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Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 2
ARRET DU 27 OCTOBRE 2022
(n° , 8 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/05773 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFPVT
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Février 2022 -Président du TJ de PARIS – RG n° 20/58324
APPELANTE
LA VILLE DE [Localité 6], prise en la personne de Madame la Maire de [Localité 6], Mme [Y] [C], domiciliée en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée et assistée par Me Fabienne DELECROIX de la SELARL DELECROIX-GUBLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R229
INTIME
M. [T] [X]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté et assistée par Me Romain ROSSI LANDI de la SELEURL ROSSI-LANDI AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0014
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Septembre 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre
Thomas RONDEAU, Conseiller,
Michèle CHOPIN, Conseillère,
Qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
*****
EXPOSÉ DU LITIGE
Par exploit délivré le 19 octobre 2020, la Ville de [Localité 6] a fait citer M. [X] devant le président du tribunal judiciaire de Paris saisi selon la procédure accélérée au fond, sur le fondement notamment des dispositions de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation, concernant l’appartement situé [Adresse 1] (bâtiment B, escalier 1, rez-de-chaussée, porte 2001, lot n°53).
Par jugement du 20 janvier 2021, le président du tribunal a sursis à statuer sur les demandes de la Ville de [Localité 6] dans l’attente d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne appelée, sur renvoi préjudiciel de la Cour de cassation (Civ. 3e, 15 nov. 2018, n°17-26.156), à apprécier la compatibilité de la réglementation nationale, telle que celle prévue par l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation, à la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006.
Par arrêt du 22 septembre 2020, la Cour de justice de l’Union européenne a considéré la réglementation nationale conforme aux dispositions de la directive 2006/123/CE (CJUE, 22 septembre 2020, Cali Apartments, affaires jointes C-724/18 et C-727/18).
Par cinq arrêts en date du 18 février 2021, la Cour de cassation a tiré les conséquences de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne. Elle a notamment jugé que la réglementation locale de la Ville de [Localité 6] sur le changement d’usage est conforme à la réglementation européenne.
Par conclusions déposées et soutenues à l’audience, la Ville de [Localité 6] demandait de voir :
‘ condamner M. [X] à lui payer une amende civile de 50.000 euros,
‘ ordonner le retour à l’habitation des locaux transformés sans autorisation, sous astreinte de 252 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai qu’il plaira au tribunal de fixer, lequel se réservera la liquidation de l’astreinte,
‘ le condamner au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
En réplique, M. [X] demandait le rejet des prétentions adverses, la réduction de l’amende à la somme de 5.000 euros, la condamnation de la ville à lui verser 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par jugement contradictoire rendu selon la procédure accélérée au fond du 16 février 2022, le magistrat saisi a :
– débouté la ville de [Localité 6] de l’ensemble de ses demandes ;
– rejeté le surplus des demandes ;
– condamné la ville de [Localité 6] aux dépens ;
– rappelé que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire de plein droit.
Par déclaration du 17 mars 2022, la Ville de [Localité 6] a relevé appel de la décision.
Dans ses conclusions remises le 04 mai 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la Ville de [Localité 6] demande à la cour, au visa des articles L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation et L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation, de :
– juger celle-ci recevable et bien fondée en son appel ;
– infirmer le jugement du 16 février 2022 en toutes ses dispositions en ce qu’il a :
‘ rejeté la demande de condamnation à une amende civile sur le fondement des dispositions des articles L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation,
‘ rejeté la demande portant sur le retour à l’habitation des locaux,
‘ rejeté la demande portant sur le retour à l’habitation des locaux,
‘ condamné celle-ci aux dépens ;
en conséquence,
– juger que M. [X] a enfreint les dispositions de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation ;
en conséquence,
– condamner M. [X] à lui payer une amende civile de 50.000 euros ;
– ordonner le retour à l’habitation des locaux transformés sans autorisation, sis [Adresse 1], lot 53, sous astreinte de 252 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai qu’il plaira au tribunal de fixer ;
– condamner M. [X] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– le condamner aux entiers dépens.
La Ville de [Localité 6] soutient en substance :
– que les recherches ont permis d’identifier un appartement sis [Adresse 1] proposé à la location de courtes durées sur le site airbnb ;
– que le 11 mars 2020, elle a adressé à son propriétaire, M. [X], une lettre recommandée avec accusé de réception lui rappelant la réglementation et l’invitant à prendre rendez-vous et à communiquer divers éléments dont le relevé de transactions et que le constat d’infraction a été dressé le 12 août 2020 ;
– que le local en cause est à usage d’habitation comme l’attestent l’extrait du registre cadastral, le relevé de propriété, la fiche modèle H2 du 20 septembre 1970, la fiche R et le registre des hypothèques ;
– qu’en effet, la fiche H2 mentionne une occupation par le propriétaire qui a acquis le bien le 12 mai 1969 si bien qu’elle emporte présomption d’usage d’habitation au 1er janvier 1970 ;
– qu’il est par ailleurs difficilement envisageable que le bien ait pu changer d’usage entre le jour de l’acquisition le 12 mai 1969 et l’occupation par le propriétaire ;
– que cette fiche mentionne un local de 24 m² composé de deux chambre, une cuisine et une entrée, qu’elle est remplie pour l’année fiscale 1970 et désigne l’occupant qui occupe le local au 1er janvier 1970 et qui sera redevable des taxes ;
– qu’en outre, le registre des hypothèques précise que le lot 53 est un « appartement » qui a été vendu le 12 mai 1969 à M. [Z] au prix de 17.000 F, qu’il a été ensuite revendu en 1973 si bien qu’il était à usage d’habitation puisque spécifié comme étant un appartement dans le registre des hypothèques ;
– qu’enfin la fiche R, ligne 20, corrobore que M. [Z] occupe l’appartement du RDC bâtiment B ;
– qu’ainsi ces éléments démontrent que le local était à usage d’habitation le 1er janvier 1970 ;
– que le bien litigieux n’est pas la résidence du loueur dès lors que le logement est déclaré en résidence secondaire ;
– que le bien a fait l’objet de locations de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile via le site airbnb.fr avec un total de 327 nuitées en 2018 et 321 nuitées en 2019 ;
– que M. [X] n’occupe pas l’appartement dont il est propriétaire, comme résidence principale et le propose à la location meublée pour de courtes durées sans autorisation ni compensation en infraction aux dispositions des articles L. 631-7 et suivants du code de la construction et de l’habitation ;
– qu’en l’absence d’autorisation préalable, cette location meublée pour de courtes durées à une clientèle de passage constitue un changement d’usage d’un local d’habitation pour une activité commerciale et caractérise l’infraction prévue et réprimée à l’article L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation ;
– que le gain total estimé peut être estimé à 82.534 euros alors que le gain régulier aurait été de 22.620 euros.
Dans ses conclusions remises le 20 mai 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, M. [X] demande à la cour, au visa de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation, des articles L. 324-3 et L. 324-4 du code du tourisme et des articles 9, 31 et 32 du code de procédure civile, de :
à titre principal,
– confirmer l’ordonnance en la forme des référés rendue le 16 février 2022 en toutes ses dispositions ;
– débouter la mairie de [Localité 6] de l’ensemble de ses demandes ;
à titre subsidiaire, et dans l’hypothèse extraordinaire où il serait condamné au paiement d’une amende civile,
– fixer l’amende civile à un montant symbolique qui ne saurait dépasser la somme de 500 euros ;
en tout état de cause,
– condamner la mairie de [Localité 6] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et d’appel.
M. [X] soutient en substance :
– que, pour établir la nature de local destiné à l’habitation du lot n°53 de l’immeuble sis [Adresse 1] appartenant à M. [X], la mairie de [Localité 6] prétend que le local serait à usage d’habitation en se fondant sur la déclaration H2 qui précise à la rubrique « occupation du local » que le « local est occupé par le propriétaire » ;
– que l’appelante prétend qu’il serait « difficilement envisageable que le bien ait pu changer d’usage entre le jour de l’acquisition le 12 mai 1969 et l’occupation par le propriétaire » ;
– que la cour n’a pas à rechercher ce qui est envisageable ou pas dès lors que la fiche H2 est datée du 25 septembre 1970 et non pas du 1er janvier 1970 ;
– qu’en outre, la fiche R en date du 5 octobre 1970 et produite par la mairie de [Localité 6] est très peu lisible et ne permet pas de corroborer l’usage d’habitation, la fiche R n’ayant pour objet que de décrire la situation de l’immeuble à la date de la souscription, en l’espèce au 5 octobre 1970, aucun élément ne permettant d’en déduire l’usage des lieux au 1er janvier 1970 ;
– qu’en outre, comme l’a relevé le premier juge, le fait que le relevé de propriété mentionne la lettre H pour habitation dans la case Af pour affectation n’a pas pour effet d’établir la nature de l’usage du bien au 1er janvier 1970 ;
– qu’ainsi, la mairie de [Localité 6] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que le lot n°53, de l’immeuble était affecté à usage d’habitation au 1er janvier 1970 ;
– que, subsidiairement, il conviendra de réduire le montant de l’amende en ce que d’une part, à la délivrance de l’assignation, il avait déjà cessé toute mise en location saisonnière depuis le mois de février 2020, que l’appartement a ensuite été loué de façon traditionnelle à titre de résidence principale et que d’autre part, le montant de l’amende sollicitée est disproportionné dès lors qu’il n’a jamais essayé de frauder et de dissimuler son activité de loueur de meublés de tourisme ;
– qu’en outre, l’amende prononcée devra être revue à la baisse dès lors que la mairie de [Localité 6] ne distingue pas entre le gain total et le gain illégal perçu.
SUR CE LA COUR
L’article L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation, tel qu’issu de la loi du n°2016-1547 du 18 novembre 2016, dispose que toute personne qui enfreint les dispositions de l’article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50.000 euros (anciennement 25.000 euros avant la loi du 18 novembre 2016) par local irrégulièrement transformé.
Cette amende est prononcée par le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond, sur requête du maire de la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé ou de l’Agence nationale de l’habitat et sur conclusions du procureur de la République, partie jointe avisée de la procédure. Le produit de l’amende est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé ce local. Le tribunal de grande instance compétent est celui dans le ressort duquel est situé le local.
Sur requête du maire de la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé ou de l’Agence nationale de l’habitat, le président du tribunal ordonne le retour à l’usage d’habitation du local transformé sans autorisation, dans un délai qu’il fixe. A l’expiration de celui-ci, il prononce une astreinte d’un montant maximal de 1.000 euros par jour et par mètre carré utile du local irrégulièrement transformé. Le produit en est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé.
Passé ce délai, l’administration peut procéder d’office, aux frais du contrevenant, à l’expulsion des occupants et à l’exécution des travaux nécessaires.
Il résulte en outre de l’article L. 631-7, dans sa version résultant de la loi n°2014-366 du 24 mars 2014, que la présente section est applicable aux communes de plus de 200.000 habitants et à celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. Dans ces communes, le changement d’usage des locaux destinés à l’habitation est, dans les conditions fixées par l’article L. 631-7-1, soumis à autorisation préalable.
Constituent des locaux destinés à l’habitation toutes catégories de logements et leurs annexes, y compris les logements-foyers, logements de gardien, chambres de service, logements de fonction, logements inclus dans un bail commercial, locaux meublés donnés en location dans les conditions de l’article L. 632-1.
Pour l’application de la présente section, un local est réputé à usage d’habitation s’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970. Cette affectation peut être établie par tout mode de preuve. Les locaux construits ou faisant l’objet de travaux ayant pour conséquence d’en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 sont réputés avoir l’usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés.
Toutefois, lorsqu’une autorisation administrative subordonnée à une compensation a été accordée après le 1er janvier 1970 pour changer l’usage d’un local mentionné à l’alinéa précédent, le local autorisé à changer d’usage et le local ayant servi de compensation sont réputés avoir l’usage résultant de l’autorisation.
Sont nuls de plein droit tous accords ou conventions conclus en violation du présent article.
Le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile constitue un changement d’usage au sens du présent article.
Pour l’application des dispositions susvisées, il y a donc lieu d’établir :
– l’existence d’un local à usage d’habitation, un local étant réputé à usage d’habitation s’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970, sauf pour les locaux construits ou faisant l’objet de travaux ayant pour conséquence d’en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 qui sont réputés avoir l’usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés, le formulaire administratif de type H1 rempli à cette époque permettant de préciser l’usage en cause ;
– un changement illicite, sans autorisation préalable, de cet usage, un tel changement étant notamment établi par le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, hypothèse excluant notamment la location saisonnière de son logement résidence principale, pour une durée n’excédant pas 120 jours par an, la location d’un meublé résidence principale (titre 1er bis de la loi du 6 juillet 1989) ou encore la location d’un meublé dans le cadre d’un bail mobilité (titre 1er ter de la loi du 6 juillet 1989).
Il est en outre constant que, s’agissant des conditions de délivrance des autorisations, la Ville de [Localité 6] a adopté, par règlement municipal et en application de l’article L. 631-7-1 du code de la construction et de l’habitation, le principe d’une obligation de compensation par transformation concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage.
En l’espèce, les parties s’opposent sur les éléments de preuve à apporter par la ville de ce que le local dont il s’agit est bien un local à usage d’habitation au sens de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation, étant rappelé qu’un local est réputé à usage d’habitation au sens de ce texte s’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970, que cette affectation peut être établie par tout mode de preuve et que la preuve d’une affectation de fait à l’usage d’habitation postérieurement au 1er janvier 1970, date de référence, est inopérante.
Il revient ainsi à la Ville de [Localité 6], pour caractériser l’infraction dénoncée de changement d’usage illicite, de démontrer avant tout que le local en cause était bien affecté au 1er janvier 1970 à l’usage d’habitation.
La fiche H2 a été ici remplie le 20 septembre 1970.
Elle décrit le local comme un appartement à usage exclusif d’habitation de 24 m² et fait état d’une occupation par le propriétaire, sans donc mention d’un locataire et d’un loyer au 1er janvier 1970, le bien ayant été acquis le 12 mai 1969.
Si ces mentions ont été portées à une date assez proche du 1er janvier 1970, elles ne suffisent cependant à établir un usage d’habitation au 1er janvier 1970, étant observé :
– qu’aux termes de l’article L 631-7 du code de la construction et de l’habitation, le local doit être affecté à un usage d’habitation au 1er janvier 1970, le texte ne posant pas une simple présomption d’affectation à un usage d’habitation ;
– que la mention de l’occupation du bien par le propriétaire ne se réfère pas à la date du 1er janvier 1970 (contrairement à l’hypothèse de la perception d’un loyer au 1er janvier 1970), en sorte que l’occupation par le propriétaire ne peut être considérée comme étant acquise dès le 1er janvier 1970 ;
– qu’au demeurant, comme le souligne d’ailleurs habituellement la Ville de [Localité 6], la preuve à apporter n’est pas celle de l’occupation du bien au 1er janvier 1970 mais de l’affectation du bien à un usage d’habitation à cette date de référence ;
– que de même, si le local est décrit sur la fiche comme étant à usage exclusif d’habitation, cette description ne vaut qu’à la date à laquelle la fiche est renseignée, soit au 20 septembre 1970.
Si la Ville de [Localité 6] soutient que l’établissement de la fiche H2 impliquerait nécessairement un usage d’habitation au 1er janvier 1970, les dispositions invoquées du décret n°69-1076 du 28 novembre 1969 ne permettent toutefois pas non plus une telle déduction (article 38, les déclarations sont établies sur des formules spéciales fournies par l’administration ; article 39, la date de référence de la première révision foncière quinquennale des évaluations foncières des propriétés bâties est fixée au 1er janvier 1970 ; article 40, les formules visées à l’article 38 comportent, à la date de leur souscription, les renseignements utiles à l’évaluation de chaque propriété ou fraction de propriété […] la date limite d’envoi ou de remise des déclarations est fixées au plus tard en ce qui concerne les biens autres que les établissements industriels au 15 octobre 1970 pour les communes de plus de 5.000 habitants).
La présomption d’usage d’habitation au 1er janvier 1970 telle qu’alléguée ne résulte ainsi ni de ces textes ni, par ailleurs, d’aucun autre texte.
Le relevé de propriété et le relevé cadastral qui sont produits par la Ville de [Localité 6] n’établissent pas plus l’affectation du bien à un usage d’habitation au 1er janvier 1970, ces documents ayant été établis à la date du constat réalisé par l’agent assermenté de la ville.
Le registre des hypothèques précise simplement que le lot est un “appartement” vendu le 12 mai 1969, la fiche R, qui n’est datée que du 5 octobre 1970, rappelant que le propriétaire occupait l’appartement sans indication, ces pièces n’étant donc pas plus probantes sur l’usage d’habitation.
La ville ne produit pas l’acte d’acquisition du 12 mai 1969, qui aurait été susceptible d’établir que les locaux étaient bien affectés à un usage d’habitation dès cette date.
Aucun autre élément probant n’est versé aux débats s’agissant de la preuve de l’usage d’habitation, qui n’apparaît donc pas établi au 1er janvier 1970.
Dans ces conditions, il y a lieu pour la cour de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, en ce compris le sort des frais et dépens de première instance, exactement réglé par le premier juge.
A hauteur d’appel, la Ville de [Localité 6] devra indemniser M. [X] pour les frais non répétibles exposés et sera condamnée aux dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris ;
Y ajoutant,
Condamne la Ville de [Localité 6] à payer à M. [T] [X] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel ;
Condamne la Ville de [Localité 6] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE