Your cart is currently empty!
13 septembre 2023
Cour d’appel de Montpellier
RG n°
21/00808
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre sociale
ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2023
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 21/00808 – N° Portalis DBVK-V-B7F-O3S2
ARRÊT n°
Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 FEVRIER 2021
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE SETE – N° RG F 18/00052
APPELANT :
Monsieur [K] [G]
né le 01 Août 1964 à [Localité 5] (59)
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Ratiba OGBI, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
S.A.R.L. LM TELECOM
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Frédéric RICHERT de la SELARL RICHERT FREDERIC, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 24 Janvier 2023
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 MAI 2023,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique DUCHARNE, Conseiller, faisant fonction de président
Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller
Madame Magali VENET, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER
ARRET :
– arrêt contradictoire ;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Madame Véronique DUCHARNE, Conseillère, en remplacement du président empêché, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.
*
* *
FAITS ET PROCÉDURE
Par contrat de travail à durée indéterminée du 4 août 2015, M. [K] [G], travailleur handicapé, a été engagé à temps complet par la SARL LM Telecom en qualité de ‘technicien télécom’ moyennant une rémunération mensuelle brut de
1 526,67 €.
Par lettre du 20 janvier 2017, l’employeur a notifié au salarié un avertissement, lequel l’a contesté en vain par lettre du 24 janvier 2017.
Le 4 mai 2018, l’employeur lui a notifié oralement sa mise à pied à titre conservatoire et par lettre du 7 mai 2018, l’a convoqué à un entretien préalable, fixé le 22 mai 2018, tout en confirmant la mise à pied à titre conservatoire.
Par lettre du 25 mai 2018, il lui a notifié son licenciement pour faute grave.
Par requête enregistrée le 18 juillet 2018, estimant que l’avertissement était injustifié, qu’il avait été victime de discrimination, que l’employeur avait manqué à son obligation de sécurité et que son licenciement était abusif, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Sète.
Par jugement du 1er février 2021, le conseil de prud’hommes a :
– débouté M. [K] [G] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
– débouté la SARL LM Telecom de sa demande de condamner M. [G] au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– condamné M. [K] [G] aux entiers dépens de l’instance.
Par déclaration enregistrée au RPVA le 9 février 2021, le salarié a régulièrement interjeté appel de ce jugement.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 8 avril 2021, M. [K] [G] demande à la Cour, au visa des articles L.1331-1, L.1132-1, L.1152-1, L.4131-1, L.4121-1, L.1132-1, L.4121-1 du code du travail :
– d’infirmer le jugement n’ayant donné aucune motivation à sa décision ;
– d’annuler l’avertissement du 20 janvier 2017 et de condamner la SARL LM Telecom au paiement de la somme de 1 500 € net de CSG et de CRDS à titre de dommages intérêts en raison de cette annulation et réparant le préjudice ;
A titre principal, de juger son licenciement nul et de nul effet ;
A titre subsidiaire, de juger le licenciement abusif et dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
En tout état de cause, de
– prendre acte du refus de l’employeur de produire :
* la fiche restitution du véhicule Renault le 04 mai 2018 conduit par le salarié,
* la géolocalisation de M. [G] et de M. [LZ] avec lequel il travaillait en binôme ainsi que celle de M. [U] travaillant sur le même chantier situé à [Localité 4] ce 03 mai 2018,
* la lettre de démission de M. [H],
* l’attestation Pôle Emploi et le dernier bulletin de paie de juin 2018 délivrés à M. [H] ;
– tirer toutes les conséquences de droit qui s’impose de ces refus manifestes de communication sur la validité de son licenciement ;
En tout état de cause, de
– condamner la SARL LM Telecom au paiement des sommes de :
* 21 972 € net de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts venant réparer la perte injustifiée de l’emploi,
* 1 217,38 € outre les congés payés y afférents de 121,73 € avec intérêts de droit depuis le 30 mai 2018 au titre des salaires de la mise à pied conservatoire du 4 au 25 mai 2018,
* 5 460 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis (salarié ayant la qualité de travailleur handicapé bénéficie d’un mois de salaire supplémentaire) ,
* 546 € au titre des congés payés y afférents,
* 1 850 € au titre de l’indemnité légale de licenciement,
* 5 000 € net de CSG ET CRDS à titre de dommages et intérêts pour discrimination raciale ayant engendrée un préjudice moral,
* 10 000 € net de CSG et de CRDS à titre de dommages intérêts au titre de la violation de l’obligation de sécurité de résultat tenant les agissements répétés de l’employeur et ayant l’exposé le salarié à un danger grave et imminent ;
– ordonner la remise des bulletins de paie pour mai 2018, pour le préavis ;
– condamner LM Telecom au remboursement des frais de signification de la déclaration d’appel, laquelle a refusé sciemment pour contraindre son ex salarié à procéder à une signification par huissier ayant entrainé le règlement de la somme de 144,56 € en sus des dépens habituels ;
– condamner la SARL LM Telecom au paiement de la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 11 juin 2021, la SARL LM Telecom demande à la Cour de :
– confirmer le jugement ;
– dire et juger à titre principal que le licenciement du 25 mai 2018 repose sur une faute grave et est parfaitement justifié ;
– débouter M. [G] de l’intégralité de ses demandes ;
– le condamner à la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Pour l’exposé des prétentions des parties et leurs moyens, il est renvoyé, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 24 janvier 2023.
L’affaire, fixée à l’audience du 14 février 2023, a fait l’objet d’un renvoi contradictoire à l’audience du 13 septembre 2023 à la demande de Maître Ogbi.
MOTIFS
Sur l’annulation de l’avertissement notifié le 20 janvier 2017 :
L’article L 1331-1 du Code du travail dispose que constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.
L’article L 1333-1 du même Code prévoit qu’en cas de litige, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction.
L’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction.
Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, le conseil de prud’hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
L’avertissement est rédigé dans les termes suivants :
«Monsieur,
Nous avons eu à regretter des manquements de votre part.
En effet, vendredi 20 janvier 2017 au matin, Mr [X] [A] vous avait préparé le matériel suivant pour réaliser le dossier [Z] 603449 qui nous a confié par notre client Orange :
– Fibre 1016 [XR]
– Pinces [Y]
Ce matériel était nécessaire à la réalisation de ce chantier suite au cahier des charges imposés par notre client, vous avez refusé de charger le matériel nécessaire à la réalisation de ce chantier, vous avez rétorqué :
« On ne prend pas le matériel car on fera pas ce travail aujourd’hui ».
Vous avez ignoré l’ordre de travail ordonné par Mr [A] responsable de chantier au sein de l’entreprise LM Telecom, vous avez fait preuve d’insubordination en refusant d’effectuer les travaux demandés.
De ce fait, vous êtes partis sans charger le matériel et vous êtes revenu à 13h30 au dépôt en demandant ce qu’il y avait comme travail à faire, la question ne ses poserait pas si vous aviez respecté l’ordre de travail donné ce matin par Mr [X] [A], en effet, vos horaires de travail sont :
-8h-12h et 13h-16h, or aujourd’hui en ignorant délibérément les consignes de travail, vous n’avez pas fini ce chantier ce jour comme cétait convenu et nous sommes obligés d’y retourner, cette insubordination va engendrer des frais supplémentaires.
Ces faits constituent une faute contractuelle au contrat de travail, ce qui nous conduit à vous notifier par la présente un avertissement qui sera versé à votre dossier personnel.
Si de tels incidents se renouvelaient nous pourrions être amenés à prendre des sanctions plus sévères.
(…) ».
L’employeur reproche au salarié et à son binôme M. [JA] [LZ], qui le contestent, de ne pas avoir respecté un ordre de travail donné le 20 janvier 2017 par leur supérieur hiérarchique, M. [X] [A].
Pour établir cette insubordination, l’employeur produit aux débats :
– un document qui se présente comme un courriel adressé le mercredi 25 janvier 2017 par [X] [A] aux dirigeants, portant en objet le titre « [N] » et rédigé comme suit :
« Bonjour,
Suite à notre entrevu de ce matin conernan le mail reçu, je vous confirme que je maintien ma version des faits, ils ont refusé d’aller chercher la commande comme je leur avait demander.
C’est pourquoi ils se sont retrouvé au dépourvu, ils m’ont dit non on y va pas, devant vous il a une version, avec moi une autre, il faut arrêter de raconter des betise, il faut qu’il assume.
Et lui demander d’arrêter de me demander de vous dire que c’est pas lui, ils étaient 3 et les 3 ont dit non.
Cordialement,
[X] [A] »,
– un courriel du 31 janvier 2017 adressé par la direction au salarié en réponse à la lettre de contestation des faits envoyée par ce dernier, aux termes duquel la direction affirme que M. [A] maintient sa version des faits et que son insubordination est caractérisée.
Ces seuls documents ne suffisent pas à établir les faits reprochés : outre que le courriel signé « [X] [A] » ne mentionne pas la date des faits reprochés, il ressort de l’attestation produite par le salarié, signée de M. [X] [A], que celui-ci conteste être l’auteur du courriel et affirme que sa boite de messagerie électronique était accessible aux membres de la direction.
Le moyen tiré de ce que M. [A] travaillerait au sein d’une société concurrente employant également le salarié ne suffit pas à contredire le contenu de l’attestation produite par le salarié.
Dès lors, l’avertissement doit être annulé.
Il y a lieu de condamner l’employeur à payer au salarié la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la notification d’un avertissement non fondé.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté le salarié de ses demandes à ce titre.
Sur le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité :
L’article L 4121-1 du Code du travail dispose que l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
En l’espèce, le salarié fait valoir que l’employeur n’a pas assuré sa sécurité sur le chantier dangereux le 3 mai 2018, qu’aucun arrêté de circulation n’avait été pris et qu’il a dû exercé son droit de retrait, tandis que l’employeur conteste l’existence même de l’exercice du droit de retrait par le salarié, précisant d’une part, qu’aucune situation de danger n’existait et d’autre part, que le salarié n’a jamais évoqué l’exercice de son droit de retrait avant son licenciement.
L’article L 4131-1 du Code du travail dispose que « le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection.
Il peut se retirer d’une telle situation.
L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection ».
Il résulte de ces dispositions légales d’une part, que si le motif lié à l’exercice du droit de retrait par le salarié est légitime, le licenciement peut être annulé et d’autre part, que si la situation alléguée ne diffère pas des risques habituels du poste de travail, les conditions de l’exercice du droit au retrait ne sont pas réunies.
En l’espèce, contrairement à ce que soutient le salarié, la lettre de licenciement ne fait pas grief au salarié d’avoir exercé son droit de retrait mais lui reproche d’avoir quitté le chantier sans autorisation préalable de son supérieur hiérarchique.
Surtout, d’une part, il ne résulte d’aucune pièce du dossier que le salarié aurait averti oralement ou par écrit son supérieur hiérarchique ou la direction de l’entreprise le 3 mai 2018 de l’existence d’un danger justifiant qu’il quitte le chantier immédiatement sans autorisation préalable.
D’autre part, le salarié verse aux débats des photographies qu’il dit avoir prises le jour de l’intervention sur le chantier qui montrent que des balises avaient été positionnées sur la portion de route sur laquelle l’intervention se déroulait ; ce qui contredit ses propres affirmations.
Enfin, les attestations de MM. [X] et [J] [A] ne sont pas probantes en ce que ces salariés n’ont pas été témoins des faits.
L’employeur verse aux débats des pièces permettant d’établir que le salarié ne pouvait pas raisonnablement penser que la situation présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.
Ainsi :
– M. [B] [H], alors conducteur de travaux, indique par courriel avoir contrôlé le chantier le matin même, avoir constaté qu’il ne présentait aucun danger, que les panneaux de signalement et les balises de sécurité étaient en place et que les quatre salariés étaient en poste ; que le binôme [LZ]-[G] devait assurer la circulation tandis que MM. [O] [BN] et [L] [U] devaient assurer le tirage de la fibre,
– M. [L] [U] précise, dans son attestation régulière, avoir en compagnie de « [O] » balisé le chantier avec les panneaux et les cônes, avoir été contrôlés par « le conducteur [B] » qui leur avait dit que « c’était bon », avoir avec son collègue tiré la fibre tandis que le binôme [LZ]-[G] qui devait assurer la circulation était resté dans le camion ; que « [O] » avait dû aller porter plainte à 12h00 du fait d’un vol, que le binôme [LZ]-[G] avait quitté le chantier après la pause déjeuner, qu’il s’était retrouvé seul et avait alors appelé son supérieur lequel lui avait demandé de quitter les lieux,
– le procès-verbal de dépôt de plainte contre X… de M. [O] [BN] établi par le commissariat de police de [Localité 6] le 3 mai 2018 à 13h46 du chef de vol dans le fourgon appartenant à la société LM Telecom entre le 1er et le 2 mai 2018, corroborant les indications de M. [U].
Le moyen tiré du fait que le chantier devait être sécurisé, ce qui démontrerait que la situation présentait un danger imminent pour le salarié, n’est pas sérieux dans la mesure où il n’est pas démontré que l’intervention différait des risques habituels de son poste de travail.
Le moyen tiré du fait que M. [H] aurait menti sur le fait qu’il avait démissionné de son poste est tout aussi inopérant d’autant que M. [U] présent sur les lieux explique clairement le déroulement des faits.
De même, le fait que le quatrième salarié ait dû s’absenter pour déposer plainte ne suffisait pas à caractériser une situation de danger imminent puisque le binôme [LZ]-[G] auraient dû réguler la circulation pendant que M. [U] aurait achevé sa mission.
Enfin, c’est en s’abstenant d’assurer la régulation de la circulation et en décidant de quitter le chantier prématurément sans autorisation que le binôme a créé une situation de danger pour l’autre salarié qui s’est retrouvé seul et a dû interrompre le chantier.
Il s’ensuit qu’aucun manquement de l’employeur à son obligation de sécurité n’est démontré.
La demande présentée à ce titre sera rejetée.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de cette demande.
Sur le licenciement pour faute grave et la discrimination :
La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. La charge de la preuve de la gravité de la faute privative des indemnités de préavis et de licenciement incombe à l’employeur débiteur qui prétend en être libéré.
La lettre de licenciement fixe les limites du litige et c’est au regard des motifs qui y sont énoncés que s’apprécie le bien-fondé du licenciement, étant précisé que, depuis le 1er janvier 2018, les motifs énoncés peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié.
En l’espèce, la lettre de licenciement est rédigée comme suit :
« Objet : notification de licenciement pour faute grave
Monsieur,
Nous sommes contraints de vous licencier pour faute grave pour les motifs suivants :
– Vous dénigrez l’entreprise et en particulier M. [M] en affirmant qu’il serait raciste, ce qui est totalement faux. Nous avons appris début mai que lors d’une réunion de travail du 9 février 2018, vous aviez dit à propos de M. [M] devant des collègues et notamment M. [R] et Mme [TB] que « de toutes façons il faut l’envoyer au pénal il est raciste », que vous aviez déjà des attestations de salariés ayant quitté l’entreprise et qu’il vous en fallait d’autres. Courant mars et avril, vous avez continué à solliciter vos collègues pour avoir des attestations en ce sens. Ces accusations infondées sont très préjudiciables à la société et aux équipes et nous ne pouvons tolérer ce dénigrement.
– Vous persistez, malgré plusieurs rappels (par mails, SMS, af’chage), à ne pas
respecter vos horaires de travail à savoir : arrivée à 8 H sur le chantier ; départ à 16 H du chantier, avec une pause obligatoire dune heure entre 12 H et 13 H.
> Le 21 mars 2018, vous avez quitté le chantier à 15 H 43
> Le 26 mars 2018, vous avez quitté le chantier à 15 H 11
> Le 23 avril 2018, vous avez quitté le chantier à 15H53
> Le 24 avril 2018, vous avez quitté le chantier à 14H55
>Le 3 mai 2018, vous avez quitté le chantier à 13H50.
Vous ne pouvez ignorer que l’insubordination dont vous faites preuve sur le respect de vos horaires perturbe gravement l’entreprise. ll n’est pas acceptable que vous décidiez de votre propre chef de rentrer à votre domicile plus tôt ou de vaquer à vos occupations personnelles. Non seulement par rapport au respect des horaires pour lesquels vous êtes rémunéré, mais également par rapport à vos collègues et à la perte de facturation pour l’entreprise.
-Pire encore, le 3 mai, vous n`avez pas travaillé du tout puisque vous êtes resté dans le camion avec M. [LZ] à consulter votre téléphone portable, avant de quitter le chantier à 13 H 50. ll a fallu que nous renvoyions une équipe le lendemain pour finir ce chantier qui aurait dû être terminé le 3 mai. Au-delà du préjudice financier et en termes d’image pour la société, cette insubordination est totalement inacceptable.
-De plus, vous remettez régulièrement en cause les directives de la direction concernant la gestion des chantiers, adoptant une attitude provoquante et source de conflits avac vos collègues, ce qui créé une ambiance délétère dans l’entreprise. Plusieurs salariés se sont plaints de votre attitude.
– Ce n’est en outre pas la première fois que vous faites preuve d’une attitude insubordonnée et nous avons été contraints de vous notifier un avertissement le 20 janvier 2017 pour insubordination, refus d’effectuer le travail demandé et non-respect des horaires.
Nous ne pouvons que constater et déplorer que malgré cet avertissement et les nombreux rappels sur les horaires de travail, vous persistez dans une attitude insubordonnée et vous ne respectez pas vos horaires de travail.
Compte tenu de la gravité des faits, nous vous avons notifié une mise à pied à titre conservatoire le 4 mai 2018 et convoqué à un entretien préalable, par courrier recommandé du 7 mai 2018.
Lors de cet entretien qui s’est tenu le 22 mai 2018, vous avez contesté les faits, contestation formalisée par l’intermédiaire de la personne qui vous a assisté lors de cet entretien, M. [S], qui nous a envoyé le 24 mai 2018 le compte rendu qu’il a rédigé et qui appelle les observations suivantes :
> M. [M] n’a jamais indiqué à M. [G] qu`il pouvait considérer nul l’avertissement du 20 janvier 2017. Ceci est totalement faux.
> M. [G] et M. [LZ] n’ont jamais évoqué un droit de retrait le 3 mai 2018. Cest une pure invention 15 jours après dans le cadre de l’entretien préalable, pour tenter de justifier leur attitude inacceptable.
> Le chantier du 3 mai 2018 n’était ni particulièrement dangereux ni en dehors des fonctions contractuelles de M. [G] et M. [LZ]. Ces affirmations sont encore une fois des tentatives de justification postérieures, qui ne correspondent pas à la réalité. D’ailleurs, M. [BN] et [U] ont travaillé ce jour~là sur ce chantier sans que cela pose de difficultés.
> M. [BN] n’a jamais dit qu’il partait pour rentrer chez lui. Il s`agit d`un mensonge grossier. M. [BN] est parti porter plainte en police, à la demande de la direction, pour un vol dans le camion.
> Le conducteur de travaux n`a jamais dit à M. [G] et M. [LZ] qu’ils pouvaient rentrer chez eux. Au contraire, puisque le chantier n’était pas terminé !
> ll est encore faux d’écrire que M. [M] et [C] auraient dit que le conducteur de travaux avait démissionné le jour même et qu’il n’y aurait aucun moyen de le joindre pour avoir sa version des faits. M. [H] est actuellement en congés et n’a pas démissionné. Il a confirmé n’avoir jamais dit aux salariés qu’ils pouvaient partir.
> Enfin lors de l`entretien préalable, il a été proposé à M. [G] comme à M. [LZ] d’être raccompagné par un salarié de l’entreprise à leur domicile, ce que ces derniers ont refusé.
> M. [G] et M. [LZ] sont repartis avec leurs effets personnels le 4 mai 2018. Les affirmations des salariés sur des affaires qu’ils auraient prétendument laissées (curieusement jamais demandées depuis…) sont totalement mensongères. Les enregistrements de vidéo surveillance du parking permettent de démontrer les mensonges de MM. [LZ] et [G]. En effet on voit clairement M. [G] récupérer ses lunettes et ses 2 pinces, M. [LZ] récupérer sa cafetière et sa caisse à outils qui est dans un sac à dos.
A aucun moment il n’y a eu d’altercation. Un salarié M. [R] est présent du début à la fin, et il pourra attester de ce qui s’est réellement passé.
Ces tentatives de justification ne nous ont pas permis de modi’er notre appréciation.
Vos absences injustifiées, votre insubordination et le dénigrement de la direction sont totalement inadmissibles et ont pour conséquence de désorganiser et de décrédibiliser l’entreprise. Ces fautes sont d’autant plus graves que vous êtes en contact direct avec la clientèle, ce qui implique une confiance totale.
Compte tenu de la gravité des faits, votre maintien dans l’entreprise est impossible.Votre licenciement prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis ni de licenciement.
Vous avez fait par ailleurs l’objet d’une mise à pied à titre conservatoire qui vous a été notifiée le 4 mai 2018. Dès lors, la période non travaillée du 4 mai 2018 au 25 mai 2018 ne sera pas rémunérée.
Les sommes vous restant éventuellement dues. votre certificat de travail et votre solde de tout compte vous seront adressés par courrier à votre domicile. (…) ».
L’employeur reproche au salarié les faits suivants :
– d’avoir accusé M. [M], gérant de l’entreprise, de racisme à son égard,
– de ne pas avoir respecté les horaires de travail à cinq reprises,
– de ne pas avoir travaillé le 3 mai 2018 et d’avoir quitté le chantier avant la fin de la journée de travail sans invoquer l’exercice du droit de retrait,
– d’avoir remis en cause régulièrement les directives reçues, adopté une attitude provoquante entraînant une ambiance délétère.
Le salarié, qui conteste les griefs de l’employeur, estime à titre principal que son licenciement est nul pour trois motifs :
– il a été victime de « discrimination raciale » ou de discrimination liée à ses origines,
– l’employeur a orchestré son licenciement car il avait établi des attestations au profit de collègues de travail rétrogradés dont l’état de santé s’était dégradé, éléments constitutifs de harcèlement moral,
– l’employeur l’a licencié à la suite de l’exercice de son droit de retrait le 3 mai 2018.
L’article L1132-1 du Code du travail dispose que « aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français ».
L’article L1134-1 du même Code dispose que « lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, (…) le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles ».
Enfin, aux termes de l’article L. 1132-3 du même Code, « aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux articles L. 1132-1 et L. 1132-2 ou pour les avoir relatés. En vertu de l’article L. 1132-4 du même code, toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul ».
Il s’en déduit que le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.
En l’espèce, le salarié fait valoir qu’il a été promu chef d’équipe mais que l’employeur s’est ravisé en tenant des propos xénophobes devant témoins et que, du fait de ses origines, la direction de l’entreprise a fait obstacle à son évolution professionnelle.
Il verse aux débats trois attestations rédigées par des ex-collègues de travail :
– M. [V] [HN], lequel indique que, lors d’une réunion avec la direction, il a proposé de promouvoir le salarié en tant que chef d’équipe, que les gérants ont accepté en présence de toutes les équipes mais qu’ils se sont ravisés quelques heures plus tard, M. [M], gérant, lui ayant indiqué « on ne peux pas faire confiance à des arabes, dès qu’ont leurs donnes un peux de pouvoir, il se sentent pousser des ailes et croient avoir tout les droits »,
– M. [WA] [F], lequel précise d’une part, que les clefs du dépôt ont été confiées pendant deux ans au salarié jusqu’à l’arrivée de M. [HN], conducteur de travaux, et d’autre part, qu’un jour M. [M] l’a convoqué dans son bureau et lui a demandé de surveiller le salarié, indiquant « ne pas faire confiance aux arabes » et estimant qu’ils seraient « des voleurs » ; ce qu’il avait répété à l’intéressé ; il confirme que la direction avait accepté lors d’une réunion de nommer celui-ci chef d’équipe mais que quelques heures plus tard, il avait entendu M. [HN] dire à M. [G] que le gérant avait des préjugé racistes envers lui ; qu’il avait lui-même été témoin direct de ce même discours et enfin que M. [O] [BN] avait dit à M. [G] que selon M. [M], il fallait « tout faire pour dégagé [K] »,
– MM. [P] [DA] et [W] [D], lesquels confirment qu’il avait été promis au salarié de devenir chef d’équipe mais que cette promesse n’avait pas été tenue malgré les qualités professionnelles de l’intéressé,
– la lettre de licenciement évoquant au titre du premier grief reproché, le dénigrement de la direction en la personne de M. [M], le gérant, constitué par le fait que ce dernier serait raciste.
Ces éléments sont suffisamment précis pour laisser présumer l’existence d’une discrimination consistant en un obstacle à l’évolution professionnelle du salarié au sein de l’entreprise en raison de ses origines étrangères.
L’employeur, qui conteste une telle discrimination, doit prouver que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Il verse aux débats :
– deux attestations de M. [V] [HN] qui indique avoir accepté d’établir une fausse attestation au profit du salarié qui le harcelait continuellement depuis janvier 2017 pour qu’il témoigne du racisme des gérants, mais regretter d’avoir accepté et qui affirme que les patrons n’étaient pas racistes et n’ont jamais tenu de propos racistes à l’égard de quiconque,
– l’attestation de Mme [I] [TB], salariée, qui indique avoir surpris le salarié dire au gérant qu’il était raciste alors que celui-ci est marié avec une femme « d’origine maghrébine » et qu’elle n’a jamais entendu de propos racistes de la part de la direction,
– l’attestation de Mme [T] [E] qui confirme l’absence de tout propos raciste dans l’entreprise,
– l’attestation de M. [B] [M] qui se dit choqué par les propos qui lui sont prêtés,
– l’attestation de M. [B] [H], lequel indique avoir été informé par les « agents de la démarche de M. [G] » qui demandait des attestations relatant l’attitude raciste du gérant.
Si les témoignages de M. [HN] conduisent à écarter son attestation produite par le salarié, aucune des autres attestations ne permet de répondre au fait qu’une promotion a été promise à ce dernier mais a été rapidement retirée du fait de considérations liées à ses origines. En tout état de cause, l’employeur ne verse aux débats aucun élément susceptible de remettre en question les propos tenus lors de la réunion.
Dès lors que l’employeur ne prouve pas que sa décision était justifiée par des éléments objectifs sans lien avec l’origine du salariée, la discrimination est établie, faute de démonstration de la mauvaise foi du salarié.
Or, aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié pour avoir relaté des faits de discrimination, de sorte que le licenciement motivé en partie par le dénigrement de la direction, présentée par le salarié comme raciste à son égard, est nul, sans qu’il y ait lieu d’examiner les faits ayant conduit l’employeur à retenir la faute grave du salarié.
Le préjudice subi du fait de la discrimination sera réparé par la somme de 3000€.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté le salarié de ses demandes au titre du licenciement nul et au titre de l’indemnisation du préjudice subi du fait de la discrimination.
Sur les conséquences pécuniaires de la rupture :
L’article L 1235-3-1 du Code du travail prévoit que l’article L 1235-3 du même Code n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une des nullités prévu à l’alinéa 2, soit notamment lorsque la nullité est afférente à un licenciement discriminatoire, et que lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Compte tenu du montant des salaires brut des six derniers mois précédent la rupture au vu des bulletins de salaire (10 867,09 €), de son ancienneté (2 ans 9 mois et 21 jours hors préavis), de son salaire mensuel brut (1 811,80 €), de son statut de travailleur handicapé et des justificatifs relatifs à sa situation (contrats de mission d’intérim en 2018, 2019, 2020 et janvier 2023, TESE, ARE jusqu’en 2020), il convient de fixer les sommes suivantes à son profit :
– 11 000 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 5 435,40 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis (3 mois, préavis doublé dans la limite de 3 mois),
– 543,54 € au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférents,
– 1 675,91 € au titre de l’indemnité légale de licenciement,
– 1 217,39 € au titre du rappel de salaire lié à la mise à pied à titre conservatoire abusive du 4 au 25 mai 2018,
– 121,73 € au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés y afférents.
Les deux dernières sommes relatives au rappel de salaire du fait de la mise à pied abusive produiront intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation par l’employeur devant le bureau de conciliation.
Sur les demandes accessoires :
Il n’y a pas lieu de répondre à la demande de « prise d’acte ».
L’employeur devra délivrer au salarié un bulletin de salaire récapitulatif rectifié conformément aux dispositions du présent arrêt.
L’employeur sera condamné aux entiers dépens de première instance et d’appel.
En revanche, il est équitable de ne pas faire application de l’article 700 du Code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, par arrêt mis à disposition au greffe ;
INFIRME le jugement du 1er février 2021 du conseil de prud’hommes de Sète en ce qu’il a débouté M. [K] [G] de sa demande d’annulation de l’avertissement et d’indemnisation subséquente, de sa demande au titre de la discrimination et de ses demandes au titre du licenciement nul ;
Statuant à nouveau sur ces seuls chefs infirmés,
ANNULE l’avertissement notifié le 20 janvier 2017 par la SARL LM Telecom à M. [K] [G] ;
DIT que M. [K] [G] a subi une discrimination liée à ses origines ;
DIT que le licenciement de M. [K] [G] est nul ;
CONDAMNE la SARL LM Telecom à payer à M. [K] [G] les sommes suivantes :
* 500 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l’avertissement abusif,
* 3 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la discrimination liée à ses origines,
* 11 000 € au titre du licenciement nul,
* 5 435,40 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
* 543,54 € au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférents,
* 1 675,91 € au titre de l’indemnité légale de licenciement,
* 1 217,39 € au titre du rappel de salaire lié à la mise à pied à titre conservatoire abusive du 4 au 25 mai 2018,
* 121,73 € au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés y afférents ;
CONFIRME ledit jugement pour le surplus ;
Y ajoutant,
DIT n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la SARL LM Telecom aux entiers dépens de première instance et d’appel ;
LE GREFFIER LE CONSEILLER
Pour le président empêché
V. DUCHARNE