Droit de rétractation : 16 mai 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 22/00822

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Droit de rétractation : 16 mai 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 22/00822
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ARRET N°217

FV/KP

N° RG 22/00822 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GQHJ

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

C/

[H]

[X]

S.E.L.A.R.L. EKIP’

S.A.R.L. ALLSUN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 16 MAI 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/00822 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GQHJ

Décision déférée à la Cour : jugement du 09 février 2022 rendu par le Tribunal de proximité de JONZAC.

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 8]

Ayant pour avocat plaidant Me Aurélie DEGLANE de la SELARL BRT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT.

INTIMES :

Monsieur [R] [P] [S] [P], [S] [H]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 10]

[Adresse 9]

[Localité 5]

Ayant pour avocat plaidant Me Patrick PAYET de la SELARL PAYET FILLOUX, avocat au barreau de SAINTES.

Madame [M] [W] [Y] [W], [Y] [X]

née le [Date naissance 6] 1963 à [Localité 11] (24)

[Adresse 9]

[Localité 5]

Ayant pour avocat plaidant Me Patrick PAYET de la SELARL PAYET FILLOUX, avocat au barreau de SAINTES.

S.E.L.A.R.L. EKIP’ Es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « S.A.R.L. ALLSUN FRANCE »

[Adresse 3],

[Localité 7]

Défaillante

S.A.R.L. ALLSUN

[Adresse 12],

[Localité 4]

Défaillante

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 13 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Claude PASCOT, Président

Monsieur Fabrice VETU, Conseiller

Monsieur Cédric LECLER, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

– REPUTE CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon un bon de commande n°2721, en date du 11 juillet 2018, Monsieur [R] [H] a acheté une centrale solaire photovoltaïque à la société ALLSUN pour un montant de 44.500€.

Le même jour, M. [R] [H] a signé une offre de contrat de crédit consentie par la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE pour financer l’installation et portant ainsi sur la somme de 44.500 €, remboursable par 180 mensualités de 355,28 € au taux d’intérêt débiteur de 4,84 %.

Le 06 août 2018, la société ALLSUN a émis une facture pour un montant de 44.500 € TTC correspondant à l’installation de la centrale solaire et les fonds ont été débloqués le 12 décembre 2018.

Par un autre bon de commande n°05744, en date du 29 août 2018, M. [R] [H] a acheté une nouvelle installation photovoltaïque à la société ALLSUN pour un montant de 44.500€.

Le même jour, M. [R] [H] a signé une offre de contrat de crédit consentie par la SA CA CONSUMER FINANCE pour financer l’installation et portant ainsi sur la somme de 44.500 €, remboursable par 180 mensualités de 401,24 € au taux d’intérêt débiteur de 4,95 %.

Par courrier daté du 02 octobre 2018, la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a informé M. [R] [H] de leur accord pour le financement à hauteur de 44.500 €.

En exécution de ce contrat, la SARL ALLSUN a émis une facture en date du 08 octobre 2018 pour un montant de 44.500€ TTC et le déblocages des fonds est intervenu le 12 décembre 2018.

M. [R] [H] a bénéficié de deux avoirs datés du 20 décembre 2018 d’un montant de 4.000 € et de 4.500 € en échange de son adhésion au fichier client de la SARL ALLSUN.

Se prévalant d’impayés, la société NEUILLY CONTENTIEUX mandatée par la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a mis en demeure M. [R] [H] de régler les sommes de 49.865,35 € et 49.901,17 € par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date des 02 décembre 2019 et 08 juillet 2020.

Par jugement du tribunal de commerce de Bordeaux en date du 14 avril 2021, la liquidation judiciaire de la SARL ALLSUN a été prononcée et la SELARL EKIP a été désignée en tant que liquidateur judiciaire.

Par actes d’huissiers signifiés les 10 et 11juin 2020, M. [R] [H] et Madame [M] [X] ont fait assigner respectivement la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et la SARL ALLSUN devant le tribunal judiciaire de Saintes, afm d’obtenir notamment l’annulation du contrat liant M. [R] [H] avec la SARL ALLSUN et par conséquent l’annulation du contrat de fmancement souscrit auprès de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE.

Par jugement en date du 05 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Saintes s’est déclaré territorialement incompétent au profit du tribunal de proximité de Jonzac.

Par actes d’huissier signifié le 04 août 2020, la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a fait assigner M. [R] [H] devant le tribunal de proximité de Jonzac, afin d’obtenir sa condamnation en paiement des sommes dues au titre du prêt du 29 août 2018. Cette procédure a été enregistrée sous le numéro de RG 11 20-111.

Par acte d’huissier signifié le 19 août 2020, la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a fait assigner M. [R] [H] devant le tribunal de proximité de Jonzac, afin d’obtenir sa condamnation en paiement des sommes dues au titre du prêt du 11juillet 2018. Cette procédure a été enregistrée sous le numéro de RG 11 20-115.

Par acte d’huissier signifié le 25 mai 2021, la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a fait assigner en intervention forcée la SELARL EKIP, ès qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la SARL ALLSUN devant le tribunal de proximité de Jonzac. Cette procédure a été enregistrée sous le numéro de RG 11 21-82.

Par jugement en date du 08 septembre 2021, la jonction des quatre instances enregistrées sous les numéros de répertoire général 11-20-111, 11-20-115, 11-21-006 et 11-21-082 a été prononcée.

Par jugement en date du 09 février 2022, le tribunal de proximité de JONZAC a statué ainsi :

– Déclare recevable la demande de Madame [M] [X] ;

– Prononce l’annulation des contrats de vente conclus entre M. [R] [H] et la SARL ALLSUN en date des 11 juillet 2018 et 22 août 2018 ;

– Dit que M. [R] [H] devra laisser l’installation photovoltaque litigieuse à disposition de la SELARL EKIP ès qualité ;

– Constate en conséquence l’annulation des contrats de crédit affecté en date des 11 juillet 2018 et 29 août 2019 conclu entre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et M. [R] [H] ;

– Déboute la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande en restitution du capital emprunté à l’encontre de M. [R] [H] ;

– Rejette la demande d’indemnisation présentée par M. [R] [H] ;

– Fixe les créances de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL ALLS UN à la somme de 44.500 € concernant le contrat du 11 juillet 2018 et de 44.500 € concernant le contrat du 22 août 2018, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

– Condamne la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à M. [R] [H] et Madame [M] [X] la somme de 1.400 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Fixe la créance de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL ALLSUN à la somme de 1.400 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamne la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à hauteur de 50 % des dépens de l’instance ;

– Fixe 50 % des dépens de l’instance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL ALLSUN ;

– Constate que l’exécution provisoire est de droit.

Par déclaration en date du 30 mars 2022, la banque BNP PARIBAS a interjeté appel de cette décision en visant ses chefs expressément critiqués.

La banque BNP PARIBAS, par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 13 octobre 2022, sollicite de la cour de :

Vu les articles 367, 1137, 1182, 1231 et 1240 du Code civil,

Vu les articles L.640-1 et suivants du Code de commerce,

Vu les articles L.111-1, L.112-3, L.121-23, L.133-2, L.216-1, L.221-5, L.312-56 du Code de la consommation, dans leurs versions applicables,

Vu les articles 31, 331 et suivants, 700 et 750-1 du Code de procédure civile,

– Réformer le jugement du 09 février 2022 rendu par le tribunal de Proximité de Jonzac en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnisation de M. [R] [H],

Statuant à nouveau sur les chefs réformés :

A titre principal,

– Juger n’y avoir lieu à nullité du contrat principal conclu le 11 juillet 2018 entre la société ALLSUN et M. [R] [H],

– Juger n’y avoir lieu à nullité du contrat principal, conclu le 29 août 2018, entre la société ALLSUN et M. [R] [H],

– Juger n’y avoir lieu à nullité du contrat de crédit conclu le 11 juillet 2018 entre la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et M. [R] [H],

– Juger n’y avoir lieu à nullité ou inexistence du contrat de crédit conclu le 29 août 2018 entre la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et M. [R] [H],

– Débouter M. [R] [H] et Mme [M] [X] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

– Condamner M. [R] [H] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE les sommes suivantes, au titre des contrats de prêt du 11 juillet 2018 et du 29 août 2018 :

‘ 49.901,17 € avec intérêts au taux de 4,84% à compter du 23 juillet 2020 sur la somme de 44.343,44 €.

‘ 49.865,35 € avec intérêts au taux de 4,84% à compter du 23 juillet 2020 sur la somme de 44.343,44 €.

À titre subsidiaire, en cas de nullité des contrats,

– Juger qu’aucune faute n’a été commise par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE dans le déblocage des fonds,

– Juger que M. [R] [H] et Mme [M] [X] ne justifient d’aucun préjudice certain, direct et personnel qui résulterait directement d’une éventuelle faute de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,

– Condamner M. [R] [H] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE les sommes suivantes, au titre des contrats de prêt du 11 juillet 2018 et du 29 août 2018 :

‘ 49.901,17 € avec intérêts au taux de 4,84% à compter du 23 juillet 2020 sur la somme de 44.343,44 €.

‘ 49.865,35 € avec intérêts au taux de 4,84% à compter du 23 juillet 2020 sur la somme de 44.343,44 €.

En conséquence,

– Débouter M. [R] [H] et Mme [M] [X] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

A titre plus subsidiaire, en cas de faute du prêteur et de préjudice des emprunteurs,

– Condamner M. [R] [H] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE les sommes suivantes, au titre des contrats de prêt du 11 juillet 2018 et du 29 août 2018 :

‘ 49.901,17 € avec intérêts au taux de 4,84% à compter du 23 juillet 2020 sur la somme de 44.343,44 €.

‘ 49.865,35 € avec intérêts au taux de 4,84% à compter du 23 juillet 2020 sur la somme de 44.343,44 €.

– Juger que le préjudice subi par M. [R] [H] s’analyse comme une perte de chance de ne pas contracter, dont la probabilité est de l’ordre de 5%, soit la somme maximum de 2.225 € pour chacun des contrats,

– Ordonner la compensation entre les sommes mises à la charge de chacune des parties,

A titre encore plus subsidiaire, en cas de débouté du prêteur de son droit à restitution du capital,

– Fixer la créance de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE dans la procédure de liquidation judiciaire de la société ALLSUN à la somme de 44.500 € pour chacun des contrats de crédit annulés, soit la somme de 89.000 €, à titre de dommages intérêts,

En toutes hypothèses,

– Débouter M. [R] [H] et Mme [M] [X] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

– Juger que les éventuelles condamnations prononcées le seront en deniers et quittances,

A titre principal, Condamner in solidum M. [R] [H] et Mme [M] [X] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 2.200€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les procédures de première instance et d’appel et les entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Me Aurélie DEGLANE, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile,

A titre subsidiaire, Fixer la créance de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE dans la liquidation judiciaire de la société ALLSUN à la somme de 2.200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les procédures de première instance et d’appel et les entiers dépens de première instance et d’appel,

M. [H] et Mme [X], par dernières conclusions RPVA du 09 août 2022, demandent à la cour de :

Vu les dispositions du Code de la Consommation,

Vu les dispositions des articles L.111, L.121-23 et suivants du Code Civil,

Vu les dispositions de l’article L.133-2 du Code Civil,

Vu les dispositions de l’article 1116 du Code Civil,

Vu la jurisprudence de la Cour de Cassation,

– Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Proximité de Jonzac en date du 9 février 2022.

– Débouter la Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de toutes ses demandes, fins et conclusions.

– Condamner la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au paiement d’une somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par exploit en date du 11 mai 2022, la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a fait signifier à personne morale sa déclaration d’appel et ses conclusions à la SELARL EKIP, ès-qualités de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société ALLSUN.

Suivant acte en date du 16 août 2022, M. [H] et Mme [X] ont fait signifier à ce mandataire leurs conclusions et pièces.

la SELARL EKIP, ès-qualités de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société ALLSUN n’a pas constitué avocat de sorte que la présente décision sera réputée contradictoire.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

La clôture de l’instruction de l’affaire est intervenue suivant ordonnance datée 13 février 2023 pour être plaidée à l’audience du 13 mars 2023, date à compter de laquelle elle a été mise en délibéré à ce jour.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité des deux bons de commande des 11 juillet et 29 août 2018 pour violation des dispositions du code de la consommation

1. Aux termes des dispositions de l’article L. 221-9 du Code de la consommation dans sa rédaction en vigueur à la date des contrats, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L. 221-5.

Le contrat mentionne, le cas échéant, l’accord exprès du consommateur pour la fourniture d’un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l’expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l’exercice de son droit de rétractation.

Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.

2. L’article L. 242-1 du même code énonce que les dispositions de l’article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

3. Selon l’article L. 221-5 du Code de la consommation :

‘Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 221-25 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 221-28, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat. […]’.

4. Aux termes de l’article L. 221-18 du Code de la consommation :

‘Le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25.

Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour :

1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L. 221-4 ;

2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

Dans le cas d’une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d’une commande d’un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce.

Pour les contrats prévoyant la livraison régulière de biens pendant une période définie, le délai court à compter de la réception du premier bien’.

5. L’article R. 221-1 du même code dispose que le formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5 figure en annexe du code.

6. L’appelante fait valoir, au titre des formulaires de rétractation, que M. [H] a expressément signé et complété la mention aux termes de laquelle il ‘déclare avoir pris connaissance des conditions générales de vente et des dispositions de la loi n°2014-344 et du code de la consommation figurant au verso et notamment de la faculté de renonciation prévue à l’article L.221-18 du Code de la consommation lequel indiquait ‘je reconnais rester en possession d’un double du présent bon de commande doté d’un formulaire détachable de rétractation. (‘)’.

La BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE soutient en outre que l’absence de précision du délai de rétractation n’a pas vocation à engendrer la nullité du bon de commande mais la prorogation du délai, conformément aux dispositions de l’article L.221-20 du Code de la consommation, dans sa version applicable au cas d’espèce.

7. Les intimés objectent que les bons de commande ne correspondent pas aux exigences d’ordre public de protection des consommateurs dès lors qu’ils sont difficilement lisibles et compréhensibles, la taille et le caractère employé dans l’édition du texte n’étant pas suffisants pour pouvoir porter une compréhension normale, ne comporte pas au recto l’adresse précise à laquelle il doit être adressé, seule étant mentionnée une publicité concernant la société ALLSUN France, les contacts de la société et les adresses.

Selon eux, en outre, les formulaires ne peuvent être détachés sans détruire le bon de commande et, notamment, faire disparaître les signatures.

8. A titre liminaire, la cour rappelle qu’il est établi que l’absence d’utilisation de la faculté de rétractation ne fait pas obstacle à l’action tendant à l’annulation du contrat et que l’action en annulation d’un contrat n’est pas subordonnée à la démonstration d’un préjudice.

9. L’article 3 des conditions générales de vente, stipule :

‘dans le cas de l’usage du droit de rétractation, il suffit de compléter et de renvoyer le bordereau de rétractation présent ci-dessous. La décision de rétractation du présent contrat doit se faire au moyen d’une déclaration dénuée d’ambiguïté (lettre recommandée…). La décision de rétractation doit être communiquée avant l’expiration du délai de rétractation. En cas d’annulation hors délai, la société ALLSUN se réserve le droit de réclamer 30 % du montant de la commande.’

10. A la lecture de cette clause, la cour observe que les deux bons de commande ne sont pas conformes aux dispositions impératives du droit de la consommation et, notamment, à ses annexes prévues aux articles R. 221-1 et R. 221-3 relatives, respectivement, au modèle de formulaire de rétractation et aux informations concernant l’exercice du droit de rétractation dès lors que :

– en premier lieu, la formulation dont s’agit laisse à penser que le consommateur doit non seulement se rétracter par le biais du bordereau mais aussi au moyen d’une lettre recommandée dénuée d’ambiguïté alors que seul l’écrit comportant déclaration dénuée d’ambiguïté est requis par la loi, l’utilisation du formulaire n’étant pas obligatoire ;

– en second lieu, que cette formulation impose au consommateur un envoi par lettre recommandée avec demande d’avis de réception alors que la rétractation peut être réalisée par tous moyens, y compris par courrier électronique.

11. Par ailleurs, remarque la cour, les formulaires de rétractation ne comportent aucune indication relative au délai pour se rétracter.

12. La cour rappelle que si le premier alinéa de l’article L. 221-20 du Code de la consommation invoqué par l’appelante édicte une sanction spéciale de prolongation de 12 mois du délai de rétractation à compter de l’expiration du délai de rétractation initial, lorsque les informations relatives au droit de rétractation n’ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° de l’article L. 221-5, il n’en demeure pas moins que cet article n’exclut pas la sanction expressément prévue par l’article L. 242-1 du Code de la consommation, à savoir, la nullité du contrat en raison de l’absence ou de l’inexactitude (qui y équivaut) des mentions relatives aux conditions, au délai et aux modalités d’exercice de ce droit ainsi que du formulaire type de rétractation que le code de consommation décrit en ses annexes aux article R. 221-1, R. 221-3 et R. 224-5.

11. En outre, souligne la cour, l’amputation partielle du contrat, dont les conditions générales de vente fait partie, par l’usage du bordereau de rétractation est bien une cause de nullité de la convention, nonobstant son anéantissement, dès lors que la préservation du contrat dans son intégralité est nécessaire pour l’exercice même du droit de rétractation en démontrant la réalité de l’engagement initialement souscrit. La cour rappelle qu’en tout état de cause, la nullité est expressément encourue pour le défaut de respect des dispositions de l’article L. 242-1 du Code de la consommation.

13. Il résulte de ce qui précède que le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu que les contrats étaient atteints d’une cause de nullité tenant, d’une part, au défaut de conformité des bordereaux de rétractation et, d’autre part, aux mentions inexactes et incomplètes relatives aux conditions, délais et modalités d’exercice de cette faculté de rétractation, étant relevé, qu’il ne résulte d’aucun élément objectif du dossier que M. [H] aurait exécuté les contrats en connaissance des causes de nullité qui les affectaient, les bons de commande ne contenant pas les éléments nécessaires à leur validité en vertu des textes précités, ni qu’il ait manifesté de manière non équivoque son intention de renoncer à la nullité qui en découle, aux motifs qu’il aurait pris connaissance ‘des dispositions de la loi n°2014-344 et du code de la consommation figurant au verso et notamment de la faculté de renonciation prévue à l’article L. 221-18 du Code de la consommation’.

14. La nullité des bons de commande étant confirmée, la cour n’examinera pas les autres irrégularités formelles tenant au nom du fournisseur, aux caractéristiques des biens, les conditions d’exécution du contrat et le prix, comme les invoque l’appelante dans ses écritures ni, d’ailleurs, l’action en nullité pour dol.

Sur les conséquences

Sur la nullité corrélative des contrats de crédit affectés

15. Il résulte de l’article L. 312-55 du Code de la consommation que l’exécution du contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

16. En vertu de l’article 1229 du Code civil :

‘La résolution met fin au contrat.

La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice.

Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l’intégralité de ce qu’elles se sont procuré l’une à l’autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.’

En l’espèce, du fait de la résolution du contrat principal, la résolution du contrat de crédit est encourue et doit être prononcée par la cour.

17. Compte tenu de la résolution des deux contrats, il convient de remettre les parties dans la situation qui aurait été la leur si les contrats en cause n’étaient pas intervenus. Ainsi, l’emprunteur doit restitution du capital emprunté, sauf faute du prêteur.

Sur le droit à restitution du prêteur

Sur l’existence d’une faute

18. La BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE fait valoir qu’elle a versé les fonds sur production d’une demande de l’emprunteur lui demandant de procéder ainsi puisque M. [H] a indiqué pour les besoins des deux emprunts :

‘l’emprunteur/acheteur reconnaît en signant la présente attestation sans réserve’:

– Que la livraison du bien et/ou la fourniture de la prestation de service ci-dessus désignée a été pleinement effectuée conformément au contrat principal de vente préalablement conclu avec le Vendeur ou la Prestataire de service ;

– Que cette livraison de fourniture est intervenue le 27 juillet 2018′(le 05 octobre 2018 s’agissant du second des contrats).

Il reconnaît que conformément à l’article L. 312-48 du Code de la consommation ses obligations au titre du contrat de ‘crédit accessoires à une vente’ ci-dessus référencé prennent effet à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation de service. En conséquence, il demande au Prêteur, par la signature de la présente attestation et en sa qualité d’Emprunteur, de procéder à la mise à disposition des fonds au titre dudit contrat de crédit accessoire à une vente’.

19. L’appelante indique qu’ainsi, M. [H] a reconnu avoir été livré de la marchandise et a attesté de l’exécution des prestations, le tout sans réserve, et qu’en pareille hypothèse, la Cour de cassation juge que le prêteur ne commet pas de faute dans le déblocage des fonds, ce dernier n’ayant aucune obligation de contrôler la régularité des bons de commande utilisés par les entreprises dont il accepte de financer la clientèle. En outre, selon la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE l’acceptation sans réserve priverait l’emprunteur de se prévaloir à la suite d’un dysfonctionnement de l’installation qui n’aurait pas été porté à sa connaissance.

20. Les intimés ripostent en indiquant qu’il est évident que CETELEM a commis une double faute dans le cadre des financements et du déblocage des fonds au profit d’ALLSUN France puisqu’elle n’aurait jamais dû débloquer les fonds au profit du vendeur tant que l’installation n’était pas fonctionnelle en totalité. Or, indiquent-ils, depuis le début de l’installation, celle-ci n’a jamais fonctionné et au contraire, produit un certain nombre de désagréments.

21. Par ailleurs, s’agissant du deuxième contrat, pour le même montant, ils soutiennent qu’il n’aurait jamais été souscrit par M. [H], et serait donc totalement inexistant.

22. En outre, selon M. [H] et Mme [X] il y aurait faute dans l’octroi des deux prêts puisqu’il lui a été prêté une somme de 90.000 € alors même que ses revenus n’étaient que de 1.700 €. Les appelants précisent encore que Mme [X] n’a jamais autorisé la pose des panneaux sur le toit de sa propriété et elle n’a jamais signé la moindre commande.

23. A titre liminaire, la cour rappelle que la faute qui consisterait pour un prêteur à procéder à deux financements de même nature et de même montant, à hauteur de 90.000 €, sans analyser la situation financière et la capacité de remboursement à partir d’un salaire de 1700 € revient à se poser la question de la disproportion du crédit alloué aux capacités de l’emprunteur. Si ce moyen est soulevé dans les écritures des intimés sans être dénommé ainsi, il n’en demeure pas moins qu’aucune prétention n’est émise à ce titre dans le dispositif de leurs conclusions, qui seul saisit la cour. La cour n’est donc pas saisie de ce point et ne l’examinera pas.

24. La cour indique qu’il en est de même de l’argument tiré du financement d’un contrat non rentable dès lors que la banque indique, à bon droit, qu’il ne lui appartient pas de renseigner l’emprunteur sur la rentabilité de l’installation, sauf à s’immiscer dans les relations avec les vendeur, ni de contrôler la conformité de l’installation.

25. Le premier juge, dont les intimés demandent la confirmation du raisonnement, a motivé l’absence de restitution à la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sur une faute tirée du financement d’un contrat entaché d’une cause de nullité pour laquelle l’appelante ne conclut pas.

26. Il est constant qu’une banque commet une faute en s’abstenant de vérifier la régularité formelle du contrat principal avant de verser les fonds empruntés. Or, pour rappel, les exemplaires produit par le prêteur ne contiennent, en contradiction avec l’article L. 221-18 précité du code de la consommation, aucune mention sur le délai de rétractation ce qui constitue une cause de nullité du contrat.

27. Dans ces conditions, en finançant le contrat sans s’assurer de la présence de cette mention prévue à peine nullité, la banque a commis une faute dans le déblocage des fonds.

Sur le préjudice

28. En droit, il est constant que la privation de la banque de son droit à restitution est subordonnée à la démonstration de l’existence d’un préjudice.

29. Sur ce point, la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE rappelle que la Cour de cassation juge que les emprunteurs, qui bénéficient de travaux intégralement exécutés et d’une installation en parfait état de marche, comme c’est le cas en l’espèce, ne subissent aucun préjudice résultant de la faute du prêteur dans le déblocage des fonds et, en conséquence, ne peuvent être dispensés d’avoir à rembourser le capital prêté.

L’appelante souligne encore que l’installation est totalement finalisée et celle-ci est fonctionnelle, de telle sorte que les consorts [H]/[X] ne peuvent arguer d’un quelconque préjudice qui résulterait de la faute de la société BNP PARIBAS.

30. Les intimés objectent qu’ils justifient d’un préjudice dans la mesure où l’installation dysfonctionne et du fait qu’ils ont dû faire appel à deux reprises à la société ALLSUN pour les désordres peu de temps après l’installation.

Selon eux, le tribunal en première instance a constaté l’existence de nombreux dysfonctionnements, de malfaçons, et a relevé la responsabilité fautive de la banque dans le financement à hauteur de 89.000 €, entraînant un taux d’endettement particulièrement élevé pour un revenu extrêmement faible au vu des sommes empruntées.

31. La cour observe que Monsieur [R] [H] et Madame.[M] [X] justifient d’un préjudice actuel et certain dans la mesure où les intimés apportent la preuve d’une installation qui ne serait pas en état de marche faute pour la banque de démontrer que les nombreux dysfonctionnements et malfaçons graves (interconnections des terres pas respectées, un module cassé et pas branché sur la 3ème rangée, 1ère colonne côté ouest, côté ouest 8 vis spéciales, fixation des rails porteurs sont manquantes, ainsi que les chevrons d’ancrage avec un risque d’arrachement au vent) mis en évidence lors de l’intervention de la société Métal Energie le 08 juin 2019 aurait fait l’objet d’une réparation (pièce n°15).

32. La cour rappelle en outre que ces malfaçons et dysfonctionnements ont été constatés à la suite de plusieurs alertes de Monsieur [R] [H] et Madame.[M] [X] concernant des désordres survenus peu de temps après l’installation, lesquelles ont amené la société ALLSUN à intervenir à deux reprises, notamment pour enrayer des fuites, comme en témoignent les fiches d’intervention des 22 novembre et 31 décembre 2018 (pièces 13 et 14).

33. En considération des ces éléments, les emprunteurs justifient d’un préjudice égal au montant total des sommes empruntées, de sorte que le premier juge a à bon droit retenu la privation totale de la banque de son droit à restitution.

34. La décision sera confirmée de ce chef.

35. Consécutivement, la décision sera également confirmer en ce qui concerne la fixation au passif des deux créances dont s’agit.

Sur les autres demandes

36. Il apparaît équitable de condamner la société BNP PARIBAS à payer à Monsieur [R] [H] et Madame.[M] [X] une somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et de rejeter la prétention émise sur le même fondement par l’appelante.

37. La société BNP PARIBAS qui échoue en ses prétentions sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Jonzac en date du 09 février 2022,

Y ajoutant,

Condamne la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Monsieur [R] [H] et Madame.[M] [X] une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

Rejette les autres demandes,

Condamne la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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