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5 juillet 2023
Cour d’appel de Rennes
RG n°
22/06727
5ème Chambre
ARRÊT N°-244
N° RG 22/06727 – N° Portalis DBVL-V-B7G-TI7M
S.A.S.U. HUBSIDE.STORE.NANTES ATLANTIS
C/
S.C.I. FORO
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 05 JUILLET 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,
Assesseur : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,
Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 10 Mai 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 05 Juillet 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
S.A.S.U. HUBSIDE.STORE.NANTES ATLANTIS représentée par ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Clémence ARNAUD de la SELARL AKLEA, Plaidant, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
S.C.I. FORO
CENTRE COMMERCIAL ATLANTIS
[Localité 3]
Représentée par Me Yann MICHEL de la SELARL ASEVEN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
Représentée par Me Emmanuelle BLOND, Postulant, avocat au barreau de NANTES
Par acte des 15 juillet et 26 août 2021, puis avenant du 11 avril 2022, la société Foro a loué à la société Hubside Store Nantes Atlantis un local à usage commercial lui appartenant, situé centre commercial ‘la galerie d’Atlantis’ à [Localité 3].
La locataire ne payant pas régulièrement les loyers échus, la société Foro lui a fait délivrer le 7 juillet 2022 un commandement d’avoir à payer la somme de 119 305,93 euros.
Faisant valoir que le commandement est demeuré infructueux et invoquant les dispositions de la clause résolutoire insérée dans le bail, la société Faro a fait assigner la société Hubside Store Nantes Atlantis par acte du 15 septembre 2022 devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Nantes.
Par ordonnance en date du 20 octobre 2022, le juge a :
– constaté la résiliation du bail signé les 15 juillet et 26 août 2021 avec toutes conséquences de droit et notamment, ordonné l’expulsion de la société Hubside Store Nantes Atlantis et de tous occupants de son chef et sans délai, ce, au besoin avec l’assistance de la force publique ;
– condamné la société Hubside Store Nantes Atlantis par provision à régler à la société Foro la somme de 85 600,80 euros au titre des loyers dus au 18 juillet 2022, outre le règlement, à compter de cette date, à titre d’indemnité d’occupation et jusqu’à la parfaite libération des lieux, de la somme de
15 000 euros par mois ;
– rejeté les autres prétentions ;
– condamné la société Hubside Store Nantes Atlantis au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’en tous les dépens qui comprendront le coût du commandement du 7 juillet 2022.
Le 21 novembre 2022, la société Hubside Store Nantes Atlantis a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 6 avril 2023, elle demande à la cour de :
– la recevoir en son appel, le dire bien fondé et y faisant droit,
– déclarer irrecevable, comme nouvelle, ou à tout le moins infondée, la demande de la société Foro tendant à sa condamnation au paiement de la somme provisionnelle de 33 705,13 euros, l’en débouter en tout état de cause ;
– confirmer l’ordonnance en ce qu’elle :
* rejette les autres prétentions,
– infirmer et au besoin réformer l’ordonnance en ce qu’elle :
* constate la résiliation du bail signé les 15 juillet et 26 août 2021 avec toutes conséquences de droit notamment ordonne l’expulsion de la société Hubside Store Nantes et de tous occupants de son chef et sans délai, ce, au besoin avec l’assistance de la force publique,
* la condamne par provision à régler à la société Foro la somme de
85 600,80 euros au titre des loyers dus au 18 juillet 2022 outre le règlement à compter de cette date à titre d’indemnité d’occupation et jusqu’à la parfaite libération des lieux la somme de 15 000 euros par mois,
* la condamne au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’en tous les dépens qui comprendront le coût du commandement du 7 juillet 2022.
Et statuant de nouveau :
À titre liminaire, sur la réformation de l’ordonnance, le juge des référés ayant statué extra petita,
– juger qu’en première instance, la SCI Foro n’a formulé aucune demande à son encontre au sein du dispositif de son assignation, ses demandes étant dirigées à l’encontre de la société Hubside Store,
– juger qu’en condamnant la société Hubside Store Nantes Atlantis au profit de la société Foro alors qu’aucune demande n’était formulée contre elle, l’ordonnance dont appel a statué extra petita,
En conséquence :
– juger irrecevable et en toute hypothèse mal fondée l’intégralité des demandes, fins et conclusions de la société Foro, l’en débouter.
À titre principal, sur le rejet des demandes de la société Foro :
– juger que le commandement de payer visant la clause résolutoire signifié à la société Hubside Store Nantes Atlantis le 7 juillet 2022 est nul,
– juger que la clause résolutoire du bail commercial n’est en conséquence pas acquise et que l’expulsion ne peut être ordonnée,
– juger que les demandes tendant à sa condamnation au paiement des sommes provisionnelles de 85 600,80 euros au titre de l’ensemble des loyers et charges, formulées par la société Foro se heurtent à des contestations sérieuses quant à leur principe et leur quantum,
– juger que les demandes de fixation de l’indemnité d’occupation au montant du loyer global de la dernière année de location majorée de 50% constitue une clause pénale constitutive d’un déséquilibre significatif et devant être réputée non écrite à ce titre ou, à tout le moins être modérée, ce qui ne relève pas des pouvoirs du juge des référés,
– juger que la demande d’application des intérêts de retard contractuels se heurtent à des contestations sérieuses quant à leur principe et leur quantum,
– juger que les conditions de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile ne sont pas remplies,
En conséquence :
– dire n’y avoir lieu à référé,
– juger irrecevable et en toute hypothèse mal fondées l’intégralité des demandes, fins et conclusions de la société Foro, l’en débouter.
À titre subsidiaire, sur l’octroi de délais de paiement et suspension de la réalisation et des effets de la clause résolutoire :
À titre principal :
– lui octroyer à titre rétroactif des délais de paiement sur un échéancier de douze mois,
– juger que l’arriéré a été apuré dans les délais et qu’elle est à jour de ses règlements,
– juger que la clause résolutoire n’est pas acquise,
– rejeter l’intégralité des demandes, fins et conclusions de la société Foro, l’en débouter.
À titre subsidiaire :
– ordonner la mise en place d’un échéancier de paiement au titre du paiement la dette locative actualisée de la société Foro sur douze mois, selon échéancier fixé par la cour,
– ordonner la suspension de la réalisation et des effets de la clause résolutoire,
– juger que la clause résolutoire ne joue pas et est réputée n’avoir produit aucun effet, dès lors qu’elle s’acquitte de la dette locative actualisée de la société Foro conformément à l’échéancier établi par la cour,
– rejeter l’intégralité des demandes, fins et conclusions de la société Foro, l’en débouter,
En tout état de cause,
– condamner la société Foro au paiement d’une somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à son profit,
– condamner la société Foro aux entiers dépens de première instance et d’appel avec distraction au profit de l’avocat soussigné aux offres de droit,
– rejeter l’intégralité des demandes, fins et conclusions de la société Foro, l’en débouter.
Par dernières conclusions notifiées le 4 avril 2023, la société Foro demande à la cour de :
– confirmer l’ordonnance rendue le 20 octobre 2022, sauf en ce qu’elle a fixé le point de départ de l’indemnité d’occupation à la date du 18 juillet 2022,
Statuant à nouveau, et y ajoutant,
– condamner la société Hubside Store Nantes Atlantis au paiement de la somme provisionnelle résiduelle de 33 705,13 euros TTC au titre des arriérés locatifs,
– juger que l’indemnité d’occupation fixée à la somme de 15 000 euros est due par la société Hubside Store Nantes Atlantis à compter du 7 août 2022,
En conséquence,
– débouter la société Hubside Store Nantes Atlantis de l’ensemble de ses
demandes, fins et prétentions,
En toute hypothèse,
– condamner la société Hubside Store Nantes Atlantis à lui payer la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Hubside Store Nantes Atlantis aux entiers dépens, en ce compris l’ensemble des frais exposés dans le cadre du commandement de payer visant la clause résolutoire du 7 juillet 2022 distraits au profit de Maître Emmanuelle Blond, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 6 avril 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il est fait grief par l’appelante au premier juge d’avoir prononcé une condamation à son encontre alors que les demandes au terme du dispositif de son assignation étaient formulées contre la société Hubside Store.
La SCI Foro objecte que le juge n’a fait que restituer la dénomination complète de la société preneuse et qu’un tel moyen doit être écarté.
Selon l’extrait Kbis versée aux débats, la société Hubside Store Nantes Atlantis est immatriculée n° 897 427 951 RCS Romans.
Le bail initial des 15 juillet 2021 et 26 août mentionne en qualité de preneur une société Hubside Store 71. Par acte du 4 novembre 2022 par la SCI Foro, la société Hubside Store 71 et la société Hubside Store Nantes Atlantis immatriculée n° 897 427 951 RCS Romans, les parties ont convenu que la société Hubside Store Nantes Atlantis se substituait au preneur d’origine.
La SCI Foro a délivré :
– le 7 juillet 2022, un commandement de payer à la société Hubside Store Nantes Atlantis immatriculée n° 897 427 951 RCS Romans,
– le 15 septembre 2022, une assignation en référé de la société Hubside Nantes Atlantis immatriculéee n° 897 427 951 RCS Romans.
Si au terme du dispositif de l’assignation, les demandes de la SCI Foro sont formées contre ‘la société Hubside Store’, celles-ci le sont au visa du bail commercial liant les parties et du commandement précité, de sorte que le premier juge a, dans le cadre de son pouvoir de préciser la dénomination complète de la partie défenderesse, et ce, sans méconnaître les dispositions des articles 4 et 5 du code de procédure civile, considéré qu’elles étaient formées contre la société Hubside Store Nantes Atlantis et non contre une autre société non en la cause.
Cet argument peu sérieux est écarté et la cour rejette la demande tendant à une infirmation de l’ordonnance au motif que le juge aurait statué extra-petita.
– sur la résiliation du bail
La société Hubside Store Nantes Atlantis considère que plusieurs contestations sérieuses font obstacle au pouvoir juridictionnel du juge des référés, en l’espèce :
– le commandement de payer est irrégulier car il ne répond pas aux exigences formelles, en ce qu’ il ne mentionne pas clairement le délai d’un mois octroyé au débiteur pour s’exécuter, et ne comporte pas de décompte précis et détaillé des sommes commandées,
– l’existence de l’obligation de payer est sérieusement contestable, les causes du commandement ayant été apurées.
Elle soutient ainsi que les pièces annexées au commandement, ne lui permettent pas de connaître précisement la nature du principal réclamé, l’échéance relative à ce montant, la période visée par la prétendue créance et le bien fondé du quantum exigé, que les décomptes transmis entraînent dans son esprit une grande confusion, d’autant qu’ils sont illisibles. Elle fait valoir en outre que le commandement ne fait pas état des paiements effectués par le preneur.
La SCI Foro estime que ces contestations ne sont pas sérieuses. Elle relève que le délai d’un mois invoqué est expressément mentionné dans le commandement, que les sommes réclamées sont justifiées par des extraits de compte joints au commandement, que les paiements effectués par la société preneuse ont été pris en considération et laissent apparaître un solde en sa faveur à la date du commandement. Enfin, elle ajoute que les causes du commandement, contrairement à ce qui est soutenu, n’ont pas été réglées et qu’ainsi ses demandes sont parfaitement fondées.
Elle précise que la somme commandée le 7 juillet 2022 prend parfaitement en compte le paiement par la société Hubside Store Nantes Atlantis intervenu le 20 juin 2022 de 47 832,49 euros, puisque sans ce paiement la somme due aurait été de 167 138,42 euros TTC.
Elle fait valoir en tout état de cause, qu’un commandement délivré pour une somme supérieure au montant réel de la dette demeure valable à concurrence de ce montant.
Selon l’article L 145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans un contrat de bail commercial prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux ; le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
Il ressort de l’article 834 du code de procédure civile que dans les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l’un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n’apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite.
* sur le commandement
En l’espèce, si page 4 du commandement litigieux, il est indiqué qu’il est ‘fait commandement à la société Hubside Store Nantes Atlantis de payer immédiatement et à l’ordre de l’huissier poursuivant la somme de 119 305,93 euros TTC, sans préjudice des termes à échoir et de tous autres dus, droits, intérêts et frais de mise à exécution’, cette mention est immédiatement suivie des termes suivants, indiqués dans un encadré, en caractère gras, après une mention en majuscule ‘TRES IMPORTANT’:
‘Je vous déclare également que, passé le délai d’UN MOIS prévu par l’article L145-41 du code de commerce, la partie requérante entendra se prévaloir si bon lui semble du bénéfice de la clause résolutoire insérée dans votre bail commercial reprise ci-dessous.’
Aucune ambiguïté telle qu’alléguée, quant au délai laissé au preneur pour s’exécuter sous peine d’engagement d’une procédure aux fins de résiliation du bail ne peut être déduite de ces mentions. La société preneuse soutient de mauvaise foi qu’il ‘s’est crée dans son esprit une confusion sur ce point l’empêchant de prendre la mesure exacte des injonctions qui lui étaient faites et d’y apporter la réponse appropriée dans le délai requis’.
Cette contestation n’apparaît pas sérieuse et est écartée.
* sur les décomptes joints au commandement
Le commandement de payer la somme de 119 305,93 euros TTC fait état tout d’abord de deux factures non réglées :
– facture n° 1387 du 1er janvier 2022 de 42 841,20 euros,
– facture n° 1429 du 1er avril 2022 de 42 759,60 euros,
soit un total de 85 600,80 euros TTC au titre des loyers, charges et taxes foncières.
Il fait référence également aux factures suivantes:
– facture DG -311221-01 du 31 décembre 2021 de 31 250 euros,
– facture CP -311121-02 du 31 décembre 2021 de 2 455,13 euros,
soit un total de 33 705,13 euros TTC au titre du dépôt de garantie et de charges particulières.
Sont annexées à cet acte onze pièces dont les factures précitées et plusieurs extraits de compte.
La facture n° 1387 de 42 841,20 euros est détaillée comme suit :
– loyer garanti période 01/01/2022 au 31/03/22 : 31 250 euros
– provision pour charges communes (20%), même période: 2 840 euros
– provision pour charges communes clim (20%) même période : 278 euros
– provision pour travaux(20%) même période : 121 euros
– provision taxe foncière (20%) même période : 1 212 euros.
La facture n° 1429 de 42 759,60 euros est détaillée comme suit:
– loyer garanti période 01/04/2022 au 30/06/22 : 31 250 euros
– provision pour charges communes (20%), même période: 2 840 euros
– provision pour charges communes clim (20%) même période : 278 euros
– provision pour travaux(20%) même période : 121 euros
– provision taxe foncière (20%) même période : 1 212 euros
– reprise provision pour charges(20%) 20/09/21 au 31/12/21 : – 3 107 euros
– reprise provision pour clim (20%) 20/09/21 au 31/12/21 : – 306 euros
– reprise provision pour travaux(20%) 20/09/21 au 31/12/21 : – 132 euros
– charges communes réelles (20%) 20/09/21 au 31/12/21 : 2 879 euros
– charges communes clim réelles (20%) 20/09/21 au 31/12/21 : 268 euros
– travaux réalisés 20% 20/09/21 au 31/12/21 : 275 euros
– charges privatives-maint SSI 20% 20/09/21 au 31/12/21 : 55 euros.
La facture de 2 455,13 euros mentionne ‘charges particulières (cf bail)’.
La facture de 31 250 euros mentionne ‘dépôt de garantie (cf bail)’.
Il n’est pas contesté que les montants réclamés au titre des loyers, des charges, des taxes foncières, du dépôt de garantie sont conformes aux mentions prévues dans le bail liant les parties.
Le premier extrait de compte au 9 juin 2022 concerne une somme due de 133 433,29 euros (facture n° 1345 de 47 832,49 euros, facture n° 1387 de 42 841,20 euros, facture n° 1429 de 42 759,60 euros). Le second extrait de compte au 10 juin 2022 concerne la somme de 33 705,13 euros (facture de 2 555,13 euros et facture de 31 250 euros).
Le paiement de 47 832,49 euros effectué le 20 juin 2022 par la société Hubside Store Nantes Atlantis correspond donc à une des échéances mentionnées sur la facture n° 1345, laquelle n’est pas visée dans le commandement. Ce paiement n’a donc pas à figurer sur le commandement de payer.
Au vu de ces éléments, la créance commandée le 7 juillet 2022 est parfaitement justifiée et détaillée par des décomptes précis. La société Hubside Store Nantes Atlantis soutient à tort que tel n’est pas le cas. Elle n’est pas fondée non plus à prétendre que ces décomptes ont de manière erronée omis d’imputer ses paiements, à défaut pour elle de justifier au 7 juillet 2022 d’un paiement autre que celui du 20 juin 2022 totalement affecté à une créance distincte non réclamée dans le commandement.
La cour rejette donc la contestation non sérieuse tirée d’une non-justification de la créance commandée par un décompte précis et détaillé.
* sur l’apurement de la somme commandée
Il est admis par les parties que la société Hubside Store Nantes Atlantis a réglé le 18 juillet 2022 une somme de 42 841,20 euros, puis le 7 octobre 2022 une somme de 42 759,60 euros.
Il s’en découle qu’à la date du 7 août 2022, un mois après la délivrance du commandement, la société preneuse restait devoir sur la somme commandée une somme de 76 464,73 euros (119 305,93 – 42 841,20 euros ).
Aucune contestation sérieuse n’est donc opposée au constat de la résiliation du bail par le jeu de la clause résolutoire tel que décidé par le juge des référés, les causes du commandement n’ayant pas été acquittées dans le délai d’un mois.
La demande de nullité du commandement est rejetée.
La cour confirme en conséquence l’ordonnance qui constate la résiliation du bail par le jeu de la clause résolutoire, les conditions d’acquisition de celle-ci étant réunies.
– sur la demande de suspension des effets de la clause résolutoire
Au soutien de cette demande, la société Hubside Store Nantes Atlantis invoque l’impact de l’épidémie de Covid-19 et de la crise économique sur son activité, avec notamment une baisse de fréquentation des centres commerciaux, source de tension de trésorerie. Elle déclare que le local a été livré le 20 septembre 2021 lorsque les mesures sanitaires étaient encore en place (dont le pass sanitaire).
La bailleresse rappelle que les boutiques du centre commercial hébergeant la société preneuse ont été fermées en raison de la crise sanitaire à différentes périodes en 2020 puis du 19 mars au 19 mai 2021, soit avant la livraison du local intervenue effectivement en septembre 2021. De même, elle observe que le pass sanitaire a été levé pour l’ensemble des centres commerciaux du département de la Loire-Atlantique à l’instar d’Atlantis, le 11 août 2021, soit plusieurs semaines avant que le preneur ne prenne possession du local, de sorte que la crise sanitaire est avancée de mauvaise foi pour expliquer sa carence. Elle souligne encore que le preneur n’a jamais formulé d’offre de paiement, et s’est arbitrairement et unilatéralement octroyé des délais de paiement en ne réglant pas pendant plusieurs mois ses arriérés locatifs, ignorant mises en demeure et acte d’huissier. Elle demande à la cour de rejeter une telle prétention.
En vertu des dispositions de l’article L145-41 alinéa 2 du code civil, les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.
Les développements précédents établissent les retards répétés de paiement par la société preneuse. Cette dernière ne justifie par aucune pièce comptable les difficultés financières qu’elle invoque. Le seul argument, tenant à la crise sanitaire, pour prétendre subir une baisse d’activité et une tension de trésorerie est vainement avancé alors que la société preneuse a pris possession du local loué après les périodes de fermeture des commerces et levée du pass sanitaire (cf arrêté du 11 août 2021 du Préfet de Loire-Atlantique).
Elle ne démontre nullement être un débiteur malheureux et de bonne foi et la cour rejette sa demande tendant à une suspension des effets de la clause résolutoire.
La cour confirme l’ordonnance en ce qu’elle ordonne l’expulsion de la société Hubside Store Nantes Atlantis et celle de tous occupants de son chef, sans délai, avec au besoin, l’assistance de la force publique.
– sur l’indemnité d’occupation
Les parties conviennent que le juge des référés ne pouvait condamner la société preneuse au paiement d’une indemnité d’occupation à compter du 18 juillet 2022, la résiliation du bail étant acquise un mois après la délivrance du commandement soit le 7 août 2022.
S’agissant du montant de cette indemnité (fixée à 15 000 euros par mois par le premier juge), la société appelante considère que le juge des référés a fait application de la clause prévoyant que l’indemnité d’occupation est égale au loyer majoré de 50%, que cette clause constitue une clause pénale, et que figurant dans un contrat d’adhésion, et donc non négocié par le preneur, son application nécessite d’apprécier le déséquilibre significatif qui en découle, pouvoir appartenant au seul juge du fond. Elle demande donc d’infirmer la décision qui fixe l’indemnité d’occupation à compter du 18 juillet 2022 au montant du dernier loyer majoré de 50%.
La SCI Foro estime que le juge des référés n’a pas fait application de l’article 52 du bail pour fixer le montant de l’indemnité d’occupation, procédant à une estimation forfaitaire sur la base de la moyenne des loyers globaux trimestriels dus pour les 1er, 2ème et 3ème trimestre, soit 42 814 euros TTC, avec prise en compte des charges, taxes et accessoires Elle conclut à la confirmation de la décision.
Le contrat prévoit en son article 52 :
L’indemnité d’occupation à la charge du Preneur en cas de non-
délaissement des locaux après la date d’effet de résiliation de plein droit, judiciaire ou conventionnelle, sera établie forfaitairement sur la base du loyer global de la dernière année de location, majorée de 50%, sans préjudice du droit du Bailleur à l’indemnisation complémentaire sur justification du préjudice effectivement subi, notamment du fait de la durée nécessaire à la relocation.
Une telle clause qui prévoit le paiement d’un loyer majoré de 50% à titre d’indemnité d’occupation, constitue une clause pénale.
S’il n’entre pas dans les pouvoirs du juge des référés de modérer une clause pénale ou d’interpréter une clause contractuelle, il peut néanmoins accorder une provision à valoir sur le montant d’une indemnité d’occupation, destinée à compenser une occupation sans droit ni titre.
Il n’appartient pas au juge de référés de se prononcer sur la qualification du contrat liant les parties, et notamment de préciser s’il s’agit d’un contrat d’adhésion ou non, une telle analyse nécessitant un examen des termes de la convention, qui relève de la seule compétence du juge du fond.
La cour retient l’existence d’une contestation sérieuse s’opposant à l’application pure et simple de la clause précitée.
La dernière échéance de juillet 2022 est de 42 841,80 euros, en ce compris les loyers et les charges et taxes. Il convient, par infirmation du jugement, d’allouer au bailleur par provision à valoir sur l’indemnité d’occupation, une somme de 14 400 euros par mois à ce titre.
La décision sur ce point est donc infirmée ; cette indemnité mensuelle de
14 400 euros sera due du 7 août 2022 jusqu’à complète libération des lieux, avec remise des clés.
– sur la dette locative
En application de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution d’une obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
S’agissant de la créance restant due, il convient d’imputer le règlement du mois d’octobre 2022 (42 759,60 euros) ; la somme due au titre des sommes commandées est donc de 33 705,13 euros. La cour constate qu’en réclamant ce montant, dont elle indique qu’il est toujours impayé à la date du 10 mars 2023, la SCI Foro ne formule pas, contrairement à ce qui est soutenu par l’appelante, une demande en paiement nouvelle, mais sollicite uniquement le solde de sa créance sur la dette locative commandée.
La société Hubside Store Nantes Atlantis fait état d’autres versements, à savoir le 8 décembre 2022 de 86 066,99 euros et le 2 février 2023 de 47 372 euros et considère être à jour de sa dette locative, inclus le premier trimestre 2023 et reproche au bailleur de ne pas en tenir compte.
Il est rappelé que la dette locative commandée le 7 juillet 2022 comprend les loyers et charges arrêtés au 30 juin 2022 outre les charges particulières et le montant du dépôt de garantie.
Les paiements invoqués de décembre 2022 de 86 066,99 euros (42 841,20 et 43 225,79 euros), correspondent précisément aux montants des factures suivantes émises par le bailleur :
– facture du 1er juillet 2022 n° 1472 de 42 841,20 euros,
– facture du 1er octobre 2022 n° 1514 de 43 225,79 euros.
Si l’appelante indique avoir réglé le premier trimestre 2023, seul un document mentionnant un paiement en cours est versé aux débats, ce qui ne peut valoir preuve de paiement effectif.
La société Hubside Store Nantes Atlantis ne démontre donc pas sa libération au titre des arriérés locatifs.
La cour infirme l’ordonnance en ce qu’elle condamne la société Hubside Store Nantes au paiement d’une provision de 85 600, 80 euros et prononcera une condamnation à provision de 33 705,13 euros à valoir sur la dette locative.
– sur la demande de délai de paiement
En l’absence de bonne foi, aucun délai de paiement ne sera accordé à la société appelante, toujours débitrice au titre d’un commandement délivré il y a bientôt un an.
– sur les frais irrépétibles et les dépens
La cour confirme l’ordonnance en ses dispositions et condamne la société Hubside Store Nantes Atlantis à payer à la SCI Foro une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens d’appel, distraits au profit de Me Emmanuelle Blond, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe :
Confirme l’ordonnance déférée sauf en ce qu’elle condamne la société Hubside Store Nantes Atlantis au paiement à la SCI Foro d’une somme de 85 600,80 euros à titre de provision au titre des loyers dus au 18 juillet 2022 outre le règlement, à compter de cette date, à titre d’indemnité d’occupation et jusqu’à la parfaite libération des lieux, de la somme de 15 000 euros par mois ;
Statuant à nouveau sur les chefs de jugement infirmés,
Fixe l’indemnité mensuelle d’occupation due par la société Hubside Store Nantes Atlantis à la SCI Foro à compter du 7 août 2022 jusqu’à complète libération des lieux, avec remise des clés, à la somme de 14 400 euros ;
Condamne la société Hubside Store Nantes Atlantis au paiement à la SCI Foro d’une somme de 33 705,15 euros à titre de provision au titre des arriérés locatifs dus au jour du commandement ;
Y ajoutant,
Déboute la société Hubside Store Nantes Atlantis de ses demandes ;
Condamne la société Hubside Store Nantes Atlantis à payer à la SCI Foro la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Hubside Store Nantes Atlantis aux dépens d’appel, distraits au profit de Me Emmanuelle Blond, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier La Présidente