CIV. 1
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 7 novembre 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10663 F
Pourvoi n° W 17-27.158
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ Mme X… Y…, domiciliée […] ,
2°/ M. Bruno Z…, domicilié […] ,
contre l’arrêt rendu le 14 septembre 2017 par la cour d’appel de Montpellier (1re chambre A), dans le litige les opposant à M. Jean-Claude A…, domicilié […] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 2 octobre 2018, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme B…, conseiller référendaire rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme Y… et de M. Z…, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. A… ;
Sur le rapport de Mme B…, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y… et M. Z… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à M. A… la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept novembre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme Y… et M. Z…
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir débouté Mme X… Y… et M. Bruno Z… de leur demande de voir dire et juger que le testament olographe du 30 septembre 2010 doit s’analyser en un legs à titre particulier de l’usufruit de la maisonnette sise […] au profit de M. Jean-Claude A…, et d’avoir dit que la volonté du testateur, Mme Ingrid Y… épouse A…, est d’instituer M. Jean-Claude A… légataire à titre universel de l’usufruit de l’ensemble des biens composant la succession et légataire à titre particulier de l’usufruit de sa résidence principale ;
AUX MOTIFS QUE Mme Y… épouse A… est décédée le […] laissant pour lui succéder son époux Jean Claude A…, suivant mariage sous le régime de la séparation des biens en date du 14/05/05 et ses deux enfants issus de deux précédentes unions X… Y… et Bruno Z… ; Le 30/09/10 elle a rédigé un testament olographe par lequel elle déclare « instituer son époux légataire de l’usufruit. Je lui lègue l’usufruit du bien immobilier qui constituera ma résidence principale au moment de mon décès et l’usufruit de l’ensemble des meubles meublants qui la garniront à condition que nous ne soyons ni divorcés, ni en instance de divorce au moment de mon décès. J’entends que le bénéfice de l’usufruit ne se cumule pas avec les droits légaux de mon époux et qu’il ne puisse prétendre à des droits en pleine propriété en renonçant au bénéfice dudit usufruit » ; Au jour du décès l’actif de la succession se compose d’une parcelle […] à Restinclières sur laquelle se trouve une maison et un studio mis à la location ainsi qu’une maisonnette constituant le logement du couple ; trois autres parcelles n° […], […] et […] en nue-propriété ; un appartement en nue-propriété […] , un véhicule et des avoirs bancaires; Le 24/01/13 un projet d’acte notarié est dressé et adressé aux héritiers pour signature par lequel l’intégralité de l’usufruit est accordé à M. A… ; Par ordonnance en date du 30/07/13 un mandataire ad hoc est désigné pour administrer la succession; les consorts Y… ont fait assigner M. A… par acte en date du 3/04/13 ; Les consorts Y… demandent à la cour d’interpréter le testament de leur mère suivant diverses règles et notamment l’interprétation de M. C… ; M. A… indique que le testament emploie des termes clairs et précis : que c’est ainsi que Mme A… l’a institué légataire de l’usufruit à titre universel de la totalité de ses biens et à titre particulier du domicile conjugal et de ses meubles meublants; que le notaire chargé de la liquidation de la succession a parfaitement compris la volonté de la défunte ; Il ajoute que son épouse n’a jamais entendu le priver de ses droits légaux successoraux ; La cour rappellera qu’il résulte des dispositions de l’article 1002 du code civil que les dispositions testamentaires sont ou universelles ou à titre universel ou à titre particulier ; La cour rappellera aussi que l’interprétation des termes d’un testament imprécis relève du pouvoir souverain du juge; qu’aussi l’article 757 du code civil indique que le conjoint survivant peut, en présence d’enfants qui ne sont pas issus de leur union, recueillir la propriété du quart des biens existants que cependant le de cujus peut modifier cette dévolution successorale et choisir que son conjoint survivant recueille, lorsqu’il existe deux enfants issus d’une 1ère union, la totalité de l’usufruit ou 1/4 en pleine propriété et 3/4 en usufruit ; Il est constant que Mme A… a fait application des dispositions de l’article 1094-1 du code civil précité dans le cadre de son testament olographe en date du 30/09/10 ; La cour constate que dans le cas d’espèce Mme A… a indiqué de manière claire et précise qu’elle instituait son époux légataire de l’usufruit, choisissant ainsi l’option qui lui est offerte par l’article 1094-1 du code civil à la fois de modifier la dévolution successorale et d’attribuer à son conjoint survivant la totalité de l’usufruit; La cour dira que cette mention faite au début de son testament n’est pas de nature à limiter les droits de M. A… ; La cour se doit cependant de rechercher si la mention, selon laquelle : « Je lui lègue l’usufruit du bien immobilier qui constituera ma résidence principale au moment de mon décès et l’usufruit de l’ensemble des meubles meublants qui la garniront à condition que nous ne soyons ni divorcés, ni en instance de divorce au moment de mon décès » est de nature elle à limiter les droits de M. A… en lui accordant seulement un legs particulier consistant en l’attribution du domicile conjugal ; La cour dira comme l’a exactement retenu le 1er juge que dans la réalité Mme A… a entendu préserver l’intégralité de son patrimoine et cela en faveur de ses enfants en empêchant son époux, en cas d’attribution de biens en pleine propriété d’en disposer librement ; que Mme A… a seulement voulu préciser la portée de son attribution de l’intégralité de l’usufruit à son époux à lui accordant à titre particulier l’usufruit du bien immobilier constituant la résidence principale du couple au jour du décès de Mme A… ; En conséquence la cour reprenant pour le surplus la motivation du 1er juge confirmera la décision entreprise en toutes ses dispositions ;
1°- ALORS QUE le juge a l’obligation de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis ; qu’il résulte des stipulations du testament litigieux, qu’après avoir identifié son époux et précisé sa qualité de « légataire de l’usufruit », Mme A… a expressément précisé l’étendue de ce legs en indiquant que l’usufruit avait pour objet le bien immobilier qui constitue sa résidence principale et les meubles meublant qui le garnissent à l’exclusion par conséquent des autres biens ; qu’en décidant que Mme A… aurait seulement voulu préciser la portée de son attribution de l’intégralité de l’usufruit à son époux à lui accordant à titre particulier l’usufruit du bien immobilier constituant la résidence principale du couple au jour du décès de Mme A…, et que le testament aurait ainsi pour objet le legs de l’usufruit de la totalité des biens de cette dernière, la Cour d’appel en a dénaturé les termes clairs et précis en violation du principe susvisé ;
2°- ALORS QUE le juge a l’obligation de ne pas dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; qu’il résulte du testament litigieux que : « en révoquant tous testaments antérieurs, institue pour mon époux : Jean-Claude A…, prothésiste dentaire, né le […] , à […] , légataire de l’usufruit Je lui lègue l’usufruit du bien immobilier
» ; qu’ainsi les termes « légataire de l’usufruit » font partie des éléments d’identification de l’époux annoncés par les deux points et seul le paragraphe suivant a pour objet la définition de l’étendue du legs ; qu’en énonçant que Mme A… aurait « rédigé un testament olographe par lequel elle déclare « instituer son époux légataire de l’usufruit », la Cour d’appel n’a pas restitué le texte du testament tel qu’il est rédigé et partant a violé le principe susvisé ;
3°- ALORS QUE les dispositions testamentaires sont ou universelles, ou à titre universel, ou à titre particulier ; qu’un légataire particulier de l’usufruit d’un bien ne peut sauf volonté contraire non équivoque du testateur avoir vocation à recueillir l’intégralité de l’usufruit de la succession ; qu’en se fondant pour dire que le testament de Mme A… comporterait au profit de M. A…, à la fois le legs de l’usufruit d’un bien immobilier déterminé et des meubles meublants qui le garnissent et le legs de l’universalité de l’usufruit des biens de la succession, sur une interprétation de la volonté de la testatrice, la Cour d’appel a violé l’article 1002 du code civil.