Nullité de constat : 17 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/13959

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Nullité de constat : 17 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/13959
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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 6

ARRÊT DU 17 JUIN 2022

(n° /2022, 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/13959 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAJTJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Janvier 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 15/05806

APPELANT

Monsieur [F] [N]

Schlyffistrasse 5

[Adresse 6] (Suisse)

Représenté par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER – BEQUET – MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Assisté de Me Cyril CHABERT,de L’AARPI CHAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P462, substitué par Me Julie BIJAYE, CHABERT,de L’AARPI CHAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P462

INTIMES

Monsieur [O] [X]

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représenté par Me Karine MATHOU de la SELAS INSOLIDUM AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1907

Assistée de Me Elodie QUINTARD de la SELAS INSOLIDUM AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1907

SARL DCR INTERIEURS prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Karine MATHOU de la SELAS INSOLIDUM AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1907

Assistée de Me Elodie QUINTARD de la SELAS INSOLIDUM AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1907

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 Novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Valérie GUILLAUDIER, Conseillère faisant fonction de Président et Valérie GEORGET, Conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Valérie GUILLAUDIER, Conseillère faisant fonction de Président,

Mme Valérie GEORGET, Conseillère

Mme Catherine LEFORT, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Suzanne HAKOUN

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, délibéré initialement prévu au 04 février 2022 puis prorogé au 18 février 2022, au 04 Mars 2022, au 18 mars 2022, au 1er avril 2022, au 27 mai 2022 et au 17 juin 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Valérie Georget, Conseillère pour la Conseillère faisant fonction de Président empêchée et par Suzanne HAKOUN, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCEDURE

M. [N] est propriétaire d’un appartement situé [Adresse 5]).

Ce bien, à vocation locative, a été acquis au prix de 1 630 000 euros. Il a été financé par la souscription de deux prêts remboursables par mensualités de 7 311, 85 euros.

M. [N] a entrepris la rénovation de cet appartement.

Il a conclu un contrat à cet effet avec la société DCR Intérieurs gérée par M. [X].

Le 29 décembre 2012, M. [N] a accepté plusieurs devis établis par cette société pour un montant total de 136 062, 44 euros TTC concernant les travaux suivants :

isolation, électricité, plomberie, peinture (56 498, 14 euros),

faux plafonds en staff (13 094, 67 euros),

fenêtres et portes (21 054, 02 euros et 8 667 euros),

climatisation (16 845, 76 euros),

cloisons (9 902, 85 euros).

Etaient expressément exclues certaines fournitures (appareils sanitaires, robinetterie, électroménager, cuisine…).

Des travaux supplémentaires ont ensuite été commandés.

En cours de chantier, des différends ont opposé les parties.

La société DCR Intérieurs n’a pas achevé les travaux. Cet achèvement a été confié à la société Global Bâtiment.

Le 4 juin et le 18 juin 2014, M. [N] et la société DCR Intérieurs ont respectivement demandé à un huissier de justice d’établir un procès-verbal de constat de l’état des lieux.

Le 30 mars 2015, M. [N] a assigné en indemnisation la société DCR Intérieurs et son gérant, M. [X] devant le tribunal de grande instance de Paris.

Par jugement du 11 janvier 2019, le tribunal de grande instance de Paris a statué en ces termes :

rejette l’exception de nullité de l’assignation soulevée par M. [X] ;

rejette les demandes présentées à l’encontre de M. [X] ;

dit que M. [N] et la société D.C.R. Intérieurs sont contractuellement liés depuis le 29 décembre 2012 par les devis établis par la S.A.R.L. D.C.R. Intérieurs et acceptés par M. [N] ;

rejette la demande en paiement de la somme de 61 970,48 euros présentée par M. [N] (coût des travaux de réfection) ;

ordonne une expertise sur pièces ;

désigne en qualité d’expert :

M. [K] [G]

[Adresse 1]

01.45.95.43.58

lequel pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un ou plusieurs autres techniciens, mais seulement dans des spécialités distinctes de la sienne, avec mission de :

décrire les travaux convenus à l’aide des devis établis par la S.A.R.L. D.C.R. Intérieurs et acceptés par M. [N],

décrire les travaux réalisés à l’aide des factures établies par la S.A.R.L. D.C.R. Intérieurs et des procès-verbaux de constat établis le 4 juin 2014 et le 18 juin 2014,

évaluer le coût des travaux réalisés à l’aide des devis établis par la S.A.R.L. D.C.R. Intérieurs et acceptés par M. [N] et des factures établies par la S.A.R.L. D.C.R. Intérieurs,

indiquer le montant et les dates des règlements opérés par M. [N],

préciser si ces paiements ont été effectués sur présentation de situations de travaux ou de factures et, de manière générale, procéder, dans la mesure du possible, à l’imputation de ces paiements,

indiquer si M. [N] a réglé des travaux non réalisés et, dans l’affirmative, chiffrer le montant de ces règlements,

indiquer si la S.A.R.L. D.C.R. Intérieurs a réalisé des travaux non réglés par M. [N] et, dans l’affirmative, chiffrer le coût des travaux non réglés,

évaluer le montant des fournitures acquises par M. [N] et conservées par la S.A.R.L. D.C.R. Intérieurs,

donner son avis sur les préjudices subis,

proposer un compte entre les parties,

rapporter toutes autres constatations utiles à l’examen des prétentions des parties ;

dit que pour procéder à sa mission l’expert devra :

convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise,

se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés et le procès-verbal de réception,

se rendre sur les lieux s’il le juge nécessaire,

à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations; l’actualiser ensuite dans les meilleurs délais :

en faisant définir une enveloppe nécessaire au financement des investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations,

en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge chargé du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui en résultent,

en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées,

en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse,

au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex. : réunion de synthèse ou communication d’un projet de rapport) et y arrêter le calendrier de la phase terminale de ses opérations :

en fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse,

en rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au delà de ce délai ;

fixe à la somme de 5 000 euros la provision concernant les frais d’expertise qui devra être consignée par la S.A.R.L. D.C.R. Intérieurs à la Régie du tribunal – atrium sud, 1er étage, à droite en sortant de l’ascenseur ou de l’escalier – le 15 mars 2019 au plus tard ;

dit que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, ou de demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera caduque ;

dit que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248 et 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport au greffe du tribunal de grande instance au plus tard le 19 décembre 2019 sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du juge du contrôle ;

dit que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge de la mise en état ;

dit que le dossier sera évoqué à l’audience de mise en état du 21 mars 2019 à 14 h (vérification du versement de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert) ;

sursoit à statuer sur toutes les autres demandes des parties jusqu’au dépôt du rapport d’expertise ;

dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire du jugement ;

réserve les dépens.

Par déclaration en date du 9 juillet 2019, M. [N] a interjeté appel dudit jugement, intimant M. [X] et la SARL D.C.R. Intérieurs devant la cour d’appel de Paris.

Par conclusions notifiées par RPVA le 12 novembre 2021, M. [N] demande à la cour de :

infirmer le jugement dont appel sauf en ce qu’il a rejeté l’exception de nullité de l’assignation soulevée par M. [X] ;

dire et juger que les demandes de M. [N] sont recevables et bien fondées ;

dire en conséquence les intimés mal fondés en leur fin de non-recevoir soulevée au visa de l’article 564 du code de procédure civile et les en débouter,

rejeter des débats toutes les attestations et tous les courriers émanant de la société Global Bâtiment et de M. [S] postérieurs au 27 mars 2017 ;

exclure des débats le procès-verbal du 18 juin 2014 réalisé par Maître [C] sans autorisation de M. [N] ni autorisation judiciaire ;

constater les manquements et inexécutions contractuelles de la société D.C.R. Intérieurs et de M. [O] [X] ;

débouter la société DCR Intérieurs et M. [O] [X] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

condamner in solidum la société D.C.R. Intérieurs et M. [O] [X] à verser la somme de 14 920,94 euros (11.145,44 + 3775,50) correspondant à la valeur du matériel manquant sur le chantier ;

condamner in solidum la société D.C.R. Intérieurs et M. [O] [X] à verser la somme de 8 000 euros correspondant aux travaux (balcon et fenêtre) non réalisés à l’identique à M. [N] ;

condamner in solidum la société D.C.R. Intérieurs et M. [O] [X] à verser la somme de 7 942,87 Euros correspondant aux acomptes indûment versés par M. [N] ;

condamner in solidum la société D.C.R. Intérieurs et M. [O] [X] à verser la somme de 53 399,34 euros correspondant au coût de la reprise des travaux ;

condamner in solidum la société D.C.R. Intérieurs et M. [O] [X] à verser la somme de 150 000,00 euros au titre des pénalités de retard ;

condamner in solidum la société D.C.R. Intérieurs et M. [O] [X] à verser la somme de 40 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi par M. [N] ;

condamner in solidum la société D.C.R. Intérieurs et M. [O] [X] à verser la somme de 35 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à la somme de 838,10 euros au titre des frais d’huissier ;

condamner in solidum la société D.C.R. Intérieurs et M. [O] [X] en tous les dépens, dont distraction en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées par RPVA le 15 octobre 2021, M. [O] [X] et la SARL DCR. Intérieurs demandent à la cour de :

dire et juger irrecevables les demandes nouvelles de M. [N] visant à :

exclure des débats toutes les attestations et tous les courriers émanant de la société Global Bâtiment et de M. [S] postérieurs au 27 mars 2017 ;

exclure des débats le procès-verbal du 18 juin 2014 réalisé par Maître [C] ;

porter sa demande de dommages et intérêts sur le fondement d’un prétendu préjudice moral à 40 000 euros (au lieu des 30 000 euros réclamés initialement) ;

à se voir rembourser par la société DCR Intérieurs et M. [X] les sommes de :

4 924,44 euros au titre des travaux de staff ;

11 335,58 euros au titre du parquet ;

3 775,50 € au titre des « nouvelles » fournitures manquantes.

Subsidiairement,

exclure des débats l’intégralité des pièces émanant de la société Global Bâtiment et/ou de M. [S], en ce compris celles communiquées par M. [N] et celles antérieures au 27 mars 2017 ;

infirmer le jugement du tribunal de grande Instance de Paris en date du 11 janvier 2019 en ce qu’il a :

omis de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par M. [X] quant au défaut d’intérêt à agir de M. [N] à son encontre,

à titre personnel ;

ordonné une mesure d’expertise en mettant à la charge exclusive de la société DCR Intérieurs la provision à valoir sur les frais d’expertise ;

sursis à statuer sur les autres demandes dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise.

confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 11 janvier 2019 en ce qu’il a :

rejeté les demandes présentées par M. [N] à l’encontre de M. [X] ;

dit que M. [N] et la société DCR Intérieurs sont contractuellement liés depuis le 29 décembre 2012 par les devis établis par la société DCR Intérieurs et acceptés par M. [N], de sorte qu’il ne peut être fait grief de ne pas avoir achevé les travaux à cette époque ;

dit et jugé que M. [N] a nécessairement accepté que le délai de réalisation des travaux soit prorogé puisqu’il a commandé, notamment en juin et juillet 2013, l’exécution de travaux supplémentaires importants ;

dit et jugé qu’ont également constitué des facteurs ayant retardé l’achèvement des travaux les délais dans lesquels M. [N] :

a commandé les fournitures lui incombant ;

a effectué des choix lui incombant ;

a réglé d’autres entrepreneurs, notamment le cuisiniste et des fournisseurs, notamment celui des appareils sanitaires.

jugé que la société DCR Intérieurs n’était pas intervenue comme maître d”uvre et que M. [N], homme avisé, a néanmoins pris le risque de ne pas recourir aux services d’un architecte chargé d’une mission complète ;

jugé que le document présenté par M. [N] comme constituant le prétendu engagement de la société DCR Intérieurs de terminer le chantier le 15 septembre 2013 sous peine de pénalités de retard est dénué de toute valeur probante ;

considéré que le procès-verbal de constat en date du 18 juin 2014 est régulier ;

dit et jugé que M. [N] est mal fondé à se prévaloir de la prétendue mauvaise qualité des travaux accomplis par la société DCR Intérieurs et de la non-conformité alléguée du parquet aux stipulations contractuelles ;

rejeté la demande en paiement de la somme de 61 970,48 € présentée par M. [N] (coût des travaux de réfection).

Et, statuant à nouveau :

A titre principal,

juger que les demandes de M. [N] dirigées à l’encontre de M. [X] sont irrecevables en l’absence d’intérêt à agir ;

mettre hors de cause M. [X] ;

juger que la société DCR Intérieurs et a fortiori M. [X], qui n’est pas le cocontractant de M. [N], n’ont pas manqué à leurs obligations contractuelles envers ce dernier,

juger que M. [N] est seul responsable de la situation,

juger que les fournitures de robinetterie et les WC sont à la disposition de M. [N],

débouter M. [N] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

A titre reconventionnel,

condamner M. [N] à payer à la société DCR Intérieurs la somme de 80 853,91 euros au titre des factures impayées, assortie des intérêts légaux à compter de la mise en demeure en date du 30 juillet 2014 pour un montant de 54 577,41 euros, et à compter du jugement à intervenir pour le surplus.

condamner M. [N] à payer à la société DCR Intérieurs la somme de 40 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral et d’image subi.

Sur la mesure d’expertise,

A titre subsidiaire,

juger que les provisions à valoir sur les frais d’expertise seront partagées par moitié entre la société DCR Intérieurs et M. [N],

En tout état de cause,

débouter M. [N] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

condamner M. [N] à payer à la société DCR Intérieurs et à M. [X] la somme de 30 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

condamner M. [N] aux entiers dépens, dont les frais d’huissier de justice pour le procès-verbal de constat établi en date du 18 juin 2016.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 18 novembre 2021.

MOTIFS

Observations liminaires

A titre liminaire, la cour observe que le jugement n’est pas critiqué en ce qu’il rejette l’exception de nullité de l’assignation soulevée par M. [X].

Le jugement déféré a, outre cette disposition, statué sur les points suivants :

rejette les demandes présentées à l’encontre de M. [X],

dit que M. [N] et la SARL DCR Intérieurs sont contractuellement liés depuis le 29 décembre 2012 par les devis établis par la SARL DCR Intérieurs,

rejette la demande en paiement de la somme de 61 970, 48 euros (coût des travaux de réfection).

Le jugement a ordonné une mesure d’expertise et sursis à statuer sur les demandes suivantes :

Concernant M. [N] :

condamner in solidum la société DCR Intérieurs et M. [X] à lui verser :

15 200 euros correspondant à la valeur du matériel volé sur place ;

29 464, 64 euros correspondant aux acomptes indûment versés ;

150 000 euros au titre des pénalités de retard ;

30 000 euros à titre de préjudice moral ;

25 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et 838, 10 euros au titre des frais d’huissier ;

condamner les mêmes aux dépens ;

rejeter les demandes reconventionnelles de la société DCR Intérieurs et de M. [X] ;

Concernant la société DCR Intérieurs et M. [X] :

condamner M. [N] à payer à la société DCR Intérieurs les sommes suivantes :

84 112, 46 euros (coût des travaux réalisés et impayés) ;

40 000 euros (dommages et intérêts en réparation du préjudice d’image et moral) ;

25 000 euros (au titre des frais irrépétibles).

La question de l’évocation des prétentions sur lesquelles le tribunal n’a pas statué sera évoquée ci-après.

Sur la recevabilité des demandes de M. [N] tendant à voir écarter des pièces

La société DCR Intérieurs et M. [X] invoquent, au visa des articles 564 et 910-4 du code de procédure civile, l’irrecevabilité, d’une part, des demandes de M. [N] tendant à voir écarter des débats les courriers et attestations établis par la société Global Bâtiment et son représentant, M. [S], après le 27 mars 2017, d’autre part, du procès-verbal de constat du 18 juin 2014 réalisé par Maître [C].

Ils exposent que de telles demandes n’ont été formées ni devant le tribunal ni par les conclusions de l’appelant déposées dans le délai de l’article 908 du code de procédure civile.

M. [N] objecte que la demande d’exclusion de pièces n’est pas une prétention au sens de l’article 564 du code de procédure civile mais un moyen de défense relatif non pas au fond, mais à l’administration de la preuve, qui peut être soulevé à tout moment tant que l’affaire n’est pas clôturée.

*

Selon l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

Aux termes de l’article 910-4 du même code, dans sa version applicable au litige, à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 783, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

Aux termes de l’article 71 du même code constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen du fond du droit, la prétention de l’adversaire.

Enfin, l’article 73 du même code dispose que les défenses au fond peuvent être proposées en tout état de cause.

Tout d’abord, en demandant de rejeter des débats toutes les attestations et tous les courriers émanant de la société Global Bâtiment et de M. [S] postérieurs au 27 mars 2017, M. [N] se borne à opposer un moyen en défense.

Il indique d’ailleurs en page 7 de ses écritures que ces attestations et courriers sont dépourvus de force probante.

La demande tendant à les voir rejeter des débats sera déclarée recevable mais non fondée. En effet, la cour appréciera la force probante de ces pièces sans qu’il n’y ait lieu de prononcer leur rejet.

Ensuite, M. [N] recherche la nullité du constat d’huissier établi le 18 juin 2014 à la demande de la société DCR Intérieurs. En effet, il demande à la cour de constater que ce procès-verbal d’huissier est irrégulier dès lors qu’il a été réalisé à son domicile sans son accord et sans autorisation judiciaire.

La demande tendant à voir prononcer la nullité d’un constat d’huissier pour qu’il soit écarté des débats constitue une prétention (2e Civ., 30 septembre 2021, pourvoi n° 19-12.244, publié).

Cette prétention n’est pas nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile.

En revanche, elle n’a pas été présentée dans le dispositif des conclusions visées par l’article 910-4 du code de procédure civile.

L’irrégularité du procès-verbal de constat d’huissier n’a pas été soulevée en réplique à des prétentions adverses postérieures aux écritures visées par l’article 908 du code de procédure civile et n’est pas née d’un fait dévoilé postérieurement, étant observé que cette irrégularité était déjà invoquée par M. [N] devant le tribunal.

La société DCR Intérieurs et M. [X] sont donc fondés à soulever l’irrecevabilité de la demande tendant à voir écarter des débats le procès-verbal de constat d’huissier du 18 juin 2014.

Sur les demandes formées par M. [N] contre M. [X]

Sur la recevabilité des demandes

Le tribunal a omis de statuer sur cette fin de non-recevoir.

Conformément à l’article 463 du code de procédure civile, il convient de réparer cette omission.

M. [X] et la société DCR Intérieurs concluent à l’irrecevabilité des demandes formées contre M. [X]. Ils soutiennent que celui-ci n’a pas commis de faute, au surplus, détachable de ses fonctions, et n’est pas le contractant de M. [N] qui ne justifie pas d’un intérêt à agir.

M. [N] conclut à l’existence d’un intérêt à agir né, légitime, direct et actuel.

*

Selon l’article 31 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

L’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action.

M. [N], qui poursuit l’indemnisation de préjudices, justifie d’un intérêt à agir contre M. [X] gérant de la société DCR Intérieurs.

Ses prétentions formées contre M. [X] seront déclarées recevables.

Sur le bien fondé des demandes

M. [N] soutient que M. [X] est l’animateur principal de la société, qu’il s’est engagé avec la société DCR Intérieurs après le contact qu’il a eu à titre personnel avec lui, que M. [X] a choisi les fournisseurs et sous-traitants dans son réseau portugais dont il a facturé les prestations, qu’il a subtilisé du matériel sur le chantier et qu’il a fait intervenir son épouse pour réaliser un constat d’huissier dans son appartement en toute illégalité.

M. [X] et la société DCR Intérieurs répliquent que les prétendues ‘fautes’ de M. [X], représentant légal de la société DCR Intérieurs, ne sont pas constituées. Ils ajoutent que le gérant de cette société n’a agi que dans un but de préservation des intérêts de la société, de sorte qu’il n’a commis aucune faute détachable de ses fonctions.

*

Selon l’article L. 223-22, alinéa 1er, du code de commerce, les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.

La responsabilité personnelle du gérant envers les tiers suppose la démonstration d’une faute intentionnelle d’une particulière gravité, incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales.

Il n’est pas établi que M. [X] aurait subtilisé du matériel ou qu’il aurait demandé à son épouse de faire réaliser un constat d’huissier en toute illégalité.

Il n’est, par ailleurs, pas justifié de fautes intentionnelles d’une particulière gravité séparables des fonctions de gérant.

Les demandes formées par M. [N] contre M. [X] seront rejetées.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes formées par M. [N] contre la société DCR Intérieurs au titre du coût de la reprise des travaux

M. [N] soutient que la société DCR Intérieurs a eu un rôle de coordinateur du chantier, de maître d’oeuvre et qu’elle a choisi les fournisseurs et sous-traitants parmi ses partenaires habituels. Il réclame une somme de 53 399, 34 euros se ventilant comme suit :

– montage des meubles : 6 380 euros ;

– reprise des travaux et des malfaçons par la société Global Bâtiment : 46 329, 34 euros ;

– changement de serrures : 690, 00 euros.

La société DCR Intérieurs réfute avoir assumé une prestation d’architecture. Elle conteste également avoir eu une mission de coordination des travaux ou de maîtrise d’oeuvre. Elle poursuit la confirmation du jugement qui a rejeté les demandes au titre des travaux de reprise.

*

Aux termes de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Selon l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Il est constant que les travaux n’ont pas fait l’objet d’une réception.

Ensuite, le jugement n’est pas utilement critiqué en ce qu’il juge que M. [N] et la société D.C.R. Intérieurs sont contractuellement liés depuis le 29 décembre 2012 par les devis établis par la S.A.R.L. D.C.R. Intérieurs et acceptés par M. [N].

Il sera confirmé de ce chef.

S’agissant de la maîtrise d’oeuvre, M. [N] n’a pu se méprendre sur l’absence de qualité d’architecte de la société DCR Intérieurs. Le 26 octobre 2012 cette société appelait d’ailleurs l’attention du maître de l’ouvrage sur son incompétence en ce domaine (pièce n° 50 de M. [N]).

Ensuite, il résulte de l’ensemble des pièces produites par les parties que M. [V], architecte, a réalisé des plans (pièce n° 81 de la société DCR Intérieurs) au début du chantier sans assurer une mission de suivi de l’exécution des travaux, Mme [L], ‘architecte d’intérieur’, est ensuite intervenue très ponctuellement avant le début des travaux puis Mme [Z], décoratrice d’intérieur, a eu un rôle de coordination (pièces n° 32, 80 et 84 de la société DCR Intérieurs) mais qui s’est limité à la fin du chantier (courant 2014).

La société DCR Intérieurs a été chargée de la plupart des lots du chantier.

Elle devait assumer la coordination des travaux qui lui étaient confiés sans toutefois qu’il soit établi qu’elle avait une mission de maîtrise d’oeuvre, de conception, et de suivi des travaux exécutés par d’autres entrepreneurs.

Quant à la qualité des travaux effectués, la cour observe, à l’instar du tribunal, que les parties ont fait le choix de ne pas solliciter une expertise judiciaire.

S’agissant du montage des meubles, le devis et la facture établis par M. [B] (pièces n° 37 et 62 de M. [N]) ne démontrent pas de malfaçons imputables à la société DCR Intérieurs.

Les attestions et courriers émanant du représentant de la société ayant terminé les travaux, la société Global Bâtiment, qui ont été fournis à chacune des parties, ne sont pas probants dès lors que leur teneur est totalement contradictoire.

Les procès-verbaux de constat des 4 et 18 juin 2014 (pièce n°18 de M. [N] et pièce n°38 de la société DCR Intérieurs) décrivent un chantier inachevé mais n’établissent pas l’existence de désordres dont il est demandé réparation selon un détail figurant en page 55 des conclusions de M. [N], s’agissant notamment des défauts affectant le parquet.

Enfin, le commentaire d’un usager du site Airbnb (pièce n°60 de M. [N]) ne justifie pas plus l’existence des désordres allégués.

Les demandes de M. [N] au titre du coût de reprise des désordres seront rejetées.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes concernant le balcon et la fenêtre non refaits à l’identique

Ainsi que relevé par la société DCR Intérieurs, cette prétention n’est pas présentée dans les conclusions de l’appelant visées par l’article 908 du code de procédure civile.

Par application de l’article 910-4 du même code, elle sera déclarée irrecevable.

Sur l’évocation

L’article 568 du code de procédure civile dispose que lorsque la cour d’appel infirme ou annule un jugement qui a ordonné une mesure d’instruction, ou qui, statuant sur une exception de procédure, a mis fin à l’instance, elle peut évoquer les points non jugés si elle estime de bonne justice de donner à l’affaire une solution définitive, après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d’instruction.

L’évocation ne fait pas obstacle à l’application des articles 554, 555 et 563 à 567.

En sollicitant de la cour qu’elle statue sur les demandes ayant fait l’objet d’un sursis à statuer dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise, les parties demandent à la cour d’user de son pouvoir d’évocation et de trancher des questions qui n’ont pas été jugées par les premiers juges.

M. [N] ne développe aucune critique du jugement en ce qu’il a ordonné une mesure d’expertise.

La société DCR Intérieurs se borne à affirmer que la cour dispose de tous les éléments pour statuer.

Or, eu égard à la complexité des comptes entre les parties, le tribunal a, à bon droit, ordonné une expertise, avec une consignation à la charge de la société DCR Intérieurs relative aux points suivants :

– travaux convenus,

– travaux réalisés et fournitures acquises,

– factures établies par la société DCR Intérieurs,

– paiements effectués par M. [N].

Le jugement sera donc confirmé sans que la cour n’use de son pouvoir d’évocation au sujet des demandes suivantes :

Concernant M. [N] :

valeur du matériel manquant ;

acomptes indûment versés ;

pénalités de retard ;

préjudice moral ;

Concernant la société DCR Intérieurs :

1. coût des travaux réalisés et impayés ;

2. préjudice d’image et moral ;

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Le tribunal a réservé les dépens et les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

Le sens du présent arrêt conduit à condamner M. [N] aux dépens et au paiement d’une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à M. [X] et à la société DCR Intérieurs.

La demande de M. [N] fondée sur l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

 


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