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21 juillet 2023
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
21/12697
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-8
ARRÊT AU FOND
DU 21 JUILLET 2023
N°2023/.
Rôle N° RG 21/12697 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BIATR
URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE
C/
[R] [G]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE
– Me Arnaud TAILFER
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Pole social du TJ de TOULON en date du 29 Juin 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 19/189.
APPELANTE
URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE, demeurant [Adresse 1]
représenté par M. [K] [M] en vertu d’un pouvoir spécial
INTIME
Monsieur [R] [G], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Arnaud TAILFER, avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Mai 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Isabelle PERRIN, Conseiller, chargé d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre
Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller
Mme Isabelle PERRIN, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Juillet 2023.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Juillet 2023
Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Le 15 décembre 2017, l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’ allocations familiales du Centre Val de Loire (ci-après URSSAF) a adressé à M. [R] [G] un appel à cotisation subsidiaire maladie au titre de l’année 2016 d’un montant de 6093 euros.
Par décision du 11 juin 2018, l’Urssaf a rejeté sa contestation du dit appel de cotisations.
Le 27 juillet 2018, M. [G] a contesté cet appel à cotisations devant la commission de recours amiable.
En présence d’une décision implicite de rejet, M. [G] a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale le 24 septembre 2018, étant précisé que la commission de recours amiable a explicitement rejeté son recours par décision du 13 décembre 2018.
Par jugement du 29 juin 2021, le tribunal judiciaire de Toulon, pôle social, ayant repris l’instance, a :
– annulé l’appel à cotisations subsidiaires maladie du 15 décembre 2017 au titre de l’année 2016 mis en oeuvre par l’URSSAF Centre Val de Loire à l’égard de M. [G] d’un montant de 6 093 euros ;
– condamné l’URSSAF Centre Val de Loire rembourser à M. [G] la somme de 6 093 euros ;
– débouté M. [G] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné l’URSSAF Centre Val de Loire aux dépens de l’instance.
L’URSSAF Centre Val de Loire a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées.
En l’état de ses conclusions visées au greffe à l’audience du 3 mai 2023, oralement soutenues et auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, la partie appelante sollicite l’infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande à la cour de :
– la recevoir en son appel et la dire bien fondée ;
– débouter M. [G] de ses demandes ;
– le condamner aux dépens.
En l’état des conclusions parvenues au greffe le 22 novembre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, l’intimé sollicite la confirmation du jugement déféré et demande à la cour de:
Elle demande à la cour de :
– annuler l’appel à cotisations critiqué et restituer la cotisation subsidiaire maladie réglée au titre de l’année 2016 ;
– condamner l’URSSAF à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par courrier reçu au greffe le 23 décembre 2022, l’intimé sollicite la radiation de l’affaire au motif qu’un récent pourvoi devant la Cour de cassation doit donner lieu à une décision en assemblée plénière à la suite d’un jugement sur renvoi du tribunal judiciaire de Lille en date du 8 décembre 2021 aux termes duquel ‘les termes au plus tard sont clair et sans équivoque et comportent en eux-mêmes la sanction prévue par le législateur’, cette procédure impactant selon lui directement l’issue du présent litige.
MOTIFS
Sur la demande de radiation
Aux termes de l’article 381 du code de procédure civile, la radiation sanctionne dans les conditions de la loi le défaut de diligence des parties.
En l’espèce, les parties ont respectivement conclu les 22 novembre 2022 et 3 mai 2023, de sorte qu’aucun défaut de diligence ne peut leur être imputé et, l’Urssaf sollicitant que soit prononcé un arrêt sur le fond, il y a lieu de trancher le présent litige en l’état de leurs conclusions, régulièrement et contradictoirement déposées.
Sur la fin de non-recevoir
L’intimé soutient que l’Urssaf Centre Val de Loire n’avait, lors de l’émission de l’appel à cotisation en litige, pas compétence territoriale pour ce faire en ce qu’il relevait de celle de l’Urssaf Ile de France, la décision du directeur de l’ACOSS du 11 décembre 2017 approuvant les conventions de mutualisations interrégionales et déléguant notamment les compétences du directeur de l’Urssaf Ile de France à l’Urssaf Centre Val de Loire n’ayant été publiée au bulletin officiel, et n’ayant donc été opposable aux usagers que le 15 janvier 2018.
L’appelante répond que la convention relative à la centralisation du recouvrement de la cotisation d’assurance maladie entre l’Urssaf Ile de France et l’Urssaf Centre Val de Loire a été prise le 12 décembre 2017 soit avant l’appel à cotisations litigieux, et que la postériorité, à l’avis de cotisations, de la publication au bulletin officiel de la décision du directeur de l’Acoss approuvant de telles conventions est en conséquence inopérante.
Sur quoi:
Selon l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
Aux termes de l’article 126 du même code, dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d’être régularisée, l’irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.
Il en est de même lorsque, avant toute forclusion, la personne ayant qualité pour agir devient partie à l’instance.
En l’espèce, le moyen soulevé par l’intimé ne relève pas d’une incompétence territoriale de l’Urssaf Centre Val de Loire pour émettre un avis de cotisations mais d’un défaut de qualité à agir à poursuivre l’appel et le recouvrement des cotisations sociales, faute selon lui, de délégation de compétence donnée par le directeur de l’Urssaf Ile de France au directeur de l’Urssaf Centre Val de Loire lors de l’émission de l’avis de cotisations en litige.
Si la décision du 11 décembre 2017 du directeur de l’Acoss, approuvant les ‘conventions de mutualisation interrégionales, prises en application de l’article L 122-7 du code de la sécurité sociale et conclues entre les Urssaf aux fins de délégation du calcul, de l’appel et du recouvrement des cotisations dues en en application de l’article L 380-2 du code de la sécurité sociale à des Urssaf délégataires conformément à la répartition figurant dans le tableau annexé à la présente décision,’ n’a été opposable aux tiers que le 12 janvier 2018 suite à sa publication au bulletin officiel, à cette date l’Urssaf Centre Val de Loire a en revanche acquis la qualité à poursuivre le recouvrement des cotisations dont relevaient les résidants d’Ile de France, au regard de la convention du 1er décembre 2017 relative à la centralisation du recouvrement de la cotisation maladie visée à l’article L 380-2 du code de la sécurité sociale conclue entre l’Urssaf Ile de France et l’Urssaf Centre Val de Loire, de la date de cette décision, et la publication postérieure de cette décision la rend opposable aux tiers ainsi qu’aux cotisants.
En conséquence, le défaut de qualité à agir de l’Urssaf Centre Val de Loire à la date d’émission de l’appel à cotisation ayant été régularisé par la suite et tant acquis dès l’introduction de l’instance judiciaire, la fin de non-recevoir doit être écartée.
Sur la nullité de l’appel à cotisation
Sur le moyen tiré de la violation de la loi ‘informatique et libertés’
L’intimé soutient que:
– si le principe de la communication de données personnelles par l’administration fiscale, pour le calcul et le recouvrement de la cotisation subsidiaire maladie, aux URSSAF est prévu par l’article L 380-2 du code de la sécurité sociale, le transfert de ces données doit respecter les conditions posées par l’article 27 de la loi du 6 janvier 1978 et notamment l’autorisation préalable donnée à l’administration, par décret du Conseil d’Etat après publication de l’avis motivé de la commission nationale de l’informatique et des libertés ;
– la délibération de la CNIL du 14 septembre 2017 rappelle qu’une information spécifique des personnes concernées par le transfert à l’ACOSS doit être prévue ;
– en l’espèce, le décret autorisant le transfert des données personnelles de cotisants par l’administration fiscale aux URSSAF, a été publié le 26 mai 2018, soit postérieurement à l’appel de cotisation en cause, de sorte que celui-ci est irrégulier comme portant atteinte aux droits fondamentaux protégés par la loi du 6 janvier 1978 et le seul décret du 3 novembre 2017 en vigueur lors de l’émission de l’appel à cotisations ne fait nullement mention des modalités d’informations mises en oeuvre par l’ACOSS à l’égard des personnes concernées par le traitement personnel de données pour le recouvrement de la cotisation subsidiaire maladie.
L’appelante répond en substance que:
– l’article L380-2 du code de la sécurité sociale autorise l’administration fiscale et les URSSAF à échanger les données nominatives pour l’établissement de la cotisation subsidiaire maladie ;
– la mise en place par l’ACOSS d’un traitement informatique a été autorisée par un décret du 3 novembre 2017 prévoyant les modalités de recouvrement des cotisations prévues à l’article L380-2 du code de la sécurité sociale, pris après avis de la CNIL, et antérieurement à la date de l’appel à cotisation contesté;
– le décret du 24 mai 2018 dont l’intimée soulève la publication postérieure à l’appel de cotisations ne fait que préciser le décret du 3 novembre 2017, qui organisait déjà le transfert des données à caractère personnel destiné au calcul de la cotisation en cause, en mettant en oeuvre par la direction générale des finances publiques d’un traitement de transfert de données à caractère personnel à destination de l’agence centrale des organismes de sécurité sociale ;
– l’article D 380-5 du code de la sécurité sociale entré en vigueur le 22 juillet 2016 prévoit que les éléments nécessaires à la détermination des revenus mentionnés aux articles D 380-1 et D380-2 sont communiqués par l’administration fiscale aux organismes chargés du calcul et du recouvrement de la cotisation prévue par l’article L 380-2 du code de la sécurité sociale;
– le site internet de l’Urssaf contient l’information prévue à l’article 32 III de la loi informatique et libertés, indiquant que les redevables sont identifiés à partir de sdonnées transmises par l’administration fiscale sur la base des éléments de revenus pris en compte pour l’impôt sur le revenu,
– elle a donc respecté son obligation d’information générale concernant la CSM,
– le cotisant ne peut arguer ne pas avoir été informé du transfert entre l’administration fiscale et l’Urssaf pour solliciter l’annulation de l’appel à cotisations ,
– en tout état de cause seule la CNIL pourrait constater le non respect de la loi du 6 janvier 2018 et prononcer une sanction qui ne saurait consister en l’annulation de l’appel à cotisations.
Sur ce:
L’article 59 de la loi n°2015-1702 de finances pour 2016 a remplacé la couverture maladie universelle par la protection universelle maladie (PUMa), laquelle est financée par la cotisation subsidiaire maladie (CSM) dont sont redevables, aux termes de l’article L 380-2 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 1er janvier 2016 au 1er janvier 2019, les personnes mentionnées à l’article L160-1 du même code, à savoir celles qui exercent une activité professionnelle en France ou qui y ont une résidence stable et régulière. Cette cotisation est assise sur les sources de revenu non professionnelles.
Il est constant en l’espèce que l’intimé a été destinataire d’un appel de cotisation subsidiaire maladie en date du 15 décembre 2017 et il n’est pas contesté que, pour le calcul de ladite cotisation, l’appelante a utilisé les données personnelles du cotisant dans le cadre de leur transmission automatisée par la direction générale des finances publiques (DGFIP) à l’agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS).
L’article L380-2 précité dispose in fine que les agents des administrations fiscales communiquent aux organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 les informations nominatives déclarées pour l’établissement de l’impôt sur le revenu par les personnes remplissant les conditions mentionnées au premier alinéa de l’article L. 380-2, conformément à l’article L. 152 du livre des procédures fiscales.
L’article D 380-5 du code de la sécurité sociale entré en vigueur le 22 juillet 2016 prévoit que les éléments nécessaires à la détermination des revenus mentionnés aux articles D 380-1 et D380-2 sont communiqués par l’administration fiscale aux organismes chargés du calcul et du recouvrement de la cotisation prévue par l’article L 380-2 du code de la sécurité sociale
Aussi, comme s’accordent les parties sur ce point, la loi comme le réglement posent-ils comme principe la communication par la DGFIP à l’ACOSS des éléments nécessaires au calcul et au recouvrement de la CSM.
Cependant, le débat porte ici sur la régularité du caractère automatisé, d’une part de la communication par la DGFIP à l’ACOSS des données personnelles relatives aux cotisants, d’autre part, de l’utilisation par l’ACOSS de ces éléments pour le calcul et le recouvrement de la CSM, à la date d’émission de l’appel à cotisation contesté et enfin, sur le défaut d’information de l’Urssaf au cotisant, quant à l’utilisation de ses données personnelles recueillies auprès de l’administration fiscale.
La loi n°78-17 dite ‘informatique et libertés’ dans sa version en vigueur du 9 octobre 2016 au 25 mai 2018 et applicable à l’espèce prévoit, en son article 27:
‘I.-Sont autorisés par décret en Conseil d’Etat, pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l’informatique et des libertés :
1° Sous réserve du I bis de l’article 22 et du 9° du I de l’article 25, les traitements de données à caractère personnel mis en ‘uvre pour le compte de l’Etat, d’une personne morale de droit public ou d’une personne morale de droit privé gérant un service public, qui portent sur des données parmi lesquelles figure le numéro d’inscription des personnes au répertoire national d’identification des personnes physiques’.
Le décret n° 2017-1530 du 4 novembre 2017, dont se prévaut l’appelante, qui certes a fait l’objet d’un avis motivé préalable de la commission informatique et libertés (CNIL) du 16 octobre 2017 publié le 4 novembre 2017, a pour objet l’autorisation de la mise en ‘uvre d’un traitement de données à caractère personnel destiné au calcul de la cotisation prévue à l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, et d’un traitement de données à caractère personnel destiné au contrôle de la résidence et modifiant le décret n° 2015-390 du 3 avril 2015.
Il dispose, en son article 1:
I. – Pour l’application des dispositions de l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale est autorisée la création par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale d’un traitement de données à caractère personnel dénommé « Cotisation spécifique maladie».
Les finalités de ce traitement sont le calcul et le recouvrement par les organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 du code de la sécurité sociale de la cotisation spécifique maladie prévue par l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale.
II. – Le traitement autorisé par le présent article porte sur les catégories de données suivantes :
1° Données relatives à l’identité des personnes :
– numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques (NIR) ;
– civilité ;
– nom de famille ;
– nom d’usage ;
– prénoms ;
– date de naissance ;
– lieu de naissance (code commune INSEE) ;
– adresse de domicile (numéro et nom de voie, nom de commune, code commune INSEE) ;
– adresse de correspondance (numéro et nom de voie, nom de commune, code commune INSEE);
2° Données fiscales relatives aux revenus :
– traitements et salaires ;
– pensions, retraites et rentes ;
– revenus et plus-values des professions non salariées : revenus agricoles, revenus industriels et commerciaux professionnels, revenus industriels et commerciaux non professionnels, revenus non commerciaux professionnels, revenus non commerciaux non professionnels ;
– divers : montant net des revenus agricoles, revenus industriels et commerciaux, revenus non commerciaux non soumis aux contributions sociales par les organismes sociaux, indemnités d’élus locaux, revenus étrangers imposables en France, ouvrant droit à un crédit d’impôt égal au montant de l’impôt français ;
– revenus des valeurs et capitaux mobiliers ;
– plus-values et gains divers ;
– revenus fonciers ;
– revenus fonciers exceptionnels ou différés ;
– le cas échéant, rectifications apportées, par le contribuable ou les services de la direction générale des finances publiques, aux mêmes données, en cas d’émission de rôles supplémentaires et de dégrèvements.
III. – Sont destinataires des données à caractère personnel mentionnées au II du présent article, à raison de leurs attributions respectives et dans la limite du besoin d’en connaître :
1° Les agents de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale individuellement habilités par le directeur de l’Agence ;
2° Les agents des organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 du code de la sécurité sociale chargés du calcul, du recouvrement et du contrôle de la cotisation prévue par l’article L. 380-2, individuellement habilités par le directeur de l’organisme concerné.
Au contraire de ce que soutient l’appelante, ce décret, qui a en effet régulièrement été précédé d’un avis publié de la CNIL et a été publié avant l’émission de l’appel à cotisation litigieux du 16 décembre 2017, n’autorise pas la mise en oeuvre de la transmission automatisée par la DGFIP à l’ACOSS de données personnelles destinées à calculer et recouvrer la CSM, mais seulement, comme le soutient l’intimée, la mise en oeuvre du traitement par l’ACOSS de ces données aux fins de calcul et recouvrement de la CSM.
Le décret n° 2018-392 du 24 mai 2018 a quant à lui pour objet la création d’un traitement automatisé de transfert de données relatives aux redevables de la cotisation annuelle prévue à l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale et dispose :
Article 1:
Pour l’application du dernier alinéa de l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, est autorisée la mise en ‘uvre par la direction générale des finances publiques d’un traitement automatisé de transfert de données à caractère personnel à destination de l’agence centrale des organismes de sécurité sociale.
Ce traitement automatisé a pour finalité de communiquer à l’agence centrale des organismes de sécurité sociale les informations nominatives dont dispose l’administration fiscale nécessaires à la détermination de l’assiette et du montant de la cotisation prévue par les dispositions de l’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale ci-dessus mentionné.
Le transfert est mis en ‘uvre par un service informatique de la direction générale des finances publiques.
Article 2 :
Le traitement autorisé par le précédent article porte sur les catégories de données suivantes :
1° Données relatives à l’identité des personnes :
– civilité ;
– nom de famille ;
– nom d’usage ;
– prénoms ;
– date de naissance ;
– lieu de naissance (code commune INSEE) ;
– adresse de domicile (numéro et nom de voie, nom de commune, code commune INSEE) ;
– adresse de correspondance (numéro et nom de voie, nom de commune, code commune INSEE);
– numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques (NIR).
2° Données fiscales relatives au revenu :
– traitements et salaires ;
– pensions, retraites et rentes ;
– revenus et plus-values des professions non salariées : revenus agricoles, revenus industriels et commerciaux professionnels, revenus industriels et commerciaux non professionnels, revenus non commerciaux professionnels, revenus non commerciaux non professionnels ;
– divers : montant net des revenus agricoles, revenus industriels et commerciaux, revenus non commerciaux non soumis aux contributions sociales par les organismes sociaux, indemnités d’élus locaux, revenus étrangers imposables en France, ouvrant droit à un crédit d’impôt égal au montant de l’impôt français ;
– revenus des valeurs et capitaux mobiliers ;
– plus-values et gains divers ;
– revenus fonciers.
Ces informations, relatives aux personnes identifiées comme redevables de la cotisation mentionnée à l’article 1er, sont extraites du traitement automatisé d’informations nominatives dénommé “accès au dossier fiscal des particuliers”.
C’est donc, contrairement à ce que soutient l’appelante, ce second décret qui pose le principe de l’autorisation de transmission automatisée et sécurisée des données personnelles relatives aux personnes redevables de la CSM par la DGFIP à l’ACOSS, et non le décret pourtant antérieurement publié du 4 novembre 2017, qui ne mentionne d’ailleurs pas la DGFIP et ne définit que l’autorisation et les modalités de traitement des données personnelles des cotisants qui sont transmises à l’ACOSS.
Or, ce second décret a été publié le 24 mai 2018, suite à l’avis de la CNIL certes rendu le 14 septembre 2017 mais publié le 24 mai 2018, de sorte que lorsque l’URSSAF a émis l’appel à cotisation du 15 décembre 2017, elle ne disposait pas encore de l’autorisation nécessaire du Conseil d’Etat pour se faire transmettre de manière automatisée par la DGFIP les données personnelles relatives à l’intimée aux fins de calcul et de recouvrement de la CSM.
En conséquence cet appel à cotisation, émis en violation de la loi du 6 janvier 2018 susvisée, doit être annulé.
L’intimé justifiant par ailleurs avoir réglé à l’URSSAF la somme de 6 093 euros au titre de l’appel à cotisation irrégulier, paiement par ailleurs non contesté par l’appelante, il doit être fait droit à sa demande en remboursement de cette somme par l’URSSAF et le jugement sera confirmé sur ce point.
Succombant, l’appelante doit être condamnée aux dépens d’appel et ne saurait se prévaloir des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Il serait en revanche inéquitable de laisser l’intimé supporter les frais qu’il a dû exposer pour sa défense et l’appelante sera condamnée à lui verser la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
– déboute l’URSSAF Centre Val de Loire de l’ensemble de ses demandes,
– condamne L’URSSAF Centre Val de Loire à verser à M. [R] [G] la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamne l’URSSAF Centre Val de Loire aux dépens d’appel.
Le Greffier Le Président