait pas notamment le prix unitaire de chaque matériel vendu au titre de l’installation photovoltaïque. Il a relevé également que le modèle et le type des panneaux photovoltaïques n’étaient pas indiqués et qu’aucune précision n’était apportée s’agissant des éléments accessoires nécessaires, notamment la batterie et l’onduleur. Il en a déduit que ces omissions ne permettaient pas au consommateur de vérifier la faisabilité de son projet, d’apprécier l’opportunité de son choix et de procéder le cas échéant à une comparaison avec d’autres biens et services proposés par d’autres fournisseurs. Par ailleurs, le tribunal a relevé que les conditions générales figurant au verso du bon de commande produit par la demanderesse, ne mentionnent pas la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation et qu’au surplus, la taille de police de ces conditions contractuelles et la qualité du document ne permettaient pas de lire la fin du texte. Il a ensuite jugé qu’aucun acte de confirmation ne faisait échec à la nullité du contrat de vente dès lors que Mme [O] était consommateur néophyte et qu’il ne peut se déduire de son acceptation des travaux et du règlement des mensualités de prêt, une exécution volontaire du contrat, à défaut pour elle de connaître les vices affectant ledit contrat. Le tribunal, constatant la nullité subséquente du contrat de crédit accessoire, a énoncé les restitutions réciproques à intervenir en exécution de l’anéantissement rétroactif des deux contrats. S’agissant de la restitution du capital prêté par l’emprunteur, le juge a relevé que la banque a commis des fautes en ne s’assurant pas d’une part, de la livraison effective de l’intégralité des prestations et biens figurant au contrat de vente et d’autre part de la conformité du bon de commande aux prescriptions d’ordre public du code de la consommation. Toutefois, s’agissant du préjudice subi par l’emprunteur, le tribunal a considéré que Mme [O] ne justifiait pas de l’absence alléguée du raccordement de l’installation au réseau électrique et n’émettait aucun grief relatif au caractère non fonctionnel du ballon d’eau chaude. En conséquence, le juge a considéré que faute de démonstration d’un préjudice, Mme [O] devait être condamnée à restituer à la banque le capital emprunté.
Par déclaration reçue au greffe de la cour, le 4 novembre 2019, la SASU SVH Energie, intimant la SA BNP Paribas Personal Finance, M. et Mme [O], a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions à l’exception de celles relatives à la mise hors de cause de la société SVH Energie immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 508’676’053, à la recevabilité de l’intervention volontaire de la société SVH Energie, immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 833’656’218, à l’irrecevabilité de ses demandes formées à l’encontre de M. [O] ainsi qu’au débouté de Mme [O] de sa demande tendant à être dispensée de la restitution du capital prêté par la banque.
Par jugement du tribunal de commerce d’Angers du 23 juin 2021, la SAS SVH Energie a été placée en liquidation judiciaire et le tribunal a désigné la SELARL Athéna prise en la personne de Me [D] [N] en qualité de liquidateur.
Suivant acte d’huissier du 3 septembre 2021, la SA BNP Paribas Personal Finance a assigné en intervention forcée la SELARL Athéna en sa qualité de liquidateur de la SAS SVH Energie.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions :
– en date du 23 mai 2023 pour la SASU SVH Energie et son liquidateur,
– en date du 6 juin 2023 pour les époux [O],
– en date du 20 septembre 2021 pour la SA BNP Paribas Personal Finance,
qui peuvent se résumer comme suit.
Les appelantes demandent à la cour, au visa des articles L111-1 et suivants et L 221-5 du code de la consommation, 1103 et suivants, 1224 et suivants et 1182 du code civil, de :
– réformer le jugement du tribunal d’instance d’Angers du 25 septembre 2019 en ce qu’il a :
– prononcé la nullité du contrat conclu le 10 avril 2017 entre la SAS SVH Energie d’une part et Mme [U] [O] d’autre part formalisé selon le bon de commande n°49945,
– condamné la SAS SVH Energie à procéder, à ses frais, au démontage et à la reprise de l’intégralité du matériel vendu, ainsi qu’à procéder, à ses frais, à la remise en état de la couverture de la maison d’habitation de Mme [U] [O] dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement,
– condamné la SAS SVH Energie à restituer à Mme [U] [O] la somme de 28 690 euros correspondant au prix de vente prévu au contrat de vente du 10 avril 2017 formalisé selon le bon de commande n°49945,
– constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté souscrit le 27 avril 2017 par Mme [U] [O] auprès de la SA BNP Paribas Personal Finance,
– condamné Mme [U] [O] à rembourser à la SA BNP Paribas Personal Finance le montant du capital emprunté, soit 28 690 euros après déduction des échéances déjà versées à la SA BNP Paribas Personal Finance avec intérêt au taux légal à compter du jour où la SAS SVH Energie lui aura, elle-même, restitué ladite somme,
– rejeté la demande de la SAS SVH Energie tendant à voir dire que le contrat de vente passé entre elle et Mme [U] [O] a été confirmé au sens des dispositions de l’article 1338 du code civil,
– condamné in solidum la SA BNP Paribas Personal Finance et la SAS SVH Energie à payer à Mme [U] [O] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté la demande formée par la SAS SVH Energie au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que la SA BNP Paribas Personal Finance et la SAS SVH Energie devront supporter l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement prévus à l’article L 111-8 du code des procédures civiles d’exécution, et ce, en application de l’article R631-4 du code de la consommation,
– condamné in solidum la SA BNP Paribas Personal Finance et la SAS SVH Energie aux dépens,
– statuant de nouveau :
– constater la validité du contrat de vente conclu entre Mme [U] [O] et la
société SVH Energie le 10 avril 2017,
– dire et juger que l’annulation du contrat n’est pas encourue telle que demandée en première instance par Mme [U] [O],
– dire et juger, qu’en tout état de cause, Mme [U] [O] a entendu confirmer son engagement à l’égard de la société SVH Energie, notamment en ne sollicitant qu’à titre subsidiaire la nullité de la vente,
– dire et juger que la résolution du contrat n’est également pas encourue telle que demandée en première instance par Mme [U] [O],
– en conséquence, débouter purement et simplement Mme [U] [O] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– par suite, débouter la société BNP Paribas Personal Finance de ses demandes à l’égard de la société SVH Energie,
– en tout état de cause, condamner les époux [O] au paiement d’une somme de 3’000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile
À l’appui de leur appel, les sociétés soulignent à titre liminaire que Mme [O], en sollicitant, devant la cour, à titre principal la résolution de la vente et uniquement à titre subsidiaire, la nullité du contrat de vente, admet nécessairement que celui-ci a été régulièrement formé. Les appelantes relevant encore que l’intimée ne peut par ailleurs demander la résolution d’un contrat prétendument nul, cette prétention s’analysant comme un acte de confirmation incontestable du bon de commande.
Sur les causes de nullité alléguées, elles affirment que l’acheteuse connaissait pertinemment l’objet du bon de commande, qui renseignait sur les caractéristiques essentielles des biens vendus et que c’est de manière parfaitement éclairée qu’elle a fait procéder à l’installation photovoltaïque. S’agissant de l’indication du prix unitaire de chaque matériel commandé, les appelantes soutiennent que cette information ne peut entrer dans la catégorie des caractéristiques essentielles, étant parfaitement inutile au consommateur puisque c’est le prix global pour la pose et l’installation d’une centrale photovoltaïque qui permet une comparaison entre les prix de prestations similaires proposées par les entreprises concurrentes. En outre, elles indiquent que les conditions générales de vente, tout à fait lisibles, stipulaient la possibilité de recourir à une médiation conventionnelle ainsi que les informations relatives à la garantie professionnelle du vendeur. Par ailleurs, elles soulignent que l’absence de mention sur le bon de commande de la durée pendant laquelle sont disponibles les pièces détachées ou de rechange, ne peut nullement fonder la nullité du contrat. En tout état de cause, observant que les dispositions du code de la consommation figuraient expressément sur le bon de commande, elles considèrent que l’acheteuse était parfaitement informée de la nullité résultant d’une irrégularité au regard de ces textes de sorte que son exécution postérieure du contrat vaut confirmation de celui-ci.
En réponse à la demande de résolution du contrat de vente, les appelantes font valoir que la société venderesse, malgré ses recherches, n’a pas retrouvé trace de la mise en demeure évoquée par Mme [O]. Elles soulignent que l’adresse apposée sur le courrier est différente de celle figurant sur l’accusé réception, que celui-ci ne comporte aucune date de présentation ni signature. Elles reprochent à l’intimée d’avoir négligé le bon suivi de son dossier en ne procédant pas à une nouvelle relance. En tout état de cause, les appelantes déclarent qu’elles avaient bien réalisé les formalités administratives nécessaires à la réalisation de l’installation mais, au vu des documents remis par Mme [O] pour constituer le dossier, avait déposé la demande auprès de la mairie de son ancien lieu d’habitation. Elles proposent, comme en première instance, de régulariser la situation administrative auprès de la mairie compétente, observant que contrairement à ce qui est allégué, l’installation est parfaitement fonctionnelle puisqu’elle est en autoconsommation et qu’une convention à cette fin a bien été conclue avec la société Enédis pour le compte de Mme [O].
Les époux [O] demandent à la cour, au visa des articles L 111-1 et suivants, L 312-48 et L 312-55 du code de la consommation, de :
– confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a mis hors de cause M. [O] de ses demandes à l’encontre de la SAS GSE Intégration et de la SA BNP Paribas Personal Finance (sic),
– pour le surplus, prononcer à titre principal la résolution des contrats de vente et de crédit et à titre subsidiaire leur annulation,
– infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la SAS SVH Energie à rembourser la somme de 28 690 euros à Mme [U] [O],
– prononcer à titre principal la résolution des contrats de vente et de crédit et à titre subsidiaire leur annulation,
– en conséquence, à titre principal, exonérer Mme [O] de devoir rembourser la somme de 28 690 euros à la SA BNP Paribas Personal Finance, en raison des fautes commises par cette dernière et de l’insolvabilité de la venderesse, l’ensemble lui causant un grave préjudice,
– à titre subsidiaire, si la faute de la SA BNP Paribas Personal Finance n’était pas retenue, fixer la créance de Mme [O] au passif de la SAS SVH Energie à la somme de 28 690 euros,
– en tout état de cause, déclarer que Mme [O] tiendra à la disposition de la SELARL Athéna prise en la personne de Me [D] [N], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SASU SVH Energie l’intégralité des matériels posés au domicile de Mme [U] [O] dans un délai de deux mois à compter du prononcé de l’arrêt,
– condamner la SA BNP Paribas Personal Finance au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
À l’appui de leurs demandes et à titre liminaire, ils rappellent que c’est par précaution que M. [O] est intervenu aux côtés de son épouse en première instance mais qu’il a renoncé à l’ensemble de ses demandes personnelles contre la société venderesse et la banque dès lors qu’il a été établi que seule Mme [O] se trouvait engagée par les deux contrats litigieux. Pour le reste, Mme [O] affirme en premier lieu qu’elle n’a eu connaissance de la convention d’autoconsommation produite par la société venderesse que dans le cadre de la première instance, soulignant que ce document semble avoir été fabriqué pour les besoins de la cause et ne porte ni sa signature ni celle d’Enédis. Elle ajoute qu’elle n’a jamais donné mandat à la société venderesse pour signer une telle convention. En second lieu et à titre principal, elle fait valoir que cette dernière a commis une faute justifiant la résolution de la vente en ne réalisant pas les démarches auprès de la mairie pour obtenir l’autorisation préalable de travaux et en ne régularisant pas la situation, malgré une sommation de son conseil le 7 novembre 2017. L’intimée indique que l’installation posée est ainsi illégale. En réponse aux moyens adverses, elle énonce que la venderesse a bien réceptionné sa mise en demeure, ne contestant d’ailleurs pas le tampon qui figure sur l’accusé réception. Elle ajoute qu’il ne lui appartenait pas, profane et mandante, de suivre le bon déroulement des démarches administratives dont la venderesse était chargée, y compris de la relancer en l’absence de réponse à sa mise en demeure. L’intimée souligne que c’est devant le premier juge qu’elle a eu connaissance de la demande de déclaration préalable de travaux déposée par la venderesse auprès de la mairie de son ancien lieu d’habitation. À cet égard, s’agissant de sa nouvelle adresse, Mme [O] affirme que la venderesse était parfaitement informée de celle-ci qui correspondait au lieu d’installation des panneaux et qui figure sur le contrat de vente et sur la fiche client établie par la société. Par ailleurs, si la venderesse a indiqué qu’elle souhaitait déposer une nouvelle demande de déclaration préalable de travaux, l’intimée observe qu’elle ne l’a jamais fait et que le délai d’un mois accordé par la mairie est largement dépassé, ce qui conduit à déposer l’installation qui est illégale.
À titre subsidiaire, elle considère que la méconnaissance par la société venderesse des dispositions des articles L111-1 et L111 -2 du code de la consommation, entraîne la nullité du contrat de vente. Ainsi, elle relève que font défaut, les renseignements nécessaires sur les caractéristiques essentielles des biens vendus (notamment le coût unitaire et la TVA de chaque matériel), l’indication du droit de recourir au médiateur de la consommation et ses coordonnées ainsi que la précision des coordonnées de l’assureur responsabilité professionnelle ou civile du vendeur. Elle affirme par ailleurs que la nullité relative du contrat de vente ne saurait être couverte implicitement par son exécution volontaire dudit contrat dans la mesure où elle n’a jamais eu connaissance des vices de forme affectant le bon de commande. En tout état de cause, elle rappelle que la résolution ou l’annulation du contrat principal entraîne de plein droit cette même sanction pour le contrat de crédit accessoire. L’intimée indique qu’elle ne saurait toutefois être tenue de restituer le solde du crédit au prêteur en raison des fautes de ce dernier. À ce titre, elle lui fait grief d’avoir procédé au déblocage des fonds en ne vérifiant pas que toutes les autorisations administratives requises pour l’installation financée avaient été obtenues. Elle souligne que l’appel de fonds ne comprend aucun descriptif du matériel livré et posé de sorte que le prêteur n’était pas en mesure de s’assurer que le vendeur avait livré intégralement les biens convenus. Elle ajoute que le bon de fin de travaux était particulièrement lacunaire et ne comportait pas l’ensemble des matériels visés au bon de commande. Elle indique encore qu’elle n’a pas demandé à bénéficier d’une livraison immédiate, ne faisant aucune démarche expresse en ce sens. L’intimée affirme que l’ensemble de ces fautes lui cause un préjudice puisqu’elle doit restituer les matériels au liquidateur judiciaire sans possibilité de se retourner contre la venderesse, en déconfiture, qu’elle doit démonter à ses frais ces matériels et qu’elle ne peut en tout état de cause les conserver car leur installation est illégale, non couverte par une assurance et non raccordée au réseau Enédis. A titre subsidiaire, si aucune faute ne devait être retenue à l’encontre du prêteur, elle demande que soit fixée sa dette au titre de la restitution du capital prêté, au passif de la société venderesse.
La SA BNP Paribas Personal Finance demande à la cour, au visa des articles L111-1, L112-3 et L312-39 et suivants du code de la consommation, 1182, 1231 et suivants, 1240, 1347, 1353 du code civil, 367 du code de procédure civile, de :
– prononcer la jonction de la présente instance avec celle introduite à la demande de la société BNP Paribas Personal Finance, à l’encontre de la SELARL Athéna, prise en la personne de Me [N], en sa qualité de liquidateur de la société SVH Energie, selon assignation en intervention forcée du 3 septembre 2021,
– infirmer le jugement rendu par le tribunal d’instance d’Angers le 25 septembre 2019 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a :
– mis hors de cause la société SVH Energie immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 508 676 053,
– reçu l’intervention volontaire de la société SVH Energie, immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 833 656 218,
– dit sans objet les demandes formées par les sociétés SAS SVH Energie et la SA BNP Paribas Personal Finance tendant à voir M. [I] [O] déclaré irrecevable en ses demandes,
– déclaré irrecevables les demandes formées par la SA BNP Paribas Personal Finance et la SAS SVH Energie à l’encontre de M. [I] [O],
– débouté la société SVH Energie et Mme [U] [O] de leurs autres demandes,
– rejeté la demande formée par la SAS SVH Energie au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau sur les chefs réformés,
A titre principal :
– juger n’y avoir lieu à nullité ou à résolution du contrat principal du 10 avril 2017 conclu entre la société SVH Energie et Mme [U] [O],
– juger n’y avoir lieu à nullité ou à résolution du contrat de crédit conclu le 27 avril 2017 entre elle et Mme [U] [O],
– condamner Mme [U] [O] à lui verser la somme de 29 919,64 euros en principal, assortie des intérêts au taux contractuel de 4,70 % à compter du 8 juin 2018,
– condamner Mme [U] [O] à lui verser la somme de 1 972,12 euros au titre de l’indemnité de retard, avec intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2018,
– débouter Mme [U] [O] et la société SVH Energie de toutes demandes contraires,
– à titre subsidiaire, en cas de nullité des contrats,
– juger qu’aucune faute n’a été commise par elle dans le déblocage des fonds,
– juger que Mme [U] [O] ne justifie d’aucun préjudice certain, direct et personnel, qui résulterait directement d’une éventuelle faute de sa part,
– condamner Mme [U] [O] à lui payer la somme de 28 690 euros au titre de l’obligation pour l’emprunteur de restituer le capital prêté déduction faite des remboursements effectués, et juger que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement,
– à titre plus subsidiaire, en cas de faute du prêteur et de préjudice de l’emprunteur, condamner Mme [U] [O] à lui payer la somme de 28 690 euros au titre de l’obligation pour l’emprunteur de restituer le capital prêté déduction faite des remboursements effectués, et juger que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement,
– juger que le préjudice subi par Mme [U] [O] s’analyse comme une perte de chance de ne pas contracter, dont la probabilité est de l’ordre de 5%, soit la somme maximum de 1 500 euros,
– ordonner la compensation entre les sommes mises à la charge de chacune des parties,
– à titre infiniment subsidiaire, en cas de rejet de la demande en restitution du capital prêté, constater et fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société SVH Energie à la somme de 28 690 euros à titre de dommages et intérêts,
– en tout état de cause, débouter Mme [U] [O] et la société SVH Energie de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions, dirigées contre elle,
– à titre principal, condamner Mme [U] [O] à lui payer la somme de 3 600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les procédures de première instance et d’appel, ainsi qu’aux entiers frais et dépens de première instance et d’appel,
– à titre subsidiaire, constater et fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société SVH Energie à la somme de 3 600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les procédures de première instance et d’appel, ainsi qu’aux entiers frais et dépens de première instance et d’appel.
Au soutien de ses prétentions, la banque fait valoir à titre principal que le contrat de vente n’encourt pas la nullité dès lors qu’aucune disposition du code de la consommation n’impose de mentionner un prix unitaire pour chaque matériel vendu et que seul le prix global est exigé. S’agissant des caractéristiques essentielles des biens vendus, l’intimée relève que le modèle, le type des panneaux photovoltaïques ainsi que la contenance du ballon thermodynamique sont bien précisés sur le bon de commande. Sur la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation, elle indique que les conditions générales prévoient cette information, observant qu’il appartient à la demanderesse à la nullité du contrat de produire l’original du bon de commande ainsi que les conditions générales de vente qu’elle qualifie d’illisibles alors qu’elles peuvent parfaitement être déchiffrées et qu’aucune disposition du code de la consommation n’impose une taille minimale des caractères du bon de commande. Elle ajoute que ces mêmes conditions comportent les informations quant aux garanties applicables et assurances souscrites par la venderesse, observant que l’identité de l’assureur de responsabilité décennale et les références du contrat figurent expressément sur la facture remise à l’acheteuse. La banque souligne encore qu’aucune disposition ne sanctionne, par la nullité du contrat, l’absence d’information sur la durée de disponibilité des pièces détachées ou de rechange sur le marché. En tout état de cause, elle considère qu’au vu de la reproduction in extenso des dispositions de l’article L111-1 du code de la consommation et du fait que Mme [O] a reconnu avoir pris connaissance des dispositions applicables du code de la consommation, les causes de nullité formelles se trouvent couvertes.
En réponse à la demande de résolution judiciaire du contrat principal, la banque relève que l’obligation incombant à la société venderesse de procéder au dépôt de la déclaration préalable en mairie, ne découle pas du contrat de vente mais d’un second contrat, intitulé ‘mandat spécial’. Elle en déduit que l’inexécution du mandat spécial ne peut entraîner la résolution du contrat de vente qui est bien distinct. En outre, elle observe que Mme [O] ne verse aux débats aucune décision ayant force exécutoire ordonnant la démolition de l’installation de sorte que son préjudice n’est pas établi. En tout état de cause, constatant que s’agissant du ballon d’eau chaude, il n’est formulé aucun grief, elle affirme qu’une éventuelle inexécution du vendeur relativement à la seule installation photovoltaïque ne saurait entraîner la résolution de l’entier contrat.
À titre subsidiaire, en cas de nullité ou de résolution des contrats, la banque expose qu’elle n’a pas commis de faute dans la délivrance des fonds de nature à la priver de son droit à restitution du capital. Elle fait état de plusieurs documents précis, à savoir l’attestation de livraison, le bon de fin de travaux et l’appel de fonds, signés par Mme [O] qui reconnaissait alors, sans réserve, avoir été livrée de la marchandise et qui attestait de l’exécution des prestations. La banque rappelle en tout état de cause qu’elle n’a aucune obligation de vérifier la conformité des prestations réalisées ni la régularité du bon de commande, étant un intermédiaire de crédit acceptant de prêter son concours à diverses opérations. Par ailleurs, elle souligne que Mme [O] ne justifie d’aucun dysfonctionnement de l’installation photovoltaïque et du ballon thermo-dynamique, ne démontrant dès lors aucun préjudice certain direct et personnel résultant directement des fautes alléguées. À titre plus subsidiaire, si une faute était retenue à son encontre dans le déblocage des fonds, elle estime que celle-ci doit s’analyser comme une perte de chance de ne pas contracter dont la probabilité est de l’ordre de 5 %. À titre infiniment subsidiaire, elle sollicite que soit fixée sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société venderesse qui est la seule responsable de l’annulation des contrats.
Conformément aux avis de clôture et de fixation délivrés par le greffe aux parties les 9 mars et 25 mai 2023, l’ordonnance de clôture qui devait initialement être rendue le 3 mai 2023 a été reportée au 7 juin 2023 et l’affaire fixée à l’audience de plaidoiries du 12 juin 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, la cour observe que l’assignation en intervention forcée du liquidateur de la société venderesse, délivrée le 3 septembre 2021, a été enregistrée au sein de cette procédure, de sorte qu’il n’y a pas lieu de prononcer la jonction sollicitée par la SA BNP Paribas Personal Finance.
I- Sur la demande principale en résolution du contrat de vente
Selon les articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
Par ailleurs, l’article 1217 du même code dispose que la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut (…) provoquer la résolution du contrat et demander réparation des conséquences de l’inexécution.
L’article 1224 précise que la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.
En l’espèce, aux termes du bon de commande passé le 10 avril 2017 entre Mme [O] et la société SVH Energie, le ‘pack GSE 12, GSE Air’System’ comprend 12 panneaux photovoltaïques, 1 onduleur, 1 kit intégration GSE, 1 boîtier DC, 1 câblage, 1 installation, 1 raccordement et des démarches administratives. Les conditions générales de vente stipulent à l’article 3 b) que sous réserve du droit de rétractation, la vente ne sera considérée comme définitive qu’après la réalisation des conditions suspensives suivantes, à savoir pour les installations photovoltaïques, l’obtention par le client ou son mandataire de l’autorisation administrative requise pour l’installation du produit après instruction de la demande de travaux et absence de recours sur cette autorisation dans les délais légaux et à l’article 7 ‘Prix’ que celui-ci comprend, pour les offres photovoltaïques, la réalisation des démarches administratives visant la présentation du dossier auprès du partenaire financier et les demandes d’autorisations de travaux.
L’article 10 de ces mêmes conditions prévoit, s’agissant des délais de livraison pour les offres photovoltaïques, que dans les 2 mois de la signature du bon de commande, la visite d’un technicien à l’adresse du client sera organisée pour s’assurer de la faisabilité technique de l’installation (‘prévisite’). ‘Dans le même temps, la société procédera aux démarches administratives (déclaration de travaux, demande de raccordement, etc.) pour lesquelles elle aura pu être mandatée par le client ainsi qu’à la transmission des données auprès de l’organisme financier partenaire. L’installation du système photovoltaïque interviendra dans un délai de 3 mois à compter de la prévisite. Ces délais pourront être modifiés en cas de survenance d’un cas fortuit, d’un cas de force majeure ou de suspension, en raison d’une cause légitime. Dans cette hypothèse, le délai sera prorogé du nombre de jours pendant lesquels l’exécution du contrat aura été suspendue en raison de l’un de ces événements. Pour l’application de ce paragraphe, seront notamment considérées comme des causes légitimes de suspension du délai l’un des événements suivants : les intempéries entraînant un arrêt des travaux, les difficultés techniques imprévisibles rencontrées au cours de la réalisation de l’installation, travaux à la charge du client qui n’auraient pas été réalisés dans les délais par ce dernier rendant impossible installation photovoltaïque (…)’.
Par ailleurs, Mme [O] a signé, le 10 avril 2017, avec la société SVH Energie, un mandat spécial aux termes duquel elle donnait pouvoir à cette dernière pour effectuer, pour elle et en son nom, toutes les démarches administratives relatives à une installation photovoltaïque notamment auprès de la mairie et plus généralement pour effectuer toutes les démarches, toutes déclarations, émettre et signer tous actes et faire le nécessaire à l’objet du mandat.
Au regard de ces deux documents contractuels, c’est vainement que la SA BNP Paribas Personal Finance soutient que l’obligation de la société venderesse ne trouverait son origine que dans le mandat spécial précité et ne pourrait dès lors justifier la résolution judiciaire de la convention principale.
Il est acquis aux débats que si la société venderesse a effectué, dans les délais, les démarches nécessaires de déclaration préalable de travaux ainsi qu’elle en justifie, celles-ci ont été réalisées auprès de la mairie de [Localité 10], commune de l’ancienne domiciliation de Mme [O]. A cet égard, c’est à tort que l’appelante soutient qu’elle a été induite en erreur par sa cocontractante du fait de l’adresse portée sur les documents remis pour constituer le dossier administratif, à savoir sa pièce d’identité et ses bulletins de salaire. Force est de constater que le bon de commande, le mandat spécial ainsi que la ‘fiche client photovoltaïque’ remplie par un technicien de la société venderesse, venu sur place pour effectuer les repérages nécessaires à la pose de l’installation photovoltaïque et du ballon d’eau chaude, mentionnent la nouvelle adresse de la maison d’habitation occupée par Mme [O] à [Localité 9].
Il est encore établi que suivant courrier du 27 octobre 2017, M. le Maire de [Localité 11] mettait en demeure Mme [O] de déposer en mairie de [Localité 9], commune déléguée, une déclaration préalable de travaux dans un délai d’un mois à compter de la réception de son courrier afin de régulariser les travaux (installation de panneaux photovoltaïques) réalisés sans l’autorisation préalable d’urbanisme prévue à l’article R 421-17 du code de l’urbanisme. Le Maire précisait à Mme [O] qu’au regard de cette situation, elle était en infraction et qu’à défaut d’obtention d’une telle autorisation, il conviendra de procéder ou faire procéder à la dépose des panneaux sous peine de poursuite.
Mme [O] produit aux débats un courrier recommandé de son conseil, daté du 7 novembre 2017, adressé à la société venderesse. Rappelant à cette dernière qu’elle était chargée des démarches administratives auprès de la mairie de son domicile, il fait état de la mise en demeure du Maire de [Localité 11], lui reprochant de ne pas avoir fait le nécessaire et la mettant en demeure de régulariser la situation dans le délai d’un mois.
S’agissant de la réception dudit courrier par la société appelante, la cour observe que les copies de la preuve de dépôt et de l’avis de réception, produites par Mme [O] justifient à la fois de la réalité de cet envoi mais également de sa réception. Le cachet de la poste apposé sur la preuve de dépôt renseigne sur l’année 2017 et il est possible de lire ‘7-11″ bien que le mois de l’année soit plus difficilement déchiffrable. Si aucune date de présentation ou de distribution n’est indiquée sur l’accusé de réception (dont le numéro correspond à celui porté sur la preuve de dépôt), le cachet de la société SVH Energie y figure néanmoins. Par ailleurs, si le conseil de Mme [O] a mentionné l’adresse du siège social de la société venderesse aux termes de son courrier, l’adresse du destinataire portée sur le recommandé est bien celle que la société renseigne elle-même pour les correspondances, la distinguant de celle de son siège social.
Au vu de ces éléments, la société appelante ne peut valablement remettre en cause la réception de ce courrier recommandé, daté du 7 novembre 2017, au seul motif que l’avis de réception ne porte trace d’aucune date. Si la réception en retour par le conseil de Mme [O] de cet avis de réception ne peut être datée, il n’est pas discutable que lors de la délivrance de l’assignation, en mars 2018, cette pièce existait et sous-tendait déjà la demande de Mme [O] en résolution du contrat de vente pour inexécution des démarches administratives.
Par ailleurs, les appelantes ne sauraient faire grief à Mme [O] de ne pas s’être rapprochée de la société venderesse face au silence gardé par celle-ci dans les suites de son envoi de la mise en demeure du 7 novembre 2017. En effet, comme cela vient d’être énoncé, Mme [O] avait pris soin de prendre un conseil pour rappeler ses obligations contractuelles à la société SVH Energie et elle était en mesure, au vu de l’avis de réception, de présumer de la bonne réception de ladite mise en demeure.
Il s’avère, au vu de ce qui précède, que la déclaration préalable de travaux n’ayant pas été effectuée, dans les délais contractuels, auprès de la Mairie du [Localité 11] et aucune régularisation n’étant intervenue dans le délai imparti par l’administration, le contrat principal encourt la résolution judiciaire. En effet, la société venderesse n’a pas respecté son obligation de déposer la déclaration préalable de travaux obligatoire pour les panneaux photovoltaïques à la mairie du domicile de Mme [O], avec expiration des délais d’opposition avant d’engager les travaux d’installation des panneaux, rendant de ce fait l’installation illégale au regard des articles L 480-4 et R 421-17 du code de l’urbanisme.
La circonstance avancée par les appelantes, indiquant que l’installation serait parfaitement fonctionnelle comme reposant sur l’autoconsommation, ce qui est formellement contesté par Mme [O], est en tout état de cause indifférente car à la supposer opérationnelle, cette installation n’en demeure pas moins illégale.
Enfin, si les appelantes font état des propositions de régularisation par la société venderesse, non discutées par Mme [O], celles-ci sont intervenues une fois l’assignation délivrée et alors même que tant le délai laissé par le Maire de [Localité 9] que celui contractuellement prévu pour la livraison de l’installation étaient largement expirés. Les appelantes ne peuvent dès lors opposer à Mme [O] une mauvaise foi s’agissant de son absence de réponse sur ce point.
Cette inexécution contractuelle entièrement imputable à la société venderesse porte nécessairement préjudice à Mme [O] en ce qu’elle s’expose à une action en démolition des panneaux et au paiement d’une amende alors qu’aucune régularisation n’est désormais envisageable au vu de la liquidation judiciaire de la société venderesse. Cela est suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat de vente, étant observé que si le ballon thermodynamique n’est pas soumis à cette autorisation de travaux et qu’il n’est pas déploré de dysfonctionnement pour ce matériel, celui-ci a un intérêt lorsqu’il est cumulé à un système photovoltaïque, ce qui explique qu’il est le complément habituel de ce type d’installation.
Il convient en conséquence d’accueillir la demande principale de Mme [O] et de prononcer la résolution du contrat de vente conclu le 10 avril 2017 avec la société SVH Energie, la disposition du jugement entrepris ayant prononcé la nullité dudit contrat se trouvant ainsi infirmée.
II- Sur la résolution du contrat de crédit accessoire
En application de l’article L 312-55 du code de la consommation, en cas de contestation sur l’exécution du contrat principal, le tribunal peut, jusqu’à la solution du litige, suspendre l’exécution du contrat de crédit. Celui-ci est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Le contrat de fourniture et de pose de l’installation photovoltaïque étant résolu, le contrat accessoire de crédit du 27 avril 2017 conclu entre Mme [O] et la société Cétélem aux droits de laquelle vient la SA BNP Paribas Personal Finance n’ayant plus d’objet, est donc également résolu de plein droit.
Le jugement entrepris qui a constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté sera infirmé.
III- Sur les conséquences de la résolution des contrats
La résolution met fin aux contrats et les parties sont remises dans l’état où elles se trouvaient lors de la conclusion de ceux-ci et doivent se restituer les prestations que chacune a reçues de l’autre.
A cet égard, Mme [O] demande qu’il lui soit donné acte de ce qu’elle tient à la disposition du liquidateur judiciaire de la société SVH Energie l’ensemble des matériels posés à son domicile, pendant un délai de deux mois à compter du prononcé du présent arrêt. Dans la mesure où la résolution du contrat emporte de plein droit l’obligation pour Mme [O] de restituer les biens qui lui ont été fournis, il y a lieu de dire que cette dernière devra tenir à la disposition du liquidateur judiciaire de la société SVH Energie l’intégralité des matériels installés durant un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, et que passé ce délai elle pourra procéder à leur démontage.
La disposition du jugement entrepris condamnant la société SVH Energie à procéder à ses frais, au démontage et à la reprise de l’intégralité du matériel vendu ainsi qu’à procéder à ses frais à la remise en état de la couverture de la maison d’habitation dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement sera infirmée au regard du placement en liquidation judiciaire de la société.
Par ailleurs, dans la mesure où la société SVH Energie, au cours de la procédure d’appel, a été mise en liquidation judiciaire, il convient d’infirmer la condamnation à paiement prononcée à son encontre par le premier juge et correspondant à la restitution du prix de vente, les dispositions de l’article L. 622-22 du code de commerce l’interdisant.
S’agissant de la résolution du contrat de crédit affecté, elle emporte l’obligation pour l’emprunteur de restituer au prêteur les sommes versées en application du contrat initial.
Pour autant, l’article L 312-48 du même code dispose que les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation.
Il est constant que le prêteur qui commet une faute dans la délivrance des fonds se voit privé des effets de la possibilité de se prévaloir à l’égard de l’emprunteur des effets de l’annulation du contrat de prêt dès lors que cet acquéreur subit un préjudice.
Au cas particulier, le prêteur a versé les fonds le 8 juin 2017 sur production des documents suivants, signés par Mme [O] :
– une demande de financement/attestation de livraison, pré-remplie, en date du 30 mai 2017, mentionnant que la livraison ‘du bien à l’acheteur et/ou la réalisation de la prestation de services a été réalisée conformément au contrat de vente conclu par ce dernier.’ La rubrique ‘description du (des) bien(s) ou de la (des) prestation(s) de services’, précisant que le descriptif doit être suffisamment détaillé et doit correspondre à ce qui est indiqué dans le bon de commande ainsi que dans le contrat de crédit, est néanmoins restée vierge.
– un bon de fin de travaux aux termes duquel Mme [O] reconnaît avoir été installée ce jour, soit le 30 mai 2017, pour l’équipement ainsi désigné ’12 panneaux Air System + ballon eau chaude’, sans référence à l’onduleur, le kit GSE Intégration, le boîtier DC pourtant prévus au bon de commande.
– un appel de fonds signé le 30 mai 2017 aux termes duquel l’emprunteur demande au prêteur d’adresser le financement de 28’690 euros correspondant à ‘cette opération’ au vendeur, sans que soient renseignés le numéro de dossier ni celui du bon de commande.
Ces documents ne permettaient pas au prêteur de s’assurer que l’ensemble des prestations prévues au contrat de vente avaient été réalisées et notamment le raccordement au réseau ERDF alors même que le bon de commande stipulait que des démarches administratives étaient incluses dans le ‘Pack GSE 12″ vendu à Mme [O].
Il s’ensuit qu’en versant ainsi les fonds à la société venderesse sans s’assurer de l’exécution complète de la prestation qu’il finançait, le prêteur a commis une faute de nature à le priver de sa créance de restitution de ces fonds, si cette faute a été à l’origine d’un préjudice pour l’emprunteur.
A cet égard et au vu des développements précédents, il est établi que l’installation photovoltaïque dont dispose Mme [O] est illégale, en l’absence d’autorisation administrative pour les travaux afférents. En outre, cette dernière soutient sans être contredite par les sociétés appelantes que l’installation ne bénéficie d’aucun raccordement auprès de ERDF du fait de son caractère irrégulier au regard des règles d’urbanisme. La société venderesse et son liquidateur ne font d’ailleurs pas état du raccordement électrique de l’installation litigieuse, se bornant à soutenir que celle-ci peut fonctionner en autoconsommation. Or, la ‘convention d’autoconsommation sans injection’ qu’elles produisent aux débats, conclue entre Mme [O] appelée le Producteur et la société Enédis et datée du 17 mai 2017, porte le cachet de la société SVH Energie et non la signature de Mme [O] dont il n’est pas démontré que cette dernière ait donné mandat pour ce faire à la société appelante. Au surplus, ce document n’a pas de valeur contractuelle dès lors qu’il n’est pas signé par Enédis.
Du tout, il résulte que le prêteur a commis le 8 juin 2017 une faute dans le déblocage des fonds puisque c’est sans contrepartie utile pour Mme [O] que la somme de 28 690 euros a été versée à la société SVH Energie qui, placée en liquidation judiciaire, sera à l’évidence en difficulté pour assumer la charge des frais de démontage du matériel installé.
Dans ces circonstances, Mme [O] justifie d’un préjudice financier équivalent au capital emprunté, soit la somme de 28 690 euros, en lien de causalité avec la faute commise par la SA BNP Paribas Personal Finance.
Il convient en conséquence d’infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a condamné Mme [O] à restituer au prêteur le montant du capital emprunté et faisant droit à la demande de l’emprunteur, de débouter le prêteur de sa demande en restitution du capital prêté.
IV- Sur la demande subsidiaire formée par le prêteur à l’encontre de la société SVH Energie
Selon l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
La SA BNP Paribas Personal Finance sollicite la fixation au passif de la procédure collective de la société venderesse d’une somme indemnitaire équivalente à sa créance de restitution dont elle estime être privée du seul fait de la faute de cette dernière.
La cour constate que si le prêteur a fait montre d’un comportement fautif à l’égard de l’emprunteur, il n’en demeure pas moins que c’est la faute commise par la société venderesse qui est à l’origine de la résolution du contrat de crédit affecté, privant la banque du coût de ce crédit.
C’est dès lors à juste titre que la SA BNP Paribas Personal Finance sollicite l’inscription au passif de la liquidation judiciaire de la société fautive, d’une créance indemnitaire égale au montant des fonds prêtés dont elle se trouve privée, soit à hauteur de 28 690 euros.
V- Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement doit être infirmé en ce qu’il a condamné la société SVH Energie à payer, in solidum avec la SA BNP Paribas Personal Finance, les dépens et frais irrépétibles. S’agissant de créances nées antérieurement au jugement d’ouverture de la procédure collective, il convient de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SVH Energie les dépens de première instance ainsi que la somme de 1 500 euros allouée à juste titre par le premier juge à Mme [O] au titre de ses frais irrépétibles de première instance.
La SA BNP Paribas Personal Finance et la société SVH Energie, qui succombent en leurs prétentions, seront tenues in solidum aux dépens d’appel et il y a lieu de fixer au passif de la société appelante ces dépens qui ne relèvent pas du traitement préférentiel prévu par l’article L 622-17 du code de commerce.
La SA BNP Paribas Personal Finance sera condamnée à payer à Mme [O] une somme de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel. La demande formée de ce chef par la SA BNP Paribas Personal Finance à l’encontre de Mme [O] sera rejetée. En revanche, il y a lieu de faire droit à la demande de l’intimée dirigée contre la société venderesse, dans la limite d’un montant de 1 500 euros qui sera fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,
Dans les limites de sa saisine,
INFIRME le jugement du tribunal d’instance d’Angers du 25 septembre 2019 sauf en ses dispositions ayant condamné la SA BNP Paribas Personal Finance au paiement d’une somme de 1’500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,
Statuant à nouveau, sur les chefs infirmés et y ajoutant,
PRONONCE la résolution du contrat de vente conclu le 10 avril 2017 entre la SASU SVH Energie et Mme [U] [O],
PRONONCE la résolution du contrat de crédit accessoire consenti le 27 avril 2017 par la société Cétélem aux droits de laquelle vient la SA BNP Paribas Personal Finance à Mme [U] [O],
DIT que Mme [U] [O] devra tenir à la disposition du liquidateur judiciaire de la SASU SVH Energie l’intégralité des matériels installés durant un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, et que passé ce délai elle pourra procéder à leur démontage,
DEBOUTE la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande de restitution du capital de 28 690 euros formée à l’encontre de Mme [U] [O],
FIXE à la somme de 28 690 euros le montant de la créance de la SA BNP Paribas Personal Finance au passif de la liquidation judiciaire de la SASU SVH Energie,
DIT que la SASU SVH Energie doit être tenue in solidum avec la SA BNP Paribas Personal Finance aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’à l’indemnité allouée au titre des frais irrépétibles de première instance,
FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SASU SVH Energie la créance de Mme [U] [O] à la somme de 1 500 euros, allouée en première instance, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SASU SVH Energie les dépens de première instance et d’appel,
CONDAMNE la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à Mme [U] [O] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SASU SVH Energie la créance de la SA BNP Paribas Personal Finance à la somme de 1 500 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel,
DEBOUTE la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande formée à l’encontre de Mme [U] [O], sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la SA BNP Paribas Personal Finance aux dépens d’appel.
LA GREFFIERE P/LA PRESIDENTE EMPECHEE
C. LEVEUF I. GANDAIS