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République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 29/06/2023
N° de MINUTE : 23/588
N° RG 21/05229 – N° Portalis DBVT-V-B7F-T4LD
Jugement (N° 20-003682) rendu le 06 Septembre 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Lille
APPELANTE
SA Cofidis agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié audit siège
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Xavier Helain, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉES
Madame [X] [D] épouse [M]
née le 07 Juin 1942 à [Localité 7] – de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Guy Foutry, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assisté de Me Samuel Habib, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
SELAFA MJA prise en la personne de Maître [L] [O] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Vivons Energy
[Adresse 2]
[Localité 6]
Défaillante à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 17 décembre 2021 à personne morale
DÉBATS à l’audience publique du 05 avril 2023 tenue par Catherine Menegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Yves Benhamou, président de chambre
Catherine Menegaire, conseiller
Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
ARRÊT RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 juin 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 23 mars 2023
EXPOSE DU LITIGE
Le 1er mars 2017, Mme [X] [D] épouse [M] a contracté auprès de la société Vivons Energy une prestation relative à l’installation d’un GSE Air’System et d’un chauffe-eau thermodynamique pour un montant TTC de 33’900 euros dans le cadre d’un démarchage à domicile, selon bon de commande numéro 6544.
Le 16 mars 2017, afin de financer cette installation, Mme [D] a accepté une offre préalable de crédit auprès de la société Cofidis exerçant sous l’enseigne ‘Projectio by Cofidis’, affecté à la réalisation de « panneaux solaires », d’un montant de 33’900 euros remboursables en 60 mensualités précédées d’un différé de paiement de 12 mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 2,45 % l’an.
Par jugement du 13 décembre 2017, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire de la société Vivons Energy et a désigné la SELAFA MJA en la personne de Me [L] [O] en qualité de liquidateur judiciaire.
Par actes d’huissier en date des 9 et 10 décembre 2021, Mme [D] a assigné la SELAFA MJA en qualité de liquidateur judiciaire de la société Vivons Energy et la société Cofidis en justice aux fins d’obtenir notamment la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement réputé contradictoire en date du 6 septembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille a :
– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 1er mars 2017 entre Mme [D] et la société Vivons Energy sous le bon de commande numéro 6544,
– constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société Cofidis et Mme [D] en date du ’13 mars 2017″,
– condamné la société Cofidis à payer à Mme [D] la totalité des sommes par elle versées à quelque titre que ce soit en exécution du contrat de crédit, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,
– dit qu’il appartient à la SELAFA MJA en a personne de Me [L] [O] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Vivons Energy de procéder à la dépose du matériel objet du bon de commande ‘n° 001912 du 7 janvier 2017″,
– dit qu’à compter de la clôture de la procédure collective de la société Vivons Energy, et si la SELAFA MJA prise en la personne de Me [L] [O] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Vivons Energy n’a pas procédé à la dépose du matériel objet du bon de commande n° 001912, Mme [D] pourra alors disposer de ce matériel,
– condamné la société Cofidis à payer à Mme [D] la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts,
– condamné la société Cofidis à payer à Mme [D] la somme de 850 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société Cofidis aux entiers dépens,
– rejeté le surplus des demandes,
– dit n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 11 octobre 2021, la société Cofidis a relevé appel de l’ensemble des chefs de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 16 mai 2022, la société Cofidis demande à la cour de :
– infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
– déclarer Mme [D] mal fondée en ses demandes,
– déclarer la société Cofidis recevable et bien fondée en ses demandes,
y faisant droit,
– condamner Mme [D] à reprendre l’exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d’amortissement,
à titre subsidiaires la cour venait à confirmer la nullité des conventions,
– infirmer le jugement sur les conséquences de la nullité des conventions,
statuant à nouveau,
– condamner Mme [D] à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté d’un montant de 33’900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,
– condamner Mme [D] à payer à la société Cofidis une indemnité d’un montant de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 27 février 2023, Mme [D] demande à la cour de :
– confirmer le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille du 6 septembre 2021 en ce qu’il a :
– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 1er mars 2017 entre Mme [D] et la société Vivons Energy sous le bon de commande numéro 6544,
– constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société Cofidis et Mme [D] en date du 13 mars 2017,
– condamné la société Cofidis à payer à Mme [D] la totalité des sommes par elle versées à quelque titre que ce soit en exécution du contrat de crédit, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,
– condamné la société Cofidis à payer à Mme [D] la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts,
– condamné la société Cofidis à payer à Mme [D] la somme de 850 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société Cofidis aux entiers dépens,
– infirmer le jugement susvisé pour le surplus et notamment en ce qu’il a débouté Mme [D] de ses demandes dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral,
statuant de nouveau,
– condamner la société Cofidis à verser à Mme [D] les sommes de :
– 3 000 euros au titre de son préjudice économique,
– 3 000 euros au titre du préjudice moral,
– condamner la société Cofidis à payer à Mme [D] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel,
à titre subsidiaire, si la cour ne faisait pas droit aux demandes de Mme [D] considérant que la banque n’a pas commis de faute,
– prononcer la déchéance du droit de la banque aux intérêts du crédit affecté,
– ordonner la poursuite du paiement par Mme [D] des échéances mensuelles du prêt, hors intérêts et assurances, selon un nouveau tableau d’amortissement communiqué par la société Cofidis,
à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour venait à débouter Mme [D] de l’intégralité de ses demandes, déclarer qu’elle devra reprendre le paiement mensuel des échéances du prêt.
Bien que régulièrement assignée par exploit d’huissier délivré le 31décembre 2021 à personne morale, la SELAFA MJA n’a pas constitué avocat.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l’exposé de leurs moyens.
La clôture de l’affaire a été rendue le 13 mars 2023, et l’affaire été fixée à l’audience des plaidoiries du 5 avril 2023.
MOTIFS
Sur la demande de résolution du contrat de vente
Mme [D] demande la résolution du contrat de vente pour non-respect de ses obligations contractuelles par la société venderesse au motif qu’elle n’a pas livré ni installé l’onduleur et le chauffe-eau thermodynamique, qu’elle n’a pas établi ‘l’attestation sur l’honneur’ et n’a pas réalisé le raccordement de l’installation au réseau électrique, de sorte qu’elle ne peut recevoir aucun revenu énergétique.
La banque soutient que Mme [D] ne rapporte pas la preuve des manquements de la société Vivons Energy et qu’il ne revêtent pas, en tout état de cause, un caractère de gravité suffisant pour entraîner la résolution du contrat de vente.
Suivant l’article 1224 du code civil dispose que ‘La résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire, soit en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.
En l’espèce, il ressort du bon de commande que la société Vivons Energy s’était engagée à livrer et installer un GSE Air’System comprenant 24 panneaux photovoltaïques pour la revente du surplus, et d’un chauffe-eau thermodynamique, ainsi qu’à faire raccorder à ses frais l’installation et à accomplir les démarches pour obtenir l’attestation de conformité photovoltaïque du Consuel, les démarches administratives et en Mairie jusqu’à l’obtention du contrat d’achat auprès d’ERDF.
Mme [D] ne produit aucun élément susceptible de prouver que l’onduleur et le chauffe-eau n’ont pas été livrés et installés, au contraire, elle a signé le 10 avril 2017 l’attestation de livraison par laquelle elle reconnaît que les marchandises ont été livrées et les travaux d’installation effectués, les différents courriers qu’elle a adressés à la société Vivons Energy ne comprenant aucune réclamation spécifique concernant le défaut de livraison de l’onduleur et du chauffe-eau.
En outre, l’attestation de conformité a été établie le 7 avril 2017 par le Consuel.
En revanche, il ressort d’un courrier de la société Enedis du 10 octobre 2017, que la demande de raccordement qui avait été présentée par la société Vivons Energy a été suivie d’une proposition de raccordement dont la durée de validité était de trois mois, que malgré un courrier de relance, la venderesse n’a pas donné de suite, de sorte que la société Enedis a mis fin au traitement de la demande, l’installation n’ayant donc pas été raccordée. La société Vivons Energy n’a pas respecté son obligation contractuelle à ce titre.
Toutefois, le contrat souscrit auprès de la société Vivons Energy ne peut être envisagé que globalement, s’agissant à la fois d’une commande de matériel et de son installation et que le prix modique du raccordement (soit environ 900 euros) par rapport à l’ensemble des biens livrées et des prestations effectivement réalisée ne justifie pas que l’ensemble du contrat soit résolu, alors au surplus que rien ne s’opposait à ce que Mme [D] entreprenne elle-même de simple démarches pour faire raccorder l’installation, et en réclame par la suite l’indemnisation auprès de la société Vivons Energy.
Dès lors, le manquement de la société Vivons Energy afférent au défaut de raccordement de l’installation n’est pas suffisamment grave pour que soit prononcée la résolution du contrat de vente, et cette demande sera rejetée.
Sur la demande de nullité du contrat de vente
En vertu de l’article L.221-9 du code de la consommation, les contrats hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat écrit daté dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat. Il comprend toutes les informations prévues par l’article L.221-5. Le contrat doit être accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L.221-5.
Selon l’article L.221-5 du code de la consommation ‘Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux articles L. 112-1 et L. 112-4 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;
3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L.221-25 ;
5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 221-28, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;
6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat. (…)’
Selon l’article L.111-1 du code de la consommation, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,
2° le prix du bien ou du service en application de l’article L.112-1 à L.112-4,
3° en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;
5° s’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique, et le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et autres conditions contractuelles ;
6° la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre 1er du livre VI. (…)’
En vertu de l’article L.242-1du code de la consommation, les dispositions de l’article L.221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
D’une part, le bon de commande prévoit un délai de livraison au 1er juin 2017, alors que l’article ‘Livraison’ des conditions générales de vente stipule que ‘la livraison et installation interviendra dans un délai de 200 jours maximum à compter de la date de signature du présent contrat et sous réserve et sous réserve d’obtention des autorisations administratives nécessaires et de l’acceptation du dossier en cas de souscription par le client d’un prêt auprès des partenaires financiers du prêteur’.
Ces mentions contradictoires ne permettent pas au consommateur d’être informé de façon certaine sur un délai ferme et définitif de livraison et d’installation. De plus, l’indication selon laquelle la livraison/installation des matériaux aurait lieu dans un délai maximum de 200 jours est insuffisante pour répondre aux exigences de l’article L. 111-1, 3, du code de la consommation, dès lors qu’il n’était pas distingué entre le délai de pose des modules et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et un tel délai global ne permet pas aux consommateurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations.
D’autre part, le bordereau de rétractation joint à l’offre, s’il est utilisé, ampute totalement l’identité et les coordonnées postales et téléphoniques de la société Vivons Energy, ce qui contrevient aux dispositions de l’article 111-1 4° du code de la consommation qui dispose que le bon de commande doit mentionner les informations relatives à l’identité du vendeur, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques.
Dès lors, le bon de commande litigieux contrevient manifestement aux dispositions du code de la consommation, ce qui entraîne sa nullité, sans que le consommateur ait à démontrer le caractère déterminant pour son consentement des informations manquantes, s’agissant d’une nullité d’ordre public, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs invoquées par Mme [D].
La société Cofidis fait valoir que Mme [D] a confirmé la nullité invoquée dans le mesure où elle a exécuté volontairement le contrat en acceptant la livraison des marchandises et le suivi des travaux, en réceptionnant sans réserve l’installation, en demandant le versement des fonds à la banque, en remboursant les échéances du crédit .
Il est rappelé que si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et qui a pour finalité la protection des intérêts de l’acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, il résulte des dispositions de l’article 1882 du code civil dans sa version applicable à la date de conclusion du contrat, que la confirmation tacite d’un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l’affectant et qu’il ait eu l’intention de le réparer.
La renonciation à se prévaloir de la nullité du contrat par son exécution doit, dès lors que la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, être caractérisée par sa connaissance préalable de la violation des dispositions destinées à le protéger.
En l’espèce, le rappel de certaines dispositions du code de la consommation ne saurait suffire à établir que l’acquéreur a agi en toute connaissance de cause et renoncé à invoquer les vices de forme du contrat de vente alors que, pour que la confirmation soit valable, il faut que son auteur ait pris conscience de la cause de nullité qui affecte l’acte et que la connaissance certaine de ce vice ne peut résulter, pour un consommateur profane, du seul rappel de ces dispositions. Au surplus, les conditions générales de vente ne mentionnent pas les dispositions de l’article L.111-1 du code de la consommation, ni celles de l’article de l’article L.242-1du code de la consommation, en sorte que le consommateur ne peut avoir eu connaissance du vice affectant le bon de commande à peine de nullité, ni l’intention de le réparer.
En conséquent, aucun de ses actes postérieurs à la signature du bon de commande ne saurait être considéré comme une confirmation tacite de la nullité par l’acheteur.
Confirmant le jugement entrepris, il y a lieu de prononcer la nullité du bon de commande en date du 1er mars 2017.
Sur l’annulation du crédit accessoire
En application du principe de l’interdépendance des contrats constatée par l’article L.312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Il y a lieu de confirmer le jugement et de constater la nullité de plein droit du contrat accessoire de crédit du 16 mars 2017 conclu entre Mme [D] et la société Cofidis, en application des dispositions susvisées.
Sur les conséquences de l’annulation du contrat accessoire de crédit
Les annulations prononcées entraînent en principe la remise des parties en l’état antérieur à la conclusion des contrats. Ainsi, l’annulation du contrat de prêt en conséquence de celle du contrat de vente qu’il finançait emporte, pour l’emprunteur, l’obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, peu important que ce capital ait été versé directement au vendeur par le prêteur, sauf si l’emprunteur établi l’existence d’une faute du prêteur et d’un préjudice consécutif à cette faute. Elle emporte également pour le prêteur l’obligation de restituer les sommes déjà versées par l’emprunteur.
Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution peut être privé de tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
En l’espèce, le bon de commande était manifestement affecté de vices de forme au regard des dispositions du code de la consommation, et la banque, professionnelle dispensatrice de crédits affectés, a commis une faute en ne vérifiant pas sa régularité avant le déblocage des fonds.
Par ailleurs, il ressort du bon de commande du 1er mars 2017 que la prestation complète de la société Vivons Energy comprenait non seulement l’installation des panneaux, mais également l’ensemble des démarches auprès de la Mairie et du Consuel, le raccordement de la centrale au réseau électrique, et l’obtention du contrat de rachat d’électricité auprès d’ERDF. Dès lors, l’obligation de vérifier la complète exécution du contrat pesant sur la banque impliquait de s’assurer aussi de la réalisation de ces prestations.
L’attestation de livraison/installation ne pouvait manifestement pas rendre compte de ce que les travaux commandés étaient terminés, et suffire à la société Cofidis de se convaincre de l’exécution complète des prestations dans la mesure où elle était datée du 10 avril 2017, soit un mois seulement après la signature du bon de commande, ce délai étant à l’évidence trop court pour assurer la finalisation de l’installation, ce que ne pouvait ignorer la banque dispensatrice de crédits affectés à la vente d’installations photovoltaïques.
En s’abstenant de s’assurer que le contrat était entièrement exécuté, le prêteur a également commis une faute dans le déblocage des fonds.
La société Cofidis soutient que Mme [D] ne subirait pas de préjudice car elle ne démontre pas que l’installation n’a pas été raccordée postérieurement au courrier de la société Enedis et ne fonctionne pas et que l’installation dont l’objet était l’autoconsommation et la revente du surplus d’énergie ne nécessitait pas de raccordement au réseau, mais la simple pose d’un compteur Linky.
Toutefois, il ressort du bon de commande que le raccordement de l’installation au réseau ERDF était contractuellement prévue, et non la pose d’un compteur Linky .
L’installation n’a jamais été raccordée au réseau, ainsi que cela résulte non seulement du courrier d’Enedis du 10 octobre 2017, mais également de l’acte notarié de vente de l’immeuble en date 21 décembre 2018, qui précise que l’immeuble est équipé d’une installation composée de 24 panneaux solaires photovoltaïques et d’un chauffe-eau thermodynamique non branchés, l’installation des équipements étant inachevée, et prévoit ‘qu’il est expressément convenu que le vendeur devra procéder à l’enlèvement de toute installation liée à ces panneaux au plus tard le 31 décembre 2019, à ses frais, le tout sous réserve d’un meilleur accord entre les parties’.
De plus, les fautes commises par la banque dans le déblocage des fonds entraînent manifestement un préjudice pour l’emprunteur en l’espèce dans la mesure où il ne sera pas en mesure d’obtenir la restitution du prix, ni la désinstallation de l’équipement et la remise en état de son habitation du fait de la déconfiture de la société Vivons Energy placée en liquidation judiciaire, alors que la restitution du prix et la remise en état par la société installatrice aurait dû être la conséquence normale de l’annulation du contrat principal.
Au regard de ces éléments, compte tenu de préjudice subi par Mme [D], il convient de confirmer le jugement, de priver la société Cofidis de son droit à restitution de l’intégralité du capital et de la condamner à restituer à Mme [D] la totalité des sommes versées par elle à quelque titre que ce soit en exécution du contrat de crédit, .
Sur le devoir de mise en garde
La société Cofidis fait grief au premier juge de l’avoir condamné à payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son devoir de mise en garde au motif erroné que le prêt souscrit a causé à l’emprunteur un endettement excessif, soit un taux d’endettement de 37 %.
Il est rappelé que l’établissement de crédit est tenu à un devoir de mise en garde à l’égard de l’emprunteur non averti lors de la conclusion du contrat de prêt ; ce devoir consiste à consentir un prêt adapté aux capacités financières de l’emprunteur et, le cas échéant, à l’alerter sur les risques de l’endettement né de l’octroi du prêt ; il implique l’obligation pour la banque de se renseigner sur les capacités financières de l’emprunteur pour l’alerter, si nécessaire, sur un risque d’endettement. Il incombe à l’emprunteur qui invoque un devoir de mise en garde de la banque à son égard de démontrer que les prêts n’étaient pas adaptés à sa situation financière et créaient un risque d’endettement contre lequel il devait être mis en garde.
En l’espèce, il n’est pas discuté que Mme [D] n’était pas un emprunteur averti.
Il ressort de la fiche de dialogue complétée par elle lors de la souscription du crédit que Mme [D], veuve et n’ayant plus d’enfant à charge, percevait une pension de retraite de 2 912 euros par mois, était propriétaire de son logement sans crédit immobilier en cours et avait un crédit pour l’acquisition d’un véhicule de 256 euros par mois.
Mme [D] devait donc faire face à des remboursement mensuels de 1 084,68 euros, comprenant les échéance du crédit affecté litigieux d’un montant de 828,68 euros, soit un taux d’endettement certes de 37 %, mais laissant un reste à vivre de 1 827,32 euros par mois pour une personne seule.
Il résulte de ces éléments que Mme [D] ne démontre pas que le crédit affecté litigieux était inadapté à sa situation et créait un risque d’endettement excessif sur lequel la banque aurait dû la mettre en garde, étant observé qu’elle ne justifie pas de la procédure de surendettement alléguée.
Dès lors, la banque n’était pas tenue à un devoir spécifique de mise en garde à son égard et il convient en conséquence de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la banque à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du devoir de mise en garde.
Sur les demandes de dommages et intérêts au titre du préjudice financier, de jouissance et moral
Selon l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a estimé que le préjudice économique invoqué est d’ors et déjà réparé par la privation de la banque du capital prêté, et que Mme [D] ne justifiait pas d’un préjudice moral, et l’a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts de ces chefs. Le jugement sera en conséquence confirmé sur ce point.
Sur les demandes accessoires
Les motifs du premier juge méritant d’être adoptés, le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
La société Cofidis succombant en son appel, sera condamnée aux dépens d’appel en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer à Mme [D] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt réputé contradictoire, dans les limites de
l’appel ;
Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a condamné la société Cofidis à payer à Mme [D] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du devoir de mise en garde ;
Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant ;
Rejette la demande de dommages et intérêts pour manquement par la société Cofidis à son devoir de mise de garde ;
Condamne la société Cofidis à payer à Mme [D] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Cofidis aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Le greffier
Gaëlle Przedlacki
Le président
Y. Benhamou