24 mai 2023
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
21/02735
24/05/2023
ARRÊT N°223
N° RG 21/02735 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OHPP
FP AC
Décision déférée du 08 Juin 2021 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE – 2020J212
M STEIN
S.A.R.L. ACCES INNOVATION SERVICES
C/
S.A.S. BPCE CAR LEASE
Infirmation partielle
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
2ème chambre
***
ARRÊT DU VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANTE
S.A.R.L. ACCES INNOVATION SERVICES
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Georges DAUMAS de la SCP GEORGES DAUMAS, avocat au barreau de TOULOUSE
Assistée par Me Claire SAINT JEVIN de la SELARL SAINT-JEVIN, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMEE
S.A.S. BPCE CAR LEASE
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Stéphane BONIN de la SCP BONIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
Assistée par Me Stéphanie DIENER, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant F. PENAVAYRE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles chargé du rapport et P.BALISTA, conseiller. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
V. SALMERON, présidente
P. BALISTA, conseiller
F. PENAVAYRE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier, lors des débats : C. OULIE
ARRET :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par V. SALMERON, présidente, et par C. OULIE, greffier de chambre.
EXPOSÉ LE LITIGE
Suivant contrat de location du 30 août 2018, la Société BPCE CAR LEASE anciennement dénommée NATIXIS CAR LEASE a consenti à la SARL ACCESS INNOVATION SERVICES (AIS en abrégé) une location de longue durée portant sur un véhicule neuf Renault Kadjar d’une valeur catalogue de 35 879,99 euros TTC, moyennant le remboursement d’un loyer mensuel de 534,80 euros TTC pendant 36 mois.
Le véhicule a été livré le 28 septembre 2018 sans réserve.
Le 11 mars 2019, la société AIS a signalé à son garagiste une panne de la boîte automatique ( suite à une fuite d’huile) et le véhicule a été immobilisé . Un véhicule de remplacement lui a été fourni.
Par la suite, le véhicule a été remorqué chez un garagiste Renault à [Localité 5] qui a constaté que le véhicule avait reçu un choc important sur le devant et que ce choc n’avait pas été réparé dans les règles de l’art.
Le cabinet BCA EXPERTISE a examiné le véhicule le 25 mars 2019 à la demande de la société CAR LEASE et a conclu que la panne est imputable à une aggravation de dommages survenus à la suite d’un choc après une réparation grossière située à l’avant gauche du véhicule qui a causé une fuite d’huile et a entraîné la détérioration de la boîte de vitesse par manque de lubrification. Le montant des réparations a été évalué à la somme de 6150 € hors-taxes.
La société CAR LEASE a informé la locataire qu’elle ne prendrait pas en charge les frais du véhicule-relais ni ceux de la réparation du véhicule Renault, objet du contrat, liés à la panne .
Par courrier recommandé du 2 mai 2019 la société ACCESS INNOVATION SERVICES a notifié au loueur son intention de procéder à la résiliation du contrat avec effet au 31 mai 2019 en indiquant que le véhicule donné en location se trouvait sous la garde du garage Renault et qu’elle allait restituer le véhicule de remplacement car elle refusait d’assumer la refacturation proposée.
Par courrier du 26 juillet 2019, la société CAR LEASE a pris acte de la résiliation anticipée du contrat par application de l’article 3.1.2 des Conditions générales et demandé à la société ACCESS INNOVATION SERVICES d’en supporter tous les frais,lui rappelant qu’elle restait gardienne du véhicule loué jusqu’à sa restitution et redevable des éventuels frais de réparation et de remise en état.
Le garage Renault [Localité 5] Sud Automobiles a facturé des frais de gardiennage que la société ACCESS INNOVATION SERVICES a refusé de régler.
Une mise en demeure a été adressée à la société AIS le 2 mars 2020 de régler l’indemnité de résiliation ainsi que les frais de remise en état du véhicule qui est restée vaine.
Le véhicule a été récupéré par le loueur le 7 juillet 2020 qui a réglé les frais de gardiennage à hauteur de 4100 €.
Le véhicule a été revendu au prix de 16 250 € hors taxes le 4 septembre 2020.
Par acte d’ huissier du 2 avril 2020, la société BPCE CAR LEASE a assigné la société ACCESS INNOVATION SERVICES devant le tribunal de Commerce de Toulouse pour l’entendre condamner à lui payer diverses sommes au titre des frais de réparation du véhicule, de l’indemnité de résiliation, des frais de remise en état et de gardiennage outre les intérêts et les accessoires.
Par jugement du 8 juin 2021, le tribunal de Commerce de Toulouse (après avoir rejeté la demande d’expertise judiciaire) a :
-condamné la société ACCESS INNOVATION SERVICES à payer à la SA S BPCE CAR LEASE la somme de 6150 € au titre des frais de réparation du véhicule assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2020
-condamné la société ACCESS INNOVATION SERVICES à payer à la société BPCE CAR LEASE la somme de 5315,57 euros au titre de l’indemnité de résiliation assortie des intérêts au taux légal depuis le 2 mars 2020
-débouté la société BPCE CAR LEASE de sa demande au titre des frais de remise en état et des frais de gardiennage
-débouté la SARL ACCESS INNOVATION SERVICES de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions
– condamné la société ACCESS INNOVATION SERVICES à payer à la société BPCE CAR LEASE la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et rejeté le surplus de sa demande
– constaté que l’exécution provisoire est de droit
-condamné la société ACCESS INNOVATION SERVICES aux entiers dépens de l’instance.
Par déclaration enregistrée au greffe le 21 juin 2021, la SARL ACCESS INNOVATION SERVICES a interjeté appel du jugement rendu le 8 juin 2021 par le tribunal de Commerce de Toulouse en ce qu’il l’a condamnée à payer à la société BPCE CAR LEASE :
– la somme de 6150 € au titre des frais de réparation du véhicule assortie des intérêts au taux légal depuis le 2 mars 2020
-la somme de 5315,57 euros au titre de l’indemnité de résiliation assortie des intérêts au taux légal depuis le 2 mars 2020
-la somme de 1200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens
et a rejeté ses demandes.
Par ordonnance du 16 décembre 2021, le magistrat en charge de la mise en état a rejeté la demande d’expertise judiciaire formée par la société ACCESS INNOVATION SERVICES et a réservé les dépens de l’incident jusqu’à l’arrêt au fond.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 13 octobre 2022,la SARL ACCESS INNOVATION SERVICES (AIS) demande à la cour :
À titre liminaire :
-de lui donner acte qu’elle renonce à sa demande d’expertise judiciaire dès lors que le véhicule a été revendu
– de donner acte à la société BPCE CAR LEASE qu’elle renonce à sa demande au titre de frais de réparation du véhicule et de ce seul chef, d’ infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société AIS au paiement de la somme de 6150 € hors taxes à ce titre
– de déclarer irrecevable comme nouvelle en appel, au sens de l’article 564 du code de procédure civile, la demande de dommages-intérêts formée par la société BPCE CAR LEASE au titre de la perte de valeur du véhicule à hauteur de 2528 €
Au fond sur le fondement des articles 1101 et suivants du Code civil :
-de dire et juger que la société AIS était bien fondée à résilier le contrat en présence d’un véhicule qui ne remplissait pas sa fonction
-de dire et juger que la société BPCE CAR LEASE ne fait pas la preuve d’une faute de la société locataire dans le cadre de l’exécution du contrat ni de dommages survenus pendant le cours de ce dernier
-de dire et juger que la clause de résiliation opposée par la société BPCE CAR LEASE est non écrite, instituant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties
-à titre subsidiaire , de dire que cette clause constitue une clause pénale manifestement excessive
En tout état de cause
– de dire et juger que la résiliation étant intervenue aux torts du bailleur, elle intervient à ses frais exclusifs
En conséquence :
-d’infirmer le jugement en ce qu’il est entré en voie de condamnation à l’encontre de la société AIS
-de débouter la société BPCE CAR LEASE de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions
-de la condamner à lui payer la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens d’appel et de première instance.
Elle soutient que la résiliation du contrat n’est pas de son fait,qu’elle n’est pas à l’origine des dégradations du véhicule qui étaient présentes dès sa prise de possession et que la résiliation du contrat a été dictée par le caractère inutilisable du véhicule et par conséquent par l’inexécution de ses obligations par le loueur.
Elle s’oppose à tous les frais et indemnités qui lui sont réclamés et s’estime fondée à refuser l’application de clauses contractuelles prévues pour sanctionner un locataire défaillant alors que c’est le loueur qui a manqué à ses obligations.
La société BPCE CAR LEASE anciennement dénommée NATIXIS CAR LEASE a notifié ses dernières conclusions le 3 novembre 2022 en formant appel incident.
Elle demande :
– de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société ACCESS INNOVATION SERVICES de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions et l’a condamnée à lui payer la somme de 5315,57 euros au titre de l’indemnité de résiliation outre les intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2020, la somme de 1200 € au titre des frais de procédure et les dépens
-de l’infirmer en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes de condamnation au titre des frais de remise en état et des frais de gardiennage
Y ajoutant
-de donner acte à la société ACCESS INNOVATION SERVICES de ce qu’elle renonce à sa demande d’expertise judiciaire devenue inutile
-de condamner la société ACCESS INNOVATION SERVICES à lui payer les sommes complémentaires suivantes :
*4100 € au titre des frais de gardiennage
*305,35 euros TTC au titre des frais de remise en état
*2528 € à titre de dommages intérêts pour la perte subie du fait de la dépréciation du véhicule
-de débouter la société ACCESS INNOVATION SERVICES de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires
-de la condamner à lui payer la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Elle fait essentiellement valoir qu’en résiliant le contrat par courrier du 2 mai 2019, la société locataire est tenue, contrairement à ce qu’elle allègue, de régler les montants contractuellement prévus liés à cette résiliation, conformément aux articles 11.3 et 3.1.2 des Conditions générales du contrat en sorte que la créance d’indemnité de résiliation est pleinement justifiée de même que les autres frais qu’elle réclame, conformément à l’annexe 1 contrat puisque la société locataire a abandonné le véhicule donné en location chez le garagiste sans procéder à une restitution contradictoire telle que prévue au guide de restitution.
Il y a lieu pour le surplus des explications des parties de se reporter expressément aux conclusions susvisées, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture est en date du 7 novembre 2022 .
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la résiliation du contrat de location de longue durée :
À la suite du remorquage du véhicule chez un garagiste en raison d’une panne de la boîte automatique, la société CAR LEASE a par courrier du 2 mai 2019, notifié à son cocontractant son refus de prendre en charge les frais liés au véhicule de remplacement ainsi que le coût de la réparation évalué à 6150 € hors-taxes « car ces frais résultent , selon le rapport du cabinet d’expertise amiable BCA, d’un choc avant et d’une utilisation du véhicule après une réparation grossière située à l’avant gauche attestée par des photos ».
Par lettre recommandée du 2 mai 2019, la société AIS a notifié son intention de mettre fin au contrat avec effet au 31 mai 2019 « en raison de l’inexécution du contrat » par le loueur et la société CAR LEASE a accepté cette résiliation, par courrier du 26 juillet 2019, sur le fondement de l’article 3.1.2 du contrat.
Contrairement à ce qui est soutenu par la société appelante qui prétend que la résiliation est intervenue aux torts du loueur car il a mis à sa disposition un véhicule affecté d’un grave défaut voire même accidenté (page 17 de ses conclusions), rien ne permet de justifier d’un manquement de ce dernier à ses obligations de délivrance conforme dès lors que le véhicule a été livré neuf, après avoir été acquis spécifiquement par la société CAR LEASE pour le mettre à la disposition de la société AIS et est resté en sa possession jusqu’au mois de mars 2019.
Par contre le véhicule a subi un choc sur le pare-chocs avant après avoir parcouru 16 000 km et c’est à la suite de cet accident qui n’a pas été réparé dans les règles de l’art , qu’une fuite d’ huile est survenue qui a provoqué la panne de la boîte de vitesse par manque de lubrification.
L’existence d’un choc important sur l’avant du véhicule à l’origine de l’immobilisation du véhicule n’est pas sérieusement contestable malgré les dénégations de la société AIS au vu du diagnostic posé par le garagiste, de l’expertise amiable du cabinet d’expertise BCA et des photographies versées aux débats.
Le cabinet d’expertise amiable a constaté que « le tuyau d’alimentation huile boîte est coupé par un frottement sur le châssis, un collier plastique est utilisé pour maintenir le tuyau hors de son emplacement d’origine, le condenseur de climatisation est lui aussi incurvé et le radiateur refroidissement est sorti de son axe ».Il conclut qu’il s’agit d’une aggravation de dommages à la suite de l’utilisation du véhicule après une réparation grossière située à l’avant du véhicule.
Si le rapport n’a pas établi de façon contradictoire, il a été régulièrement communiqué aux parties et soumis à la critique de la société appelante. Or cette dernière se contente de contester avoir eu un accident sans pour autant fournir d’autres explications alors que le véhicule était en sa possession depuis le mois de septembre 2018.
Il est à noter qu’elle n’a pas fait part non plus d’un accident survenu à l’arrière du véhicule en février 2019 qui a été réparé en dehors du réseau Renault et dont la société CAR LEASE n’a été informée que postérieurement.
Les conclusions du cabinet BCA sont corroborées par l’ensemble des éléments de preuve fournis aux débats, notamment le courrier du garage Renault du 20 mars 2019 adressé à la société AIS qui indique « avoir trouvé un tuyau d’alimentation d’huile au niveau de la boîte à vitesse automatique coupé par le frottement sur le châssis . Suite à la dépose du pare-choc avant, il apparaît un collier plastique pour tenir le tuyau défectueux et une pièce de liaison non fixée tandis que le condenseur de climatisation est incurvé, vraisemblablement suite à un choc avant ».
Le même garagiste a, par courriel du 7 juillet 2020 indiqué que « le véhicule n’a pas de malfaçons et a été immatriculé neuf suivant la carte grise. Le conducteur a eu un choc à l’avant suffisamment fort pour déformer le condenseur de climatisation qui est incurvé de plus de 2 cm avec des traces de coups apparents. La date de fabrication du pare-chocs correspond à la date d’immatriculation du véhicule. Le tout a été remonté avec utilisation d’un collier rapide, type serflex, pour tenir un tuyau d’huile qui arrive de la boîte automatique et qui s’est sectionné par le frottement des kilomètres parcourus sur le collier serflex qui n’est pas un montage Renault d’usine ».
C’est donc à tort que la société AIS soutient que la résiliation est intervenue en raison des manquements du loueur à ses obligations contractuelles et qu’il doit en supporter tous les frais alors qu’elle est responsable des dégradations survenues pendant la période où elle avait la garde du véhicule et doit respecter les modalités contractuelles de résiliation du contrat.
En tout état de cause, rien ne permet de dire que les autres incidents dont elle s’est plaint depuis le mois de novembre 2018 en raison de bruits anormaux et inexpliqués au sein du moteur ont un caractère suffisamment grave pour justifier la résiliation du contrat alors qu’ils ont été réparés et pris en charge dans le cadre du contrat de location avec services de la société CAR LEASE
Les modalités de résiliation du contrat litigieux sont régies par les articles 3.1.2 , 11.1 et 11.2 des Conditions générales .
Le contrat de location peut-être résilié de façon anticipée par le locataire (article 3.1.2 des conditions générales) ou par le loueur en cas de non-exécution par le locataire d’une quelconque de ses conditions (article 11 du contrat).
Aux termes de l’article 3.1.2 du contrat, à la demande expresse du locataire, le loueur peut accepter de mettre fin par anticipation à la location, sous réserve du paiement par le locataire, au plus tard au jour de la restitution convenu,d’ une indemnité calculée selon une formule élaborée par le Syndicat National des loueurs de véhicules de longue durée qui est détaillée en page 5.
Tel est le cas en l’espèce, la société CAR LEASE ayant notifié au conseil de la société appelante le 26 juillet 2019 qu’elle acceptait la résiliation par anticipation du contrat à la demande expresse du locataire, tout en lui rappelant ses obligations , ce qui n’a pas été contesté par la société AIS.
Dès lors il y a lieu de rejeter la demande de la société appelante de voir prononcer la résiliation du contrat aux torts du loueur et de dire qu’elle est intervenue à la demande du locataire sans faute de la société CAR LEASE.
Sur les réclamations de la société CAR LEASE :
Il y a lieu de constater que la société CAR LEASE a revendu le véhicule litigieux le 4 septembre 2020 sans le réparer ( et sans aviser la juridiction de première instance) en sorte qu’il y a lieu d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société CAR LEASE à lui payer des frais de réparation à hauteur de 6150 € hors taxes, cette réclamation étant devenue sans objet.
En cause d’appel la société CAR LEASE a actualisé ses demandes et réclame désormais les sommes suivantes :
-5315,57 euros au titre de l’indemnité de résiliation avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mars 2000
-4100 € au titre des frais de gardiennage
-305,35 euros TTC au titre des frais de remise en état
-2528 € à titre de dommages et intérêts du fait de la dépréciation du véhicule.
Que le contrat soit résilié à la demande expresse du locataire (article 3.1. 2) ou résilié de plein droit par le loueur pour non-exécution par le locataire des conditions de la location (article 11), il est prévu dans les Conditions générales annexées au contrat que le locataire doit :
– restituer à ses frais et sous sa responsabilité le véhicule loué avec tous ses accessoires (article 12)
-payer le montant des frais de réparation et de remise en état conformément aux dispositions de l’article 12.4
-payer l’indemnité de résiliation prévue à l’article 3.1.2 qui est calculée selon une formule mathématique élaborée par le Syndicat national des loueurs de véhicules de longue durée et dont le mode de calcul est détaillé en page 5.
En ce qui concerne l’indemnité de résiliation , il est soutenu par la société appelante qu’il s’agit d’une clause abusive au sens de l’article du 1171 code civil et qu’à défaut, il s’agit d’une clause pénale devant être modérée car elle présente un caractère excessif au sens de l’article 1231-5 du Code civil.
L’article 1171 du Code civil stipule que dans un contrat d’adhésion ,toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.
En l’espèce c’est à tort que la société AIS invoque la clause figurant à l’article 11.3 des conditions générales ( clause de résiliation de plein droit réservée au loueur) alors que la résiliation est intervenue à la demande expresse du locataire et est régie par les dispositions de l’article 3.1.2.
Dans le cadre de cet article, le paiement par le locataire d’ une indemnité de résiliation calculée selon la formule élaborée par le Syndicat National des loueurs de véhicules de longue durée est la contrepartie de la faculté qui lui est accordée de demander la résiliation anticipée du contrat alors qu’il a été conclu pour une durée initiale de 36 mois. Cette clause ne crée pas de déséquilibre significatif à son détriment puisqu’il peut ainsi mettre fin au contrat à tout moment en payant une indemnité compensatrice.
Aux termes de l’article 1231-5 du Code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter, payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte moindre. Néanmoins le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Il n’est pas démontré par la société appelante que l’indemnité de résiliation présente un caractère excessif au regard de l’économie générale du contrat qui a été résilié huit mois après sa prise d’effet alors qu’il devait durer initialement 36 mois en sorte que le bailleur a été privé de l’équivalent de 28 mois de loyers qui représentent une somme de 14 974,40 euros.
Au vu de ces éléments il y a lieu de confirmer la décision du Tribunal de commerce qui a condamné la société AIS à payer à la société CAR LEASE la somme de 5315,57 euros au titre de l’indemnité de résiliation avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 mars 2020.
En ce qui concerne la restitution du véhicule , selon l’article 12 des conditions générales, le locataire est tenu d’informer le loueur au préalable de la date effective de restitution du véhicule par télécopie ou courriel . Il s’engage à suivre la procédure de restitution figurant dans le Guide de restitution. Enfin, il demeure tenu des obligations de garde, et d’assurance si nécessaire , du véhicule jusqu’à la restitution effective au loueur.
Force est de constater que la société locataire n’a pas respecté la procédure de restitution alors que le guide de restitution lui a été communiqué par courrier recommandé du 2 mars 2020 et qu’il a abandonné le véhicule pris en location chez le garagiste Renault de [Localité 5] courant mars 2019 en refusant de payer les frais de remise en état et de gardiennage qui lui ont été facturés.
C’est à tort que le tribunal de commerce a rejeté la demande formée titre des frais de gardiennage alors qu’il est acquis que ce n’est pas le véhicule litigieux qui a été restitué le 27 mai 2019 mais le véhicule de remplacement.
Selon les informations fournies, la société CAR LEASE a récupéré le véhicule Renault Kadjar le 23 juillet 2020 après s’est acquittée des frais de gardiennage réclamés par le garagiste à hauteur de 4100 €.
La société AIS n’ayant pas respecté la procédure de restitution du véhicule et s’étant désintéressée du sort du véhicule sans qu’aucune faute ou négligence ne puisse être imputée au loueur qui a dû se substituer à son cocontractant pour les paiements des frais de gardiennage, elle doit être condamnée à rembourser cette somme à la société CAR LEASE.
En ce qui concerne les frais de remise en état réclamés à hauteur de 305,35 euros TTC, il y a lieu de rejeter cette demande dès lors que, selon les explications fournies par la société CAR LEASE les frais de remise en état ont été pris en charge par le cessionnaire du véhicule et qu’elle ne justifie pas d’avoir effectivement exposé de tels frais .
En ce qui concerne la perte de valeur du véhicule , la Société CAR LEASE, renonçant à sa demande de condamnation au titre des frais de remise en état qui ont été pris en charge par le cessionnaire du véhicule après revente, réclame la condamnation de la société AIS à lui payer la somme de 2528 € au titre de la décote qu’elle a subie à la revente du véhicule en raison des manquements commis par cette dernière.
La société appelante soutient qu’il s’agit d’une demande nouvelle au sens de l’article 564 du Code civil tandis que la société intimée explique qu’elle est justifiée par l’évolution du litige survenu en cours de procédure .
En vertu de l’article 565 du code de procédure civile,les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au Premier juge même si leur fondement juridique est différent. En l’espèce la demande formée au titre de la décote de valeur du véhicule tend aux mêmes fins que les demandes formées au titre de la réparation du véhicule dès lors qu’il s’agit dans les deux cas d’indemniser les frais et pertes subies par la société bailleresse du fait de la dégradation du bien donné en location.
Selon la cote argus personnalisée du véhicule , la Société CAR LEASE pouvait espérer revendre le véhicule à un prix de 22 028 € TTC alors qu’elle n’a perçu que la somme de 19 614 € TTC soit une perte de 2414 €. Cependant elle ne justifie pas de ses sources d’information en sorte qu’il y a lieu de rejeter sa demande après avoir constaté que le cours argus moyen hors options s’établit selon elle à 19 500 € et que la perte de valeur alléguée n’est pas significative.
Sur les autres demandes
Compte tenu de l’évolution du litige à hauteur d’appel, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais qu’elles ont exposés pour assurer leur représentation en justice devant la cour.
Par contre la partie qui succombe doit supporter les frais de l’instance.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant après en avoir délibéré,
Infirme partiellement le jugement du tribunal de commerce de Toulouse en date du 8 juin 2021 en ce qu’il a condamné la SARL ACCESS INNOVATION SERVICES à payer à la société BPCE CAR LEASE la somme de 6150 € au titre des frais de réparation du véhicule avec intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2020 et débouté la société BPCE CAR LEASE de sa demande au titre des frais de gardiennage,
Et statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,
Déboute la société ACCESS INNOVATION SERVICES de sa demande de résiliation du contrat aux torts de la société BPCE CAR LEASE,
Dit que la résiliation du contrat est intervenue à la demande expresse du locataire et est régie par l’article 3.1.2 des conditions générales du contrat,
Donne acte à la société BPCE CAR LEASE qu’elle renonce à la demande formée au titre des frais de réparation du véhicule à hauteur de 6150 €,
Déboute la société ACCESS INNOVATION SERVICES de sa demande tendant à voir déclarer non écrite la clause de résiliation prévue au contrat ,
Rejette la demande de modération de la clause de résiliation formée en application de l’article 1231-5 du code civil,
Condamne la société ACCESS INNOVATION SERVICES à payer à la société BPCE la somme de 4100 € au titre des frais de gardiennage,
Déboute la société BPCE CAR LEASE de sa demande en paiement de la somme de 305,35 euros TTC,
Déclare la société BPCE CAR LEASE recevable en sa demande formée au titre de la dépréciation de valeur du véhicule mais l’en déboute au fond,
Confirme le jugement pour le surplus,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel,
Condamne la société ACCESS INNOVATION SERVICES à supporter les entiers dépens de l’instance.;
Le greffier La présidente
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