Signature électronique : 19 octobre 2023 Cour d’appel de Chambéry RG n° 22/00447

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Signature électronique : 19 octobre 2023 Cour d’appel de Chambéry RG n° 22/00447
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COUR D’APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 19 Octobre 2023

N° RG 22/00447 – N° Portalis DBVY-V-B7G-G57S

Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection de BONNEVILLE en date du 02 Mars 2022, RG 21/01215

Appelante

S.A. CIC LYONNAISE de BANQUE dont le siège social est sis[Adresse 4]e – [Localité 2] – prise en la personne de son représentant légal

Représentée par la SELARL SERRATRICE/BOGGIO, avocat au barreau de BONNEVILLE

Intimé

M. [R] [H] [I]

né le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 5] (INDE), dont la dernière adresse connue est[Adresse 3]z – [Localité 6]

sans avocat constitué

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue le 27 juin 2023 avec l’assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,

Et lors du délibéré, par :

– Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

– Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,

– Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

-=-=-=-=-=-=-=-=-=-

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon convention signée électroniquement le 7 août 2020, M. [R] [H] [I] a ouvert un compte courant dans les livres de la société CIC Lyonnaise de banque (le CIC), agence de [Localité 6].

Selon offre préalable acceptée par signature électronique le 08 décembre 2020, le CIC a consenti à M. [I] un crédit renouvelable d’un montant de 9 000 euros d’une durée d’un an renouvelable. A la demande de l’emprunteur, la somme de 9 000 euros a été débloquée le 17 décembre 2020 et devait faire l’objet d’un remboursement en 60 mensualités.

A compter du mois de février 2021 M. [I] a cessé de rembourser ce crédit, et le compte courant présentait un solde débiteur de 12 691,90 euros le 6 mai 2021.

Aucune régularisation n’étant intervenue, et après mise en demeure restée infructueuse du 27 juillet 2021 (signifiée le 02 août 2021 selon procès-verbal de recherches infructueuses), par courrier du 07 septembre 2021, signifié par acte transformé en procès-verbal de recherches infructueuses du 09 septembre 2021, le CIC a prononcé la déchéance du terme du crédit renouvelable et a dénoncé la convention de compte courant avec un délai de préavis de 60 jours.

C’est dans ces conditions que, par acte délivré le 15 novembre 2021, le CIC a fait assigner M. [I] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville pour obtenir sa condamnation au paiement :

– de la somme de 13 828,78 euros outre intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2021 au titre du compte courant,

– 9 880,38 euros outre intérêts au taux de 2,95 % l’an et 0,50 % d’assurance à compter du 3 novembre 2021, au titre du solde du crédit,

– une indemnité de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le juge des contentieux de la protection a soulevé d’office divers moyens tirés de :

– la forclusion,

– la nullité du contrat en raison du déblocage prématuré des fonds,

– la déchéance du droit aux intérêts en raison de l’absence de lisibilité de l’offre, de l’absence de consultation du FICP, de l’absence de fiche pré-contractuelle, de l’absence de vérification de la solvabilité,

– l’absence de déchéance du terme régulière faute de mise en demeure préalable.

M. [I], assigné selon les modalités prévues à l’article 659 du code de procédure civile, n’a pas comparu devant le tribunal.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 02 mars 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville a :

débouté la société CIC Lyonnaise de banque de l’ensemble de ses demandes,

condamné la société CIC Lyonnaise de banque aux dépens.

Par déclaration du 15 mars 2022, le CIC a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées le 04 avril 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, la société CIC Lyonnaise de banque demande en dernier lieu à la cour de :

réformer le jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée,

statuant à nouveau, condamner M. [I] au paiement des sommes :

– au titre du solde débiteur du compte courant, la somme de 13 828,78 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2021, date d’établissement du dernier décompte, et jusqu’à parfait paiement,

– la somme de 9 880,38 euros outre intérêts au taux de 2,95 % l’an et 0,50 % d’assurance à compter du 3 novembre 2021, et jusqu’à parfait paiement,

condamner M. [I] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

La déclaration d’appel et les conclusions de l’appelante ont été signifiées à M. [I] par acte transformé en procès-verbal de recherches infructueuses le 06 avril 2022. M. [I] n’a pas constitué avocat devant la cour.

L’affaire a été clôturée à la date du 26 mai 2023 et renvoyée à l’audience du 27 juin 2023, à laquelle elle a été retenue et mise en délibéré à la date du 19 octobre 2023.

MOTIFS ET DÉCISION

Sur la validité de la signature électronique des contrats

Pour rejeter les demandes du CIC, le tribunal a jugé que l’existence même du contrat de prêt n’est pas établie, faute pour la demanderesse de rapporter la preuve de la fiabilité de la signature électronique de la convention d’ouverture de compte et du contrat de crédit litigieux dans les conditions fixées par le décret du 28 septembre 2017, renvoyant aux articles 26, 28 et 29 du règlement UE n° 910/2014 du 23 juillet 2014.

Le CIC indique que le fichier de preuve des signatures électroniques est désormais produit à hauteur d’appel, de sorte que la preuve est bien rapportée.

En application de l’article 1366 du code civil, l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité.

L’article 1367 du même code dispose que la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l’authenticité à l’acte.

Lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat.

L’article 1er du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 prévoit ainsi que, la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en oeuvre une signature électronique qualifiée.

Est une signature électronique qualifiée une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement UE n° 910/2014 du 23 juillet 2014 et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l’article 29 dudit règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement.

L’article 26 du règlement UE n° 910/2014 du 23 juillet 2014 énonce les exigences relatives à une signature électronique avancée. Les articles 28 et 29 du règlement renvoient à des annexes fixant les exigences que doivent respecter les certificats qualifiés de signature électronique et les dispositifs de création de signature électronique qualifiés.

En l’espèce, le CIC produit aux débats :

– la convention de compte courant signée électroniquement par M. [I] le 7 août 2020 à 14:25:17 UTC+02:00 (pièce n° 1-c) et le fichier de preuve Protect&Sign associé (pièce n° 7) qui relate précisément le processus de signature électronique, certifiant la fiabilité du procédé,

– le contrat de crédit en réserve, signé électroniquement par M. [I] le 8 décembre 2020 à 19:28:31 UTC+01:00 (pièce n° 2b), et le fichier de preuve Protect&Sign associé (pièce n° 8) qui relate précisément le processus de signature électronique, certifiant la fiabilité du procédé.

L’examen de ces pièces permet d’identifier le signataire comme étant M. [I], dont l’identité et les coordonnées résultent des renseignements fournis par l’emprunteur lui-même à la banque.

La fiabilité de la signature électronique est donc établie, et les contrats sont présumés valables, en l’absence de preuve contraire.

Par ailleurs, il convient de souligner que le compte courant a fonctionné normalement pendant de nombreux mois (pièce n° 1.i), et que la réalité du contrat de crédit résulte en outre de son commencement d’exécution puisque les fonds ont été débloqués le 17 décembre 2020, puis utilisés par M. [I], et la première échéance a été honorée. Ainsi le crédit a été mis à disposition de l’emprunteur qui l’a utilisé. Le contrat a donc été exécuté de part et d’autre et son existence n’est pas contestable.

Le jugement déféré ne peut qu’être infirmé en toutes ses dispositions.

Sur le montant de la créance

A l’appui de sa demande en paiement, le CIC produit notamment :

– la convention de compte courant du 7 août 2020,

– les courriers adressés à M. [I] de mise en demeure de régulariser le solde dû, ainsi que les courriers l’avisant de son inscription au FICP (pièces n° 1.d à 1.g),

– le relevé du compte courant révélant un fonctionnement débiteur à compter du mois de février 2021 (pièce 1.i),

– le décompte de la créance arrêté au 2 novembre 2021 pour 13 828,78 euros (pièce 1.a),

– l’offre de contrat de crédit renouvelable, dit «en réserve», acceptée par M. [I] le 8 décembre 2020 par signature électronique, d’un montant maximum de 9 000 euros, au taux d’intérêt nominal initial de 2,95 % (TAEG 2,99 %), révisable, le montant des mensualités étant déterminé en fonction du montant utilisé (tableau d’amortissement pièce 3.d), et l’adhésion à l’assurance décès, PTIA, ITT et invalidité permanente en date du même jour, avec la notice d’information correspondante (pièce 2.b),

– la fiche de renseignements remplie par l’emprunteur, contenant ses revenus et charges, accompagnée des justificatifs d’identité et de revenus, et de l’information précontractuelle normalisée remise à l’emprunteur (pièce 2.a),

– le fichier de preuve du service Protect&Sign, qui établit que l’ensemble de ces documents ont été remis électroniquement à M. [I] qui les a signés le 8 décembre 2020 (pièce 8),

– le justificatif de la consultation du FICP faite le 26 novembre 2020,

– l’historique du compte faisant apparaître que la première échéance impayée non régularisée est en date du 5 février 2021 (pièces 3.b et 3.h),

– la mise en demeure préalable à la déchéance du terme, adressée au débiteur par acte d’huissier délivré le 2 août 2021, et la lettre de déchéance du terme, adressée par au débiteur par acte d’huissier du 9 septembre 2021, ces actes ayant été transformés en procès-verbaux de recherches infructueuses (pièces 4.b et 4.c),

– le décompte de la créance arrêté au 02 novembre 2021 (pièce 3.a) mentionnant un taux d’intérêt de 2,949 %.

L’examen de ces pièces permet ainsi de retenir que les contrats souscrits par l’emprunteur sont réguliers, que l’établissement de crédit n’encourt aucune des sanctions prévues par le code de la consommation, et que la résiliation du contrat a été valablement prononcée par le CIC. La créance est donc fondée dans son principe.

Compte tenu des justificatifs produits, cette créance s’établit comme suit :

Compte courant n° 10096 18033 00073024001 :

– solde débiteur au 02/11/2021 12 706,90 euros

– intérêts courus au 02/11/2021 1 121,88 euros

– total 13 828,78 euros

Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 03 novembre 2021 sur la somme de 12 706,90 euros.

Crédit en réserve n° 10096 18033 000730240 03 :

– échéances impayées au 07/09/2021

(dont 1 094,20 euros en capital) 1 339,24 euros

– intérêts de retard sur impayés 12,96 euros

– assurance courue jusqu’au 07/09/2021 0,59 euros

– capital restant dû au 07/09/2021 7 771,24 euros

– indemnité de 8 % sur le capital dû 709,24 euros

– total dû à la déchéance du terme 9 833,27 euros

– intérêts de retard du 08/09/2021 au 02/11/2021 40,11 euros

– TOTAL dû 9 873,38 euros

Le contrat de prêt étant résilié, l’assurance l’est également, de sorte que les cotisations cessent d’être dues à la déchéance du terme. Ainsi, M. [I] sera condamné à payer au CIC la somme de 9 873,38 euros, outre intérêts au taux contractuel de 2,949 % sur la somme de 8 865,44 euros (1 094,20 + 7 771,24), à compter du 03 novembre 2021, les intérêts n’étant pas capitalisés et l’indemnité de 8 % n’étant pas soumise aux intérêts contractuels.

Sur les demandes accessoires

Il serait inéquitable de laisser à la charge du CIC la totalité des frais exposés, et non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de lui allouer la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [I] supportera les entiers dépens, de première instance et d’appel,

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt de défaut,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville le 15 mars 2022,

Statuant à nouveau,

Condamne M. [R] [H] [I] à payer à la société CIC Lyonnaise de Banque :

– la somme de 13 828,78 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 03 novembre 2021 sur la somme de 12 706,90 euros, au titre du solde débiteur du compte courant n° 10096 18033 00073024001,

– la somme de 9 873,38 euros outre intérêts au taux contractuel de 2,949 % sur la somme de 8 865,44 euros, à compter du 03 novembre 2021, au titre du crédit renouvelable n° 10096 18033 000730240 03,

Condamne M. [R] [H] [I] à payer à la société CIC Lyonnaise de Banque la somme de 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [R] [H] [I] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Ainsi prononcé publiquement le 19 octobre 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La Greffière La Présidente

 


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