Prothésiste dentaire : 14 mars 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 18/03941

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Prothésiste dentaire : 14 mars 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 18/03941

ARRÊT N°

N° RG 18/03941 – N° Portalis DBVH-V-B7C-HEUX

MS/EB

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES

15 octobre 2018

RG :F 17/00264

[D]

C/

[C]

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 14 MARS 2023

APPELANTE :

Madame [Z] [D]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Céline ROUSSEAU de la SELARL ALTEO, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMÉ :

Monsieur [L] [C]

né le 29 Janvier 1978 à [Localité 8]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représenté par Me Olivier GOUJON de la SCP GMC AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES

Madame [P] [D] en sa qualité de représentante légale de la persone et des biens de Madame [V] [I]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

non comparante, non représentée

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 21 Décembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

M. Michel SORIANO, Conseiller, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Leila REMILI, Conseillère

M. Michel SORIANO, Conseiller

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 05 Janvier 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 14 Mars 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 14 Mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

M. [L] [C] a été engagé du 05 juillet 2010 au 31 août 2010 suivant contrat de travail à durée déterminée en remplacement d’un salarié absent, en qualité de chauffeur livreur, par feu [Z] [D], décédée le 04 juin 2021.

Selon avenant du 1er septembre 2010, la relation contractuelle était pérennisée.

Par courrier du 26 septembre 2016, M. [C] était convoqué à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement, fixé le 5 octobre 2016 et se voyait confirmer sa mise à pied à titre conservatoire à compter du 19 septembre 2016.

Par courrier du 27 octobre 2016, M. [C] était licencié pour faute grave dans les termes suivants : « Nous avons eu à déplorer de votre part des agissements ayant entraîné une mise à pied à titre conservatoire.

En effet, lors de vote tournée prévue dans la nuit du 16 au 17/09/16 vous n’avez pas livré un de nos principal client la société VALPRODENT (située [Adresse 2]). Ici il s’agit d’une livraison d’une dizaine de colis particulièrement sensibles puisque ce sont des empreintes dentaires et des prothèses, ce dont vous étiez parfaitement informé.

Suite à cette non livraison qui devait être faite avant 5 heures le matin du 17/09/16, M. [F] gérant de la Société VALPRODENT (un de nos principaux clients) m’a contacté directement par téléphone le matin même vers 10 h30 pour me demander des explications car ce manquement entraînait pour son entreprise de lourdes conséquences.

A partir de ce moment, je n’ai eu de cesse de vous téléphoner et de vous envoyer des SMS pour savoir quel souci vous aviez eu, afin de pouvoir me justifier auprès de M. [F]. Vous n’avez daigné me répondre par SMS que vers 12h45 avec comme seule explication « je suis chez le médecin » et que vous preniez, de votre propre chef, la décision de remettre les colis à 15h à la société VALPRODENT.

Nous vous rappelons que contractuellement vous avez l’obligation d’informer la société en cas de difficulté à réaliser vos missions.

Dans un second temps, vous vous êtes rendu à ladite société pour livrer le colis vers 15h40 où M. [F] vous attendait.

M. [F] se plaint de votre comportement intolérable où non seulement vous n’avez pas su vous excuser mais où en plus, vous vous êtes permis de dénigrer avec véhémence la société DIABOLO COURSES et nous-mêmes. M. [F] m’a précisé qu’un comportement aussi peu respectueux de votre part pouvait remettre en cause l’intégralité de nos contrats avec sa société.

Vous comprendrez aisément que votre manque de sérieux dans l’accomplissement de vos missions, le non-respect des consignes établies pour ne pas léser les clients et qui plus est, la mise en danger de la société par vos dénigrements auprès de la clientèle, ont largement justifié une mise à pied conservatoire (prévue par l’article L. 1331-1 et 2 du code du travail), en attendant la conclusion de notre enquête.

Lors de l’entretien préalable auquel vous étiez convoqué le 05/10/2016 assisté de M. [J] délégué CFDT, vous n’avez pas nié les faits qui vous étaient reprochés ni n’avez pu vous justifier.

Semblant qui plus est de ne pas comprendre la gravité de vos agissements. De plus et suite aux investigations préliminaires que nous avons menés à votre sujet dans le cadre d’un licenciement pour faute grave nous avons eu la désagréable surprise d’apprendre avec certitude que vous, M. [C] aviez démarché un de nos clients pour lui proposer vos services au noir avec notre véhicule, notre essence et ce pendant votre temps de travail.

Pour ces motifs :

– non-respect des consignes contractuelles en cas d’impossibilité de livrer les clients en temps et en heure,

– dénigrements de l’entreprise et du chef d’entreprise auprès d’un client important au risque de mettre la société en péril,

– tentative auprès d’un autre client d’obtenir des missions pour votre propre compte, missions que vous envisagiez de réaliser pendant votre temps de travail et avec le matériel de l’entreprise,

Nous vous signifions votre licenciement pour faute grave. (‘) »

Contestant la légitimité de la mesure prise à son encontre, le 19 avril 2017, M. [C] saisissait le conseil de prud’hommes de Nîmes en paiement d’indemnités de rupture et de diverses sommes lequel, par jugement contradictoire du 15 octobre 2018, a :

– dit que le licenciement de M. [L] [C] est un licenciement pour cause réelle et sérieuse

– condamné ‘Mme [Z] [D]’ à payer à M. [L] [C] les sommes suivantes :

* 2 482,17 euros bruts à titre de rappels de salaire sur mise à pied de septembre octobre

2016

* 1 277,78 euros bruts à titre d’indemnité de licenciement

* 4 259,28 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

* 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– débouté ‘Mme [Z] [D]’ de l’ensemble de ses demandes ;

– mis les dépens à la charge de ‘Mme [Z] [D]’.

Par acte du 05 novembre 2018, feu [Z] [D] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 2 avril 2019, Mme [P] [D], en sa qualité de représentante légale de Mlle [V] [D] et de M. [T] [D], eux même en leur qualité d’ayants droit de feu [Z] [D], demande à la cour de :

– réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nîmes le 15 octobre 2018,

Et statuant à nouveau

– constater que le licenciement de M. [C] repose sur une faute grave,

– constater qu’il n’existe aucune irrégularité de procédure,

En conséquence

– débouter M. [C] de l’ensemble de ses demandes,

– condamner M. [C] au paiement de la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle soutient que :

– le licenciement pour faute grave de M. [C] est fondé dans la mesure où ce dernier n’a pas respecté les consignes contractuelles en cas d’impossibilité de livraison, a dénigré l’entreprise auprès d’un client et a tenté de mettre en place une concurrence déloyale avec les moyens fournis par l’entreprise. Elle produit des attestations démontrant la réalité de ces griefs.

– il existe des procédures en cas d’impossibilité de livraison, lesquelles n’ont pas été respectées par le salarié.

– les manquements contractuels de M. [C] suffisent à eux seuls à justifier la rupture de la relation contractuelle.

– le salarié ne démontre aucun préjudice justifiant une indemnisation à hauteur de deux mois de rémunération.

En l’état de ses dernières écritures en date du 13 septembre 2022, contenant appel incident, M. [L] [C] demande à la cour de :

– constater qu’aucun des griefs retenus par l’employeur n’est fondé,

et par conséquent,

A titre principal,

– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nîmes du 15 octobre 2018 en ce qu’il a jugé que le licenciement dont il avait fait l’objet reposait sur une cause réelle et sérieuse,

Et par conséquent,

– condamner Mme [P] [D], en sa qualité de représentante légale de Mlle [V] [D] et M. [T] [D], eux-mêmes en leur qualité d’ayants droit de [Z] [D], à lui payer et porter :

* le règlement des salaires correspondants à la période de mise à pied à titre conservatoire du 19 septembre 2016 au 29 octobre 2016 ;

* 1 327,02 nets au titre de l’indemnité de licenciement ;

* 4 865,74 euros bruts au titre de l’indemnité de préavis ainsi que de l’indemnité

compensatrice de congés payés sur préavis ;

* 13 266 euros nets à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;

– assortis du paiement des intérêts légaux sur l’ensemble des condamnations depuis la date de l’acte introductif d’instance et jusqu’à parfait paiement, outre capitalisation en application des dispositions de l’article 1154 du code civil ;

A titre subsidiaire,

– constater qu’aucun des griefs retenus par l’employeur ne justifie la mesure de licenciement pour faute grave dont il a fait l’objet,

et par conséquent,

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nîmes du 15 octobre 2018,

Et par conséquent,

– condamner Mme [P] [D], en sa qualité de représentante légale de Mlle [V] [D] et M. [T] [D], eux-mêmes en leur qualité d’ayants droit de [Z] [D], à lui payer et porter :

* le règlement des salaires correspondants à la période de mise à pied à titre conservatoire du 19 septembre 2016 au 29 octobre 2016 ;

* 1 327,02 nets au titre de l’indemnité de licenciement ;

* la somme de 4 423,40 euros nets à titre d’indemnisation pour irrégularité de la procédure;

* 4 865,74 euros bruts au titre de l’indemnité de préavis ainsi que de l’indemnité

compensatrice de congés payés sur préavis ;

– assortis du paiement des intérêts légaux sur l’ensemble des condamnations depuis la date de l’acte introductif d’instance et jusqu’à parfait paiement, outre capitalisation en application des dispositions de l’article 1154 du code civil ;

En tout état de cause,

– condamner Mme [P] [D], en sa qualité de représentante légale de Mlle [V] [D] et M. [T] [D], eux-mêmes en leur qualité d’ayants droit de [Z] [D], à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Il fait valoir que :

– son licenciement ne repose sur aucun grief sérieux dans la mesure où :

* il n’a jamais manqué au respect des consignes contractuelles en cas d’impossibilité de livrer les clients puisque cela n’est nullement prévu dans son contrat de travail ; par ailleurs, il avait un motif légitime valable (impossibilité physique) justifiant son impossibilité de livrer le client de son employeur.

* il n’a pas non plus dénigré son employeur auprès de M. [F] mais a simplement expliqué à ce dernier avoir beaucoup de travail cette nuit-là et avoir été malade, raisons pour lesquelles il n’a pu assurer sa mission.

– le grief invoqué par la partie adverse au cours de la procédure à savoir, plusieurs manquements dans l’exécution de ses missions, ne peut être retenu conformément à l’article L1232-6 du code du travail.

– à titre subsidiaire, la cour ne pourra que constater que les griefs qui lui sont reprochés ne sont pas constitutifs d’une faute grave.

– c’est à juste titre que les premiers juges ont retenu que le grief tiré d’une tentative auprès d’un autre client d’obtenir des missions pour son propre compte, ne pouvait fonder son licenciement dans la mesure où il en a eu connaissance postérieurement à l’entretien préalable.

– son licenciement et les reproches formulés à son encontre ont eu des graves répercussions financières sur lui et il n’a toujours pas retrouvé d’emploi.

– il a subi un préjudice en raison d’une irrégularité de forme dans la procédure de licenciement. Il expose que l’employeur n’a pas évoqué, durant l’entretien préalable, le grief tiré d’une tentative auprès d’un autre client d’obtenir des missions pour son propre compte.

– il a été mis à pied à titre conservatoire sans être réglé du paiement de ses salaires.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 10 juin 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 31 août 2022. L’affaire a été fixée à l’audience du 14 septembre 2022, puis renvoyée à l’audience du 5 janvier 2023.

MOTIFS

Sur le licenciement

La faute grave résulte de tout fait ou ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail et des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible son maintien dans l’entreprise et exige son départ immédiat, ce, même pendant la durée du préavis.

Il incombe à l’employeur qui l’invoque d’en rapporter la preuve.

La lettre de licenciement vise trois griefs qu’il convient d’examiner :

– le non-respect des consignes contractuelles en cas d’impossibilité de livrer les clients en temps et en heure’

M. [C] ne conteste pas la non livraison ‘en temps et en heure’ mais se justifie en soutenant qu’il avait un motif légitime valable (impossibilité physique) justifiant son impossibilité de livrer le client de son employeur.

M. [C] a été embauché en qualité de coursier, le contrat comportant la définition de l’emploi suivante :

‘…

Charge sa voiture ; assure l’arrimage et la préservation des marchandises transportées ; est responsable de la garde de son véhicule, de ses agrès et de sa cargaison ; décharge la marchandise à la porte du destinataire. Si l’employeur prescrit la livraison en resserre, en dépôt ou aux étages, le conducteur devra prendre pour la durée de son absence toutes les dispositions possibles en vue de la garde et de la préservation du véhicule, de ses agrès et de sa cargaison ; …’

L’article VIII ‘Absence et indisponibilité’ du contrat de travail prévoit que :

‘ En cas d’absence pour maladie ou accident, Monsieur [C] [L] devra immédiatement en aviser l’employeur et en justifier par la production d’un certificat médical dans les 48 heures.

En cas d’absence prévisible, Monsieur [C] [L] devra solliciter une autorisation préalable.’

M. [C] produit le compte rendu de l’entretien préalable au licenciement, duquel il ressort que le salarié reconnaît ne pas avoir pu ‘faire le dernier client’ car il était malade, ne pas avoir répondu au SMS ou à l’appel de son employeur car il dormait étant très malade et s’étant couché à 5 heures du matin.

Le salarié produit encore un certificat médical du docteur [K], du 8 décembre 2016, ainsi libellé :

‘certifie avoir reçu le 17/09/2016 Mr [C] [L] et lui avoir proposé un arrêt de travail pour le samedi 17/09/2016. Il m’a refusé cet arrêt de travail pour une seule journée me disant que ce n’était pas nécessaire pour une seule journée.’

L’employeur produit de son côté l’attestation de M. [F], client de l’employeur, ainsi libellée :

‘Le samedi 17 septembre Mr [L] [C] a eu un comportement inadmissible.

En effet, non seulement ce monsieur s’est présenté avec un retard de plusieurs heures en livrant les colis sans présenter d’excuses d’une part, et d’autre part s’est permis de dénigrer avec véhémence la société DIABOLO COURSES et sa propre patronne Mme [Z] [D] en me dévoilant des informations qui ne me regardaient pas et avec l’intention très nette de nuire et mettre en difficulté l’entreprise de son employeur.

Face à ce comportement, j’ai eu le fort sentiment d’être pris en otage. Cela m’a fortement déplu ; j’en ai donc avisé immédiatement par téléphone Mme [D], en lui précisant que je n’acceptais pas un tel comportement, que j’avais perdu confiance en son employé et que je remettais en doute notre contrat avec sa société.’

Le retard de livraison est dès lors confirmé, tant dans les propos du salarié que dans ceux du client, M. [F], prothésiste dentaire.

En outre, s’agissant d’une cargaison fragile, à savoir des prothèses dentaires, il appartenait au salarié, non seulement d’alerter son employeur de la difficulté et de son absence, mais également de justifier des mesures prises pour assurer ‘la préservation du véhicule, de ses agrès et de sa cargaison’, conformément à ses obligations contractuelles reprises supra.

En outre, le salarié n’a pas plus répondu aux appels de son employeur ainsi qu’il resulte du compte rendu de l’entretien préalable repris ci-dessus, la seule réponse intervenant à 12h45, alors qu’il n’est pas contesté par les parties que la livraison devait intervenir à 5 heures.

M. [C] ajoute avoir procédé à la livraison litigieuse à 15 heures, en dehors de ses heures de travail, ce qui ne saurait être reproché à l’employeur, s’agissant d’une initiative personnelle du salarié, l’employeur attendant en vain un appel de ce dernier pour pouvoir éventuellement le remplacer et procéder à la livraison chez M. [F].

La faute de M. [C] est dès lors avérée.

– les ‘dénigrements de l’entreprise et du chef d’entreprise auprès d’un client important au risque de mettre la société en péril’

Pour démontrer ce grief, l’employeur produit l’attestation de M. [F] reprise supra, de laquelle il résulte que M. [C] a effectivement dévoilé des informations sur l’entreprise ne concernant aucunement le client.

Pour autant, M. [F] ne donne aucune précision sur la nature de ces informations ni sur les propos pouvant constituer un dénigrement de l’employeur.

M. [C] indique avoir expliqué au client qu’il avait beaucoup de travail cette nuit-là et qu’il avait été malade, raisons pour lesquelles il n’a pu assurer sa mission.

Il ressort du compte rendu de l’entretien préalable que M. [C] :

– s’est excusé auprès de M. [F], ce que ce dernier conteste,

– a expliqué à M. [F] que l’employeur lui donnait ‘de plus en plus de clients à livrer et que cela était très difficile à faire’.

Le contrat de travail en son article X ‘Obligations professionnelles’ prévoit que le salarié doit, notamment, être poli et discret, obligations que le salarié a omis de respecter à l’égard de M. [F], ainsi qu’il résulte du témoignage de ce dernier ; ce client étant à même de mettre ‘en doute’ le contrat le liant à l’employeur eu égard à l’attitude de M. [C].

La faute de M. [C] est dès lors avérée.

– la ‘tentative auprès d’un autre client d’obtenir des missions pour votre propre compte, missions que vous envisagiez de réaliser pendant votre temps de travail et avec le matériel de l’entreprise’

M. [C] soutient que ce grief n’a pas été évoqué lors de l’entretien préalable, ce qui est confirmé par le compte rendu établi par M. [Y] [W], ayant assisté le salarié.

La preuve étant libre en matière prud’homale, la Cour de cassation considère que rien ne s’oppose à ce que le juge prud’homal retienne une attestation établie par le conseiller du salarié qui l’a assisté pendant l’entretien préalable et en apprécie librement la valeur et la portée.

Pour autant, les griefs énoncés dans la lettre de licenciement doivent être examinés par le juge même s’ils n’ont pas été évoqués lors de l’entretien préalable ; dans ce dernier cas, le juge peut néanmoins tenir compte de ces griefs pour donner au licenciement une cause réelle et sérieuse ; mais il s’agit d’une irrégularité de forme.

Dès lors, pour démontrer ce grief, l’employeur produit les éléments suivants :

– une attestation du 28 octobre 2016 établie par M. [R] [N], ex employé de la société Occi’dent, qui indique, ‘à l’époque des faits (il y a près d’un an) en phase de devenir associé de ladite société, avoir été contacté par monsieur [X] [A] gérant de cette même société pour avoir mon avis sur la proposition de Monsieur [C] [L] livreur de la société Diabolo courses.

Celui ci proposant ses services pour effectuer les livraisons de nos produits pour son propre compte et ce à condition de le faire de façon non déclarée ; cela pendant les heures de travail et avec le véhicule de la société l’employant.

…’

M. [C] soutient ne pas connaître M. [N] et n’avoir eu affaire au sein de la société Occi’dent qu’à [A], ce qui corrobore les déclarations du premier sur les propos de M. [A] [X].

Aucun élément ne permet de mettre en doute le témoignage de M. [N] sur la tentative de concurrence déloyale du salarié, de sorte que ce grief sera retenu et justifie à lui seul la rupture immédiate du contrat de travail.

Il résulte dès lors de l’ensemble des explications développées supra que le comportement de M. [C] justifie la rupture du contrat de travail pour faute grave, le jugement querellé devant être réformé à ce titre, ainsi que sur les dispositions financières subséquentes.

Sur les demandes accessoires

Il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code procédure civile.

Les dépens de première instance et d’appel seront mis à la charge de M. [C].

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

Réforme le jugement rendu le 15 octobre 2018 par le conseil de prud’hommes de Nîmes en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Dit le licenciement de M. [L] [C] fondé sur une faute grave,

Déboute M. [L] [C] de toutes ses demandes,

Rappelle en tant que de besoin que le présent arrêt infirmatif tient lieu de titre afin d’obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l’exécution provisoire,

Dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code procédure civile,

Condamne M. [L] [C] aux dépens de première instance et d’appel,

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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