Merchandising : 6 décembre 2013 Cour d’appel de Paris RG n° 13/05039

·

·

Merchandising : 6 décembre 2013 Cour d’appel de Paris RG n° 13/05039
Ce point juridique est utile ?

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRET DU 06 DECEMBRE 2013

(n° 293, 15 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 13/05039.

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Mars 2009 – Tribunal de Commerce de PARIS 8ème Chambre – RG n° 2007029442.

APPELANTES :

– Société de droit italien SAS MONDO TV

prise en la personne de ses représentants légaux,

ayant son siège social [Adresse 1] (ITALIE),

– Société de droit italien SARL DORO TV MARCHANDISING

prise en la personne de ses représentants légaux,

ayant son siège social [Adresse 5] (ITALIE),

– SARL SIDONIS PRODUCTION NC

prise en la personne de ses représentants légaux,

ayant son siège social [Adresse 2],

– Société de droit anglais MARBLE ARCH FILMS LIMITED

prise en la personne de ses représentants légaux,

ayant son siège social [Adresse 3] (GRANDE BRETAGNE),

représentées par la SELARL CABINET BITOUN AVOCAT en la personne de Maître Jacques Georges BITOUN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0189,

assistées de Maître Jacques Georges BITOUN de la SELARL Cabinet BITOUN Avocat, avocat au barreau de PARIS, toque : P0189.

INTIMÉS :

– SARL FILMS SANS FRONTIERES

prise en la personne de son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 4],

– SARL FILMS SANS FRONTIERES 2

prise en la personne de son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 4],

– Monsieur [J] [F]

demeurant [Adresse 4],

représenté par Maître Sylvie CHARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0079,

assistés de Maître Gildas ANDRE de la SELARL Avocats GILDAS ANDRE, avocat au barreau de MARSEILLE.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 23 octobre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine AIMAR, présidente,

Madame Sylvie NEROT, conseillère,

Madame Véronique RENARD, conseillère,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Truc Lam NGUYEN.

ARRET :

Contradictoire,

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

– signé par Madame Marie-Christine AIMAR, présidente, et par Monsieur Truc Lam NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.

La société de droit italien Doro TV Merchandising, filiale à 100 % de la société de droit italien Mondo TV, se présente comme ayant acquis, au terme d’une chaîne de contrats et selon contrat du 5 octobre 1989, les droits du producteur d’origine sur le film intitulé ‘Théorème’ réalisé par [K] [T] [Q] en 1968.

Par contrat daté du 11 décembre 1989, la société Films Sans Frontières a acquis les droits de distribution en salles de ce film pour une durée de sept années, soit jusqu’au 31 décembre 1996. Par un second contrat du 31 janvier 1995, cette même société a obtenu de la société Doro TV la cession des droits d’exploitation télévisuelle pour une durée de quatre années, soit jusqu’au 31 décembre 1999.

La société de droit italien Adriana Chiesa Enterprises à qui la société Mondo TV avait donné mandat, le 22 avril 2002, de commercialiser le film ‘Théorème’ dans le monde entier pour une durée de sept années, a, par contrat signé le 2 novembre 2005, cédé à la société de droit anglais Marble Arch Films Ltd les droits d’exploitation de ce film durant sept ans pour le territoire de la France et les pays de langue française. Le 1er décembre 2005, la société Marble Arch a concédé à la société de droit français Sidonis Production NC la licence d’exploitation multi-droits qu’elle avait acquise, laquelle a confié le mandat exclusif d’édition vidéographique de ce film (DVD) à la société SGGC, cette dernière en sous-traitant la distribution au groupe Sony Pictures (anciennement GCTHV) avec une sortie commerciale intervenue en mai 2006.

Estimant que, depuis le 31 décembre 1999, la société Films Sans Frontières SARL n’a plus aucun droit sur le film ‘Théorème’ et faisant grief à celle-ci, à la SARL Films Sans Frontières 2 (ci-après FSF et FSF 2) ainsi qu’à leur dirigeant commun, [J] [F], d’avoir, sans droits :

– cédé les droits de diffusion télévisuelle sur le film’Théorème’ à la chaîne Arte, lequel a été diffusé le 14 février 2002 pour des programmations simultanées en France et en Allemagne.

– au mois de juin 2006 commercialisé des DVD du film ‘Théorème’ dans des magasins parisiens,

les sociétés Mondo TV, Doro TV Merchandising, Marble Arch Films Ltd et Sidonis Production NC ont fait pratiquer quatre saisies-contrefaçon auprès de divers distributeurs finaux (Fnac, Virgin, CD Discount) ainsi qu’au siège de la société Films Sans Frontières entre le 19 juin et le 22 septembre 2006, avant de les assigner devant le Tribunal de commerce de Paris en contrefaçon de leurs droits sur le film ‘Théorème’, selon acte du 02 mai 2007

Par jugement contradictoire rendu le 04 mars 2009 le tribunal de commerce de Paris a, en substance et avec exécution provisoire :

– ‘débouté’ les sociétés Mondo TV, Marble Arch Limited et Sidonis Production NC de leurs demandes, faute d’intérêt à agir,

– condamné in solidum les sociétés FSF et FSF 2 ainsi que Monsieur [J] [F] à payer la somme de 10.000 euros à la société Doro TV Merchandising à titre d’indemnisation de son préjudice moral,

– prononcé à l’encontre des défendeurs à l’action et sous astreinte les mesures d’interdiction de commercialiser le film ‘Théorème’ et de restitution des masters et DVD du film d’usage,

– condamné in solidum les sociétés FSF et FSF 2 ainsi que Monsieur [J] [F] à payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Les sociétés Mondo TV, Doro TV Merchandising, Sidonis Production NC et Marble Arch Films Ltd ont interjeté appel de ce jugement le 7 juillet 2009.

Une ordonnance de radiation a été prononcée le 18 novembre 2010, suivie d’une ordonnance de retrait du rôle le 24 mai 2012 avant que l’affaire ne soit rétablie et un calendrier de procédure fixé selon avis du 22 mars 2013.

Par ailleurs, selon ordonnance rendue le 4 juillet 2013, le conseiller de la mise en état, saisi d’un incident par les société appelantes, les a déclarées irrecevables en leur demande tendant à voir procéder, par le conseiller de la mise en état, à une vérification d’acte, d’écriture et de signature de deux contrats datés du 19 mars 1998 et du 15 septembre 1999, a constaté que lesdits contrats pouvaient être consultés au cabinet de l’avocat postulant des intimés selon différentes modalités et, s’agissant des documents contractuels dont la communication était sollicitée à titre reconventionnel par les intimés, a constaté leur mise à disposition au cabinet de l’avocat des appelantes selon les mêmes modalités.

Par dernières conclusions signifiées le 16 octobre 2013, la société par actions de droit italien Mondo TV, la société de droit italien Doro TV Merchandising Srl et la société à responsabilité Sidonis Production NC demandent essentiellement à la cour, au visa des articles L.122-4, L.331-1-3, L.331-1-4 et L.335-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle, et au visa des articles 1154, 1315 et 1324 du code civil :

‘ in limine litis,

de débouter les intimés de leur demande de nullité des actes subséquents aux saisies contrefaçon,

‘ à titre principal

– de ‘procéder à la vérification des contrats du 19 mars 1998 conclus entre les sociétés FSF, FSF 2 et Doro TV Merchandising (deux contrats) et du 15 septembre 1999 entre FSF et Doro TV Merchandising, desdits contrats, de leur écriture et de leurs signatures, et de considérer comme fausses lesdites signatures conformément aux avis de l’expert en écritures des 1er novembre 2012 et 5 septembre 2013,

– d’écarter des débats ces contrats du 19 mars 1998 (deux contrats) et du 15 septembre 1999,

– d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions, à l’exception des condamnations prononcées au profit de la société Doro TV Merchandising, de l’interdiction de commercialisation du film “Théorème”, prononcées sous astreinte, et de l’injonction de remise des matériels du film ‘Théorème’,

– de considérer que les sociétés FSF, FSF 2 et Monsieur [F] ont commis des actes de contrefaçon en distribuant des vidéogrammes du film intitulé “Théorème’et en concédant des droits de télédiffusion à des tiers,

– de condamner in solidum les sociétés FSF, FSF 2 et Monsieur [F] :

* à verser aux sociétés Mondo TV et Doro TV Merchandising la somme indemnitaire de ‘700.00″euros (sic) au titre de l’exploitation vidéographique contrefaisante du film intitulé ‘Théorème’, celle de 210.000 euros au titre de l’exploitation télévisuelle contrefaisante de ce film, outre celle de 150.000 euros en réparation de leur préjudice moral,

* à verser à la société Sidonis Production NC la somme indemnitaire de 126.400 euros au titre de l’exploitation vidéographique contrefaisante du film intitulé “Théorème”outre celle de 70.000 euros en réparation de son préjudice moral,

‘ à titre subsidiaire

si la cour devait considérer que le mandat d’Adriana Chiesa Enterprises n’est pas valide : – de considérer que les droits étaient restés dans les mains de la société Mondo TV et qu’en conséquence cette dernière avait qualité pour agir contre les contrefacteurs,

– de condamner en conséquence in solidum les sociétés FSF, FSF 2 et Monsieur [F] à payer aux sociétés Mondo TV et Doro TV Merchandising une somme de 826.400 euros de dommages-intérêts au titre de l’exploitation vidéographique contrefaisante du film intitulé “Théorème”, celle de 150.000 euros en réparation de leur préjudice moral outre la somme indemnitaire de 210.000 euros au titre de l’exploitation télévisuelle contrefaisante dudit film,

‘ en tout état de cause

– de débouter les intimés de leurs entières prétentions, et en particulier de leur demande indemnitaire reconventionnelle pour diffamation,

– d’ajouter aux condamnations les intérêts capitalisés calculés sur la base des dispositions de l’article 1154 du Code civil,

– d’ordonner la publication de l’arrêt à intervenir aux frais in solidum des intimés dans cinq quotidiens nationaux et un magazine américain,

– de condamner in solidum les intimés à verser à chacune d’elles trois une somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

Par dernières conclusions signifiées le 11 octobre 2013, les sociétés à responsabilité limitée Films Sans Frontières, Films Sans Frontières  2 ainsi que Monsieur [J] [F] prient pour l’essentiel la cour, au visa des articles 31 et suivants du code de procédure civile, 1134 du code Civil, L.132-1 et suivants ainsi que L.332-1 du code de la propriété intellectuelle, de l’article 7 §3 de la directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle, et 41 de la loi du 29 juillet 1881, de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté les appelantes de leurs demandes faute d’intérêt à agir, d’infirmer le jugement entrepris sur les autres demandes, et statuant à nouveau :

‘ in limine litis

de constater que les saisies effectuées sont nulles pour défaut de qualité et intérêt à agir des appelantes, et que celles-ci n’ont pas non plus qualité à agir à la présente procédure, aucune d’entre elles n’apportant la preuve de la titularité de ses droits d’exploitation sur le film ‘Théorème’ ; subsidiairement, en tout état de cause, de constater que la société Marble Arch est liquidée depuis 2009, et ne peut intervenir valablement à la présente procédure ; de ‘débouter’ en conséquence, les appelantes de toutes leurs demandes,

‘ à titre subsidiaire

– sur l’incident, de constater que les sociétés FSF, FSF 2 et Monsieur [J] [F] ont communiqué les contrats des 19 mars 1998 et 15 septembre 1999 et les justificatifs des paiements visés auxdits contrats et de considérer que ces contrats sont véritables et sincères, – sur le fond, de considérer que la société FSF était titulaire des droits TV France et Allemagne en février 2000, et que la vente à la chaîne Arte est valable, que la société Doro TV a commis une faute en ne fournissant pas, en cours de contrat, du matériel normalement exploitable à son cocontractant, qu’un accord tacite est intervenu entre les parties et que la société FSF a exploité les DVD de façon notoire jusqu’en 2006, conformément à la clause de préférence figurant au contrat de 1995 ; de débouter, en conséquence, de plus fort les appelantes de leurs prétentions,

‘ à titre plus subsidiaire

– pour le cas où la cour estimerait que FSF doit réparation à une ou plusieurs des appelantes, de considérer que le préjudice allégué par celles-ci doit se confondre avec celui de la société FSF qui n’a pas pu exploiter les droits vidéo de 1995 à 2000, – de condamner la société Doro TV Merchandising à payer à la société FSF la somme de 20.000 € au titre de l’article 41 de la loi de 1881,

– de condamner ‘solidairement’ les appelantes à payer aux sociétés FSF, FSF 2 et à Monsieur [J] [F] la somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral outre celle de 8.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

SUR CE,

Sur les demandes présentées in limine litis par les intimés :

Considérant que les intimés poursuivent en premier lieu la nullité des saisies-contrefaçon pratiquées les 19 et 20 juin 2006 puis le 22 septembre 2006 en arguant du défaut d’intérêt ou de qualité à agir des appelantes du fait que ‘seuls les auteurs et les ayants droits des auteurs peuvent engager une procédure de contrefaçon’, et se prévalent, de plus, de l’absence de saisine de la juridiction de fond dans les délais légaux prévus à l’article R.332-1 du code de la propriété intellectuelle ;

Qu’ils invoquent, en second lieu, le défaut de qualité et d’intérêt à agir de chacune des quatre sociétés demanderesse à l’action ;

Mais considérant que l’appréciation de l’élément de preuve que constitue une saisie contrefaçon relève du fond du litige ;

Que, par ailleurs, l’argumentation des intimées procède d’une lecture tronquée de l’article L 332-1 du code de la propriété intellectuelle en sa rédaction applicable aux faits de l’espèce (modifiée par la loi n° 2006-961 du 1er août 2006), d’ailleurs reprise dans les mêmes termes par l’article L 332-1 issu de la loi du 29 octobre 2007, aux termes duquel la requête aux fins de saisie-contrefaçon peut être effectuée ‘à la demande de tout auteur d’une oeuvre protégée par le Livre 1er, de ses ayants droit ou de ses ayants cause’ ;

Qu’il s’en déduit qu’un ayant cause peut requérir du juge l’autorisation de procéder à une saisie-contrefaçon et que, dès lors que la nullité d’un procès-verbal de saisie-contrefaçon peut résulter de l’absence de validité du titre invoqué, il convient de se prononcer d’abord sur la qualité et l’intérêt à agir des quatre sociétés demanderesses à l’action qui leur sont contestés ;

Sur la qualité et l’intérêt à agir des sociétés demanderesses à l’action :

‘ s’agissant de la société Marble Arch Ltd :

Considérant que si cette société était présente en première instance et a relevé appel du jugement, aux côtés des trois autres sociétés demanderesses à l’action le 07 juillet 2009, il est démontré qu’elle a fait l’objet d’une dissolution à la date du 15 septembre 2009 et patent qu’elle ne figure plus au rang des sociétés appelantes dans leurs dernières conclusions qui ne contiennent aucune demande à son profit ;

Qu’il convient, dans ces conditions, d’en faire le constat et de considérer comme sans objet les demandes des intimés tendant à voir cette société déclarée irrecevable à agir, faute de qualité et d’intérêt ;

‘ s’agissant de la société Doro TV Merchandising :

Considérant que les intimés lui opposent le fait qu’elle n’a pas acquis, le 05 octobre 1989, les droits sur le film ‘Théorème’ pour toutes les formes d’exploitation, la société Nife Film Srl, dont elle tient ses droits, n’ayant elle-même acquis de la société Spring Films Srl que ‘le droit d’utilisation et de représentation économiques’, qu’en vertu de l’adage nemo plus juris, elle ne disposait donc pas du droit de reproduction, distinct du droit de représentation, sur le film, et n’avait, dès lors, ni qualité ni intérêt pour leur reprocher l’exploitation du film ‘Théorème’ sous forme de vidéogrammes ;

Qu’en réponse à l’appelante, ils ajoutent que la circonstance qu’ils ont acquis par contrats les droits d’exploitation vidéographiques du film n’atteste pas de leur mauvaise foi dès lors qu’ils ignoraient cette situation juridique ;

Considérant, ceci exposé, que la chaîne des droits attestée par les appelantes révèle (pièce 21, extrait du Registre public de la Société Italienne des Auteurs et Editeurs (SIAE) :

– que le producteur initial du Film (déclaré en 1968 à la SIAE) était la société Aetos Film Srl,

– que par contrat enregistré le 20 janvier 1971, la société Aetos a cédé ses droits à la société Spring Films et il a été transcrit :

‘ vente par Aetos Film Srl à Spring Films Srl (…) s’agissant du film ‘Teorema’ de tous les droits de représentation et d’exploitation économique sous toute forme et par tout moyen de représentation dans tous les pays du monde, Italie comprise’,

– que par contrat enregistré le 18 janvier 1984, la société Spring Films Srl les a cédés à la société Nife Film Srl et il a été transcrit :

‘Spring Films (…) a vendu et transféré à Nife Film Srl qui les acceptés et acquis tous les droits d’utilisation et de représentation économique, sans aucune exclusion ou exception, compris ceux de projeter et de diffuser sous tout format et de quelque manière que ce soit (en particulier à la télévision et au cinéma), par toute technique (même si elle n’est pas encore inventée à ce jour) renvoyant au film ‘Teorema’ pour tous les pays du monde, Italie comprise. Enfin, Spring Films Srl a transféré à Nife Film Srl tout droit de propriété, de même que la propriété sur tous les supports techniques et matériels (négatif, internégatif, bandes) du film susmentionné. La vente est faite sans limitation de durée’ ;

Que les intimés ne peuvent en déduire que seuls les droits de représentation ont été cédés aux termes de cette dernière convention dès lors que les contractants italiens ont également cédé les droits ‘d’utilisation’ ; qu’ils ne peuvent se borner à prétendre que le droit d’utilisation n’existe pas en tant que tel ou dire que les droits d’utilisation économique ne concernent que l’exploitation cinématographique ;

Que si ce terme d”utilisation’ n’est pas le terme ‘reproduction’, dans le sens que lui donne le droit français, il ne l’exclut pas, d’autant que la lecture in extenso des termes du contrat de 1984, évoquant ‘tous formats’ et ‘toute technique (même si elle n’est pas encore inventée à ce jour)’ sont susceptibles de se rapporter, par leur généralité, à la fixation matérielle de l”uvre par tous procédés qui permettent de la communiquer au public d’une manière indirecte, les appelantes faisant pertinemment observer que les vidéogrammes n’existaient pas à cette date ;

Qu’ainsi, la société Doro TV qui entend voir sanctionner l’exploitation vidéographique du film, selon elle illicite, a intérêt et qualité et agir, ainsi qu’en ont décidé les premiers juges ;

‘ s’agissant de la société Mondo TV :

Considérant qu’alors que les intimés font valoir que seule la société Doro TV était partie au contrat de cession de droits conclu avec la société Nife Film Srl et que la société Mondo TV ne dispose d’aucun droit sur le film, les appelantes soutiennent que sa qualité de société-mère et d’associée unique de la société Doro TV justifie son intérêt à agir ;

Considérant, cela étant, que le seul examen du tableau de la chaîne des droits élaboré par les appelantes (page 21/37 de leurs dernières conclusions) suffit pour constater qu’il existe une rupture de cette chaîne entre cédants et cessionnaires postérieurement au contrat à durée limitée conclu entre les sociétés Dora TV et FSF le 31 janvier 1995 ;

Qu’il n’est justifié (ni même fait état) d’aucune cession de droits intervenue entre les deux personnes morales distinctes que sont les sociétés Dora TV et Mondo TV et que la qualité de maison-mère et d’associée unique de cette dernière ne lui donne pas qualité à agir, si bien que la décision de la juridiction consulaire doit être confirmée sur ce point ;

‘ s’agissant de la société à responsabilité limitée Sidonis Production NC :

Considérant que, selon contrat du 1er décembre 2005, cette dernière tient ses droits de la société Marble Arch, laquelle se les ai vus céder, le 02 novembre 2005, par la société Adriana Chiesa Enterprise agissant en vertu d’un mandat de commercialisation du 22 avril 2002 consenti par la société Mondo TV ;

Que dans la mesure où, comme il vient d’être dit, la société Mondo TV ne détenait aucun droit sur le film ‘Théorème’, elle ne pouvait les céder d’une quelconque manière, ce dont il résulte qu’à bon droit les premiers juges ont considéré que la Société Sidonis n’avait pas qualité à agir ;

Qu’il s’évince de l’ensemble de ce qui précède que seule la société Doro TV Merchandising peut se prévaloir d’un intérêt et d’une qualité à agir, comme il a été jugé en première instance ;

Sur la validité des quatre saisies-contrefaçon pratiquées les 19 et 20 juin 2006 puis le 22 septembre 2006 (respectivement au siège de la société SFS, dans des magasins parisiens à l’enseigne de la Fnac et de Virgin Mégastore puis au siège de la société Cdiscount) :

Considérant qu’il résulte encore des motifs précédents que les ayants cause ont qualité pour requérir une mesure de saisie-contrefaçon et que dès lors que la société Doro TV qui avait cette qualité figure parmi les requérants à ces différentes mesures, les intimés ne sont pas fondés à en solliciter la nullité du fait d’une absence d’intérêt ou de qualité ;

Considérant que si les requérants, observant qu’il s’est écoulé un délai de huit mois entre les premières saisies et l’assignation, invoquent un second moyen de nullité tiré des dispositions de l’article R 332-1 du code de la propriété intellectuelle exigeant la saisine de la juridiction de fond dans un délai de 20 jours, il y a lieu de relever, en toute hypothèse, que ce texte est issu d’un décret entré en vigueur le 27 juin 2008, soit postérieurement à l’introduction de l’action ;

Qu’il échet de rappeler qu’en matière de propriété littéraire et artistique et contrairement aux saisies-contrefaçon pratiquées en matière de propriété industrielle, le requérant n’a pas l’obligation d’assigner dans un délai précis pour éviter la caducité de la saisie ;

Que l’article 7 § 3 de la directive 2004/48/CE qu’invoquent également les intimés et à la lumière de laquelle il est constant que doit être interprété le droit national prévoit, certes, que le requérant à la mesure de conservation des preuves doit engager une action au fond dans un délai raisonnable pouvant être de 20 jours ouvrables ou de 31 jours civils ;

Qu’une telle exigence n’a pas été introduite en droit interne en cette matière ; que cette absence de transposition se trouve, cependant, contrebalancée par la faculté donnée au saisi, comme le prévoyait l’article L 332-2 en sa rédaction alors applicable, de demander au président du tribunal, statuant en référé, d’ordonner la mainlevée de la saisie ou d’en cantonner les effets, ceci conformément à l’article 7 § 1 de la directive précitée énonçant que lorsque les mesures de conservation des preuves ont été adoptées sans que l’autre partie ait été entendue, ‘les parties affectées en sont avisées sans délai après l’exécution des mesures au plus tard. Une révision, compris le droit d’être entendu, a lieu à la demande des parties affectées afin qu’il soit décidé, dans un délai raisonnable après la notification des mesures, si celles-ci sont modifiées, abrogées ou confirmées’ ;

Qu’il convient, par conséquent, de débouter les intimés de leur demande tendant à voir annuler les procès-verbaux des quatre saisies-contrefaçon pratiquées et d’ajouter au jugement qui, bien que saisi de cette demande, a omis de se prononcer ;

Sur la contrefaçon :

Sur la contestation relative aux contrats de 1998 et de 1999 et sur la demande de vérification d’écriture :

Considérant qu’alors que la société Dora TV, seule recevable à agir, reproche aux intimés d’avoir commis des actes de contrefaçon en distribuant des vidéogrammes du film intitulé ‘Théorème’ et en concédant des droits de télédiffusion à des tiers, les intimés entendent justifier leurs droits par la production de trois contrats respectivement conclus les 19 mars 1998 (deux contrats) et le 15 septembre 1999 par lesquels la société Doro TV leur a, selon eux, cédé leurs droits ;

Qu’en cause d’appel, la société Doro TV qui arguait du caractère apocryphe de ces trois contrats en en contestant la signature et qui a vu son moyen rejeté par le tribunal aux motifs qu’ils présentaient l’apparence de contrats valables et que, de plus, la société Doro TV ne justifiait pas d’un dépôt de plainte à ce titre, produit un avis rédigé et complété par un expert en écritures par elle mandaté tout en soulignant qu’une sommation d’en communiquer les exemplaires originaux, en mai 2012, est restée sans effet et qu’elle n’a pu les obtenir que tardivement et après avoir saisi le conseiller de la mise en état d’un incident ;

Qu’elle ajoute que si les intimés se prévalent de paiements, en contrepartie des cessions de droits alléguées, ils ne produisent que deux photocopies de chèques et non la preuve d’encaissements; que, par ailleurs, elle persiste à désavouer sa signature et ajoute qu’il appartient à la partie qui se prévaut d’un acte d’en démontrer la sincérité, qu’aucun texte ne l’oblige à engager une procédure pénale et qu’une procédure de vérification des signatures de l’instumentum original est, selon elle, inévitable et nécessaire ; qu’elle précise qu’elle ne s’est jamais opposée à une expertise judiciaire sur ce point et critique le rapport du technicien missionné par les intimés, selon elle ‘peuplé de ‘vraisemblablement’, ‘semblerait’ et ‘autres observations sceptiques’ ;

Qu’en réplique, les intimés rappellent les difficultés qui ont été les leurs pour avoir, de leur côté, communication des exemplaires originaux des contrats de cession de droits successivement conclus depuis la cession consentie par la société Aetos Film, n’en obtenant d’ailleurs qu’une partie, se prévalent, de plus, de la réticence des appelantes à voir ordonner une expertise judiciaire ou à engager une procédure pénale ou à initier une procédure d’inscription de faux, tirent argument de l’avis d’un expert en écritures par eux-mêmes missionné et ajoutent qu’il convient de se référer aux termes et contexte de la signature de ces contrats ;

Considérant, ceci rappelé, que l’article 1324 du code civil dispose :

‘Dans le cas où la partie désavoue son écriture ou sa signature, et dans le cas où ses héritiers ou ayants cause déclarent ne point la connaître, la vérification en est ordonnée en justice’ ;

Que s’il appartient donc à la juridiction ainsi saisie de procéder elle-même à l’examen de l’écrit, force est de relever en l’espèce qu’aucune conclusion dénuée de réserves ne peut être tirée de l’examen, par la cour, de la signature de Monsieur [P] [L] portée sur les trois actes sous seing privé litigieux ;

Que la cour peut d’autant plus se montrer réservée que deux techniciens respectivement mandatés par les parties – ayant, par ailleurs, semblablement la qualité d’experts près la cour d’appel de Paris – ont émis des avis qui divergent et ne sont pas sans réserves (pièces 39 et 52 des appelantes – avis du 1er novembre 2012 à partir de copies / complément d’avis du 5 septembre 2013 à partir des originaux // pièces 27-1 à 27-9, 29-1 à 29-17 des intimés – avis du 12 octobre 2013 à partir des originaux) ;

Qu’en particulier, le technicien consulté par les appelantes précise qu’il lui aurait fallu procéder à des examens en cabinet pour avoir des certitudes tandis que le technicien consulté par les intimés et qui a disposé de matériels de grossissement et de diffusion de lumière blanche, infrarouge et ultra-violet relève que le dossier de comparaison fait apparaître une évidente variabilté des signatures de référence justifiant notamment que la paternité de la signature soit, par lui, attribuée à Monsieur [L] ‘vraisemblablement’ ;

Que la cour ne saurait, toutefois, recourir à une mesure d’expertise – qu’aucun texte ne l’oblige à ordonner – qu’autant qu’elle ne peut trouver dans la cause d’autres éléments de nature à lui permettre de forger sa conviction et de trancher le litige sans avoir à se prononcer sur la sincérité de ces signatures ;

Qu’étant d’abord rappelé que les premières opérations de saisie-contrefaçon se sont déroulées en 2006 et que l’acte introductif d’instance date du 02 mai 2007, il a lieu de considérer que les trois contrats litigieux des 19 mars 1998 (x 2) et 15 septembre 1999 n’ont pu être élaborés pour les besoins de la cause dès lors qu’ils ont fait l’objet d’enregistrements au Registre Public de la Cinématographie et de l’Audiovisuel en 1998 et 2000 ;

Qu’à cet égard, la société Doro TV, en sa qualité de professionnelle était informée ou aurait dû être informée de l’existence de ces contrats, d’autant qu’un mandat de commercialisation et des contrats de cession de droits sur ce film ont été consentis par sa maison-mère et son mandataire dès avant les saisies-contrefaçon que les demanderesses à l’action ont fait pratiquer ;

Que la coexistence de deux contrats datés du 19 mars 1998, au même contenu, mais qui comportaient, pour le premier, une erreur matérielle par inversion sur la personne du ‘distributor’ et du ‘sub-distributor’ tend à accréditer l’affirmation des intimés selon laquelle les parties se sont réellement liées à cette date, l’auteur d’un faux, selon la terminologie de la société Dora TV, n’ayant nul besoin de produire deux contrats dès lors qu’un seul suffisait pour justifier de la cession de droits revendiquée ;

Que dans cette optique de fabrication de faux documents contractuels, l’auteur d’un faux aurait pu ajouter à ces contrats une convention portant sur la cession de droits de reproduction vidéographique et pas seulement de droits de diffusion télévisuelle ; que les intimés ne versent, pourtant, aucune pièce contractuelle dans ce sens, évoquant uniquement un accord tacite ;

Que ces derniers ne produisent, certes, que la photocopie de chèques pour attester du versement de sommes en contrepatie des droits cédés, lesquels étaient entièrement exigibles à réception du matériel accepté, à l’exclusion de la preuve de leur encaissement (pièces 22 et 23) ;

Que si l’appelante peut contester cette carence probatoire, il peut être relevé qu’il lui était cependant loisible de rapporter la preuve, au moyen de documents issus de sa propre comptabilité, que cette somme n’est pas entrée dans sa trésorerie à la date à laquelle les intimés affirment qu’elle a été rendue destinataire de ces chèques ;

Qu’enfin, l’attitude de la société Doro TV qui oriente ses conclusions sur le fait que sont produits en justice par la partie adverse trois actes sous seing privé matériellement falsifiés et qu’ils n’ont aucune valeur probatoire n’est pas dénuée d’équivoque ;

Que l’inscription de faux concerne, certes, les actes authentiques et il est vrai qu’elle n’était pas tenue de saisir la juridiction pénale sur le fondement des articles 441-1 et suivants du code pénal ; qu’elle ne peut, cependant, prétendre que le choix qui a été le sien de la voie civile y faisait obstacle et argumenter d’abondance sur la difficulté qu’elle a rencontrée pour accéder aux originaux, alors que ces difficultés qui ont occasionné la délivrance d’une sommation de communiquer ou la saisine du conseiller de la mise en état lui auraient été épargnées en agissant au pénal ; que, par ailleurs, il peut être observé que si elle déclare ne pas s’opposer à une expertise judiciaire, une demande dans ce sens ne figure pas, même à titre subsidiaire, dans ses conclusions ;

Que l’ensemble de ces éléments ne permet donc pas à la société Doro TV de solliciter de la cour qu’elle ‘écarte des débats’ ces trois contrats présentés comme apocryphes sans preuves suffisantes, en ne tenant pas compte de leurs effets juridiques ;

Sur l’exploitation télévisuelle du film ‘Théorème’ :

Considérant qu’il résulte des contrats précités versés aux débats :

– que le 19 mars 1998, la société Doro TV a cédé à la société FSF le droit de diffuser par la télévision le film ‘Théorème’ en Allemagne et dans les territoires de langue allemande pour une durée de cinq ans (soit jusqu’au 19 mars 2003) et pour un nombre de transmissions illimité,

– que le 15 septembre 1999, la société Doro TV a cédé à la société FSF le droit de diffuser par télévision le film ‘Théorème’ en France et dans les territoires francophones pour une durée de deux ans (soit jusqu’au 15 septembre 2001) et pour un nombre de transmissions illimité ;

Que les intimés sont, en conséquence, fondés à soutenir que le contrat d’achat de droits de diffusion signé le 24 février 2000 avec la société anonyme Sept Arte (produit en pièce 14) était valable et à solliciter la confirmation du jugement en ce qu’il a débouté la société Doro de ses demandes au titre de l’exploitation télévisuelle contrefaisante de ce film ;

Sur l’exploitation vidéographique du film ‘Théorème’ :

Considérant qu’au visa de l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle selon lequel :

‘ Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayant cause est illicite (…)’

et en se prévalant des atteintes caractérisées constatées par huissier, chez les revendeurs, sur internet et dans la presse (à savoir: la vente du DVD du film à la FNAC, chez Virgin Megastore, sur internet par le premier vendeur de vidéogrammes en ligne qu’est la société CDiscount, chez des détaillants et la promotion de ce DVD dans ‘Voici’, magazine tiré à plus de 500.000 exemplaires et qui compterait plus de quatre millions de lecteurs hebdomadaires), la société Doro TV reproche au tribunal d’avoir, certes, constaté la contrefaçon à ce titre mais de n’avoir pas réparé son préjudice patrimonial, conformément aux articles L 331-1-3 et L 331-1-4 du code précité en n’indemnisant que son préjudice moral ;

Que les intimés rétorquent que, par lettre du 25 mars 1998 (pièce 15), la société Films Sans Frontières a informé la société Doro TV de son intention de renouveler les droits vidéographiques conformément au § V d’un précédent contrat à effet au 1er janvier 1995 et expirant le 31 décembre 1999 (pièce 2) selon lequel ‘Le cessionnaire aura un droit de première négociation / premier refus pour proroger la durée à tout moment avant l’expiration du présent contrat’ et qu’en raison de la quasi-impossibilité dans laquelle elle s’est trouvée d’exploiter ses droits vidéographiques entre 1995 et 1999 du fait de la mauvaise qualité du matériel fourni par la société Doro TV, celle-ci a accepté que la durée du contrat soit prorogée de cinq ans avec une période de ‘sale off’ de six mois pour écouler les stocks, de sorte qu’en vertu de leur accord tacite elle pouvait se livrer à l’exploitation vidéographique de ce film jusqu’à ‘début 2006″ ;

Considérant, ceci exposé, que si les intimés justifient des difficultés qu’ils ont ponctuellement rencontrées en 1996 du fait de désordres affectant le master livré par la société Doro TV, il apparaît, à la lecture du message qu’adressait la société FSF à la société Doro TV le 17 janvier 1996, qu’elle se plaignait de la livraison d’un master ‘inexploitable pour une diffusion TV’ et non pour une exploitation vidéographique ;

Que, par ailleurs, bien que versant la lettre par laquelle elle émettait le souhait ‘de renouveler les droits du film’ (sans préciser de quels droits il s’agit et sans faire état des désordres constatés sur le master), elle ne produit aucun contrat écrit, aucun avenant, formalisant un accord dont la société Doro TV conteste l’existence pas plus qu’elle ne justifie d’une relance après l’envoi de sa lettre du 17 janvier 1996 ou d’un paiement en contrepartie des droits d’exploitation au moyen de vidéogrammes dont elle prétend qu’ils ont été prorogés ;

Que les intimés échouent, par conséquent, à démontrer qu’à compter du 1er janvier 2000 et jusqu’à ‘début 2006″ ils pouvaient licitement exploiter le film ‘Theorème’ sous forme de vidéogramme; que le jugement qui a retenu l’existence d’actes de contrefaçon à ce titre, fût-ce dans une moindre mesure, doit être confirmé ;

Sur les mesures réparatrices :

Considérant que pour solliciter l’allocation des sommes de 700.000 euros et de 150.000 euros venant réparer, respectivement, ses préjudices patrimonial et moral, la société Doro TV, rappelant que les intimés se sont abstenus de fournir à l’huissier des éléments comptables, font état du minimum garanti de 150.000 euros consenti par la société CDiscount, et de la vente d’au moins 50.000 exemplaires depuis le 15 janvier 2003 par deux distributeurs seulement (Fnac et Virgin Megastore) qui aurait rapporté, compte tenu de la moyenne de prix qu’elle fixe, la somme de 315.333 euros ;

Considérant, ceci rappelé et s’agissant de la réparation du préjudice patrimonial, que les intimés qui ne peuvent se prévaloir d’une exploitation licite jusqu’à ‘début 2006″ font en revanche justement valoir que la société Doro ne commercialisait pas elle-même le film puisque c’est sa société-mère qui l’exploitait, sans droit, et qu’elle ne souffre donc pas d’un ‘véritable préjudice’; qu’ils mettent, par ailleurs, justement en relief la circonstance que toute commercialisation du DVD litigieux a cessé dès l’exécution des opérations de saisie-contrefaçon, comme a pu le constater l’huissier ;

Qu’il ressort en effet des pièces et explications de la société Doro TV que, selon des modalités qui n’ont pas été soumises à l’appréciation de la cour, la société Mondo TV, bien que ne pouvant justifier d’une cession de droits par la personne morale distincte, au patrimoine distinct, que constitue sa filiale, a consenti un mandat de commercialisation à la société Adriana Chiesa Enterprises le 22 avril 2002 et pour une durée de sept ans ; qu’en outre, il apparaît qu’elle s’est tardivement inquiétée de la commercialisation du film sous forme de DVD alors que les intimés avaient inscrits les contrats litigieux au RPCA depuis le 1999 et qu’elle était en mesure, dès cette date, de prévenir les agissements des intimés qu’elle n’a entendu voir sanctionner que par voie d’action en justice en 2007 ;

Que tout au plus peut-elle se plaindre du désordre commercial qu’a nécessairement engendré cette exploitation sans droit des droits vidéographiques par les intimés ; qu’ainsi, son préjudice patrimonial sera réparé, mais à hauteur de la somme de 10.000 euros ; qu’il sera ajouté au jugement dans ce sens ;

Que le jugement a, en revanche, à bon droit admis et exactement apprécié à la somme de 10.000 euros le montant de la réparation du préjudice moral causé à la société Doro TV dès lors que les faits délictueux ont porté atteinte à l’image et à réputation de cette société auprès de la profession ;

Que tout aussi justement le tribunal a rejeté la demande de mise hors de cause de Monsieur [J] [F] qui a pu laisser croire au grand public acquérant les DVD litigieux qu’il était le producteur du film en faisant porter la mention ‘Galeshka Moravioff présente’, commettant, ce faisant, une faute détachable de ses fonctions de dirigeant des deux sociétés FSF et FSF2, ainsi que celle de la société Films sans Frontières 2 qui, du fait de ses liens étroits avec la société Films Sans Frontières, ne pouvait ignorer que la cession de droits qui lui était consentie pour une durée de 3 ans à compter du 1er janvier 1999 excédait la durée d’exploitation des droits qui avait été antérieurement consentie à la société Film Sans Frontières ;

Que les intimés seront, par conséquent, condamnés in solidum au paiement de ces dommages-intérêts, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil, ainsi que requis par l’appelante ;

Considérant que les faits délictueux incriminés étant anciens et ayant cessé, les mesures ci-avant ordonnées réparant, par ailleurs, à suffisance les préjudices subis, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de publication et de confirmer le jugement sur ce point ;

Que les mesures d’interdiction et de restitution, prononcées en tant que de besoin, doivent, de leur côté, être confirmées ;

Sur les demandes reconventionnelles :

Considérant que les sociétés Films Sans Frontières, Films Sans Frontières 2 et Monsieur [F] poursuivent le versement d’une somme indemnitaire à titre reconventionnel en se prévalant cumulativement d’une procédure fautive non dénuée de l’intention de nuire, d’une ‘dénonciation calomnieuse, injurieuse et outrageante’ du fait de l’incrimination de faux, de la fourniture de matériel inexploitable, de la négligence des appelantes qui n’ont pas cru devoir vérifier l’existence de contrats inscrits au RPCA, du préjudice subi auprès des distributeurs, des modalités de présentation des requêtes aux fins de saisie-contrefaçon et de l’atteinte à l’image et à la réputation de la société FSF ;

Que les montants réclamés se révèlent variables puisqu’il est demandé paiement de la somme de 100.000 euros au profit de la société FSF et au titre de son préjudice moral dans le corps des dernières conclusions des intimés, mais 20.000 euros au profit de cette dernière au titre de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881 et 15.000 au profit, globalement, des sociétés FSF, FSF 2 et de Monsieur [F] en réparation de leur préjudice moral ;

Mais considérant qu’en toute hypothèse, la teneur du présent arrêt conduit à considérer que les faits dénoncés justifiaient l’exécution de mesures à des fins probatoires et l’introduction d’une instance ; qu’il a, par ailleurs, été tenu compte de la négligence des appelantes dans l’appréciation du préjudice patrimonial subi ; qu’enfin, les écrits qui ont été produits en justice par les appelantes doivent bénéficier de l’immunité prévue à l’article 41 alinéa 4 de la loi du 29 juillet 1881 dans la mesure où, bien que parfois vifs mais s’appuyant sur des décisions de justice ayant opposé les intimés à des tiers, ils n’excédaient pas les limites d’une défense légitime ;

Que les intimés seront déboutés, comme en première instance, de leurs demandes indemnitaires ;

Sur les demandes accessoires :

Considérant que l’équité conduit à allouer à la société Dora TV la somme complémentaire de 4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Que, déboutées de ce dernier chef de prétentions, les sociétés intimées supporteront les dépens d’appel ;

PAR CES MOTIFS,

Constate que la société de droit anglais Marble Arch Films Ltd était présente en première instance et a relevé appel du jugement, conjointement avec les trois autres sociétés demanderesses à l’action le 07 juillet 2009, qu’elle a fait l’objet d’une dissolution à la date du 15 septembre 2009 et qu’elle ne figure plus au rang des sociétés appelantes dans leurs dernières conclusions qui ne contiennent aucune demande de son chef ;

Considère, par conséquent, comme sans objet les demandes tendant à la voir déclarer irrecevable à agir ;

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a ‘débouté’ plutôt que déclaré irrecevables à agir les sociétés Mondo TV et Sidonis Production NC, Marble Arch Films Ltd et en ce qu’il a, par ailleurs, débouté la société Doro TV Merchandising de sa demande indemnitaire au titre de son préjudice patrimonial et, statuant à nouveau dans cette limite en y ajoutant (notamment sur le sort des saisies-contrefaçon sur lequel les premiers juges ont omis de statuer) ;

Déclare la société de droit italien Mondo TV SpA et la société Sidonis Production NC SARL irrecevables en leur action, faute de qualité à agir ;

Rejette les demandes des intimés tendant à voir prononcer l’annulation ‘des saisies’ ;

Dit qu’en commercialisant des vidéogrammes du film ‘Théorème’ de [K] [T] [Q] les sociétés Films sans Frontières SARL et Films Sans Frontières 2 SARL ainsi que Monsieur [J] [F] ont commis des actes de contrefaçon au préjudice de la société Dora TV Merchandising Srl en lui causant un préjudice patrimonial ;

Condamne, en conséquence, in solidum les sociétés Films sans Frontières SARL et Films Sans Frontières 2 SARL ainsi que Monsieur [J] [F] à verser à la société Dora TV Merchandising la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice patrimonial ;

Ordonne la capitalisation de ces intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil ;

Condamne in solidum les sociétés Films sans Frontières SARL et Films Sans Frontières 2 SARL ainsi que Monsieur [J] [F] à verser à la société Dora TV Merchandising la somme complémentaire de 4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens d’appel, avec faculté de recouvrement conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier,Le Président,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x