Sous-location : 1 décembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 22/09435

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Sous-location : 1 décembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 22/09435
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 2

ARRÊT DU 01 DECEMBRE 2022

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/09435 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CF2EV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Avril 2022 -Président du TJ de Paris – RG n° 21/52229

APPELANTE

LA VILLE DE [Localité 7], prise en la personne de Madame la Maire de [Localité 7], Mme [Z] [D], domiciliée en cette qualité audit siège

Hôtel de Ville

[Localité 4]

Représentée par Me Colin MAURICE de la SARL CM & L AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1844

Substitué à l’audience par Me Claire LITAUDON, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Mme [P] [S]

[Adresse 2]

[Localité 3]

M. [Y] [E]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentés par Me Caroline DARCHIS de la SARL MANEO AVOCAT, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 192

Assistés par Me Quentin VRILLIAUX, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 octobre 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller et Michèle CHOPIN, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

Par exploit du 18 février 2021, la ville de [Localité 7] a fait assigner M. [Y] [E] et Mme [P] [S] devant le tribunal judiciaire de Paris, saisi selon la procédure accélérée au fond, sur le fondement des dispositions des articles L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation, concernant un appartement situé [Adresse 1]) (bâtiment 4, étage 5, porte 2, lots n°12 ; 13 et 14), aux fins de les voir condamnés in solidum au paiement :

‘ d’une amende civile de 50.000 euros en vertu de l’article L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation,

‘ d’une amende civile de 10.000 euros en vertu de l’article L .324-1-1 IV du code du tourisme,

‘ dont le produit lui sera intégralement versé,

‘ de la somme de 2.000 au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens.

Par jugement contradictoire rendu selon la procédure accélérée au fond le 13 avril 2022, le tribunal judiciaire de Paris :

– condamné in solidum M. [Y] [E] et Mme [P] [S] au paiement de :

‘ une amende civile de un euro symbolique dont le produit sera versé à la ville de [Localité 7],

‘ la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles,

– rejeté le surplus des demandes ;

– condamné in solidum M. [Y] [E] et Mme [P] [S] aux dépens ;

– rappelé que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire de plein droit.

Par déclaration du 11 mai 2022, la ville de [Localité 7] a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 11 août 2022, la ville de [Localité 7] demande à la cour de :

– la juger recevable en son appel, en ses conclusions et l’y juger bien fondée ;

– statuer ce que de droit sur la recevabilité de l’appel incident de M. [E] et de Mme [S] ;

– infirmer le jugement rendu selon la procédure accélérée au fond le 13 avril 2022 par le tribunal judiciaire de Paris, en ce que le premier juge a :

‘ condamné in solidum M. [Y] [E] et Mme [P] [S] au paiement de :

* une amende civile de un euro symbolique dont le produit sera versé à la ville de [Localité 7],

* la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles,

– rejeté le surplus des demandes ;

Statuant de nouveau,

– juger que Mme [S] et M. [E] ont enfreint les dispositions de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation en changeant l’usage et en louant pour de courte durée l’appartement situé dans le bâtiment 4, cinquième étage de l’immeuble du [Adresse 1]) (constituant les lots 12, 13 et 14) ;

– condamner in solidum Mme [S] et M. [E] à une amende civile de 50.000 euros et ordonner que le produit de cette amende lui sera intégralement versé conformément aux dispositions de l’article L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation ;

– juger que Mme [S] et M. [E] ont enfreint les dispositions de l’article L. 324-1-1 IV du code de tourisme en ne transmettant le nombre de jours au cours desquels l’appartement a été loué dans le mois qui a suivi la demande ;

– condamner in solidum Mme [S] et M. [E] à payer une amende civile de 10.000 euros de l’article L. 324-1-1 V du code de tourisme et ordonner que le produit de cette amende lui sera intégralement versé ;

En tout état de cause,

– débouter Mme [S] et M. [E] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions formulées dans le cadre de l’appel incident ;

– condamner in solidum Mme [S] et M. [E] à lui verser une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner in solidum Mme [S] et M. [E] aux entiers dépens d’instance et d’appel.

La ville de [Localité 7] soutient en substance que :

– l’usage d’habitation au 1er janvier 1970 est établi par les calepins des propriétés bâties qui précisent les numéros de lots concernés, le nom du propriétaire, Mme [V], et de l’occupant et la valeur locative du bien en 1964, par la fiche « R » du 24 novembre 1970 et la fiche « H2 » du 17 janvier 1971 si bien qu’entre 1964 et 1971 le propriétaire est resté le même comme l’a justement relevé le tribunal judiciaire de Paris ;

– le bien litigieux n’est pas la résidence principale du loueur dès lors que Mme [S] et M. [E] résident au [Adresse 2]) ;

– le quantum de l’amende devra être revu à la hausse compte étant tenu de l’objectif d’intérêt général de la loi et des circonstances de l’espèce.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 27 juillet 2022, Mme [S] et M. [E] demandent à la cour, de :

– les juger recevables et bien fondés en leurs demandes, fins et conclusions, ainsi qu’en leur appel incident, et y faisant droit ;

– déclarer la ville de [Localité 7] irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes et l’en débouter ;

A titre principal,

– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 13 avril 2022 en ce qu’il a jugé qu’ils ont enfreint les dispositions des articles L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation ;

Statuant à nouveau de ce chef infirmé,

– juger qu’ils n’ont pas enfreint les dispositions des articles L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation ;

– débouter la ville de [Localité 7] de sa demande de les voir condamner in solidum à une amende civile de 50.000 euros et de voir ordonner que le produit de cette amende sera intégralement versé à la ville de Paris, sur le fondement de l’article L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait retenir que les intimés ont enfreint les dispositions des articles L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 13 avril 2022 en ce qu’il les a condamnés au paiement d’une amende civile d’un euro symbolique dont le produit sera versé à la ville de Paris ;

En tout état de cause,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 13 avril 2022 en ce qu’il a jugé qu’ils n’ont pas enfreint les dispositions de l’article L. 324-1-1 du code du tourisme ;

– débouter la ville de [Localité 7] de sa demande de les voir condamnés in solidum à une amende civile de 10.000 euros et de voir ordonner que le produit de cette amende sera intégralement versé à la ville de Paris, sur le fondement de l’article L. 324-1-1 V du code du tourisme ;

– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 13 avril 2022 en ce qu’il les a condamnés à régler une somme de 800 euros à la ville de [Localité 7] au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens ;

Statuant à nouveau de ce chef infirmé,

– débouter la ville de [Localité 7] de ses demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens ;

– condamner la ville de [Localité 7] à leur régler la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Mme [S] et M. [E] soutiennent en substance que :

– l’appartement situé au [Adresse 1]) constituait la résidence principale de M. [E] pendant toute la période au cours de laquelle l’appartement a été loué pour de courtes durées dans la mesure où il a exercé ses fonctions entre 2009 et octobre 2019 au sein du site de [Adresse 5] de la société Edf douze mois sur douze et rentrait simplement le week-end en Bretagne ;

– la notion de résidence fiscale n’est pas celle retenue par l’article L. 631-7 A in fine du code de la construction et de l’habitation qui se réfère à l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989 qui définit la résidence principale comme le logement occupé au moins huit mois par an ;

– dès lors qu’il a occupé sur l’année 2019 pendant au mois huit mois le bien litigieux, rien ne lui interdisait de le louer sur de courtes durées tout au long de cette même année 2019 ;

– subsidiairement, le jugement rendu devra être confirmé en ce qu’il a limité le montant de l’amende civile à un euro symbolique, qui parait justifié en raison de la signature d’un bail en location classique à effet au 31 août 2020 ;

– en tout état de cause, ils n’ont pas enfreint l’article L. 324-1-1 du code du tourisme et que la lettre versé aux débats par la ville de [Localité 7] a été envoyée à la mauvaise adresse et lors de la deuxième demande ils avaient déjà satisfait à la demande de la ville de [Localité 7] via la plateforme airbnb, de sorte qu’ils doivent être considérés comme étant de bonne foi.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE

Sur l’infraction reprochée en application des dispositions de l’article L 631-7 et L 651-2 du code de la construction et de l’habitation

Sur le rappel des textes applicables, il convient de se référer à la décision de première instance qui en a fait un exposé exhaustif, la cour rappelant simplement :

– qu’en application des articles L.631-7 et L.651-2 du code de la construction et de l’habitation et conformément à l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à la Ville de [Localité 7] d’établir :

– que l’existence d’un local à usage d’habitation, un local étant réputé à usage d’habitation si la preuve est apportée par tout moyen qu’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970, sauf pour les locaux construits ou faisant l’objet de travaux ayant pour conséquence d’en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 qui sont réputés avoir l’usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés ;

– qu’un changement illicite, sans autorisation préalable, de cet usage, un tel changement étant notamment établi par le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile ;

– que selon l’article L. 631-7-1 A du code de la construction et de l’habitation, “[…] Lorsque le local à usage d’habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l’article 2 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986, l’autorisation de changement d’usage prévue à l’article L.631-7 du présent code ou celle prévue au présent article n’est pas nécessaire pour le loueur pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile.”

La Ville de [Localité 7] produit en cause d’appel les documents qu’elle a produits en première instance, étant précisé que l’usage d’habitation n’est pas in fine discuté par les intimés.

C’est par des motifs exacts et pertinents, que la cour approuve que le premier juge a considéré que l’usage d’habitation du bien au 1er janvier 1970 se trouve suffisamment établi par les éléments suivants :

– le calepin des propriétés bâties daté de l’année 1964 mentionne le nom du propriétaire, Mme [H] [V],

– le nom de Mme [V] se retrouve sur la fiche R et la fiche H2, établie le 17 octobre 1971,

– la fiche H2 datée du 17 octobre 1971précise que le bien a été acquis en 1961 par adjudication par Mme [V] elle-même,

– le calepin des propriétés bâties précise en outre qu’en 1964, alors que Mme [V] était déjà propriétaire, les lots n°12 et n°13 étaient occupés par Mme [U] [T], le lot n°14 par Mme [R], ces éléments attestant d’une occupation continue du bien à titre de domicile, à tout le moins de résidence entre 1964 et 1971, et par conséquent d’un usage d’habitation au 1er janvier 1970.

Il n’est en outre pas discuté que le bien a conservé cet usage d’habitation depuis 1970, comme en atteste la fiche de révision foncière H2 du 5 décembre 2003.

M. [E] soutient avoir fait du bien en cause sa résidence principale de janvier 2015 à octobre 2019, ce, pour les besoins de son poste exercé au sein de la société EDF et basé sur le site de [Localité 7] [Adresse 5], alors que son épouse et ses enfants résidaient en Bretagne.

La résidence principale s’entend aux termes de l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989 comme le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l’habitation.

M [E] justifie bien avoir occupé les lieux situés au [Adresse 1] à compter du 1er janvier 2015, notamment par les éléments suivants :

– l’attestation de M [A], délégué cadres dirigeants du pôle clients du groupe EDF, indiquant que M [E] travaillait de janvier 2015 à octobre 2019 à [Localité 7]-[Adresse 5] et sa lettre d’engagement du 14 novembre 2014, aux termes de laquelle il était convenu qu’il exercerait ses responsabilités sur quatre jours par semaine à [Localité 7] dans les locaux d’EDF à [Adresse 5],

– les attestations de M [I], [K], [O], [L] et de Mmes [G] et [J], ses collègues de travail confirmant que M [E] était à cette période présent à [Localité 7] quatre jours par semaine, son épouse et ses enfants résidant en Bretagne,

– les relevés bancaires du compte joint des époux [E] qui font apparaître des dépenses en région parisienne, dont certaines, régulières, au profit du magasin Bio C’Bon de la rue [Localité 8] à [Localité 7], à coté de l’appartement en cause.

Il justifie en outre avoir en octobre 2019 pris ses fonctions de directeur commerce délégué pour la région Ouest, en Bretagne, et avoir souhaité entre 2015 et 2019 “amortir les frais conséquents générés par les obligations professionnelles de M [E]”.

Cependant, alors qu’il n’est pas discuté que la présence de M. [E] quatre jours par semaine dans les lieux pour les besoins de son poste basé à [Localité 7] [Adresse 5], l’appariement étant loué en airbnb les fins de semaine ainsi que le démontre le calendrier des réservations, force est de constater que l’occupation dudit appartement n’atteint pas les 8 mois par an, au moins, requis par les dispositions de l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989. En effet, à raison de quatre jours par semaine durant 52 semaines par an compte n’étant pas tenu des périodes de vacances, dont le quantum est ignoré, la période d’occupation du logement par M. [E] peut-être estimée à 208 jours, alors que les huit mois requis s’élèvent à 240 jours. De la sorte, l’appartement occupé dans ces circonstances par M. [E] ne peut être considéré comme sa résidence principale sur la période concernée, alors, au surplus, que les époux [E]-[S] ont déclaré de 2015 à 2019 leurs revenus en commun de 2015 à 2019, et leur résidence bretonne comme résidence principale.

Ainsi, M.[E] et Mme [S] n’établissent pas de manière suffisante que M.[E] a occupé l’appartement du [Adresse 1] sur une durée de huit mois au moins au cours des années 2015 à 2019, ce qui ne leur permet pas de se prévaloir des dispositions de l’article L 631-7-1 A du code de tourisme jusqu’au 1er octobre 2019.

M.[E] a incontestablement bénéficié d’une mutation professionnelle en Bretagne à compter du 1er octobre 2019, de sorte qu’à cette date, les lieux situés au [Adresse 1] sont devenus la résidence secondaire du couple.

De la sorte, le bien situé [Adresse 1] ne peut être considéré comme résidence principale de M. [E].

De plus, le logement a bien fait l’objet de locations de courtes durées à une clientèle de passage, sans que ne soit mise en oeuvre une mesure de compensation, étant rappelé :

– que le constat établi par l’agent de la ville de [Localité 7] le 19 novembre 2020 fait état de 121 commentaires au 5 mars 2020 sous l’annonce sur le site airbnb proposant le bien à la location de courte durée, le plan ancien commentaire étant d’août 2015 et le plus récent de février 2020,

– qu’il est en outre précisé par le contrôleur que sous les annonces, l’hôte se prénomme [Y], comme M [E], et propose à la location un logement entier pour quatre personnes avec un prix de 120 euros et frais hôteliers,

– que le constat complémentaire du 5 mars 2021 fait état de ce que l’annonce proposant le bien à la location est toujours active.

L’infraction aux dispositions des articles L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation est ainsi parfaitement caractérisée.

Concernant le quantum de l’amende, il y a lieu de rappeler le caractère d’intérêt général de la législation, l’objectif étant de lutter contre les difficultés de logement à [Localité 7].

La ville de [Localité 7] rappelle à juste titre que le gain tiré de la location de courte durée peut être estimé pour 22,5 nuits à la somme mensuelle de 2.700 euros, là où le loyer mensuel classique compte tenu du loyer médian aurait été de 1.164, 40 euros, et que le montant de la compensation aurait été de 82.000 euros.

L’infraction a perduré à tout le moins de 2015 à mars 2020 selon le constat initial et jusqu’en mars 2021, selon le constat complémentaire, soit en tout état de cause sur un temps long.

Les époux [E] produisent des échanges avec une infirmière de l’hôpital [6] dont il ressort qu’ils ont pu en mai 2020 mettre leur appartement à sa disposition et produisent ensuite un bail d’habitation à effet au 31 août 2020 portant sur les lieux.

L’amende civile sera ainsi fixée à la somme de 20.000 euros, montant qui tient compte de l’ensemble des éléments cités ci-dessus.

Aussi, la décision sera infirmée en ce qu’elle a condamné condamné in solidum M [E] et Mme [S] à une amende d’un euro à titre symbolique à verser à la ville de [Localité 7].

– Sur l’infraction aux dispositions de l’article L. 324-1-1 IV du code de tourisme

Il résulte de l’article L. 324-1-1 IV du code de tourisme que, dans les communes ayant mis en ‘uvre la procédure d’enregistrement de la déclaration préalable mentionnée au III, toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme qui est déclaré comme sa résidence principale ne peut le faire au-delà de cent vingt jours au cours d’une même année civile, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure.

La commune peut, jusqu’au 31 décembre de l’année suivant celle au cours de laquelle un meublé de tourisme a été mis en location, demander au loueur de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé a été loué. Le loueur transmet ces informations dans un délai d’un mois, en rappelant l’adresse du meublé et son numéro de déclaration.

Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations résultant du IV est passible d’une amende civile dont le montant ne peut excéder 10.000 euros.

En l’espèce, il sera relevé que l’obligation de transmission de l’article L.324-1-1 IV alinéa 2 du code du tourisme ne peut concerner que les locations visés à l’article L.324-1-1 IV alinéa premier, à savoir les locations d’un meublé de tourisme déclaré comme résidence principale, étant rappelé :

– que les textes relatifs à une infraction civile, pouvant conduire au prononcé d’une amende, doivent s’interpréter strictement ;

– que l’article L. 324-1-1 IV, constitué de deux alinéas, doit s’analyser en son ensemble ;

– que la transmission du nombre de jours vise à établir si la limite des 120 jours a été dépassée, de sorte que cette disposition concerne bien logiquement les meublés déclarés comme résidence principale, astreints à cette limite.

Nonobstant le fait que la ville de [Localité 7] indique elle-même que le bien n’est pas la résidence principale de M. [E], force est de constater que ce dernier justifie au surplus résider à une autre adresse en Bretagne, et bien qu’il n’ait pas procédé ici à une déclaration d’un meublé de tourisme comme résidence principale le 20 novembre 2017, il apparaît que la lettre de la ville de [Localité 7] datée du 9 août 2019 sollicitant la transmission du nombre de nuitées pour les années 2018 et 2019 a été adressée à une adresse erronée, et que lors de la seconde demande de cet ordre de la ville de [Localité 7], adressée cette fois à la bonne adresse, il avait été satisfait à cette demande par la plateforme airbnb, étant précisé qu’il est constant que les locations litigieuses sont intervenues exclusivement sur cette plateforme. Les époux [E] ont de surcroît transmis à la ville de [Localité 7] l’historique des locations en première instance comme en appel.

Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge en ce qu’il a rejeté la demande de la ville de [Localité 7] sur ce point.

Sur les autres demandes

Le sort des dépens et frais de première instance a été exactement réglé par le premier juge, de sorte que la décision sera également confirmée sur ce point.

Les époux [E] qui succombent seront condamnés aux dépens de l’appel, ainsi qu’à payer à la ville de [Localité 7] une somme en application de l’article 700 du code de procédure civile, ce, dans les termes du dispositif.

PAR CES MOTIFS

Infirme l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a condamné in solidum M.[E] et Mme [S] à une amende civile de un euro symbolique à verser à la ville de [Localité 7] ;

Confirme la décision rendue pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne in solidum M. [E] et Mme [S] à une amende de 20.000 euros, dont le produit sera versé à la ville de [Localité 7],

Condamne in solidum M. [E] et Mme [S] à payer à la ville de [Localité 7] la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel ;

Condamne in solidum M. [E] et Mme [S] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

 


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