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Attestation de vigilance : 12 juillet 2023 Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion RG n° 22/00148

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Attestation de vigilance : 12 juillet 2023 Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion RG n° 22/00148

12 juillet 2023
Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion
RG n°
22/00148

ARRÊT N°23/

SP

R.G : N° RG 22/00148 – N° Portalis DBWB-V-B7G-FVAV

[B]

C/

S.A.S. CABINET HABILIS

COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS

ARRÊT DU 12 JUILLET 2023

Chambre commerciale

Appel d’une décision rendue par le TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE SAINT PIERRE en date du 13 DECEMBRE 2021 suivant déclaration d’appel en date du 07 FEVRIER 2022 RG n° 2021000550

APPELANT :

Monsieur [V] [B]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Guillaume ALBON, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

S.A.S. CABINET HABILIS

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Farid ISSE-ALY, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 21/11/2022

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 03 Mai 2023 devant Madame PIEDAGNEL Sophie, Conseillère, qui en a fait un rapport, assistée de Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, les parties ne s’y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l’issue des débats, que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 12 Juillet 2023.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre

Conseiller : Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère

Conseiller : Monsieur Franck ALZINGRE, Conseiller

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 12 Juillet 2023.

* * *

LA COUR

Le 22 avril 2015, M. [V] [B] a signé avec la SARL Cabinet Habilis, devenue une SAS (le cabinet Habilis), titulaire de la carte professionnelle « transactions sur immeubles et fonds de commerce », un contrat de négociateur non-salarié, lui donnant ainsi en tant qu’agent commercial un mandat de représentation, de prospection, de négociation ou d’entremise.

Par courrier remis par huissier le 4 décembre 2020, le cabinet Habilis a signifié à M. [B] la résiliation de son contrat de négociateur non-salarié.

Par acte du 4 février 2021, M. [B] a fait assigner le cabinet Habilis devant le tribunal mixte de commerce de Saint Pierre de la Réunion aux fins de condamnation à lui payer les sommes de 159.640 euros en réparation de son préjudice et 3.000 euros au titre des frais irrépétibles, constatation du caractère abusif de la résiliation de son contrat et prononcé de la nullité de la clause limitant son indemnisation.

Dans ces dernières écritures, M. [B] a maintenu ses demandes et sollicité en outre la condamnation du cabinet Habilis à lui verser les sommes de 16.458,19 euros au titre de paiement de factures, avec intérêts au taux contractuel à compter de leur date de transmission et 3.000 euros pour procédure abusive.

Le cabinet Habilis a conclu au débouté des prétentions de M. [B] et sollicité une indemnité de procédure de 3.000 euros. A titre subsidiaire, il a demandé à ce que le montant de l’indemnité de rupture soit limité, à titre infiniment subsidiaire que la clause contractuelle qui limite le montant de l’indemnisation à 12 fois la moyenne mensuelle des commissions perçues au cours des 24 derniers mois soit déclarée valide.

Par jugement rendu le 13 décembre 2021, le tribunal mixte de commerce de Saint Pierre de la Réunion a statué en ces termes :

CONDAMNE la SAS CABINET HABILIS à payer à Monsieur [V] [B] une somme de 10 000€ au titre de l’indemnisation consécutive à la rupture du contrat de négociateur non salarié

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes

CONDAMNE la SAS CABINET HABILIS à payer à Monsieur [V] [B] une somme de 700 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la SAS CABINET HABILIS aux entiers dépens, y compris les frais de greffe taxes et liquides à hauteur de 62,92 euros

RAPPELLE que la présente décision est de droit revêtue de l’exécution provisoire en toutes ses dispositions

Par déclaration au greffe en date du 7 février 2022, M. [B] a interjeté appel de cette décision.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 21 novembre 2022 et l’affaire a reçu fixation pour être plaidée à l’audience rapporteur du 3 mai 2023.

* * *

Dans ses uniques conclusions transmises par voie électronique le 5 mai 2022, M. [B] demande à la cour, au visa de l’article L134-12 du code de commerce, de :

Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes ou en tout cas mal fondées :

-Infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a réduit les demandes de M. [B] à la somme de 10.000 euros ;

-Infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a rejeté le surplus des demandes de M. [B] ;

Statuant de nouveau :

-Déclarer abusive la résiliation du contrat ;

-Prononcer la nullité de la clause limitant l’indemnisation de M. [B] ;

-Condamner le cabinet Habilis à verser à M. [B] la somme de 159.640 euros en réparation de son préjudice ;

-Condamner le cabinet Habilis à verser à M. [B] la somme de 3.000 euros pour résistance abusive dans le paiement de ses factures ;

-Condamner le cabinet Habilis à verser à M. [B] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner le cabinet Habilis aux entiers dépens.

* * *

Dans ses uniques conclusions transmises par voie électronique le 5 août 2022, le cabinet Habilis demande à la cour, au visa des articles L134-1 et suivants et plus particulièrement les L134-12 alinéa 1er et L134-13 1° du code de commerce, L243-15 et D243-15 du code de la sécurité sociale, L8222-1 à L8222-5 du code du travail, 9 et 200 à 203 du code de procédure civile, 441-7 du code pénal et 14 de la loi HOGUET n° 70-9 du 2 janvier 1970 modifié par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 (art. 156), du Décret n° 2016-173 du 18 février 2016 relatif à la formation continue des professionnels de l’immobilier et de la circulaire interministérielle N°DSS/SD5C/2012/186 du 16 novembre 2012 relative à l’attestation de vigilance (obligations déclaratives et paiement des cotisations sociales), de :

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

A- A titre principal

– Confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris

B- A titre subsidiaire

-Juger que M. [B] a commis une faute grave justifiant la résiliation unilatérale du contrat de négociateur non-salarié :

. En s’abstenant volontairement de transmettre dans le délai imparti les justificatifs obligatoires réclamés par le mandant (Attestations des heures de formation + Attestation de vigilance URSSAF) lui faisant courir un risque tant sur le plan civil, pénal et financier,

.et en se comportant de manière déloyale envers celui-ci en le dénigrant auprès de ses clients ;

-En conséquence, débouter M. [B] de toutes ses demandes indemnitaires ;

C- A titre très subsidiaire

-Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a fixé à 10.000,00 euros le droit à indemnisation de M. [B], au regard de la réalité du préjudice subi ;

D- A titre infiniment subsidiaire

-Juger valide la clause contractuelle limitant l’indemnisation à allouer à M. [B] qui ne pourra dépasser un montant égal à 12 fois la moyenne mensuelle des commissions perçues au cours des 24 derniers mois ayant précédé la rupture (Article 8-3 : Indemnisation), cette clause ayant été librement acceptée par le mandataire ;

-Ordonner l’application de cette clause ;

E- Sur la demande de condamnation du cabinet Habilis pour résistance abusive

-Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [B] de sa demande de condamnation pour résistance abusive ;

En tout état de cause

-Condamner M. [B] à payer au cabinet Habilis la somme de 5.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, en ce compris les frais irrépétibles de première instance ;

-Condamner M. [B] aux entiers dépens, en ce compris ceux de première instance.

* * *

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

A titre liminaire

D’une part, il y a lieu de préciser qu’il sera fait application des dispositions du code civil dans leur version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve de l’obligation dans la mesure où le contrat d’agent commercial a été conclu avant l’entrée en vigueur de la réforme.

D’autre part, la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentées au soutien de ces prétentions.

Enfin, les dispositions suivantes ne sont pas discutées en cause d’appel par les intéressés en ce que le tribunal a débouté M. [B] de sa demande tendant à voir condamner le cabinet Habilis à lui payer la somme de 16.458,19 euros au titre de paiement de factures avec intérêts au taux contractuel à compter de leur date de transmission, lesdites factures ayant été réglées par le cabinet Habilis.

Sur la rupture du contrat

M. [B] estime que la rupture de son contrat d’agent commercial est abusive :

-elle est intervenue sans aucun avertissement ;

-elle ne peut pas se fonder sur les attestations de formations car il pouvait parfaitement effectuer lesdites formations a minima jusqu’au mois de mars 2021 alors que la rupture du contrat est intervenue le 4 décembre 2020 ;

-il était à jour de ses obligations URSSAF et le délai pour en justifier n’était pas écoulé ; les comportements déloyaux visés par le cabinet Habilis se fondent sur des attestations mensongères rédigées par des proches collaborateurs et/ou amis de M. [Y], président du cabinet Habilis.

M. [B] soutient que conformément aux dispositions de l’article L134-12 alinéa 1er du code de commerce, en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi qui se justifie du fait que la résiliation a pour effet de priver l’agent, au moment où ils commençaient à devenir rémunérateurs, des résultats qu’il est en droit d’attendre de ses efforts et frais de prospection. Il considère que l’existence d’un préavis de trois mois et/ou le fait qu’il ait retrouvé une nouvelle activité, est sans effet sur l’existence de son droit à indemnité.

A titre principal, le cabinet Habilis demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, à savoir d’accorder à M. [B] la somme de 10.000 euros au titre de l’indemnisation consécutive à la rupture du contrat de négociateur non salarié.

A titre subsidiaire, le cabinet Habilis soutient que la rupture du contrat est due à une faute grave de M. [B] excluant toute indemnisation : il n’a pas transmis les justificatifs relatifs au nombre d’heure de formations obligatoires pour les professionnels de l’immobilier, ni l’attestation de vigilance de l’URSSAF et s’est montré déloyal

A titre très subsidiaire, le cabinet Habilis soutient que la clause de limitation de l’indemnisation doit s’appliquer.

En l’espèce, il n’est pas contesté que M. [B] relève du statut protecteur des agents commerciaux et que le contrat le liant au cabinet Habilis a pris fin.

Suivant CONTRAT DE NEGOCIATEUR NON-SALARIE daté du 22 avril 2015, signé et paraphé par les parties, la SARL Cabinet Habilis, représentée par son gérant, M. [N] [Y] (le mandant) a conclu avec M. [V] [B] un contrat d’agent commercial (le mandataire) afin de développer son activité et les parties ont expressément souhaité appliquer au contrat les articles L134-1 et suivants du code de commerce traitant des agents commerciaux, pour une durée indéterminée, moyennant des commissions définies à l’article 7.

Aux termes de l’article 8 Fin du contrat :

« 8-1 : Préavis

Les parties mettent fin au mandat par lettre recommandée avec accusé de réception en respectant la durée du préavis suivante : un mois durant la première année du contrat, deux mois durant la deuxième année, trois mois pour la troisième année commencée et les années suivantes.

Ce délai commence à courir du jour de la première présentation de la lettre, et la fin de ce délai ne coïncide pas obligatoirement avec la fin d’un mois civil.

Toutefois, la résiliation du mandant en raison :

.de la faute grave de l’une des parties

. Ou du non-respect d’une des obligations prévues à l’article 5, huit jours après une mise en demeure restée en tout ou partie infructueuse, interviendra sans délai, au jour de la première présentation de la lettre à l’autre partie.

8-2 : Droit de suite

(‘)

8-3 : Indemnisation

Pour le cas où une indemnité serait due au Mandataire à l’occasion de la rupture du présent contrat, les parties entendent rappeler qu’il s’agit, aux termes exacts de la loi, d’une « indemnité compensatrice du préjudice subi » et qu’il appartiendra en conséquence au Mandataire de démontrer l’existence du préjudice, d’en justifier le montant et d’établir le lien de cause à effet direct entre la rupture et le préjudice allégué.

Prenant en compte les contraintes spécifiques et importantes résultant des dispositions législatives particulières qui réglementent et limitent le développement et l’organisation de la mission de représentation de l’agent commercial dans le secteur de l’immobilier, notamment celles issues de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006, les parties s’accordent expressément pour considérer qu’il n’existe pas d’usage applicable au présent contrat qui permettrait de fixer forfaitairement l’indemnité éventuellement due.

Sous réserve des justifications précédemment rappelées, et prenant en compte les termes de la clause de non concurrence, les signataires conviennent en outre que cette indemnisation ne pourra dépasser un montant égal à 12 fois la moyenne mensuelle des commissions perçues par le mandataire au cours des 24 derniers mois ayant précédés la rupture.

8-4 : Clause de non concurrence

(‘) (non complétée) »

Suivant acte d’huissier en date du 4 décembre 2020, le cabinet Habilis a fait signifier à M. [B] une lettre datée du 3 décembre 20202 ayant pour objet « Résiliation de votre contrat de négociateur non salarié du 22/04/2015 et mise en demeure de restituer immédiatement les clés des biens des mandats en votre possession » se présentant comme suit :

« Nous sommes au regret de vous notifier par la présente la résiliation de votre contrat de négociateur non salarié (Agent Commercial Indépendant) signé le 22/04/20125, avec un délai de préavis de trois mois conformément à l’article 8-1 relatif au préavis ci-dessous reproduit :

(‘)

Nous vous rappelons les termes de l’article 5 du contrat de mandant qui précise que « les rapports entre le mandataire et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d’information ». Cet article détaille l’ensemble des obligations contractuelles qui s’imposent au mandataire, précision étant faite que « le non-respect de l’une quelconque des obligations du présent article ouvre droit à la rupture immédiate du contrat dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article 8-1 ci-après. Un tel manquement est en outre susceptible de constituer une faute grave. »

Malgré nos demandes formalisées par courriel du 26/10/2020 vous invitant à répondre de vos obligations de transmission des justificatifs requis sous un délai de 20 jours ouvrés, vous ne nous avez jamais fourni les justificatifs de vos heures de formation obligatoires (Décret n° 2016-173 du 18/02/2016 : 14h/an ou 42h sur 3 ans), ni votre attestation de vigilance URSSAF (Art. L.243-15 et D.24315 du Code de la Sécurité Sociale et art. L.8222-1 à L.8222-5 du Code du Travail), nous exposant ainsi aux remontrances des services de contrôle qui nous réclament actuellement la transmission de tels justificatifs.

Nous regrettons par ailleurs le non-respect de votre part de nos règles internes qui imposent la remise systématique à l’agence des clés des biens que nos mandants nous ont confiées en gestion. Vous n’ignorez pourtant pas que les clés doivent être impérativement être redéposées au tableau prévu à cet effet après leur utilisation, gardées sous la responsabilité de la collaboratrice en charge de la gestion des clés. Chaque agent commercial doit signer le registre d’entrée et de sortie des clés.

En ce qui vous concerne, voici la liste des biens en mandat sous votre responsabilité et pour lesquels les clés sont actuellement toujours en votre possessions.

(…)

En conséquence, nous vous mettons en demeure de nous restituer immédiatement et sous un délai de 5 jours à compter de la réception des présentes l’ensemble des clés en votre possession.

Passé ce délai, nous nous réservons la possibilité de saisir la juridiction compétente d’une demande ‘injonction de faire. La condamnation judiciaire en restitution des clés sous astreinte journalière à laquelle vous vous exposerez pourra être grevée de dommages et intérêts que nous ne manquerons pas de réclamer en réparation de nos préjudices.

Sachez que vous pouvez éviter une telle issue en vous conformant à nos demandes.

Enfin, conformément à l’article 8-2 du contrat relatif au droit de suite, nous vous confirmons que le paiement de vos commissions sur les actes en cours seront honorés dans un délai de six mois à compter de la résiliation de votre contrat.

8-2 : Droit de suite

(…) »

M. [B] verse aux débats, notamment :

-un extrait de la liste des collaborateurs du cabinet Habilis de 2018 selon M. [B] sur laquelle apparaît, notamment, les noms de M. [W] [F] ([Courriel 3]) M. [D] ([Courriel 4])

-une capture d’écran d’un site non identifié qui indique que M. [N] [Y] est aussi gérant de la société [D] Bleu Horizon

-une capture d’écran site société.com de Merville Island dont la président est Mme [P] [H] et l’adresse du siège social est [Adresse 2] à [Localité 5]

-une ATTESTATION DE COLLABORATEUR délivré par la CCI de la Réunion le 6 avril 2020 et valable jusqu’au 9 mars 2023

-une ATTESTATION DE COMPTE A JOUR ET DE FOURNITURE DE DECLARATION ET DE PAIEMENTS établie par l’URSSAF le 17 février 2021 attestant que M. [B] est à jour de ses obligations en matière de déclarations et de paiements de cotisation de sécurité sociale (maladie-maternité, indemnités journalières, retraite, invalidité-décès, allocation familiales) et des contributions sociales (CSG/CRDS et, le cas échéant, de la contribution à la formation professionnelle CFP) au 31/03/2021.

-des courriels émanant du cabinet Habilis d’octobre 2020 et janvier 2021 lui demandant de « faire sa facture » pour diverses locations et lui souhaitant une bonne et heureuse années 2021.

Le cabinet Habilis verse aux débats, notamment :

-un courriel daté du 22 août 2019 émanant de la responsable des travaux et assistante de gestion du cabinet Habilis adressé à MM. [Z], [S], [F], [C], [B], [G] et [X] rédigé comme suit :

« Il faudrait me transmettre par courrier l’attestation de vigilance qui est délivre vis une demande par internet sur le site de l’URSSAF.

Pour information vous trouvez en PJ le FLASH INFO reçu du SNPI à ce sujet. » ;

-un courriel daté du 22 août 2019 émanant de Mme [A], assistance de gestion au cabinet Habilis adressé à « carolinerossi » concernant le FLASH URSSAF et les formations ALUR ;

-un courriel daté du 26 octobre 2020 de M. [B] adressé à « conseil » relatif au suivi des heures de formation et attestation de vigilance URSSAF dans lequel il écrit :

« Merci pour ta réponse.

Je réunis mes attestations, je pense qu’il le manque des heures, nous ferons un point et en fonction, je ferais le nécessaire en urgence. »

-un « courriel de relance » selon le cabinet Habilis de Mme [T], assistante commerciale; le destinataire n’est pas précisé ;

-une attestation de [I] [D], indiquant n’avoir aucun lien de parenté, de subordination, de collaboration ou de communauté d’intérêts avec les parties, datée du 20 avril 2021 qui affirme avoir été contacté par M. [B] pour lui confier personnellement la location du bien actuellement géré par le cabinet Habilis, ce qu’il a « toujours refusé » ;

-une attestation de M. [W] [F], indiquant n’avoir aucun lien de parenté, de subordination, de collaboration ou de communauté d’intérêts avec les parties, datée du 6 décembre 2020 affirmant avoir été contacté par M. [B] qui lui a proposé de s’occuper de la vente de son bien à titre personnel ;

-une attestation de Mme [P] [H], indiquant n’avoir aucun lien de parenté, de subordination, de collaboration ou de communauté d’intérêts avec les parties, datée du 10 décembre 2020, affirmant avoir été contacté par M. [B] afin qu’elle lui confie le mandat de vente de la maison familiale « car il ouvrait son agence et que l’on aurait de meilleures prestations en signant avec lui » ;

-message de bienvenue de Winkey recrutement adressé à M. [B] le 15 avril (date non précisée) ;

-publication postées par M. [B] sur Linkedin en avril 2021 ;

-attestation de M. [K] [L] [R], n’ayant au lien de parenté, de subordination, de collaboration ou de communauté d’intérêts avec les parties, datée du 15 janvier 2021 qui fait état de proposition de M. [B] de lui louer quelques appartements vides lui appartenant car « pour lui, le CABINET HABILIS ne serait plus capable de louer ces biens car il est le seul commercial compétent et capable » et indique avoir informé l’agence de la « tentative de détournement » ;

-attestation de M. [M] [E], n’ayant au lien de parenté, de subordination, de collaboration ou de communauté d’intérêts avec les parties, datée du 24 juin 2021 affirme avoir été contacté fin novembre 2020 par M. [B] pour lui confier ses projets immobiliers ;

-Mme [O] [J], n’ayant au lien de parenté, de subordination, de collaboration ou de communauté d’intérêts avec les parties, datée du 24 juin 2021 affirmant avoir été contacté par M. [B] pour vendre son bien « via une agence spécialisée qu’il possède » qui aurait employé des expressions très familières sur l’équipe de commerciaux de l’agence Habilis qui m’ont incommodées ;

-plusieurs courriels demandant à M. [B] de communiquer ses factures (10, 19 et 31 mars 2021).

Sur ce,

En tant que contrat de distribution, le contrat d’agent commercial est, à la fois, soumis au droit commun des contrats et au code de commerce.

D’une part,

Il ressort des dispositions de l’article 1134 (ancien) que :

‘Les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que leur consentement mutuel ou pour des causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi.’

L’obligation de loyauté et de sincérité ainsi que le devoir de coopération associés à l’exigence de bonne foi s’imposent en matière contractuelle et présentent un caractère d’ordre public. La bonne foi est toujours présumée et c’est à celui qui l’invoque de la prouver.

D’autre part,

Aux termes de l’article L134-1 alinéa 1er du code de commerce :

« L’agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels, de commerçants ou d’autres agents commerciaux. Il peut être une personne physique ou une personne morale. »

L’article L134-4 du même code dispose :

« Les contrats intervenus entre les agents commerciaux et leurs mandants sont conclus dans l’intérêt commun des parties.

Les rapports entre l’agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d’information.

L’agent commercial doit exécuter son mandat en bon professionnel ; le mandant doit mettre l’agent commercial en mesure d’exécuter son mandat. »

Par ailleurs, selon l’article L134-11 du même code :

« Un contrat à durée déterminée qui continue à être exécuté par les deux parties après son terme est réputé transformé en un contrat à durée indéterminée.

Lorsque le contrat d’agence est à durée indéterminée, chacune des parties peut y mettre fin moyennant un préavis. Les dispositions du présent article sont applicables au contrat à durée déterminée transformé en contrat à durée indéterminée. Dans ce cas, le calcul de la durée du préavis tient compte de la période à durée déterminée qui précède.

La durée du préavis est d’un mois pour la première année du contrat, de deux mois pour la deuxième année commencée, de trois mois pour la troisième année commencée et les années suivantes. En l’absence de convention contraire, la fin du délai de préavis coïncide avec la fin d’un mois civil.

Les parties ne peuvent convenir de délais de préavis plus courts. Si elles conviennent de délais plus longs, le délai de préavis prévu pour le mandant ne doit pas être plus court que celui qui est prévu pour l’agent.

Ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque le contrat prend fin en raison d’une faute grave de l’une des parties ou de la survenance d’un cas de force majeure. »

La rupture du contrat obéit aux règles du droit commun des conventions.

Le contrat à durée déterminée ne peut être résilié sauf en cas de faute grave. Il n’existe pas de droit au renouvellement.

Le contrat à durée indéterminée peut être résilié à tout moment. La protection du cocontractant réside dans l’exigence d’un préavis ou dans l’application de la théorie de l’abus de droit.

1°) l’abus de droit

L’exercice abusif du droit de résiliation constitue un manquement contractuel fondé sur l’exigence de bonne foi.

L’abus du droit suppose que le droit subjectif est exercé en conformité avec la loi, mais que cet usage est illégitime.

La responsabilité contractuelle du contractant ne peut être recherchée que si le comportement reproché a engendré un dommage.

Le dommage issu de la disparition du contrat et des ressources qu’il procurait étant le résultat normal de l’exercice du droit de résilier le contrat, le dommage de l’abus de droit ne peut donc être établi que lorsque les charges engendrées par la mise en ‘uvre de la prérogative excèdent celles qui en résultent normalement.

L’abus de droit ne se réduit pas à la volonté de nuire, mais doit être recherché dans les circonstances qui accompagnent le prononcé de la résiliation et qui révèlent un usage désinvolte ou excessif de cette prérogative.

Les motifs de la rupture, légitimes ou non, exacts ou mensongers, sont indifférents.

Seule l’allocation de dommages-intérêts peut compenser le dommage causé par la rupture de la relation contractuelle.

En l’état, non seulement M. [B] ne sollicite pas de dommages et intérêts en réparation de l’abus de droit qu’il prétend avoir subi mais, en outre, il ne fait valoir, en réalité, aucune circonstance particulière accompagnant la rupture du contrat, s’en tenant à la critique des motifs allégués par le cabinet Habilis.

Il s’en suit que M. [B] ne rapporte pas la preuve de l’abus de droit de résilier le contrat.

2°) l’indemnisation prévue par le code de commerce

Selon l’article L134-12 alinéas 1 et 2 du code de commerce :

« En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

L’agent commercial perd le droit à réparation s’il n’a pas notifié au mandant, dans un délai d’un an à compter de la cessation du contrat, qu’il entend faire valoir ses droits.

Tandis que l’article L134-13 du même code précise que :

« La réparation prévue à l’article L. 134-12 n’est pas due dans les cas suivants :

1° La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l’agent commercial ;

2° La cessation du contrat résulte de l’initiative de l’agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l’âge, l’infirmité ou la maladie de l’agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ;

3° Selon un accord avec le mandant, l’agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu’il détient en vertu du contrat d’agence. »

Comme le relève à juste titre les premiers juges, la cour ne peut que constater que la lettre de résiliation signifiée par voie d’huissier le 4 décembre 2020 à M. [B] est confuse : elle se réfère à l’article 8-1 relatif au préavis de trois mois, tout en mettant en demeure M. [B] de restituer immédiatement les clés des biens des mandats en sa possession. Elle rappelle également les dispositions de l’article 5 « qui détaille l’ensemble des obligations contractuelles qui s’imposent au mandataire », dont l’obligation de loyauté et le devoir réciproque d’information, tout en précisant que « le non-respect de l’une quelconque des obligations du présent article ouvre droit à la rupture immédiate du contrat dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article 8-1 ci-après. Un tel manquement est en outre susceptible de constituer une faute grave. » Pour autant, la lettre ne comporte à aucun endroit la référence claire à une quelconque faute commise par M. [B], évoquant tout au plus de possibles « remontrances » des services de contrôle s’agissant des justificatifs de formation et de l’attestation de vigilance URSSAF non produit par M. [B].

Il s’en déduit que la rupture du contrat n’est que l’application stricte des dispositions contractuelles la prévoyant, à savoir : l’envoi d’une lettre commandée avec accusé de réception en respectant un préavis, en l’espèce, un préavis de trois mois.

Sur l’indemnité de rupture

M. [B] soutient que l’indemnisation doit être estimée au regard des commissions perçues pendant le contrat et que qu’il n’existe aucun barème légal, l’usage consiste indemniser l’agent commercial à hauteur de deux années de commission, soit la somme de 159.640 euros (70.320€ en 2019 et 89.320€ en 2020).

S’agissant de la clause limitative de l’indemnisation, M. [B] estime qu’elle est nulle et non-avenue car seules sont valables les clauses prévoyant une indemnité supérieure ou égale ou préjudice subi ou une indemnité supplémentaire se cumulant avec l’indemnité de cessation de mandat.

A titre principal, le cabinet Habilis demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, à savoir d’accorder à M. [B] la somme de 10.000 euros au titre de l’indemnisation de consécutive à la rupture du contrat de négociateur non salarié.

Sur ce,

L’article L134-1 du code de commerce ne contient aucune indication sur le mode de calcul de l’indemnité de rupture destinée à compenser le préjudice subi par l’agent, à savoir la perte subie en raison de la privation des commissions qu’il aurait dû percevoir sur les affaires traitées avec sa clientèle.

Souvent, l’indemnité de résiliation est calculée sur la base de deux années de commissions mais il s’agit d’une simple règle d’usage qui ne lie pas le juge.

Le principe est que l’indemnité doit réparer le préjudice résultant de la rupture imputable au mandant mais tout le préjudice et rien que le préjudice. Elle ne peut donc être évaluée qu’après la rupture et toute clause prévoyant un mode particulier d’évaluation de l’indemnité n’est pas valable.

En l’espèce, le contrat à durée indéterminée conclu le 22 avril 2015 a pris fin à l’issu d’un préavis de trois mois, soit le 4 mars 2021 : la relation contractuelle entre M. [B] et le cabinet Habilis a donc duré presque 6 ans.

La cour relève que :

-le contrat ne comporte aucune clause de non concurrence

-M. [B] a retrouvé un emploi dans la même branche quasiment immédiatement

-M. [B] ne produit aucun élément sur les commissions qu’il a perçues depuis la rupture du contrat.

Il résulte de ce qui précède que c’est par une juste appréciation des faits de la cause et par des motifs que la cour adopte que les premiers juges ont fixé l’indemnité à la somme de 10.000 euros, au regard de la réalité du préjudice subi et justifié par M. [B].

Le jugement sera par conséquent confirmé en toutes ses dispositions, étant précisé qu’il n’y donc pas lieu de statuer sur les demandes subsidiaires, très subsidiaires, et infiniment subsidiaires du cabinet Habilis, celui-ci ayant sollicité à titre principal la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

Pour rappel, en vertu des dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil anciens (devenus les articles 1240 et 1241 depuis le 1er octobre 2016), tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer et chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

L’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits ne constituant pas en soi une faute caractérisant un abus du droit d’agir en justice ni une quelconque résistance abusive, en l’absence de justification d’un préjudice spécifique, il convient de rejeter la demande formée par M. [B] à ce titre.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

M. [B] succombant, il convient de le condamner aux dépens d’appel et le débouter de sa demande au titre des frais irrépétibles pour la procédure d’appel.

Aucune considération d’équité ne conduit à faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit du cabinet Habilis.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, en matière commerciale, par mise à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13 décembre 2021 par le tribunal mixte de commerce de de Saint Pierre de la Réunion ;

Y ajoutant

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [V] [B] aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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