Mandat apparent : 11 mai 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 20-15.659

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Mandat apparent : 11 mai 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 20-15.659

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 11 mai 2022

Cassation

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 395 F-D

Pourvoi n° J 20-15.659

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 MAI 2022

Mme [A] [V], domiciliée [Adresse 6], a formé le pourvoi n° J 20-15.659 contre l’arrêt rendu le 15 janvier 2020 par la cour d’appel de Bastia (chambre civile, section 1), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société Organigram, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à Mme [E] [F] [P], domiciliée [Adresse 1]),

3°/ à M. [X] [Z], domicilié [Adresse 4],

4°/ à M. [D] [P], domicilié [Adresse 5],

5°/ à M. [M] [P], domicilié [Adresse 7],

6°/ à M. [L] [P], domicilié [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La société Organigram a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de Mme [V], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Organigram, de la SCP Richard, avocat de M. [Z], après débats en l’audience publique du 29 mars 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Déchéance partielle du pourvoi examinée d’office

1. Après avis donné aux parties conformément à l’article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l’article 978 du même code.

Vu l’article 978 du code de procédure civile :

2. Il résulte de ce texte qu’à peine de déchéance, le mémoire en demande doit être signifié au défendeur n’ayant pas constitué avocat au plus tard dans le mois suivant l’expiration du délai de quatre mois à compter du pourvoi.

3. Mme [V] n’a pas signifié le mémoire ampliatif à Mme [F] veuve [P].

4. Il s’ensuit que la déchéance du pourvoi principal doit être constatée à son égard, ainsi qu’à celui de MM. [D], [M] et [L] [P], ses enfants, membres de la même indivision successorale, entre lesquels il existe une indivisibilité.

Faits et procédure

5. Selon l’arrêt attaqué (Bastia, 15 janvier 2020), par acte authentique du 8 mars 2011, [L] [P] (le vendeur), propriétaire d’un appartement donné à bail à Mme [V] (la locataire), l’a vendu à M. [Z] (l’acquéreur) au prix de 65 000 euros.

6. Invoquant notamment le non-respect de son droit de préemption subsidiaire, la locataire, par acte du 23 avril 2014, a assigné, en nullité de cette vente, le vendeur et l’acquéreur, lequel a assigné en intervention forcée la société Organigram, agent immobilier, en sa qualité de mandataire du vendeur et de gestionnaire du bien.

7. Le vendeur étant décédé en cours de procédure, ses héritiers, Mme [F] et MM. [D], [M] et [L] [N] [P], ont été assignés par la locataire.

Examen des moyens

Sur le moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal et sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident, réunis

Enoncé des moyens

8. Par son moyen, Mme [V] fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de nullité de la vente du 8 mars 2011, sa demande de restitution des loyers et sa demande de remboursement des charges locatives et assurance locative payées par elle à compter du 22 avril 2011 et, de la condamner au paiement de diverses sommes en application de l’article 700 du code de procédure civile, alors « que le bailleur qui décide de vendre le bien, sur lequel le locataire bénéficie d’un droit de préemption à un prix moindre que celui indiqué dans l’offre initiale doit, afin de purger le droit de préemption subsidiaire du locataire, lui notifier une nouvelle offre contenant le nouveau prix de vente et ce, à peine de nullité de la vente ; qu’en décidant, pour rejeter la demande en nullité de la vente consentie à M. [Z] pour le prix de 65 0000 euros, soit 20 000 euros de moins que l’offre initiale qui avait été notifiée à l’exposante, que cette dernière ne peut plus faire valoir un second droit de préemption du fait d’une baisse du prix de l’immeuble « puisque son offre était du même montant que le prix finalement payé par M. [Z] », la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales s’évinçant de ses constatations dont il ressortait que la vente qui s’était faite au profit d’un tiers, à un prix nettement inférieur à celui indiqué dans l’offre du 25 novembre 2010 annexée au congé, était nulle, l’exposante n’ayant pas bénéficié d’une nouvelle offre contenant le nouveau prix de vente et a violé l’article 15 II de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989. »

9. Par son premier moyen, la société Organigram fait grief à l’arrêt de rejeter la demande en nullité de la vente du 8 mars 2011, de la condamner en conséquence à payer à M. [Z] la somme de 21 571,50 euros au titre de loyers régulièrement acquittés entre ses mains par Mme [V], précisant que la somme de 18 912,35 euros consignée par la société Organigram était incluse dans le montant du paiement auquel elle était condamnée et la somme de 12 080 euros au titre des loyers impayés du 1er juin 2015 au 30 avril 2017 et de rejeter sa demande en paiement de la somme de 8 900 euros au titre de la rémunération prévue par le mandat du 27 janvier 2010, alors « que le bailleur qui décide de vendre le bien, sur lequel le locataire bénéficie d’un droit de préemption à un prix moindre que celui indiqué dans l’offre initiale doit, afin de purger le droit de préemption subsidiaire du locataire, lui notifier une nouvelle offre contenant le nouveau prix de vente et ce, à peine de nullité de la vente ; qu’en décidant, pour rejeter la demande en nullité de la vente consentie à M. [Z] pour le prix de 65 000 euros, soit 20 000 euros de moins que l’offre initiale qui avait été notifiée à Mme [V], que cette dernière ne pouvait plus faire valoir un second droit de préemption du fait d’une baisse du prix de l’immeuble « puisque son offre était du même montant que le prix finalement payé par M. [Z] », la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales s’évinçant de ses constatations dont il ressortait que la vente qui s’était faite au profit d’un tiers, à un prix nettement inférieur à celui indiqué dans l’offre du 25 novembre 2010 annexée au congé, était nulle, Mme [V] n’ayant pas bénéficié d’une nouvelle offre contenant le nouveau prix de vente et a violé l’article 15 II de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 15, II, alinéa 4, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 :

10. Selon ce texte, dans le cas où le propriétaire décide de vendre à des conditions ou à un prix plus avantageux pour l’acquéreur, le notaire doit, lorsque le bailleur n’y a pas préalablement procédé, notifier au locataire ces conditions et prix à peine de nullité de la vente.

11. Pour rejeter la demande de nullité de la vente consentie à M. [Z], l’arrêt retient que Mme [V] ne justifie pas avoir sollicité un prêt, de sorte que son offre d’achat est devenue caduque au plus tard le 28 février 2010 et qu’elle ne peut pas non plus faire valoir un second droit de préemption du fait d’une baisse du prix de l’immeuble, puisque son offre était du même montant que le prix finalement payé par M. [Z].

12. En statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que la locataire avait reçu, le 25 novembre 2010, une offre de vente de la part du mandataire du vendeur au prix de 85 000 euros et que la vente du 8 mars 2011 avait été consentie au tiers acquéreur au prix de 65 000 euros, sans qu’une nouvelle offre lui ait été notifiée, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

13. En application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions de l’arrêt rejetant la demande de nullité de la vente entraîne celle du chef de dispositif rejetant la demande en paiement de la somme de 8 900 euros formée par la société Organigram qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CONSTATE la déchéance du pourvoi principal en tant que dirigé contre Mme [F] veuve [P] et MM. [D], [M] et [L] [N] [P] ;

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 15 janvier 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Bastia ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Montpellier ;

Condamne M. [Z] aux dépens du pourvoi principal et condamne M. [Z] et Mme [F] veuve [P] et MM. [D], [M] et [L] [N] [P] aux dépens du pourvoi incident ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille vingt-deux.

 


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