Droit de rétractation : 29 juin 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01330

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Droit de rétractation : 29 juin 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01330
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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 29/06/2023

N° de MINUTE : 23/594

N° RG 21/01330 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TPTP

Jugement rendu le 14 Janvier 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Cambrai

APPELANTS

Monsieur [V] [S]

né le [Date naissance 3] 1989 à [Localité 8] – de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 5]

Madame [G] [O]

née le [Date naissance 1] 1988 à [Localité 8] – de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué assisté de Me Samuel Habib, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant

INTIMÉES

SELARL [W] [H] prise en la personne de Maître [U] [H], domicilié en cette qualité audit siège ès qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la SARL Force Energie

[Adresse 2]

[Localité 7]

Défaillante, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 6 mai 2021 à personne morale

SELARL [W]-[H] prise en la personne de Maître [U] [H] ès qualité de mandataire ad’hoc de la Sarl Force Energie

[Adresse 2]

[Localité 7]

Défaillante assignée en reprise d’instance par acte délivré le 26 juillet 2022 à personne morale

SA Cofidis

[Adresse 9]

[Localité 4]

Représentée par Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DÉBATS à l’audience publique du 05 avril 2023 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 juin 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 23 mars 2023

EXPOSE DU LITIGE

Le 15 mars 2017, dans le cadre d’un démarchage à domicile, M. [V] [S] a contracté avec la société Force Energie un contrat portant sur l’achat et l’installation de 12 panneaux photovoltaïques ainsi que des travaux d’isolation en toiture, pour le prix de 24’500 euros TTC, suivant bon de commande numéro 0004.

Le 23 mars 2017, M. [S] a souscrit une offre préalable de crédit affecté auprès de la société Cofidis, exerçant sous l’enseigne ‘Projectio by Cofidis’, d’un montant de 24’500 euros, remboursable en 120 échéances, avec un différé de remboursement de 12 mois, au taux débiteur fixe de 2,68 %.

Par actes d’huissier en date des 21 et 23 avril 2020, M. [S] et Mme [O] ont assigné la société Force Energie, prise en la personne de son liquidateur Me [U] [H] et la société Cofidis aux fins d’obtenir la résolution, subsidiairement l’annulation des contrats de vente et de crédit.

Par jugement réputé contradictoire du 14 janvier 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Cambrai a :

– dit irrecevables Mme [O] en ses demandes,

– débouté M. [S] de l’intégralité de ses demandes, dirigées tant à l’égard de la société Force Energie que de la société Cofidis, à l’exception de celle relative à la suspension de l’exécution du contrat de prêt du 24 mars 2017,

– dit que l’exécution du contrat de prêt du 24 mars 2017 a été suspendue entre le 21 avril 2020 et la date du présent jugement, sans application d’un intérêt contractuel et légal, et que le paiement des échéances contractuelles reprendra le mois qui suivra la signification de la présente décision,

– dit que la société Cofidis devra remettre à M. [S] un nouveau tableau d’amortissement tenant compte de ce qui précède,

– débouté la société Cofidis de sa demande d’indemnité procédurale,

– condamné M. [S] et Mme [O] aux dépens de l’instance.

Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 2 mars 2021, M. [S] et Mme [O] ont relevé appel de ce jugement en ce qu’il a dit Mme [O] irrecevable en ses demandes, a débouté M. [S] de l’intégralité ses demandes tant à l’égard de la société Force Energie que la société Cofidis, et a condamné M. [S] et Mme [O] aux dépens de l’instance.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 mars 2023, M. [S] et Mme [O] demandent à la cour de :

– infirmer le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Cambrai en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la société Cofidis de ses demandes indemnitaires procédurales,

statuant à nouveau :

– constater le désistement d’instance et d’action, ainsi que le désistement d’appel de Mme [O] dans le cadre de la présente procédure,

– dire les demandes de M. [S] recevables et les déclarer bien fondées,

– débouter la société Cofidis de l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions,

à titre principal,

– prononcer la résolution du contrat de vente liant M. [S] et la société Force Energie prise en la personne de son mandataire ad hoc, Me [U] [H],

à titre subsidiaire,

– prononcer l’annulation du contrat de vente liant M. [S] et la société Force Energie prise en la personne de son mandataire ad hoc Me [U] [H],

en tout état de cause,

– prononcer la résolution ou l’annulation du contrat de crédit affecté liant M. [S] à la société Cofidis,

– dire et juger que la société Cofidis a commis des fautes personnelles engageant sa responsabilité à l’égard de M. [S],

– dire et juger que la société Cofidis ne pourra se prévaloir des effets de l’annulation à l’égard des emprunteurs,

en conséquence,

– ordonner le remboursement par la société Cofidis des sommes qui lui ont été versées par M. [S], à savoir la somme de 8 738,64 euros arrêtés au mois de mai 2021, et ce jusqu’au jour de l’arrêt à intervenir, outre les mensualités postérieures acquittées, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

à titre subsidiaire,

– condamner la société Cofidis à verser à M. [S] la somme de 8 700 euros sauf à parfaire à titre de dommages-intérêts du fait de la négligence fautive de la banque,

à titre infiniment subsidiaire, si la cour ne faisait pas droit demande de M. [S], considérant que la banque n’a pas commis de faute,

– prononcer la déchéance du droit aux intérêts du crédit affecté,

en tout état de cause,

– condamner la société Cofidis à verser à M. [S] les sommes de :

– 4 538,07 euros au titre du préjudice financier,

– 4 000 euros au titre du préjudice économique et du trouble de jouissance,

– 5 000 euros au titre du préjudice moral,

– condamner la société Cofidis à payer à M. [S] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Force Energie prise en la personne de son mandataire ad hoc Me [U] [H] et la société Cofidis au paiement des entiers dépens,

– prononcer l’exécution provisoire de la décision à intervenir,

– à titre subsidiaire, ordonner l’exécution provisoire sur l’arrêt des prélèvements bancaires à venir,

à titre infiniment subsidiaire,

– si par extraordinaire la cour venait à débouter M. [S] de l’intégralité de ses demandes, dire et juger qu’il reprendra le paiement mensuel des échéances du prêt.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 février 2022, la société Cofidis demande à la cour de :

– déclarer M. [S] et Mme [O] mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,

– déclarer la société Cofidis recevable et bien fondée en ses demandes,

y faisant droit,

– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

à titre subsidiaire, si la cour venait à prononcer la nullité ou la résolution des conventions,

– condamner solidairement M. [S] et Mme [O] à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté d’un montant de 24’500 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées,

en tout état de cause,

– condamner solidairement M. [S] et Mme [O] à payer à la société Cofidis une indemnité d’un montant de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Régulièrement assignée par acte d’huissier délivré le 6 mai 2021, la Selarl [W] [H] es qualité de liquidateur de la société Force Energie n’a pas constitué avocat.

Par jugement du 3 mars 2022, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la clôture pour insuffisance d’actifs de la liquidation de la société Force Energie.

Par ordonnance du 24 mai 2022, la Selarl [W] [H] représentée par Me [U] [H] a été désigné mandataire ad hoc de la société, lequel a été régulièrement assigné par exploit d’huissier délivré le 26 juillet 2022 à personne morale.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l’exposé de leurs moyens.

La clôture de l’affaire a été rendue le 13 mars 2023, et l’affaire été fixée à l’audience des plaidoiries du 5 avril 2023.

MOTIFS

Sur le désistement de Mme [O]

Il convient de constater le désistement de Mme [O] en application des article 400 et suivants du code de procédure civile.

Sur la demande de résolution du contrat de vente

M. [S] demande la résolution du contrat de vente au motif que la société Force Energie n’a pas rempli l’ensemble de ses obligations contractuelles, cette dernière n’ayant pas procédé au raccordement de l’installation au réseau électrique et n’ayant pas établi ‘l’attestation sur l’honneur’, en sorte qu’il s’est trouvé dans l’impossibilité de percevoir des revenus énergétiques.

La banque soutient que M. [S] ne rapporte pas la preuve des manquements de la société Force Energie et qu’ils ne revêtent pas, en tout état de cause, un caractère de gravité suffisant pour entraîner la résolution du contrat de vente.

Suivant l’article 1224 du code civil dispose que ‘La résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire, soit en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.’

En l’espèce, il ressort du bon de commande que la société Force Energie s’était engagée à livrer et installer 12 panneaux photovoltaïques pour la revente d’énergie à EDF, ainsi qu’à faire raccorder à ses frais l’installation et à accomplir les démarches pour obtenir l’attestation de conformité photovoltaïque du Consuel, les démarches administratives et en Mairie jusqu’à l’obtention du contrat d’achat auprès d’ERDF .

Il ressort des éléments du dossier que la société Force Energie a livré et installé les panneaux au domicile de M. [S] le 12 avril 2017, que les démarches en Mairie ont été effectuées le 22 avril 2017, l’arrêté de non-opposition ayant été rendu le 16 mai 2017 et que l’attestation de conformité a été établie le 3 mai 2017 par le Consuel.

En revanche, il ressort d’un mail de la société Enedis du 7 mai 2021qu’aucune demande de raccordement concernant le projet photovoltaïque n’a été formée au [Adresse 6] à [Localité 5], ce qui est confirmé par un procès-verbal de constat en date du 2 mars 2021 dressé par Me [M], Huissier de justice, qui constate ‘l’absence de compteur électrique et de branchement ou autre équipement relatif à des panneaux photovoltaïques’.

Toutefois, le contrat souscrit auprès de la société Force Energie ne peut être envisagé que globalement, s’agissant à la fois d’une commande de matériel et de son installation et que le prix modique du raccordement (soit environ 900 euros) par rapport à l’ensemble des biens livrées et des prestations effectivement réalisée ne justifie pas que l’ensemble du contrat soit résolu, alors au surplus que rien ne s’opposait à ce que M. [S] entreprenne lui-même de simples démarches pour faire raccorder l’installation, et en réclame par la suite l’indemnisation auprès de la société Force Energie.

Dès lors, le manquement de la société Force Energie afférent au défaut de raccordement de l’installation n’est pas suffisamment grave pour que soit prononcée la résolution du contrat de vente, et cette demande sera rejetée.

Sur la nullité du contrat de vente

En vertu de l’article L.221-9 du code de la consommation, les contrats hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat écrit daté dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat. Il comprend toutes les informations prévues par l’article L.221-5. Le contrat doit être accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L.221-5.

Selon l’article L.221-5 du code de la consommation ‘Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 221-25 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 221-28, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat. (…)’

Selon l’article L.111-1 du code de la consommation, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,

2° le prix du bien ou du service en application de l’article L.112-1 à L.112-4,

3° en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;

5° s’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique, et le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et autres conditions contractuelles ;

6° la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre 1er du livre VI. (…)’

En vertu de l’article L.242-1du code de la consommation, les dispositions de l’article L.221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

D’une part, le bon de commande ne comporte pas l’ensemble des caractéristiques essentielles des biens offerts et prestations offerts à la vente. La marque dont la fonction est de garantir l’origine d’un produit commercialisé, est une caractéristique essentielle pour le consommateur démarché qui doit pouvoir ainsi identifier le fabriquant garant de la qualité, de la pérennité et de la sécurité de ses produits, et doit aussi pouvoir procéder utilement à des comparaisons de prix dans le délai de rétractation qui lui est ouvert par la loi. Or, si le bon de commande indique que les panneaux sont de marque ‘Synexium’, il résulte des pièces produites aux débats par M. [S] qu’il ne s’agit pas d’une marque de panneaux photovoltaïques mais d’un distributeur et installateur de panneaux. La marque des panneaux n’est donc pas précisée. Par ailleurs, s’agissant des travaux d’isolation en toiture et murs extérieurs, le contrat ne précise pas le type de matériaux utilisé et la surface à isoler, et s’agissant des travaux de renforcement de la charpente, il ne précise pas davantage le type de matériaux (ardoise/tuile) et la surface à renforcer, le consommateur n’ayant pas reçu d’informations suffisantes sur les caractéristiques essentielles desdites prestations.

D’autre part, alors que des prestations différentes ont été commandées, le prix des travaux d’isolation et de renforcement de la charpente n’est pas indiqué, en sorte que le consommateur se trouve dans l’impossibilité de distinguer le prix de l’installation photovoltaïque de celui des travaux d’isolation et de renforcement de la charpente.

Par ailleurs, le bon de commande produit par le consommateur ne prévoit aucun délai de livraison alors que les prestations ne pouvaient être exécutées immédiatement, ni d’ailleurs aucune précision sur les modalités d’exécution des prestations alors que le contrat conclu implique des opérations à la fois matérielles de livraison et d’installation du matériel commandé, mais également des démarches administratives et de raccordement.

Dès lors, le bon de commande litigieux contrevient manifestement aux dispositions du code de la consommation, ce qui entraîne sa nullité, sans que le consommateur ait à démontrer le caractère déterminant pour son consentement des informations manquantes, s’agissant d’une nullité d’ordre public.

La société Cofidis fait valoir que M. [S] a confirmé la nullité invoquée dans le mesure où il a exécuté volontairement le contrat en acceptant la livraison des marchandises et le suivi des travaux, en réceptionnant sans réserve l’installation, en demandant le versement des fonds à la banque, en remboursant les échéances du crédit et qu’il a signé sous la mention suivant laquelle ils reconnait ‘être d’accord avec les conditions générales de vente et (reconnait) avoir pris connaissance des articles L.121-21-5 du code de la consommation’.

Il est rappelé que si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et qui a pour finalité la protection des intérêts de l’acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, il résulte des dispositions de l’article 1882 du code civil dans sa version applicable à la date de conclusion du contrat, que la confirmation tacite d’un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l’affectant et qu’il ait eu l’intention de le réparer.

La renonciation à se prévaloir de la nullité du contrat par son exécution doit, dès lors que la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, être caractérisée par sa connaissance préalable de la violation des dispositions destinées à le protéger.

En l’espèce, le rappel de certaines dispositions du code de la consommation, au demeurant dans leur rédaction et numérotation antérieure à l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, ne saurait suffire à établir que l’acquéreur a agi en toute connaissance de cause et renoncé à invoquer les vices de forme du contrat de vente alors que, pour que la confirmation soit valable, il faut que son auteur ait pris conscience de la cause de nullité qui affecte l’acte et que la connaissance certaine de ce vice ne peut résulter, pour un consommateur profane, du seul rappel de ces dispositions. Au surplus, les conditions générales de vente ne mentionnent pas les dispositions de l’article L.111-1 du code de la consommation, ni celles de l’article de l’article L.242-1du code de la consommation, en sorte que le consommateur ne peut avoir eu connaissance du vice affectant le bon de commande à peine de nullité, ni l’intention de le réparer.

En conséquent, aucun de ses actes postérieurs à la signature du bon de commande ne saurait être considéré comme une confirmation tacite de la nullité par l’acheteur.

Réformant le jugement entrepris, il y a lieu de prononcer la nullité du bon de commande en date du 15 mars 2017.

Sur l’annulation du crédit accessoire

En application du principe de l’interdépendance des contrats constatée par l’article L.312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il y a lieu de confirmer le jugement et de constater la nullité de plein droit du contrat accessoire de crédit du 23 mars 2017 conclu entre M. [S] et la société Cofidis, en application des dispositions susvisées.

Sur les conséquences de l’annulation du contrat accessoire de crédit

Les annulations prononcées entraînent en principe la remise des parties en l’état antérieur à la conclusion des contrats. Ainsi, l’annulation du contrat de prêt en conséquence de celle du contrat de vente qu’il finançait emporte, pour l’emprunteur, l’obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, peu important que ce capital ait été versé directement au vendeur par le prêteur, sauf si l’emprunteur établi l’existence d’une faute du prêteur et d’un préjudice consécutif à cette faute. Elle emporte également pour le prêteur l’obligation de restituer les sommes déjà versées par l’emprunteur.

Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution peut être privé de tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

En l’espèce, le bon de commande était manifestement affecté de vices de forme au regard des dispositions du code de la consommation, et la banque, professionnelle dispensatrice de crédits affectés, a commis une faute en ne vérifiant pas sa régularité avant le déblocage des fonds.

Par ailleurs, il ressort du bon de commande du 15 mars 2017 que la prestation complète de la société Force Energie comprenait non seulement l’installation des panneaux, mais également l’ensemble des démarches auprès de la Mairie et du Consuel, le raccordement de la centrale au réseau électrique, et l’élaboration de la demande du contrat de rachat d’électricité auprès d’ERDF. Dès lors, l’obligation de vérifier la complète exécution du contrat pesant sur la banque impliquait de s’assurer aussi de la réalisation de ces prestations.

Or, l’attestation de livraison et d’exécution de la prestation en date du 12 avril 2017 ne permettait pas à la banque de se convaincre de l’exécution complète des prestations, alors que le consommateur avait confirmé ‘avoir obtenu et accepté sans réserve la livraison des marchandises, constaté expressément que tous les travaux et prestations qui devaient être effectués à ce titre ont été pleinement réalisés et que les démarches de raccordement au réseau ont bien été engagées (…)’, ce qui supposait nécessairement que les démarches de raccordement n’avaient pas encore été réalisées.

Cette attestation ne pouvait manifestement pas rendre compte de ce que les travaux commandés étaient terminés, dans la mesure où elle était datée du 12 avril 2017, soit un mois seulement après la signature du bon de commande, ce délai étant à l’évidence trop court pour assurer la finalisation de l’installation, ce que ne pouvait ignorer la banque dispensatrice de crédits affectés à la vente d’installations photovoltaïques. Il résulte d’ailleurs des documents produits aux débats que l’attestation du Consuel a été établie le 3 mai 2017, la déclaration préalable à la réalisation des travaux déposée en Mairie le 22 avril 2017, soit postérieurement à l’attestation de livraison autorisant le déblocage des fonds, et que le raccordement n’a jamais été réalisée par la société venderesse.

En s’abstenant de s’assurer que le contrat était entièrement exécuté, le prêteur a également commis une faute dans le déblocage des fonds.

Les fautes commises par la banque dans le déblocage des fonds entraînent manifestement un préjudice pour l’emprunteur en l’espèce dans la mesure où il ne sera pas en mesure d’obtenir la restitution du prix, ni la désinstallation de l’équipement et la remise en état de son habitation du fait de la déconfiture de la société Force Energie placée en liquidation judiciaire, clôturée pour insuffisance d’actifs, alors que la restitution du prix et la remise en état par la société installatrice aurait dû être la conséquence normale de l’annulation du contrat principal.

De plus, contrairement aux allégations de la société Cofidis, il est démontré par le courriel de la société Enedis du 7 mai 2021 produit par M. [S] que l’installation n’a jamais été raccordé par la société Force Energie au réseau d’électricité, en sorte qu’elle ne fonctionne pas et ne produit pas d’énergie.

Au regard de ces éléments, compte tenu de préjudice manifeste subi par M. [S], il convient d’infirmer le jugement, de priver la société Cofidis de son droit à restitution de l’intégralité du capital, et de la condamner à restituer à M. [S] la totalité des sommes versées par lui à quelque titre que ce soit en exécution du contrat de crédit, .

La banque sera donc condamnée à payer à M. [S] la somme de 8 738,64 euros arrêtées au mois de mai 2021, non contestée, ainsi que toutes les sommes versées en exécution du contrat de crédit postérieurement à l’échéance de mai 2021.

Sur les demandes de dommages et intérêts au titre du préjudice financier, de jouissance et moral

Selon l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

M. [S] ne rapporte pas la preuve de ce que son niveau de vie a été réduit, ni que l’installation photovoltaïque présenterait un caractère inesthétique et occasionnerait des désordres, ni encore de ce qu’il subirait un préjudice moral. Il sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts de ces chefs.

Sur les demandes accessoires

Le jugement sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens, mais confirmé en ce qu’il a débouté la société Cofidis de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Succombant, la société Cofidis sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer à M. [S] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt réputé contradictoire, dans les limites de l’appel,

Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a débouté M. [S] de sa demande de résolution du contrat de vente et a débouté la société Cofidis de sa demande d’indemnité procédurale ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

Constate le désistement de Mme [O] ;

Prononce la nullité du contrat de vente conclu le 15 mars 2017 entre M. [S] et la société Force Energie sous le bon de commande n° 0004 ;

Constate la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté conclu entre la société Cofidis et M. [S] en date du 23 mars 2017 ;

Déboute la société Cofidis de sa demande de restitution du capital prêté au titre du contrat de crédit affecté ;

Condamne la société Cofidis à restituer à M. [S] la somme de 8 738,64 euros arrêtées au mois de mai 2021 ainsi que l’ensemble des sommes versées en exécution du contrat de crédit postérieurement à l’échéance de mai 2021 ;

Déboute M. [S] de ses demandes de dommages et intérêts

complémentaires ;

Condamne la société Cofidis à payer à M. [S] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Cofidis aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Le greffier

Gaëlle PRZEDLACKI

Le président

Yves BENHAMOU

 


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