ARRET
N°
C.E. VOLKSWAGEN GROUP FRANCE
C/
S.A.R.L. IMPERIAL SHOW
PM/SGS
COUR D’APPEL D’AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU SEPT JUILLET
DEUX MILLE VINGT DEUX
Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : N° RG 21/00236 – N° Portalis DBV4-V-B7F-H6W6
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE SOISSONS DU DIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT
PARTIES EN CAUSE :
C.E. VOLKSWAGEN GROUP FRANCE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me BUVRY substituant Me Christine HAMEL de la SCP FRISON ET ASSOCIÉS, avocat au barreau D’AMIENS
APPELANTE
ET
S.A.R.L. IMPERIAL SHOW, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Jean-louis DECOCQ de la SELARL XY AVOCATS, avocat au barreau de COMPIEGNE
INTIMEE
DÉBATS & DÉLIBÉRÉ :
L’affaire est venue à l’audience publique du 12 mai 2022 devant la cour composée de Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre, Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre et M. Pascal MAIMONE, Conseiller, qui en ont ensuite délibéré conformément à la loi.
A l’audience, la cour était assistée de Mme Vitalienne BALOCCO, greffière.
Sur le rapport de M. [Y] [V] et à l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré et la présidente a avisé les parties de ce que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 07 juillet 2022, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
PRONONCÉ :
Le 07 juillet 2022, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la Présidente étant empêchée, la minute a été signée par Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre, et Madame Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
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* *
DECISION :
Le 10 avril 2017, le Comité d’Entreprise Volkswagen Group France (ci-après le comité d’entreprise Volkswagen) représenté par son secrétaire M. [X] [B] a signé avec la Sarl Imperial Show (ci-après la Sarl Imperial ), société ayant pour activité l’organisation de spectacles:
-un bon de commande pour l’organisation d’un spectacle devant se tenir le dimanche 10 décembre 2017 pour un montant TTC de 49.680 euros,
-un bon de commande pour l’organisation d’un spectacle portant sur le cirque de Noël et une kermesse géante devant se tenir le dimanche 16 décembre 2018, pour un montant TTC de 49.680 euros.
Par un courrier en date du 5 février 2018, Mme [R], nouvelle secrétaire du Comité d’Entreprise, le trésorier et leurs adjoints ont informé la Sarl Impérial qu’ils ne seraient pas en mesure de poursuivre 1’engagement pris par M. [X] [B] en avril 20l7 pour l’organisation de l’événement de décembre 2018 et qu’ils décidaient d’annuler cette réservation.
Le 7 novembre 2018, la Sarl Imperial a adressé au comité d’entreprise Volkswagen une facture d’un montant de 49.680 euros TTC qui est demeurée impayée en dépit d’une mise en demeure en date du 10 décembre 2018.
Par acte d’huissier du 30 juin 2019, la Sarl Imperial a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Soissons le comité d’entreprise Volkswagen pour l’entendre condamner, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, à lui payer la somme de 49.680 euros TTC, correspondant au montant de la facture du 7 novembre 2018, avec intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2018, date de la mise en demeure, outre une indemnité de 3000 euros, au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Par jugement du 10 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Soissons a :
-Condamné le Comité d’Entreprise Volkswagen à payer à la Sarl Impérial la somme de 49 680 euros avec intérêts au taux légal à compter du décembre 2018.
-Débouté le Comité d’Entreprise Volkswagen de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;
-Condamné le Comité d’Entreprise Volkswagen aux entiers dépens, et à verser, au titre de l’article 700 du code de procédure civile à la Sarl Imperial une indemnité de 3000 euros ;
-Ordonné l’exécution provisoire du jugement.
Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 7 janvier 2021, le Comité d’Entreprise Volkswagen a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions transmises par la voie électronique le 24 janvier 2022, le Comité d’Entreprise Volkswagen demande à la Cour de :
-Le dire recevable et bien fondé en son appel.
-Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné le Comité d’entreprise Volkswagen à payer à la Sarl Imperial la somme de 49.680 euros, en ce qu’il l’a débouté de sa demande en dommages et intérêts et en ce qu’il l’a condamné à payer à la Sarl Imperial la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conséquent,
A titre principal,
– Prononcer l’annulation du contrat lié au bon de commande de la prestation du 16 décembre 2018 pour défaut de capacité à contracter et/ou pour défaut de validité du consentement.
A titre subsidiaire.
– Constater que la résolution unilatérale du contrat est intervenue le 5 février 2018 par le fait du Comité d’entreprise.
A titre infiniment subsidiaire.
– Constater l’inexécution de sa propre obligation parla société Imperial.
– Constater l’impossibilité d’ordonner l’exécution forcée des prestations.
– Prononcer, en conséquence, la résolution judiciaire du contrat lié au bon de commande de la prestation du 16 décembre 2018 à la date du 5 février 2018.
En tout état de cause,
– Condamner la société Imperial prise en la personne de son représentant légal à payer au comité d’entreprise Volkswagen :
. à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi la somme de 5000 euros ,
. au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 3000 euros ainsi qu’aux entiers dépens, dont distraction au profit de la Scp Frison & Associés.
. Débouter la société Imperial de toute demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions transmises par la voie électronique le 17 janvier 2022, la Sarl Impérial demande à la Cour de :
A titre principal,
-La déclarer bien fondée en ses demandes et ;
En conséquence,
-Débouter le Comité d’Entreprise Volkswagen de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
-Confirmer le jugement entrepris et donc en conséquence la condamnation du Comité d’Entreprise Volkswagen à lui payer la somme de 49.680 euros TTC correspondant au montant de l’engagement contractuel et de la facture qui lui a été adressée le 7 novembre 2018, ainsi qu’aux intérêts moratoires au taux légal à compter du 10 décembre 2018 date de la mise en demeure ;
En tout état de cause,
– Condamner le Comité d’Entreprise Volkswagen à lui payer la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
-Condamner le Comité d’Entreprise Volkswagen aux entiers dépens.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens.
Par ordonnance du 27 avril 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture et renvoyé l’affaire pour plaidoiries à l’audience du 12 mai 2022.
CECI EXPOSE, LA COUR,
Sur la nullité du contrat pour défaut de capacité à contracter de M. [B]:
L’article L2315-23 du code du travail, applicable à la date de signature des bons de commande litigieux dispose que le comité d’entreprise est doté de la personnalité civile.
En application des articles 1128 et 1145 du code civil, la convention passée par une personne morale dépourvue de capacité à contracter n’est pas valable et peut être annulée.
L’article 1998 du code civil dispose que le mandant est tenu d’exécuter les engagements contractés par le mandataire, conformément au pouvoir qui lui est donné. Il n’est tenu de ce qui a pu être fait au-delà, qu’autant qu’il l’a ratifié expressément ou tacitement.
En application de ces dispositions, il est considéré qu’en l’absence de délégation expresse, le secrétaire du comité d’entreprise n’est pas habilité à le représenter.
Mais il est considéré que le mandant peut être engagé sur le fondement d’un mandat apparent, si la croyance du tiers à l’étendue des pouvoirs du mandataire est légitime et que les circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs.
En l’espèce, si le règlement intérieur du Comité d’Entreprise Volkswagen confère au secrétaire le pouvoir de signature pour engager le comité jusqu’à 50.000 euros, ce règlement daté du 1er avril 2018 adopté lors de la réunion du CE du 19 avril 2018 n’était applicable qu’à compter du 1er mai 2018 donc postérieurement à la signature du bon de commande litigieux. Ainsi M. [B] n’avait pas reçu de délégation expresse pour représenter, en sa qualité de secrétaire, le Comité d’Entreprise Volkswagen, et signer du bon commande litigieux du 10 avril 2017.
Par ailleurs, s’il n’est pas contesté que le Comité d’Entreprise Volkswagen était en relation d’affaire avec la Sarl Imperial, cette dernière ne produit aucun bon de commande signé par M. [B] pour le compte du Comité d’Entreprise antérieur au 10 avril 2017.
Il n’est donc pas établi qu’au 10 avril 2017, date de signature des deux bons de commandes pour les Noël 2017 et 2018, la Sarl Imperial pouvait légitimement croire en raison de relations d’affaires antérieures avec le Comité d’Entreprise Volkswagen que M. [B] avait reçu mandat pour signer des engagements en son nom et qu’elle n’avait pas à vérifier les limites exactes de ce mandat.
Le règlement du 5 février 2018 par le comité d’entreprise du coût de la facture correspondant aux prestations accomplies par la Sarl Imperial pourles festivités de Noël 2017 est postérieur à l’engagement du 10 avril 2017: la Sarl Imperial ne pouvait en déduire que M. [B] avait reçu mandat en 2017 pour engager le comité et que cet engagement serait ratifié par le Comité.
La Sarl Imperial ne justifie donc pas du mandat apparent de M. [B] dont elle fait état .
Le bon de commande litigieux signé par M. [B] ne peut donc être opposé au Comité d’entreprise Volkswagen par la Sarl Imperial et le contrat litigieux signé par une personne dépourvue de qualité à agir doit être déclaré nul et réputé ne pas avoir engagé le comité.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a condamné le Comité d’entreprise Volkswagen à payer à la Sarl Imperial la somme de 49.680 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2018 et il convient de débouter la Sarl Imperial de sa demande en paiement de la somme de 49.680 euros avec intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2018.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par le Comité d’Entreprise Volkswagen:
Il n’est pas établi que l’action engagée par la Sarl Imperial a causé au Comité d’Entreprise Volkswagen un quelconque préjudice moral.
Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté le Comité d’Entreprise Volkswagen de sa demande de dommages et intérêts.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
La Sarl Imperial succombant, il convient :
-d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné le Comité d’Entreprise Volkswagen aux dépens de première instance ;
-d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné le Comité d’Entreprise Volkswagen à payer à la Sarl Imperial la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles ;
-de condamner la Sarl Imperial aux dépens de première instance et d’appel ;
-de débouter la Sarl Imperial de ses demandes au titre des frais irrépétibles pour la procédure de première instance et d’appel.
L’équité commandant de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur du Comité d’Entreprise Volkswagen, il convient d’infirmer le jugement en ce qu’il a débouté le Comité d’Entreprise Volkswagen de sa demande à ce titre pour la procédure de première instance et il convient de lui accorder de ce chef la somme de 2500 euros.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :
Infirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a débouté le Comité d’Entreprise Volkswagen Group France de sa demande de dommages et intérêts ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
Déboute la Sarl Imperial Show de sa demande en paiement de la somme de 49.680 euros formée à l’encontre du Comité d’Entreprise Volkswagen Group France ;
Condamne la Sarl Imperial Show à payer au Comité d’Entreprise Volkswagen Group France la somme de 2500 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;
Déboute les parties de leurs plus amples demandes ;
Condamne la Sarl Imperial Show aux dépens de première instance et d’appel ;
Autorise, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, la Scp Frison & Associés, avocat à recouvrer directement ceux des dépens dont elle à fait l’avance sans recevoir de provision.
LA GREFFIEREP/ LA PRESIDENTE EMPECHEE