Signature électronique : 23 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 23/00701

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Signature électronique : 23 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 23/00701
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Rétention Administrative

CHAMBRE 1-11 RA

ORDONNANCE

DU 23 MAI 2023

N° 2023/701

Rôle N° RG 23/00701 – N° Portalis DBVB-V-B7H-BLKAK

Copie conforme

délivrée le 23 Mai 2023 par courriel à :

-l’avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Signature,

le greffier

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 21 Mai 2023 à 10h40.

APPELANT

Monsieur [W] [F] en réalité [A] [P]

né le 06 Janvier 2004 à [Localité 2]

de nationalité Algérienne

comparant en personne, assisté de Me LAURENS Maëva, avocat au barreau d’Aix en Provence, avocat choisi substituée par Me FLORES Laëtitia, avocat au barreau d’Aix en Provence et de M. [U] [O] (Interprète en langue arabe) en vertu d’un pouvoir général inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

INTIME

Monsieur le préfet des BOUCHES DU RHÔNE

représenté par Monsieur [X] [S]

MINISTÈRE PUBLIC :

Avisé et non représenté

DÉBATS

L’affaire a été débattue en audience publique le 23 mai 2023 devant Madame Laurence DEPARIS, Conseillère à la cour d’appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Madame Elodie BAYLE, Greffière,

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 23 Mai 2023 à 16h25,

Signée par Madame Laurence DEPARIS, Conseillère et Madame Elodie BAYLE, Greffière,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;

Vu l’arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris par le préfet de LA HAUTE GARONNE le 06 juin 2022 et notifié le même jour à 17h45 ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 21 mars 2023 par le préfet des BOUCHES DU RHONE notifiée le même jour à 17h25 ;

Vu l’ordonnance du 21 Mai 2023 rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE décidant le maintien de Monsieur [W] [F] en réalité [A] [P] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;

Vu l’appel interjeté le 22 mai 2023 par Monsieur [W] [F] en réalité [A] [P] ;

Monsieur [W] [F] en réalité [A] [P] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare : ‘j’ai dit à Forum que je voulais faire une demande il y a deux jours, je ne l’ai pas encore faite, je suis fatigué du centre, j’accepte tout y compris d’aller signer, je veux bien ramener tous les documents dont j’ai besoin, je demande pardon si j’ai fait des erreurs’.

Son avocat a été régulièrement entendu ; il conclut à l’irrégularité de la signature électronique figurant sur la requête en prolongation de la mesure, à l’absence de conditions pour ordonner une troisième prolongation, à l’insuffisance de diligences de l’administration et à la violation de ses droits fondamentaux. Le procédé électronique est présumé valable jusqu’à preuve du contraire. La fiabilité ne peut être présumée. Il n’aurait pas pu prendre le vol à 8h30. Le défaut de la mesure d’éloignement n’est pas du fait de l’étranger. Sur les diligences, sa prolongation expire le 4 juin, les diligences sont insuffisantes. Sur la consultation Eurodac, aucune procédure de reprise en charge n’a été diligentée, seule l’Algérie a été consultée. Il y a violation des droits fondamentaux de l’étranger, les Pays bas sont plus respectueux que l’Algérie.

Le représentant de la préfecture sollicite confirmation de la décision frappée d’appel. La signature électronique est régulière. Il a fait obstruction à l’exécution de la mesure d’éloignement, le pv est établi à 8 heures à l’aéroport et non au centre de rétention, c’est le deuxième refus d’embarquer, un départ est prévu le 31 mai sur un vol dédié et le 6 juin sur un vol commercial. Pour Eurodac, il s’agit de la troisième prolongation, cela a été purgé avant, je ne sais pas plus précisément. S’il avait fait une demande, on aurait demandé une réadmission.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l’appel contre l’ordonnance du juge des libertés et de la détention n’est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d’irrégularité.

Sur le moyen tiré de l’irrégularité de la signature électronique portée sur la requête en prolongation de la mesure de rétention

Aux termes de l’article R 743-2 du CESEDA, à peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention

En l’espèce, la requête en prolongation de la mesure de rétention en date du 19 mai 2023 porte la mention suivante ‘ [I] [L] 1064822, signature numérique de [I] [L] 1064822 Date : 2023.05.19 16:09:16 +02’00”. Elle comporte ainsi l’identité du signataire et son numéro d’habilitation ; il en résulte que la fiabilité du procédé de signature électronique est présumée.

Sur les conditions de la troisième prolongation de la mesure et l’insuffisance des diligences de l’administration et la violation des droits de l’étranger

Aux termes de l’article L 742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;

2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :

a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 9° de l’article L. 611-3 ou du 5° de l’article L. 631-3 ;

b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge des libertés et de la détention ait statué. Le juge statue par ordonnance dans les conditions prévues au présent article. S’il ordonne la prolongation de la rétention, la prolongation court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours. Si l’une des circonstances mentionnées à la première phrase du présent alinéa survient au cours d’une période de prolongation ordonnée en application du présent alinéa, le juge peut être à nouveau saisi dans les mêmes conditions. Toutefois, la rétention ne peut être prolongée plus de deux fois en application du présent alinéa et sa durée maximale ne peut excéder quatre-vingt-dix jours ou, par dérogation, deux cent-dix jours dans le cas prévu au quatrième alinéa.

Il ressort de ce texte que la troisième prolongation de rétention doit rester exceptionnelle et impose plus que la simple exigence de réalisation de diligences par la préfecture en vue de l’identification ou de la mise à exécution de la mesure d’éloignement.

La directive européenne n°2008-115/CE dite directive ‘retour’ dispose en son article 15§1 que toute rétention est aussi brève que possible et n’est maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. La rétention doit reposer sur des circonstances de fait qui la rendent nécessaire et proportionnée ( CJUE 5 juin 2014 M. [H], C-146/14).

Aux termes de l’article L741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration doit exercer toute diligence à cet effet.

Si ce texte impose en effet au préfet d’effectuer sans désemparer les démarches nécessaires à l’exécution, dans les meilleurs délais, de la décision d’éloignement, l’appréciation des diligences qu’il a effectuées doit être faite in concreto en tenant compte des circonstances propres à chaque cas.

S’il est constant qu’il n’appartient pas au juge judiciaire de se prononcer sur la légalité de la décision fixant le pays de retour, il lui incombe d’apprécier les diligences mises en oeuvre pour reconduire l’intéressé dans son pays ou tout autre pays.

En l’espèce, il ressort de la procédure que la préfecture a interrogé par courrier en date du 21 mars 2023, adressé par e-mail en date du 22 mars 2023, le consulat d’ALGÉRIE aux fins d’identification de M. [F] et de délivrance d’un laissez passer, M. [F] ayant été précédemment identifié via Interpol en février 2023. Par e-mail en date du 11 avril 2023, l’administration a, à nouveau, sollicité le consulat algérien aux fins de délivrance d’un laissez-passer pour un vol vers Alger prévu le 6 mai 2023. Un laissez-passer consulaire valable jusqu’au 20 mai 2023 a été délivré. M. [F] a refusé d’embarquer le 6 mai 2023 en refusant de sortir de sa cellule.

Par procès-verbal en date du 18 mai 2023 à 8h, il a été constaté à 8h10 le refus d’embarquer de M. [F] refusant de sortir de sa cellule en indiquant ne pas être prêt pour partir maintenant. Ce procès-verbal a été établi à l’aéroport de [Localité 1] et non au centre de rétention et ne permet en aucun cas de présager que, quelle que soit son intention, M. [F] n’aurait pu embarquer à bord de ce vol. Ainsi, son obstruction justifie la demande en troisième prolongation de la mesure.

Une nouvelle demande de routing a été formée le 19 mai 2023.

Il résulte enfin de la procédure que la consultation du fichier EURODAC a permis de révéler que M. [F] avait été identifié comme connu du fichier EURODAC et que ses empreintes digitales avaient été saisies le 3 février 2023 par les PAYS BAS et le 2 mars 2023 par la SUISSE. A l’audience du 21 avril 2023 devant la présente cour et en présence du représentant du préfet, M. [F] a indiqué par ailleurs avoir formé une demande d’asile en SUISSE.

Il résulte de la procédure qu’aucune suite n’a été donnée à ce document. L’administration n’est pas en mesure d’apporter un élément nouveau ou un élément de réponse quant à cette difficulté qui pose question quant au respect des règlements UE du parlement européen et du conseil n° 603/2013 et 604/2014 et des droits de M. [F] qui, par ailleurs, n’est plus en mesure de contester valablement la mesure d’éloignement et le choix du pays d’éloignement devant la juridiction administrative.

Au vu de ces éléments, en l’absence d’éléments apportés par l’administration pourtant demanderesse à la prolongation de la mesure, il convient de constater que, même si des diligences utiles ont été accomplies pour éloigner M. [F] vers son pays d’origine, il n’est pas attesté du respect de ses droits par rapport aux règlements sus-visés.

Dans ces conditions, il convient de mettre fin à la mesure de rétention.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Infirmons l’ordonnance du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 21 Mai 2023.

Disons n’y avoir lieu à prolongation de la mesure de rétention et mettons fin à la mesure de rétention de Monsieur [W] [F] en réalité [A] [P].

Les parties sont avisées qu’elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d’Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier, Le président,

 


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