Sous-location : 10 janvier 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 20/01837

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Sous-location : 10 janvier 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 20/01837
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 20/01837 – N° Portalis DBVH-V-B7E-HYJ2

LR/EB

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION DE DEPARTAGE D’ALES

24 juillet 2020 RG :19/00101

[L]

[S]

C/

[J]

Grosse délivrée

le

à

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 10 JANVIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation de départage d’ALES en date du 24 Juillet 2020, N°19/00101

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Leila REMILI, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Madame Leila REMILI, Conseillère

M. Michel SORIANO, Conseiller

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 20 Octobre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 10 Janvier 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTS :

Madame [E] [L]

[Adresse 4], CH

[Localité 1] SUISSE

Représentée par Me Euria THOMASIAN, avocat au barreau d’ALES

Monsieur [R] [P] [S]

[Adresse 4], CH

[Localité 1] SUISSE

Représenté par Me Euria THOMASIAN, avocat au barreau d’ALES

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/006282 du 23/09/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Nîmes)

INTIMÉ :

Monsieur [F] [J]

né le 09 Avril 1980 à AUCHEL

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Julie GRAS, avocat au barreau d’ALES

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/6282 du 23/09/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Nîmes)

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 06 Octobre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 10 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S], de nationalité suisse et domiciliés en Suisse, sont propriétaires d’une parcelle de terre sur la commune de [Localité 5], sur laquelle est édifié un grand mas cévenol ainsi qu’une maison individuelle.

Le 4 novembre 2017, M. [V] [J] et M. [F] [T] époux [J] ont signé un bail d’habitation avec Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S].

M. [F] [J] a effectué diverses prestations. Une déduction sur le loyer a été opérée.

Le 30 août 2019, Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] ont signifié à M. [F] [J] et à son époux un congé pour reprise, par le ministère de Me [X] [H], huissier de justice à [Localité 3].

Par requête en date du 23 octobre 2019, M. [F] [J] a saisi le conseil de prud’hommes d’Alès afin de voir constater l’existence d’un contrat de travail et obtenir la condamnation de Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] au paiement de diverses sommes.

Par jugement, en date du 24 juillet 2017, le conseil de prud’hommes d’Alès a:

– dit et jugé que le contrat de travail entre M. [F] [J] et Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] est un contrat à durée indéterminée à temps complet,

– condamné Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] à payer à M. [F] [J] les sommes suivantes :

– 29 819 euros à titre de rappel de salaire du mois de février 2018 à août 2019,

– 2 981 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire,

– l 656.61 euros à titre de gratification conventionnelle,

– 3 489, 50 euros à titre de loyers indûment versés,

– 900 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné à Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] de délivrer à M. [F] [J] les documents sociaux suivants :

– les bulletins de salaire de février 2018 à août 2019,

– le certificat de travail,

– l’attestation Pole Emploi,

– le reçu de solde tout compte,

Le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du quinzième jours suivant la notification de la présente décision,

– condamné Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] aux entiers dépens y compris ceux éventuellement nécésssaires à1’exécution du présent jugement,

– dit qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire les sommes retenues par l’huissier instrumentaire, en application du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties de leurs autres ou plus amples demandes, fins et conclusions.

Par acte du 27 juillet 2020, Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] ont régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de leurs dernières conclusions en date du 29 juillet 2020, Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] demandent à la cour de :

– déclarer l’appel recevable et régulier tant sur la forme que sur le fond

– réformer la décision déférée en ce qu’elle a :

– dit et jugé que le contrat de travail entre M. [F] [J] et Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] est un contrat de travail à durée indéterminée et à temps complet,

– condamné Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] à payer à M. [F] [J] les sommes suivantes:

– 29819 euros à titre de rappel de salaires de février 2018 à août 2019,

– 2981 euros à titre d’indemnité de congés payés sur rappel de salaires,

– 1656, 61 euros à titre de gratification conventionnelle,

– 3489, 50 euros à titre de loyers indûment versés,

– 900 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné à Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] à délivrer à M. [F] [J] les bulletins de salaires de février 2018 à août 2019, le certificat de travail, l’attestation Pôle Emploi, le reçu de solde tout compte sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

– condamné Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] aux entiers dépens de l’instance,

Statuant a nouveau

Au principal,

– dire et juger que le contrat conclu entre les parties n’est pas un contrat de travail,

– dire et juger que le contrat conclu entre les parties est un contrat de bail, contrat

principal dont l’accessoire est le contrat de prestations de services,

– débouter la partie adverse de toutes ses demandes,

– inviter M. [F] [J] à mieux se pourvoir,

Au subsidiaire,

– dire et juger que la volonté de démissionner du salarié est claire et non équivoque,

– dire et juger que le salarié relève de la convention collective des employés de maison et services à la personne,

– dire et juger que les demandes du salarié sont non fondées et les rejeter,

En tout état de cause :

– condamner M. [F] [J] à porter et à payer à Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] les sommes suivantes :

– 3000 euros au titre de la procédure abusive,

– 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [F] [J] aux entiers dépens.

Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] soutiennent que :

– Ils ont accepté que le locataire effectue des prestations en échange de la diminution du loyer, ils n’avaient aucun pouvoir de contrôle ou de sanction, leur locataire disposant d’une grande liberté.

– Il n’y a donc aucun contrat de travail, M. [J] agissant pour se venger de la fin du bail.

– Subsidiairement, la rupture du contrat ne peut s’analyser qu’en démission claire et non équivoque comme cela ressort des messages produits et non en une prise d’acte de la rupture d’un contrat de travail.

– Par ailleurs, si salarié il y avait, il doit être qualifié d’employé de maison soumis à la convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999.

En l’état de ses dernières écritures en date du 6 octobre 2020, M. [F] [J] demande de :

Sur la forme :

Statuer ce que de droit sur la recevabilité de l’appel interjeté par Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S]

Sur le fond :

– confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Alès en date du 24 juillet 2020

-débouter Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] de leurs fins demandes et prétentions

– dire et juger que M. [F] [J] et Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] sont liés par un contrat de travail du 1er février 2018 au 30 août 2019

– dire que le contrat de travail entre M. [F] [J] et Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] est un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet

– condamner Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] à payer à M. [F] [J] les sommes suivantes :

– 29 819 euros à titre de rappel de salaire du mois de février 2018 à août 2019,

– 2981 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire,

– 1656,61 euros brut au titre de la gratification conventionnelle,

– 3 489,50 euros au titre des loyers indûment versés,

– ordonner à Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] de communiquer à M. [F] [J] les documents sociaux suivants :

– les bulletins de salaire de février 2018 à août 2019

– le certificat de travail

– l’attestation Pole Emploi

– le reçu pour solde de tout compte

Le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à

intervenir.

– condamner Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] aux entiers dépens d’instance et d’appel et à payer à M. [F] [J] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [F] [J] fait valoir que :

– En contrepartie de la location, il a assuré avec son époux, à compter de février 2018, l’accueil des locataires vacanciers, la garde, la surveillance et l’entretien du mas.

– Ils étaient rémunérés en nature, notaient le nombre d’heures de travail réalisées et les époux [S] mettaient à leur disposition le logement en contrepartie du travail effectué.

– Les époux [S] donnaient des directives, les sanctionnaient comme cela ressort du congé délivré. Ils n’étaient pas libres d’intervenir comme bon leur semblait.

– Le contrat de travail a pris fin le 30 août 2019 suite à la démission des époux.

– Depuis le mois de février 2018, la relation de travail doit être qualifiée de contrat à durée indéterminée, soumis à la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles.

– Le salarié a droit au paiement des salaires selon sa qualification et au remboursement des loyers versés pour un logement de fonction qui constitue un avantage en nature.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 2 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 6 octobre 2022 à 16 heures et fixé examen de l’affaire à l’audience du 20 octobre 2022.

MOTIFS

Sur l’existence d’un contrat de travail

L’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait, dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs. Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements.

Il n’est pas contesté que M. [F] [J] et son époux, d’une part et Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S], d’autre part, ont conclu le 4 novembre 2017, moyennant un loyer mensuel de 600 euros un contrat de location d’une maison individuelle meublée située sur la même parcelle qu’un mas appartenant aux propriétaires et que ces derniers offraient à la location.

Il est de même constant que M. [F] [J] a effectué divers prestations et travaux, les heures effectuées étant déduites du montant du loyer.

Il ressort d’un document remis par les époux [S] au début de la relation contractuelle que ces derniers donnaient bien des ordres et des directives à M. [J]. Ainsi :

«-Dans toute la maison : poussière, aspirateur, retirer les toiles d’araignées, vitres si nécessaire

Bain, WC : nettoyer le sol humide, nettoyer le lavabo, miroir, la douche (aussi les carrelages au paroi) et le WC, mettre un rouleau de papier toilette et une serviette à main

salon : nettoyer le sol humide

cuisine : nettoyer le sol humide, propre combinaison de cuisine à fond , nettoyer le frigo, mettre une lavette, nettoyer la machine à café

cage d’escalier : nettoyer le sol humide (prudent avec les vieux escalier )

chambre bleue 1 : tourner les matelas, nettoyer le sol humide, mettre draps de lit

WC : nettoyer le WC et sol humide, mettre un rouleau de papier toilette

Bain : nettoyer les lavabos, le bain et le sol humide, mettre une serviette à main

chambre 2 : tourner les matelas, mettre draps de lit

escalier :nettoyer le sol humide avec un chiffon

chambre 3 : tourner les matelas,mettre draps de lit

Bain : nettoyer le lavabo, la douche et le sol humide, mettre un rouleau de papier toilette et une serviette à main

chambre 4 : tourner les matelas, mettre draps de lit

-Sur chaque lit (pour chaque personne et par semaine) : mettre une serviette de bain grande et deux petites, un gant de toilette

-pour 4 personnes seulement préparer le parterre et le 1er étage

-dans les bains mettre un tapis de bains

– cadeau de bienvenue : une bouteille d’eau, une bouteille de rosé dans le frigo»

Un inventaire est également produit aux débats qui devait être rempli à chaque location.

Sur Internet, Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] faisaient la promotion de leur mas en précisant : « dans la maison voisine habite la personne qui s’occupe de toi ».

Un vacancier a même indiqué dans son commentaire « Un grand merci également à l’administrateur sur place ».

M. [F] [J] a établi des rapports mensuels d’activité sur un calepin remis par les époux [S] (les mentions sont en effet en suisse allemand « nom de l’ouvrier » « poste de travail » « travaux exécutés ») avec le détail et les heures effectuées, qu’il transmettait aux époux [S], comme cela ressort des messages échangés.

Il ressort également des échanges de messages produits que les intimés donnaient des directives

et en contrôlaient l’exécution. Ainsi par exemple :

« Le samedi, quand mon amie arrivera avec sa famille, il fera froid. Si c’est vraiment comme ça, il faut chauffer un peu. Tu peux mettre en route le vendredi matin ou le jeudi soir. Tu peux bien leur expliquer comment ils peuvent réduire pendant la journée le chauffage et aussi montrer le ventilateur dans la salle de bain et qu’ils enlève le bouchon ,quand ils n’ont pas besoin (…) Tu peux aussi poser les chaises longues en bas’ Couvrir avec le plastique. Et stp ouvre tous les volets au rdc et 1er étage (…) Aussi mettre le tapis pour la douche et bain. (…) Merci pour tout et tu peux envoyer encore des heures de travaux pour le mas. ».

Ou encore : M. [J] précisant « ce matin j’ai taillé les mûriers avec [N]… Et cet aprem on s’occupe des arbres au niveau de l’olivier’ ». M. [S] demandant « quels muriers’ », M. [F] [J] précisant « Les 3 ». M. [S] : « ‘ » et M. [F] [J] lui adressant alors des photos.

Ou encore « Tu as arroser les nouvelles plantes’ » … « J’arrose tout les lundi mais je pense que je peux faire plus car il commence à faire chaud »… « Bonjour, serai bien arroser 2-3 fois/semaine maintenant sécheresse »…

« Bonjour [F]. Tu as reçu le colis aujourd’hui’ Après le 25/5, viendra yohanan pour les portes d’entrées. Alors il faut attendre avec le ménage. »…

« Bonjour on part. J’ai barré la porte derrière (ça vs devez aussi faire quand vs parts) il faut entrer de devant. Il manquent les petit clef des 2 cerrures volant de la cuisine tu as les récupérer’ Stp va serrer les deux encore-,,!! Le Alkaliniter du piscine et mieux mais il faux absolument nettoyer aujourd’hui et surtout met le choc partout contre les algues. Comme ça quand vs partez cette semaine tout et en ordre avec le salter.! Tu fais des photos du côté détruit du volant actuel si sa viennent encore pire.’! »

Concernant la piscine encore : « T’es sur que tu sais comment ça marche pour tous faire en remise et bien en ordre avec l’heure et la pompe. Tu peux aussi tel [N] qu’il vient semaine proch et faire un date pour vous deux stp ».

Encore : « le tracteur gazon il marche maintenant ou il faut le réparer’ Et actuel piscine’ Et le gaz’ Pour nous c’est agréable si tu nous informes des choses qui sont à faire et que tu as réglé. »… « C’est quoi tu as fait pour régler le gaz et le tracteur …’ « Là en ce moment pas beaucoup de temps » « ça veut dire quoi”’ »… « Que j’ai pas eu beaucoup de temps entre tout pour m’en occuper ». « Au moins essayer de redemarrer, s’il fonctionne pas fait coup d’oeil au garage déjà parler stplait »… Les époux [S] pouvant relancer en l’absence de réponse à une demande (« Hallooo”’ »).

Il ne peut être soutenu que M. [F] [J] intervenait quand il le désirait, dès lors que manifestement ses horaires de travail dépendaient des arrivées et des départs des hôtes. M. [F] [J] devait alors intervenir pour l’accueil des locataires ainsi que pour le ménage en respectant un délai entre le départ et l’arrivée des nouveaux des vacanciers.

Les attestations produites par les appelants ne contredisent nullement l’existence d’une prestation de travail. Le fait que les témoins indiquent n’avoir pas vu « [F] » travailler est sans incidence puisqu’il ressort suffisamment de ce qui précède qu’il a effectué diverses tâches au profit des appelants. Les témoins précisent à tout le moins qu’il effectuait de petits travaux, l’entretien de la piscine, le ménage et la remise des clés. L’artisan menuisier mentionne sa présence pour l’ouverture du mas. Enfin, sur la qualification de la relation unissant les parties, ils ne font que rapporter les propos des époux [S].

Il ressort bien des pièces produites que M. [F] [J] accueillait les hôtes et leur expliquaient le fonctionnement et se tenait à leur disposition en cas de problème, effectuait l’inventaire des éléments présents, faisait le ménage, divers petits travaux, entretenait le jardin et la piscine avec le matériel présent sur le mas, gérait les rendez-vous avec les artisans, surveillait la bonne fermeture des lieux, le tout selon les directives et les ordres des époux [S].

Il importe peu de savoir qui a sollicité l’autre pour l’exécution de la prestation.

En tout état de cause, il ressort manifestement des échanges de textos que lorsque M. [F] [J] a indiqué, en juillet 2019, que pour l’année prochaine il faudrait trouver quelqu’un d’autre pour le mas, souhaitant se consacrer à son activité musicale, les époux [S] ont indiqué qu’ils reprendraient le gîte en ces termes « Si vous ne ferez rien du tout au mas, on aura besoin du gite ». La lecture attentive des échanges de courriels permet de confirmer que la décision de mettre fin au bail est bien consécutive à l’annonce par M. [F] [J] de sa décision d’arrêter de travailler pour le compte des époux [S] et non liée à une perte de confiance en raison d’une somme d’argent non restituée, ce qui n’est évoqué que par la suite dans les discussions.

Ainsi, à la suite à la décision de M. [F] [J] d’arrêter son travail pour leur compte, les époux [S], ont, par acte d’huissier du 30 août 2019, signifié un congé pour reprise aux époux [J].

Ce qui s’analyse bien en une sanction.

Il ressort donc de l’ensemble de ces éléments, l’existence d’un contrat de travail.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il a justement dit et jugé que les parties sont liées par un contrat de travail du 1er février 2018 au 30 août 2019.

Sur le contrat de travail à durée indéterminée, les rappels de salaire, le remboursement de loyer et le versement de la gratification

– Sur la convention collective applicable

La convention collective nationale des salariés du particulier employeur définit en son article 1er son champ d’application :

« La présente convention collective règle les rapports entre les particuliers employeurs et leurs salariés. Le caractère spécifique de cette profession est de s’exercer au domicile privé du particulier employeur avec toutes les conséquences qui en découlent. Le particulier employeur n’est pas une entreprise. Est salarié toute personne, à temps plein ou partiel, qui effectue tout ou partie des tâches de la maison à caractère familial ou ménager. La présente convention s’applique aux utilisateurs du chèque emploi-service (voir accord du 13 octobre 1995, en annexe III). Le particulier employeur ne peut poursuivre, au moyen de ces travaux, des fins lucratives ».

Selon l’article L. 7221-1 du code du travail relatif aux employés à domicile par des particuliers employeurs « Le présent titre est applicable aux salariés employés par des particuliers à leur domicile privé pour réaliser des travaux à caractère familial ou ménager.

Le particulier employeur emploie un ou plusieurs salariés à son domicile privé, au sens de l’article 226-4 du code pénal, ou à proximité de celui-ci, sans poursuivre de but lucratif et afin de satisfaire des besoins relevant de sa vie personnelle, notamment familiale, à l’exclusion de ceux relevant de sa vie professionnelle. ».

La convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles dispose en son article 1er qu’elle « a pour objet de définir sur l’ensemble du territoire métropolitain les conditions de travail et de rémunération du personnel disposant ou non d’un logement de fonction et chargé d’assurer la garde, la surveillance et l’entretien – ou une partie de ces fonctions seulement – des immeubles ou ensembles immobiliers et de leurs abords et dépendances, qu’ils soient affectés à l’habitation, à l’usage commercial ou professionnel, placés sous le régime de la copropriété, donnés en location ou inscrits à une association syndicale de propriétaires (ASP), quel que soit le régime juridique de l’employeur. Toutefois, ne sont pas visés par la présente convention les personnels relevant d’une autre convention collective nationale».

L’article L. 7211-1 du code du travail relatif aux concierges et employés d’immeuble à usage d’habitation dispose que « Les dispositions du présent titre sont applicables aux salariés définis à l’article L. 7211-2, à l’exclusion des concierges attachés à la personne même du propriétaire, lesquels relèvent des dispositions du titre II applicables aux employés de maison. » et selon l’article L. 7211-2 de ce même code, « est considérée comme concierge, employé d’immeubles, femme ou homme de ménage d’immeuble à usage d’habitation, toute personne salariée par le propriétaire ou par le principal locataire et qui, logeant dans l’immeuble au titre d’accessoire au contrat de travail, est chargée d’en assurer la garde, la surveillance et l’entretien ou une partie de ces fonctions».

Les époux intimés sont des particuliers qui habitent en Suisse, ont mis en location le mas dont ils sont propriétaires par l’intermédiaire d’un site internet dédié et d’annonces de location sur les sites abritel, airbnb et de l’office du tourisme des Cévennes.

Il ressort des pièces au dossier que les fonctions exercées par M. [F] [J] étaient précisément les suivantes :

*Préparation et nettoyage du mas avant et après l’arrivée des locataires, aération

*Lavage du linge de lit, de bain et de cuisine après chaque locataire

*Accueil des locataires, remise des clés

*Réception ponctuelle de colis

*Se tenir à leur disposition pendant la semaine en cas de problèmes (changement de bouteille de gaz, problème de chaudière, électricité)

*Mise en service de la piscine, entretien et nettoyage des filtres, des parois, vérification du PH ou alcalinité de l’eau

*Nettoyage et entretien extérieur : tonte des pelouses, désherbage, arrosage des plantes, débroussaillage, taille des arbres, ramassage des feuilles, vérification des arrosages automatiques, entretien des terrasses

*Divers travaux d’entretien

*Gérer les relations avec les intervenants extérieurs (notamment artisans)

*Vérification des fermetures de portes

*Information des propriétaires en cas de dysfonctionnements

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que l’activité principale du salarié était le gardiennage, la surveillance et l’entretien du mas, ainsi que l’entretien des extérieurs.

Il ne peut être considéré qu’il s’agissait de réaliser des travaux à caractère familial ou ménager, sans but lucratif afin de satisfaire les seuls besoins relevant de la vie personnelle des époux [S], au sens de la convention collective nationale des salariés du particulier employeur, dans la mesure où les employeurs procédaient à la location régulière de leur bien immobilier et poursuivaient des fins lucratives.

Il y a lieu dès lors de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a appliqué la convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles.

– Sur les conséquences financières

En application de l’article 11 de la convention collective applicable mais également des articles L. 1221-2, L. 1242-12 et L. 1245-1 du code du travail, la relation de travail doit être qualifiée de contrat de travail à durée indéterminée.

La détermination de la catégorie et du coefficient hiérarchique doit être effectuée en application de la convention collective et notamment de son article 21, soit un coefficient hiérarchique de 602.

Le conseil de prud’hommes a justement fait droit à la demande de rappel de salaires de février 2018 à août 2019, soit la somme de 29 819 euros, outre 2981 euros d’indemnité compensatrice de congés payés.

M. [F] [J] a également droit à la gratification du 13ème mois, soit 1656,61 euros.

Le jugement déféré sera donc confirmé.

Enfin, l’article 20 de la convention collective prévoit que l’attribution d’un logement de fonction est obligatoire lorsque le salarié est classé en catégorie B.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné les époux [S] à rembourser à M. [F] [J] la somme de 3489,50 euros au titre des loyers indûment versés.

Sur la rupture du contrat de travail

Il n’est pas contesté que M. [F] [J] a démissionné comme le retient le conseil de prud’hommes, l’intimé sollicitant la confirmation du jugement et ne réclamant plus la requalification de la démission en licenciement et des indemnités de rupture.

Or les demandes financières ne sont pas consécutives à la rupture du contrat de travail, de sorte qu’il n’y a lieu à aucun rejet à ce titre.

Le jugement sera donc confirmé.

Sur les demandes accessoires et les dépens

Le jugement sera confirmé en ce qui concerne la délivrance des documents de fin de contrat, les dépens et les frais irrépétibles.

Les dépens d’appel seront mis à la charge de Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] et l’équité justifie d’accorder à l’intimé la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

-Confirme le jugement rendu le 24 juillet 2020 par le conseil de prud’hommes d’Alès en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

– Condamne Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] à payer à M. [F] [T] époux [J] la somme de 2000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Rejette le surplus des demandes,

– Condamne Mme [E] [L] et M. [R] [P] [S] aux dépens d’appel.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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