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Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 2
ARRET DU 01 SEPTEMBRE 2022
(n° , 5 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/18688 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CER3Q
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Octobre 2021 -Président du TJ de Paris – RG n° 20/58710
APPELANTE
LA VILLE DE [Localité 3], prise en la personne de Madame la Maire de [Localité 3], Mme [B] [I], domiciliée en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Colin MAURICE de la SARL CM & L AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1844
Assistée par Me Alix DE CHEZELLES, avocat au barreau de PARIS
INTIME
M. [V] [O]
[Adresse 2],
NEW YORK ETATS UNIS
Représenté et assisté par Me Sébastien GARNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1473
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 1er juin 2022en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Michèle CHOPIN, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre
Thomas RONDEAU, Conseiller,
Michèle CHOPIN, Conseillère,
Qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
*****
EXPOSE DU LITIGE
Par exploit du 8 septembre 2020, la Ville de [Localité 3] prise en la personne de Mme la Maire de [Localité 3] a fait assigner M. [O] devant le président du tribunal judiciaire de Paris saisi selon la procédure accélérée au fond, sur le fondement notamment des dispositions de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation, concernant l’appartement situé [Adresse 1]) (bâtiment A, escalier 1, 3ème étage, porte 4001).
Par mention au dossier du 4 mai 2021, la réouverture des débats a été ordonnée en raison des décisions successivement prononcées par la Cour de justice de l’Union européenne le 22 septembre 2020 (CJUE, 22 sept. 2020, Cali Apartments, affaires joints C-724/18 et C-727/18) et par la Cour de cassation le 18 février 2021, la première ayant notamment jugé que la réglementation nationale, telle que prévue à l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation, était conforme aux dispositions de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 et la seconde, que la réglementation locale de la Ville de [Localité 3] sur le changement d’usage était conforme à la réglementation européenne.
L’affaire a été rétablie à l’audience du 03 septembre 2021.
Par jugement rendu selon la procédure accélérée au fond le 13 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Paris, a :
– condamné M. [O] au paiement d’une amende civile de 7.000 euros, dont il a été rappelé que le produit sera versé à la Ville de [Localité 3] ;
– condamné M. [O] à verser à la Ville de [Localité 3] la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– rejeté le surplus des demandes ;
– condamné M. [O] au paiement des dépens ;
– rappelé que la décision bénéficie de l’exécution provisoire de plein droit.
Par déclaration du 27 octobre 2021, la Ville de [Localité 3] a relevé appel de cette décision en ce qu’elle a rejeté le surplus de ses demandes.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 05 janvier 2022, la Ville de [Localité 3] demande à la cour, de :
– la juger recevable et bien fondée en son appel ;
– confirmer le jugement rendu le 13 octobre 2021 par le président du tribunal judiciaire de Paris, en ce qu’il a :
‘ condamné M. [O] au paiement d’une amende civile de 7.000 euros, dont il est rappelé que le produit lui sera versé,
‘ condamné M. [O] à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ condamné M. [O] au paiement des dépens,
– infirmer le jugement rendu le 13 octobre 2021 par le président du tribunal judiciaire de Paris, ce que le Président du tribunal a :
‘ rejeté sa demande tendant à voir juger que M. [O] a enfreint les dispositions de l’article L. 324-1-1 IV du code de tourisme en ne transmettant pas le nombre de jours au cours desquels l’appartement a été loué dans le mois qui a suivi la demande, et à voir condamner M. [O] à payer une amende civile de 10.000 euros et à voir ordonner que le produit de cette amende lui soit intégralement versé,
‘ rejeté sa demande tendant à voir ordonner le retour à l’habitation des locaux transformés sans autorisation, de l’appartement situé dans le bâtiment A, escalier 1 au 3ème étage, porte 4001 de l’immeuble du [Adresse 1]) ( constituant le lot n°39), sous astreinte de 240 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai qu’il plaira à la Cour de fixer et se réserver la liquidation de l’astreinte,
Statuant de nouveau sur les dispositions infirmées,
– juger que M. [O] a enfreint les dispositions de l’article L. 324-1-1 IV du code de tourisme en ne transmettant pas le nombre de jours au cours desquels l’appartement a été loué dans le mois qui a suivi la demande ;
– condamner M. [O] à payer une amende civile de 10.000 euros au titre de l’article L.324-1-1 V du code de tourisme et ordonner que le produit de cette amende lui soit intégralement versé ;
– ordonner le retour à l’habitation des locaux transformés sans autorisation, de l’appartement situé dans le bâtiment A, escalier 1 au 3ème étage, porte 4001 de l’immeuble du [Adresse 1]) ( constituant le lot n°39), sous astreinte de 240 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai qu’il plaira au tribunal de fixer ;
En tout état de cause,
– débouter M. [O] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
– condamner M. [O] à lui verser une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner M. [O] aux entiers dépens d’instance et d’appel.
La Ville de [Localité 3] soutient en substance que :
– dans le cadre d’une opération de contrôle de l’occupation des locaux d’habitation, une présomption d’infraction a été détectée concernant l’appartement litigieux ;
– suite à ce contrôle, les recherches effectuées ont permis de déterminer que M. [O] était propriétaire de cet appartement ;
– M. [O] a mis son bien en locations de courtes durées via des annonces consultables sur le site Airbnb de septembre 2016 à février 2020 a minima ;
– le décompte au cours des années 2018 et 2019 indique 161 nuitées en 2018 et 152 nuitées en 2019 d’après Airbnb ;
– au cours de l’année 2020, le bien a été loué 44 nuitées ;
– le bien litigieux a été utilisé à usage de meublé touristique loué pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, en infraction à la réglementation du changement d’usage définie dans les articles L. 631-7 et suivants du code de la construction et de l’habitation;
– en l’absence d’autorisation préalable, cette location meublée pour de courtes durées à une clientèle de passage, constitue un changement d’usage d’un local d’habitation pour une activité commerciale et caractérise l’infraction ;
– M. [O] a enfreint les dispositions des articles L. 324-1-1 du code de tourisme en ne transmettant pas le nombre de jours au cours desquels les locaux ont été loués ;
– le premier juge a commis une erreur de droit en rejetant la demande de retour à l’habitation sous astreinte au motif que l’annonce de location du local a été désactivée, dans la mesure où cette demande vise à garantir que les locaux sont retournés à un usage d’habitation et non pas seulement à mettre fin à la location de courte durée ;
– le seul fait que le bien litigieux ne soit plus proposé sur le site Airbnb est insuffisant pour prouver que les locaux litigieux sont retournés à un usage d’habitation ;
– l’article L. 324-1-1 IV du code du tourisme ne s’applique pas seulement aux résidences principales ;
– il convient donc de condamner M. [O] à payer une amende civile de 10.000 euros au titre de l’article L. 324-1-1 IV du code du tourisme.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 16 février 2022, M. [O] demande à la cour de :
– débouter la Ville de [Localité 3] de son appel comme mal fondé ;
– confirmer le jugement déféré du chef des dispositions querellées ;
– condamner la Ville de [Localité 3] à lui payer la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens d’appel.
M. [O] soutient en substance que :
– il imaginait que sa bonne foi et l’acceptation de la décision rendue permettraient de mettre un terme au différend qui l’opposait à la Ville de [Localité 3] ;
– une fois informé de la réglementation applicable, il a immédiatement supprimé son appartement de la liste Airbnb et renoncé définitivement à sa location à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile ;
– vivant aux Etats-Unis et souhaitant conserver ce bien pour son usage personnel lors de séjours en Europe, il ne pouvait consentir à une location classique qui lui interdirait alors de pouvoir y résider librement lors de ses séjours ;
– l’argument selon lequel l’alinéa 2 de l’article 324-1-1 IV du code du tourisme s’appliquerait indépendamment de la nature du meublé mis en location, résidence principale ou résidence secondaire, est inopérant ;
– l’article L. 324-1-1 IV du code du tourisme s’impose aux seules résidences principales et non aux résidences secondaires ;
– on ne saurait faire grief à M. [O] de ne pas avoir répondu aux courriers dont il n’a jamais eu connaissance ;
– depuis deux ans maintenant, il n’a jamais plus proposé son logement à la location à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile ;
– la demande de retour à l’habitation sera rejetée dans la mesure où l’annonce de mise en location sur le site Airbnb a été supprimée et qu’il n’y a pas eu de nouveau constat d’infraction depuis plus de deux ans.
SUR CE, LA COUR
La Ville de [Localité 3] a interjeté appel de la décision rendue en ce qu’elle a rejeté le surplus de ses demandes, à savoir celle portant sur l’infraction aux dispositions de l’article L324-1-1-IV du code de tourisme en ne transmettant pas le nombre de jours au cours desquels l’appartement a été loué dans le mois qui a suivi la demande, et de condamner M. [O] à payer une amende civile de 10.000 euros au titre de l’article L 324-1-1 V du code de tourisme, ordonner le retour à l’habitation des locaux transformés sans autorisation, sous astreinte de 240 euros par jour de retard à l’expiration du délai qu’il plaira au tribunal de fixer, se réservant l’astreinte.
M. [O] pour sa part sollicite aux termes de ses dernières écritures la confirmation du jugement rendu.
Il s’en déduit que la cour n’est pas saisie de la question de l’usage d’habitation des lieux, laquelle n’est pas discutée, ni de l’application des dispositions de l’article L631-7 du code de la construction et de l’habitation, ni encore du quantum de l’amende prononcée.
S’agissant de l’infraction aux dispositions de l’article L.324-1-1 IV du code du tourisme, à savoir le défaut de transmission relative au nombre de jours loués, il sera relevé que l’obligation de transmission de l’article L.324-1-1 IV alinéa 2 du code du tourisme ne peut concerner que les locations visés à l’article L.324-1-1 IV alinéa premier, à savoir les locations d’un meublé de tourisme déclaré comme résidence principale, étant rappelé que les textes relatifs à une infraction civile, pouvant conduire au prononcé d’une amende, doivent s’interpréter strictement.
La Ville de [Localité 3] affirmant elle-même que le bien litigieux n’est pas la résidence principale de M. [O] qui réside aux Etats-Unis, l’infraction aux dispositions légales susvisées n’est pas caractérisée, de sorte que le rejet de la demande de la Ville de [Localité 3] à cet égard sera également confirmé.
En ce qui concerne la demande de la Ville portant sur le retour à l’habitation des lieux litigieux sous astreinte, il est justifié par M. [O] que l’annonce de location sur le site Airbnb a été supprimée dès l’année 2020 et qu’aucune infraction n’a été relevée depuis, ce qui suffit à établir le retour à l’habitation. La décision entreprise sera également confirmée de ce chef.
Le sort des dépens et des frais irrépétibles a été exactement tranché par le premier juge.
En cause d’appel, la commune appelante devra indemniser l’intimé de ses frais non répétibles exposés et sera condamnée aux dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant dans les limites de sa saisine,
Confirme le jugement entrepris ;
Y ajoutant,
Condamne la Ville de [Localité 3] à verser à M. [O] la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel ;
Condamne la Ville de [Localité 3] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE