Droit de rétractation : 10 juillet 2023 Cour d’appel d’Orléans RG n° 20/01735

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Droit de rétractation : 10 juillet 2023 Cour d’appel d’Orléans RG n° 20/01735
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COUR D’APPEL D’ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 10/07/2023

la SELARL AVOCAT LOIRE CONSEIL

la SELARL CASADEI-JUNG

la SELARL DEREC

ARRÊT du : 10 JUILLET 2023

N° : – N° RG : 20/01735 – N° Portalis DBVN-V-B7E-GGML

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d’ORLEANS en date du 13 Mai 2020

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265253694560960

Monsieur [Z] [S]

né le 19 Février 1988 à [Localité 16]

[Adresse 6]

[Localité 9]

représenté par Me Eric GRASSIN de la SELARL AVOCAT LOIRE CONSEIL, avocat au barreau d’ORLEANS

Madame [K] [V] épouse [S]

née le 19 Février 1987 à [Localité 11]

[Adresse 6]

[Localité 9]

représentée par Me Eric GRASSIN de la SELARL AVOCAT LOIRE CONSEIL, avocat au barreau d’ORLEANS

D’UNE PART

INTIMÉES : – Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265252064653858

Madame [U] [X]

née le 18 Mars 1958 à [Localité 14] (28) ([Localité 14])

[Adresse 3]

[Localité 7]

représentée par Me Jean Marc RADISSON de la SELARL CASADEI-JUNG, avocat au barreau d’ORLEANS substitué par Me POTIER

– Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265255000510178

E.U.R.L. PASCAL COLLINOT, exerçant sous l’enseigne « CENTURY [Adresse 4] », immatriculée au RCS d’Orléans sous le numéro 432 075 463, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 5]

[Localité 7]

représentée par Me Pierre François DEREC de la SELARL DEREC, avocat au barreau d’ORLEANS substitué par Me BARATA

D’AUTRE PART

DÉCLARATION D’APPEL en date du : 11 Septembre 2020.

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 20 mai 2023

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats :

En l’absence d’opposition des parties ou de leurs représentants :

Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,

Après délibéré au cours duquel Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre et Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de:

Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,

Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT :

L’arrêt devait initialement être prononcé le 03 juillet 2023, à cette date le délibéré a été prorogé au 10 juillet 2023,

Greffier :

Madame Fatima, Greffier lors des débats et du prononcé.

DÉBATS :

A l’audience publique du 16 Mai 2023 , à laquelle ont été entendus Madame Anne-Lise COLLOMP, Président, en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries.

Prononcé le 10 JUILLET 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

FAITS ET PROCEDURE

Par acte authentique en date du 7 mars 2014, Mme [U] [X] a acquis, par l’intermédiaire de l’EURL PASCAL COLLINOT exerçant sous l’enseigne CENTURY 21, une maison d’habitation appartenant à Monsieur [Z] [S] et Madame [K] [V], son épouse (ci-après M. et Mme [S]), située [Adresse 3] à [Localité 7] et à [Adresse 13], moyennant le prix de 87.000 €.

A l’occasion d’intempéries survenues au mois de juin 2014, la maison a subi un sinistre et Mme [X] s’est plaint de malfaçons affectant la maison.

Par acte d’huissier du 12 février 2015, Mme [X] a fait assigner en référé M. et Mme [S] aux fins de nomination d’un expert judiciaire.

Par une ordonannce en date du 6 juillet 2016, Monsieur [T] a été désigné expert pour procéder aux opérations d’expertise sur le bien en cause.

L’expert a déposé son rapport le 31 janvier 2017.

Par acte d’huissier de justice du 21 janvier 2017, Mme [X] a fait assigner M. et Mme [S] et l’EURL PASCAL COLLINOT exerçant sous l’enseigne ‘CENTURY [Adresse 4]’ en nullité de la vente vente et en responsabilité contre l’agence immobilière.

Par jugement en date du 13 mai 2020, le tribunal judiciaire d’Orléans a :

– prononcé la nullité de la vente reçue le 7 mars 2014 par Maître [L] [F], Notaire Associé de la SCP [L] [F] et Carole PROSPER, Notaires Associés, titulaire d’un office notarial à [Localité 7] (Loiret) aux termes de laquelle Monsieur [Z] [S] et Madame [K] [V] épouse [S] ont vendu à Madame [U] [X] une maison d’habitation sise à [Adresse 15] et à [Adresse 13], sans numéro, cadastrée sur la commune de [Localité 7] section AL n° [Cadastre 10], lieu-dit [Adresse 17], pour une contenance de 1are 39 centiares – sur la commune de [Localité 12] section A n° [Cadastre 1], lieu-dit [Adresse 17], pour une contenance de 60 centiares – ainsi que sur la commune de [Localité 12] (Loiret) [Adresse 8] le tiers indivis d’un passage commun figurant au cadastre section A n° [Cadastre 2], lieu-dit [Adresse 17], pour une contenance de 42 centiares ;

– condamné solidairement Monsieur [Z] [S] et Madame [K]

[S] à payer à Madame [X] la somme de 95.889,59 € au titre du

remboursement du prix de vente ;

– condamné l’EURL PASCAL COLLINOT exerçant sous l’enseigne CENTURY

[Adresse 4] à payer à Madame [U] [X] la somme de 8.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de la commission d’agence payée inutilement ;

– condamné solidairement Monsieur et Madame [S] in solidum avec l’EURL PASCAL COLLINOT à payer à Madame [U] [X] la somme de 15.000 € en réparation de ses préjudices complémentaires ;

– dit l’EURL PASCAL COLLINOT exerçant sous l’enseigne CENTURY [Adresse 4] irrecevable en ses demandes à l’encontre de Monsieur [Z] [S] et Madame [K] [S] ;

– condamné in solidum les époux [S] à payer à Madame [U] [X] la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du CPC ;

– condamné in solidum les époux [S] à payer à Madame [U] [X] les dépens comprenant les frais d’expertise judiciaire et fait application de l’article 699 du CPC au profit de la SELARL CASADEI-JUNG, Avocat à la Cour d’Appel d’Orléans ;

– rejeté tout autre demande des parties,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision.

Pour retenir la nullité du contrat de vente, le tribunal s’est fondé sur l’existence d’un dol ayant vicié le consentement de l’acquéreur, faute pour M. et Mme [S] de l’avoir informée du fait qu’ils avaient eux-meêm réalisé l’extension de la maison, sans permis de construire et sans respecter les règles de l’art.

Il a retenu que l’EURL PASCAL COLLINOT a manqué à son obligation de conseil et d’information précontractuelle en omettant d’avertir Mme [X] de l’état du bien litigieux.

Par déclaration d’appel en date du 11 septembre 2020, les consorts [S] ont relevé appel de cette décision, en tous chefs de son dispositif.

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 11 décembre 2020, les consorts [S] demandent à la cour :

– recevoir en leur appel Monsieur et Madame [S] comme étant bienfondés

En conséquence,

– infirmer le jugement rendu par le tribunal judicaire d’Orléans intervenu le 13 mai 2020,

– débouter Madame [X] de toutes ces demandes,

– condamner Madame [X] à régler à Monsieur et Madame [S] la somme de 4 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 11 mars 2021, l’EURL PASCAL COLLINOT demande à la cour de :

– déclarer mal fondés les appels formés par les époux [S] et Madame [X],

– déclarer recevable et bien fondé l’appel incident formé par la société PASCAL COLLINOT, et en conséquence, y faisant droit,

– rejeter toutes les demandes de Madame [X] dirigées contre la société PASCAL

COLLINOT,

– subsidiairement, condamner solidairement Monsieur et Madame [S] à garantir intégralement et relever indemne la société PASCAL COLLINOT de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre.

– en toute hypothèse, condamner Madame [U] [X], et subsidiairement Monsieur et Madame [S] solidairement, à verser à la société PASCAL COLLINOT la somme de 3 500 € à titre d’indemnité pour frais irrépétibles.

– en toute hypothèse toujours, condamner Madame [U] [X], et subsidiairement Monsieur et Madame [S] solidairement, au paiement des dépens de première instance et d’appel, et accorder à la Selarl DEREC le droit prévu à l’article 699 du Code de procédure civile.

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 8 juin 2021, Madame [U] [X] demande à la cour de :

– débouter les époux [S] et l’EURL PASCAL COLLINOT de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– prononcé la nullité de la vente reçue le 7 mars 2014 par Maître [L] [F], Notaire Associé de la SCP [L] [F] et Carole PROSPER, Notaires Associés, titulaire d’un office notarial à [Localité 7] (Loiret) aux termes de laquelle Monsieur [Z] [S] et Madame [K] [V] épouse [S] ont vendu à Madame [U] [X] une maison d’habitation sise à [Adresse 15] et à [Adresse 13], sans numéro, cadastrée sur la commune de [Localité 7] section AL n° [Cadastre 10], lieu-dit [Adresse 17], pour une contenance de 1are 39 centiares – sur la commune de [Localité 12] section A n° [Cadastre 1], lieu-dit [Adresse 17], pour une contenance de 60 centiares – ainsi que sur la commune de [Localité 12] (Loiret) [Adresse 8] le tiers indivis d’un passage commun figurant au cadastre section A n° [Cadastre 2], lieu-dit [Adresse 17], pour une contenance de 42 centiares ;

– condamné solidairement Monsieur [Z] [S] et Madame [K]

[S] à payer à Madame [X] la somme de 95.889,59 € au titre du remboursement du prix de vente ;

– condamné l’EURL PASCAL COLLINOT exerçant sous l’enseigne CENTURY

[Adresse 4] à payer à Madame [U] [X] la somme de 8.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de la commission d’agence payée inutilement ;

– condamné in solidum les époux [S] à payer à Madame [U] [X] la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du CPC ;

– rejeté tout autre demande des parties,

Et à titre principal,

– condamner in solidum l’EURL PASCAL COLLINOT avec Monsieur [Z] [S], Madame [K] [V], solidairement, à payer à Madame [U] [X] la somme de 103.600 € au titre du remboursement du coût total d’acquisition du bien situé [Adresse 3] à [Localité 7], cadastrée sur la commune de [Localité 7], section AL N° [Cadastre 10] pour une contenance de 1a 39ca et sur la commune de [Localité 12], section A N° [Cadastre 1] pour une contenance de 60ca, et à titre de dommages-intérêts ;

– infirmer le jugement en ce qu’il limité les dommages et intérêts alloués à Madame [U] [X] au titre de ses préjudices complémentaires à la somme de 15.000 € ;

En conséquence,

– condamner solidairement Monsieur [Z] [S], Madame [K] [V] et l’EURL PASCAL COLLINOT à payer à Madame [U] [X] la somme 46.000 € au titre de ses préjudices complémentaires ;

Subsidiairement,

– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

En tout état de cause,

– débouter les époux [S] et l’EURL PASCAL COLLINOT de toutes demandes plus amples ou contraires ;

– condamner solidairement Monsieur [Z] [S], Madame [K] [V] et l’EURL PASCAL COLLINOT à payer à Madame [U] [X] au paiement d’une indemnité de 5.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamner solidairement Monsieur [Z] [S], Madame [K] [V] son épouse, et l’EURL PASCAL COLLINOT aux dépens de première instance de d’appel, comprenant les frais d’expertise judiciaire, dont distraction au profit de la SCP BERTRAND-RADISSON-BROSSAS, avocats.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 20 mars 2023.

MOTIFS

Sur la demande d’annulation de la vente

Moyens des parties

Mme [X] fait valoir que l’existence d’un dol est établi, dans la mesure où il est établi que les démarches déclarées effectuées par les vendeurs dans l’acte de vente du 7 mars 2014 et destinées à permettre la construction de l’extention en bois de la maison, n’ont en réalité aucunement été effectuées et que de surcroît, cette extension rend la maison impropre à sa destination.

qu’il résulte du rapport d’expertise que des désordres graves affectent le bien acquis, et que notamment, les désordres affectant l’extension-bois de la maison la rendent impropre à sa destination, que les vendeur ont déclaré dans l’acte de vente qu’aucune contraction n’avait été effectué dans les dix dernières années ou depuis leur acquisition si elle est plus récente, ce qui était erroné. Elle ajoute qu’il est manifeste que des travaux ont été réalisés par les vendeurs s’agissant notamment de l’extention-bois de la maison, dans la mesure où M. et Mme [S] avaient acquis le bien le 19 février 2013 lequel portait la désignation d’une ‘maison ancienne d’habitation à usage de garage et dépendance avec grenier au-dessus’. Elle relève que M. et Mme [J]

M. et Mme [S] sollicitent le rejet de cette demande. Ils font valoir qu’aucune pièce dans le rapport d’expertise ne vient prouver que les travaux ont été faits alors qu’ils étaient propriétaires, de sorte qu’il n’est pas possible de retenir que si Mme [X] avait eu connaissance de ce qu’ils avaient fait les travaux eux-mêmes, elle n’aurait pas acheté la maison,ou pas à ce prix là.

Réponse de la Cour

En application de l’article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, applicable au litige :

‘Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.

Il ne se présume pas et doit être prouvé ‘.

En l’espèce, l’acte de vente stipule que ‘Le vendeur déclare qu’aucune construction ou rénovation n’a été effectuée dans les 10 dernières années depuis son acquisition si elle est plus récente, ni qu’aucun élément constitutif d’ouvrage ou d’équipement indissociable de l’ouvrage au sens de l’article 1792 du code civil n’a été réalisé sur cet immeuble dans ce délai’.

Or il résulte du rapport d’expertise qu’une extension en bois a été ajoutée à la maison, dans laquelle ont été aménagées une chambre et une douche, que cette extension est affectée de nombreuses non-conformités électriques et d’équipement ( hauteur des marches non conforme, abnsence de ventilasation dans la salle de douche, non conformités électriques,, non respecte de la norme 15.100, pente de la toiture insuffisante relevé d’étanchéité conte le bâtiment moellons non étanche, recueil des eaux de pluie en dehors de la goutière, absence de descente d’eaux pluviales) et de désordres à l’origine d’infiltrations par la toiture.

M. et Mme [S] font valoir qu’il n’est pas établi qu’ils sont à l’origine de la réalisation de cette extension.

Toutefois, il convient de relever qu’ils ont fait l’acquisition de cette maison le 19 février 2013, et que leur acte d’acquisition désignait comme suit le bien ‘une maison ancienne d’habitation à usage de garage et dépendance avec grenier au-dessus (…)’.

Il en résulte que cette ancienne maison d’habitation était, à cette date, ‘à usage de garage’, ce que confirme la lettre adressée par le notaire à M. et Mme [S] le 4 décembre 2012 pour l’exercice de leur droit de rétractation, dans lequel il décrit la maison comme ‘une ancienne maison d’habitation actuellement à usage de garage et de dépendances’.

Ils ont acquis ce bien au prix de 25 000 euros.

Ils l’ont vendu à Mme [X], le 7 mars 2014 donc un an plus tard, au prix de 87 000 euros. La maison était décrite comme suit :

‘- une maison d’habitation comprenant :

– au rez-de-chaussée : cuisine, séjour, chambre avec salle d’eau, salle de bains, WC

– à l’étage : dégagement, chambre et bureau’.

Il résulte donc de la comparaison entre la désignation du bien dans ces deux actes que des travaux avaient été effectués dans la maison, décrite dans l’acte d’acquisition de Mme [X] comme ‘à usage d’habitation’, avec la descritpion des pièces nécessaires à cet usage, sans plus aucune référence à un usage de garage, et dont la valeur avait plus que triplé.

La facture CEM du 16 avril 2012 pour couverture, placo et isolation, qu’ils ont produite à l’expert n’est pas versée aux débats et ne saurait en tout état de cause démontrer qu’ils ne sont pas à l’origine des travaux de rénovation de la maison et notamment de construction de l’extension en bois dans la mesure où il résulte au contraire de leur propre acte d’acquisition que celui-ci a été précédé d’un avant-contrat du 1er février 2012 les ayant autorisé à réaliser sur le bien qui leur a été ensuite vendu un certain nombre de travaux.

Il résulte en conséquence de ces éléments que M. et Mme [S] ont réalisé dans la maison des travaux de rénovation qui ont permis à cette ancienne maison d’habitation, qui était à usage de garage lors de leur acquisition, de retrouver un usage d’habitation et ont édifié une extension en bois qui n’existait pas lors de leur acquisition.

C’est donc de façon volontairement erronée qu’ils ont déclaré dans l’acte de vente à Mme [X] qu’aucune construction ou rénovation n’avait été effectuée depuis leur acquisition et qu’aucun élément constitutif d’ouvrage ou d’équipement indissociable de l’ouvrage au sens de l’article 1792 du code civil n’avait été réalisé sur cet immeuble dans ce délai.

Une telle information était de nature à avoir une incidence sur la décision de Mme [X] de faire l’acquisition de cette maison, compte tenu d’une part des risques importants qui en résultaient pour elle, d’une part de nature administrative, l’absence de permis de consrtuire faisant peser un risque sur la pérennité de l’extension ainsi construite, et d’autre part de nature technique, compte tenu des malfaçons et non-conformités susceptibles d’affecter des travaux réalisés par des non professionnels, et de l’absence de tout assureur garantissant les éventuels désordres.

Ce risque s’est au demeurant réalisé puisqu’il résulte de l’expertise que les travaux réalisés sont affectés de nombreuses mal-façons et défauts de conformités aux règles de l’art, au point que le clos et le couvert ne sont pas assurés et que la maison est impropre à sa destination.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a prononcé l’annulation de la vente et condamné les époux [S] à en restituer le prix, majorée des frais de vente, de prêt et du prorata de taxe foncière.

Sur l’indemnisation des préjudices complémentaires

Le tribunal a alloué à Mme [X] une somme de 15000 euros en réparation de ses préjudices complémentaires, se décomposant comme suit :

– préjudice de jouissance faute pour elle de pouvoir habiter la maison : 10 000 euros

– préjudice moral : 5000 euros.

Mme [X] sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a limité à 15 000 euros le montant des dommages et intérêts qui lui ont été alloués, et demande à ce titre une somme de 46 000 euros, se décomposant comme suit :

– 40 000 euros à titre de préjudice de jouissance mensuel depuis son arrivée dans les lieux, soit 500 euros X 80 mois ;

– 6000 euros à titre de préjudice moral.

M. et Mme [S] sollicitent le rejet de ces demandes, qu’ils estiment non justifiées.

Toutefois, il résulte du rapport d’expertise que ‘Mme [X] ne peut plus habiter ce logement, car il est insalubre et non clos ni couvert’. L’expert explique en effet que la maison n’est pas habitable, que les infiltrations se font par la couveture, par les baies vitrées, que l’isolation et le plafond sont totalement soumis aux intempéries, que l’électricité est dangereuse dans la salle d’eau.

Il ne s’agit là nullement des seules conséquences du sinistre survenu en juin 2014, puisque l’expert impute ces désordres aux nombreuses malfaçons et non repsect des règles de l’art dont il a constaté l’existence :

– dans l’extension infltrations par la toiture, pentes non conformes, fixations insuffisantes, faîtage non conforme, absence de pièces de faîtage, rive inéchevée, égoût inachevé, gouttière mal placée et trop courte, DEP inexistante, fenêtres non étanches, isolation sous-toiture non fixée et pourrie, absence de ventilation dans la douche, non conformités électriques ;

– dans le reste de la maison : non conformités électriques, absence de ventilation dans les pièces d’eau, défaillance d’ouverture de la fenêtre, entrait de ferme coupé, risque d’effondement de la toiture.

Il en résulte que l’inhabitalité de la maison résulte des travaux réalisés et non du sinistre survenu en juin 2014, et que la réalité du préjudice de jouissance de Mme [X] est parfaitement démontrée, celle-ci ne pouvant plus habiter la maison qu’elle avait achetée à cette fin en 2014 tout en ne pouvant pas disposer des fonds investis pour son acquisition.

Le préjudice de jouissance de Mme [X] sera justement indemnisé par l’allocation d’une somme de 17 000 euros.

Mme [X] a également subi un préjudice moral tenant à la déception de voir son achat immobilier se solder par une demande d’annulation, aux démarches qu’elle a dû entreprendre pour faire valoir ses droits et aux soucis et tracas générés par ce litige depuis près de dix ans.

Son préjudice à ce titre sera indemnisé par l’allocation d’une somme de 6000 euros.

Sur la responsabilité de l’EURL Pascal COLLINOT

Moyens des parties

Mme [X] soutient que l’agence immobilière a manqué à son obligation d’information et de conseil, en ce qu’elle n’a pas vérifié s’il y avait eu une demande de permis de consturire, une conformité, un Consuel ou des factures de travaux de la part des vendeurs, n’a pas attité son attention sur l’absence de conformité et d’habitabilité de l’annexe en bois, ne s’est pas renseignée sur les travaux effectués. Elle précise qu’il résulte du rapport d’expertise que les désordres les plus importants n’étaient pas apparents pour un acquéreur non spécialiste de la construction, notamment ceux affectant la toiture de l’extension et la section de l’entrait fragilisant la charpente. Elle estime que que l’apparence récente de l’extension semblant non terminée en bordure de toiture alors que les vendeurs soutenaient l’absence de travaux récents auraient dû alerter un agent immobilier normalement diligent, qui aurait dû procédé à des investigations complémentaires ou conseiller à Mme [X] de requérir les services d’un homme de l’art.

L’agence immobilière soutient quant à elle qu’elle n’a pas commis de faute, que si elle est tenue à l’égard des candidats à l’acquisition d’une obligation de vérification de la véracité des descriptions contenues par l’annonce qu’il publie, il n’est pas démontré que cela n’a pas été le cas en l’espèce. Elle ajoute que Mme [X] a visité trois fois la maison, dans laquelle elle envisageait de réaliser des travaux, que de nombreux désordres étaient apparents, et que s’agissant des prétendus vices cachés concernant la charpente, ou l’absence d’autorisation administrative de construire, ces éléments, s’ils étaient cachés pour Mme [X], l’étaient aussi pour l’agent immobilier qui n’est pas expert en bâtiment. Il ne peut davantage devenir des informations qui ne lui ont été données par le vendeur, telle la réalisation de travaux sans autorisation.

Réponse de la cour

Le mandataire répond sur un fondement extracontractuel des fautes dont il se rend coupable envers les tiers.

L’agent immobilier, mandataire des parties, est tenu, en sa qualité de rédacteur d’actes, d’assurer l’efficacité juridique des actes passés par son entremise.

Et, en sa qualité de professionnel, l’agent immobilier est tenu d’une obligation de renseignement et de conseil non seulement vis-à-vis de son mandant, mais à l’égard de toutes les parties à l’acte conclu par son entremise (1ère Civ., 26 mars 1996, Bull. n°154).

Toutefois, sauf cas de discordance avérée, l’agent immobilier n’est pas tenu de procéder à des investigations approfondies qui sont hors du champ de sa compétence.

La question se pose donc de savoir si en l’espèce, la société Pascal Collinot disposait d’éléments de nature à lui faire suspecter que les informations qui lui avaient été communiquées étaient inexactes ou parcellaires et que l’opération comportait des risques pour l’acquéreur, sur lesquels il aurait dû attirer son attention.

Il convient en premier lieu de relever que le ‘compromis de vente’ rédigé par l’EURL COLLINOT ne comporte aucune information sur la réalisation récente d’éventuels travaux.

Et en l’état des dénégations de M. et Mme [S] qui contestent être à l’origine des travaux litigieux, il n’est nullement établi qu’ils ont informé leur mandant de la réalisation par leurs soins d’un certain nombre de travaux et notamment de travaux d’extension nécessitant une autorisation administrative.

D’autre part, il n’est pas démontré que l’agent immobilier, qui n’est pas un professionnel du bâtiment, était en mesure de suspecter des malfaçons affectant dans les travaux réalisés, en dehors des défauts apparents (marches d’escaliers, linteau de la porte d’entrée, état de la toiture du bâtiment existant… ) et absence de finitions (rive du toit de l’extension, goutières inachevées…) dont Mme [X] avait, tout autant que l’agent immobilier, pu se convaincre.

L’existence d’une faute délictucelle commise par l’EURL COLLINOT à l’égard de Mme [X] n’est dès lors pas démontrée.

Enfin, et en tout état de cause, le manquement à un devoir d’information et de conseil ne peut donner lieu qu’à l’indemnisation d’une perte de chance de ne pas contracter, perte de chance qui n’est pas alléguée en l’espèce puisque Mme [X] sollicite l’indemnisation de son entier préjudice.

En conséquence, Mme [X] sera déboutée de ses demandes dirigées contre la société Pascal Collinot.

Sur les dépens et les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

M. et Mme [S] seront tenus aux dépens de la procédure d’appel, dont distraction au profit de la SELARL CASADEI-JUNG, et de la SELARL Derec, avocats, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Les circonstances de la cause justifient de condamner in solidum M. et Mme [S] à payer à Mme [X] une somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et de rejeter les autres demandes à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu’il :

– prononce la nullité de la vente reçue le 7 mars 2014 par Maître [L] [F], Notaire Associé de la SCP [L] [F] et Carole PROSPER, Notaires Associés, titulaire d’un office notarial à [Localité 7] (Loiret) aux termes de laquelle Monsieur [Z] [S] et Madame [K] [V] épouse [S] ont vendu à Madame [U] [X] une maison d’habitation sise à [Adresse 15] et à [Adresse 13], sans numéro, cadastrée sur la commune de [Localité 7] section AL n° [Cadastre 10], lieu-dit [Adresse 17], pour une contenance de 1are 39 centiares – sur la commune de [Localité 12] section A n° [Cadastre 1], lieu-dit [Adresse 17], pour une contenance de 60 centiares – ainsi que sur la commune de [Localité 12] (Loiret) [Adresse 8] le tiers indivis d’un passage commun figurant au cadastre section A n° [Cadastre 2], lieu-dit [Adresse 17], pour une contenance de 42 centiares ;

– condamne solidairement M. et Mme [S] à payer à Mme [X] une somme de 95 889,59 euros au titre du remboursement du prix de vente ;

– condamne in solidum les époux [S] à payer à Madame [U] [X] la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamne in solidum les époux [S] à payer à Madame [U] [X] les dépens comprenant les frais d’expertise judiciaire et faitapplication de l’article 699 du CPC au profit de la SELARL CASADEI-JUNG, Avocat à la Cour d’Appel d’Orléans ;

L’INFIRME pour le surplus des disposien ses dispositions critiquées ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

CONDAMNE solidairement M. et Mme [S] à payer à Mme [U] [X] une somme de 23 000 euros en réparation de ses préjudices complémentaires ;

CONDAMNE in solidum M. et Mme [S] à payer à Mme [X] une somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et rejette les autres demandes à ce titre ;

CONDAMNE in solidum M. et Mme [S] aux dépens de la procédure d’appel. dont distraction au profit de la SELARL CASADEI-JUNG, et de la SELARL Derec, avocats, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre et Madame Fatima HAJBI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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