Droit de rétractation : 12 mai 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/01247

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Droit de rétractation : 12 mai 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/01247
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2ème Chambre

ARRÊT N°223

N° RG 20/01247

N° Portalis DBVL-V-B7E-QQCA

(2)

SA COFIDIS

C/

M. [U] [R]

Mme [S] [D] épouse [R]

Société ALLIANCE

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– Me DEMIDOFF

– Me DELOMEL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 12 MAI 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 07 Février 2023

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 12 Mai 2023, après prorogations, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

SA COFIDIS

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Eric DEMIDOFF de la SCP GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Xavier HELAIN de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOET HELAIN

INTIMÉS :

Monsieur [U] [R]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Madame [S] [D] épouse [R]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Tous représentés par Me Arnaud DELOMEL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Société ALLIANCE prise en la personne de [H] [L] ès qualité de liquidateur de la société NEO CONCEPT ET RENO 2018

[Adresse 3]

[Localité 5]

Assigné par acte d’huissier en date du 03/06/2020, délivré à personne morale, n’ayant pas constitué

EXPOSE DU LITIGE :

Suivant bon de commande en date du 22 mars 2017, M. [U] [R] et Mme [S] [D], son épouse, ont commandé à la société Neo concept & rénovation dans le cadre d’un démarchage la fourniture et la pose de douze panneaux photovoltaïques avec système de récupération et de redistribution d’air chaud aéro-voltaïque pour un coût de 26 500 euros. L’opération a été financée par la souscription d’un prêt auprès de la société Cofidis.

 

Suivant jugement en date du 26 juillet 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société Neo concept & rénovation et désigné Me [H] [L] en qualité de mandataire liquidateur.

 

Suivant acte d’huissier en date des 22 et 26 mars 2019, les époux [R] ont assigné Me [H] [L] ès qualités et la société Cofidis devant le tribunal d’instance de Dinan.

 

Suivant jugement en date du 31 décembre 2019, le tribunal d’instance de Dinan a :

 

Déclaré les époux [R] recevables et bien fondés en leur action diligentée à l’encontre de Me [H] [L] ès qualités et de la société Cofidis.

Prononcé l’annulation du contrat conclu entre les époux [R] et la société Neo concept & rénovation et du contrat de prêt souscrit concomitamment.

En conséquence,

Dit que les époux [R] devraient laisser à disposition de Me [H] [L] ès qualité le matériel installé si celle-ci en faisait la demande dans le délai de deux mois suivant la signification du jugement.

Dit que dans cette hypothèse, les frais de dépose de l’installation seraient à la charge de la société Neo concept & rénovation.

Dit qu’en l’absence de réclamation de la part du mandataire, les époux [R] pourraient disposer librement de l’installation.

Débouté la société Cofidis de sa demande de remboursement des fonds empruntés.

Condamné la société Cofidis à payer aux époux [R] la somme de 1 574,13 euros correspondant au montant total des échéances contractuelles versées.

Condamné la société Cofidis à payer aux époux [R] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Débouté les époux [R] de leurs autres demandes.

Ordonné l’exécution provisoire.

Dit que la société Cofidis supporterait les dépens de l’instance et ses frais irrépétibles.

Dit que la somme allouée aux époux [R] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens de la procédure devraient figurer au passif de la liquidation judiciaire de la société Neo concept & rénovation.

 

Suivant déclaration en date du 20 février 2020, la société Cofidis a interjeté appel.

En ses dernières conclusions en date du 5 décembre 2022, la société Cofidis demande à la cour de :

 

Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

La dire recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions.

Y faisant droit,

Débouter les époux [R] de leurs demandes, fins et conclusions.

Les condamner solidairement à reprendre l’exécution du contrat de prêt conformément aux stipulations contractuelles.

Les condamner solidairement à lui rembourser en une seule fois l’arriéré des échéances impayées depuis le jugement assorti de l’exécution provisoire jusqu’au jour de la signification de la présente décision au taux légal.

Les condamner à lui rembourser l’intégralité des sommes perçues dans le cadre de l’exécution provisoire.

À titre subsidiaire, si la cour devait confirmer la nullité des conventions ou prononcer la résolution judiciaire,

Dire qu’elle n’a commis aucune faute de nature à la priver de sa créance de restitution.

Dire que les époux [R] ne justifient pas d’un préjudice de nature à la priver de sa créance de restitution.

En conséquence,

Condamner solidairement les époux [R] à lui payer la somme de 26 500 euros au titre de la restitution du capital emprunté outre les intérêts au taux légal.

En tout état de cause,

Les condamner solidairement à lui payer la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Les condamner solidairement aux dépens avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

 

En leurs dernières conclusions en date du 25 novembre 2022, les époux [R] demandent à la cour de :

 

Vu les articles L. 111-1 et suivants, L. 221-5 et suivants et L. 312-55 et suivants du code de la consommation,

Vu les articles 1217, 1224 et suivants et 1231-1 du code civil,

 

À titre principal,

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Débouter la société Cofidis de ses demandes, fin et conclusions.

À titre subsidiaire,

Prononcer la résolution du contrat de vente.

Confirmer le jugement entrepris pour le surplus notamment s’agissant des conséquences de l’anéantissement des contrats.

En tout état de cause,

Condamner la société Cofidis à leur payer la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La condamner aux dépens.

 

Me Véronique [L] n’a pas constitué avocat.

 

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions des parties.

 

L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

 

Il est constant que suivant bon de commande en date du 22 mars 2017, les époux [R] ont commandé à la société Neo concept & rénovation dans le cadre d’un démarchage la fourniture et la pose de douze panneaux photovoltaïques avec système de récupération et de redistribution d’air chaud aéro-voltaïque.

 

Les époux [R] concluent à la nullité du bon de commande. Ils indiquent que les informations relatives aux caractéristiques des biens acquis sont manquantes de même que celles relatives au prix détaillé et au délai de livraison. Ils indiquent également que le droit pour le consommateur d’avoir recours à un médiateur n’est pas rappelé et que le document ne comporte pas de bordereau de rétractation.

Aux termes des articles L. 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’une commercialisation hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat, dont un exemplaire est remis au client, devant comporter notamment les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné, le prix du bien ou du service, les modalités de paiement, en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service, la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation, lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation.

 

Le bon de commande précise la marque, le modèle et le type des panneaux photovoltaïques à savoir douze panneaux de marque Soluxtec, d’une puissance individuelle de 250 Wc d’une puissance globale de 3 000 Wc.

 

Concernant le coût unitaire des différents biens et prestations, il convient de rappeler que les dispositions de l’article L. 111-1 du code de la consommation exigent l’indication du prix global à payer et non du coût unitaire de chaque élément de l’installation de production d’électricité.

 

Le bon de commande comporte un bordereau de rétractation dont les conditions sont par ailleurs rappelées au contrat.

 

En revanche, il n’est donné aucune précision quant à la marque, au modèle et au type du système de récupération et de redistribution d’air chaud aéro-voltaïque, quant à la date ou au délai auquel le professionnel s’engage à exécuter le service ou encore quant à la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation.

 

La banque soutient que ces irrégularités ne sont sanctionnées que par une nullité relative que les emprunteurs ont renoncé à invoquer en acceptant la livraison et en signant l’attestation de livraison.

 

La confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.

 

Il convient en l’espèce de constater que le bon de commande reproduit au verso les dispositions des articles L. 121-17 et suivants du code de la consommation de sorte que les dispositions légales applicables ont été portées à la connaissance des époux [R]. Le bon de commande vise les dispositions des articles L. 111-1 et L. 111-2 du code de la consommation dont la teneur était reproduite à l’article 1er des conditions générales de vente.

 

Il est par ailleurs constant que les panneaux ont été livrés et installés, raccordés au réseau et qu’ils produisent de l’électricité que les époux [R] revendent à ERDF.

 

Il sera ainsi constaté que dès la signature du contrat de vente, les époux [R] pouvaient se convaincre des insuffisances et imprécisions du bon de commande. La mise en production de l’installation permet de retenir qu’ils ont poursuivi leurs obligations contractuelles en connaissance des vices dont ils auraient pu se prévaloir ce qui emporte confirmation de leurs engagements et les prive de la possibilité de se prévaloir des nullités formelles des contrats.

 

À titre subsidiaire, les époux [R] concluent à la résolution du contrat de vente. Ils font valoir que l’installation comporte des malfaçons qui empêchent le fonctionnement normal du système de récupération et de redistribution d’air chaud aéro-voltaïque. Ils produisent aux débats des fiches d’intervention de professionnels en date des 29 décembre 2018, 22 janvier 2019 et 4 avril 2022. Ils font valoir également que l’installation photovoltaïque ne leur a pas permis de réaliser les économies d’énergie attendues. Ils ajoutent qu’ils n’ont pas obtenu le crédit d’impôt promis ou encore la moindre prime.

 

Il n’est produit aucun élément de preuve permettant de caractériser des dysfonctionnements graves affectant le système de récupération et de redistribution d’air chaud aéro-voltaïque justifiant l’anéantissement du contrat. La cause des dysfonctionnements n’est pas identifiée et les moyens d’y remédier moins encore. M. [Y] [C], professionnel intervenu le 29 décembre 2018 à la demande des époux [R], a pu indiquer que l’installation était en état de marche même si elle dysfonctionnait. Par ailleurs, le bon de commande ne comporte aucun objectif chiffré de rentabilité de l’installation. Il n’est pas démontré que le vendeur s’était engagé à ce que les époux [R] puissent financer le coût de l’installation par la production d’électricité. Si ceux-ci entendent se prévaloir d’une correspondance reçue le 11 mai 2017 évoquant la possibilité d’une rentabilisation de l’installation en sept à huit ans, ce document n’a pas valeur contractuelle puisqu’il est postérieur à la conclusion du contrat. Le bon de commande ne comporte par ailleurs aucun engagement relatif au montant susceptible d’être perçu au titre d’un crédit d’impôt ou d’une prime.

 

Il convient dès lors d’infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé l’annulation du contrat de vente et du contrat de prêt.

 

La société Cofidis est fondée à solliciter la poursuite de l’exécution du contrat de prêt et à obtenir condamnation des époux [R] au paiement des échéances échues et impayées.

 

Les époux [R] qui succombent seront condamnés solidairement aux dépens sans qu’il y ait lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Cofidis.

PAR CES MOTIFS :

 

La cour,

 

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 31 décembre 2019 par le tribunal d’instance de Dinan.

 

Statuant à nouveau,

 

Déboute M. [U] [R] et Mme [S] [D], son épouse, de leurs demandes. 

 

Condamne M. [U] [R] et Mme [S] [D], son épouse, co-emprunteurs solidaires, à reprendre l’exécution du contrat de prêt conformément aux dispositions contractuelles et à payer les échéances impayées.

 

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile. 

 

Condamne solidairement M. [U] [R] et Mme [S] [D], son épouse, aux dépens de première instance et d’appel.

 

Accorde le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. 

 

Rejette toute autres demandes. 

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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