Droit de rétractation : 13 septembre 2023 Cour d’appel de Riom RG n° 22/00013

·

·

Droit de rétractation : 13 septembre 2023 Cour d’appel de Riom RG n° 22/00013
Ce point juridique est utile ?

COUR D’APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°363

DU : 13 Septembre 2023

N° RG 22/00013 – N° Portalis DBVU-V-B7F-FXLJ

VD

Arrêt rendu le treize Septembre deux mille vingt trois

Sur APPEL d’une décision rendue le 09 Novembre 2021 par le Tribunal Judiciaire de CLERMONT-FERRAND (RG N°20/00375)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

Madame Virginie DUFAYET, Conseiller

En présence de :Mme Pauline LACROZE, Greffier placé, lors de l’appel des causes et Mme Stéphanie LASNIER, Greffier, lors du prononcé

ENTRE :

S.A. COFIDIS

société à directoire et conseil de surveillance, immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le numéro 325 307 106

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représentants : Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (avocat postulant) et Me Jean-Pierre HAUSSMANN de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOËT, avocat au barreau d’ESSONNE (avocat plaidant)

APPELANTE

ET :

M. [T] [F]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentant : Me David TEYSSIER de la SCP TREINS-POULET-VIAN ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Mme [O] [S] épouse [F]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentant : Me David TEYSSIER de la SCP TREINS-POULET-VIAN ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

S.E.L.A.R.L. [L]

représentée par Me [P] [L], ès-qualités de mandataire liquidateur de la SAS ECORENOVE, immatriculée au RCS de LYON sous le numéro 753 322 767 dont le siège social est [Adresse 1] [Localité 5]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Non représentée, assignée à personne habilitée

INTIMÉS

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, à l’audience publique du 25 Mai 2023, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame DUFAYET, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 13 Septembre 2023 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Stéphanie LASNIER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige

Le 20 novembre 2019, M. [T] [F] et Mme [O] [S] épouse [F] ont commandé auprès de la SAS Ecorénove une station photovoltaïque au prix de 29 700 euros, pose comprise. Cette acquisition a été intégralement financée par un crédit affecté souscrit le même jour auprès de la SA Cofidis.

Par jugement du 3 mars 2020, la SAS Ecorénove a été placée en liquidation judiciaire et la SELARL [P] [L] désignée en qualité de liquidateur.

Par exploit d’huissier en date du 18 septembre 2020, les époux [F] ont fait assigner la SELARL [P] [L] ès qualités et la SA Cofidis devant le juge des contentieux de la protection (JCP) du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand afin d’obtenir la nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté.

Par jugement du 9 novembre 2021, le JCP a :

– prononcé la nullité du contrat conclu le 20 novembre 2019 entre M. [T] [F] et Mme [O] [S] épouse [F] d’une part et la SAS Ecorénove d’autre part,

– constaté l’annulation subséquente et de plein droit du contrat de crédit affecté conclu le 20 novembre 2019 entre M. [T] [F] et Mme [O] [S] épouse [F] d’une part et la SA Cofidis d’autre part,

– ordonné que les parties soient replacées dans leur état originel,

– dit que M. [T] [F] et Mme [O] [S] épouse [F] doivent restituer à la SA Cofidis le capital emprunté de 29 700 euros, sous déduction de la privation partielle du droit de cette dernière à restitution (19 800 euros),

– dit que la SA Cofidis doit restituer à M. [T] [F] et Mme [O] [S] épouse [F] l’ensemble des sommes perçues à quelque titre que ce soit de la part de ces derniers (0 euro),

– condamné en conséquence M. [T] [F] et Mme [O] [S] épouse [F] à payer à la SA Cofidis le solde de 9 900 euros, outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

– condamné la SA Cofidis à payer à M. [T] [F] et Mme [O] [S] épouse [F] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de l’instance,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– rappelé que le jugement est de droit exécutoire à titre de provision.

Pour annuler le contrat principal, le tribunal a retenu que la description des caractéristiques essentielles des fournitures et prestations était insuffisante.

Il a ensuite estimé qu’il n’y avait pas eu de confirmation de l’acte nul.

Sur les conséquences de l’annulation des contrats, il a jugé que le prêteur avait commis une faute dans la libération des fonds. Il a par ailleurs évalué à 19 800 euros la privation du droit à restitution du capital prêté au regard du préjudice subi par les emprunteurs.

La SA Cofidis a interjeté appel de cette décision par déclaration électronique en date du 24 décembre 2021, intimant les époux [F] et la SELARL [P] [L] ès qualités.

Par conclusions régulièrement déposées et notifiées par voie électronique le 22 mars 2023, l’appelante demande à la cour de :

– infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

– statuant à nouveau :

– déclarer M. [T] [F] et Mme [O] [F] née [S] irrecevables et subsidiairement mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,

– la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

– Y faisant droit :

– condamner solidairement M. [T] [F] et Mme [O] [F] née [S] à lui payer la somme de 33 643,24 euros au taux légal à compter du 19 avril 2021,

– à titre subsidiaire, si la cour confirmait le jugement sur la nullité des conventions :

– infirmer le jugement sur les fautes de Cofidis,

– statuant à nouveau :

– condamner solidairement M. [T] [F] et Mme [O] [F] née [S] à lui rembourser la totalité du capital, soit la somme de 29 700 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, en l’absence de faute de sa part et en toute hypothèse en l’absence de préjudice et de lien de causalité,

– à titre infiniment subsidiaire :

– condamner solidairement M. [T] [F] et Mme [O] [F] née [S] à lui rembourser une partie du capital dont le montant sera fixé à la somme de 28 400 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

– en tout état de cause condamner solidairement M. [T] [F] et Mme [O] [F] née [S] à lui payer une indemnité d’un montant de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

Suivant conclusions régulièrement déposées et notifiées par voie électronique le 26 avril 2023, les époux [F] demandent à la cour, au visa des articles L.111-1 et suivants du code de la consommation et L.312-55 du même code, de :

– juger la société Cofidis irrecevable et infondée en son appel,

– y faisant droit :

– débouter la société Cofidis de l’ensemble de ses prétentions,

– au contraire, confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce que celui-ci les a condamnés à payer à la société Cofidis la somme de 9 900 euros outre intérêts au taux légal à compter du jugement,

– infirmer ce chef du dispositif,

– statuant à nouveau en fait et en droit :

– priver la société Cofidis de tout remboursement de leur part au titre du capital, des frais et accessoires du crédit affecté litigieux,

– les dispenser de leur obligation de rembourser le capital emprunté auprès de la société Cofidis,

– condamner la société Cofidis à leur porter et payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et d’appel dont distraction au profit de maître David Teyssier de la SCP Treins Poulet et associés, avocat sur son affirmation de droit.

La SELARL [P] [L] ès qualités n’a pas constitué avocat. La SA Cofidis lui a signifié la déclaration d’appel par acte du 15 février 2022, l’acte étant délivré à personne habilitée.

Il est renvoyé aux dernières écritures des parties pour l’exposé complet de leurs prétentions et moyens.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 11 mai 2023.

Motivation de la décision

1/ Sur la nullité du contrat de vente

Le bon de commande souscrit le 20 novembre 2019 mentionne que le contrat a été signé à [Localité 8] (63), qui est la commune du domicile des époux [F], ce qui confirme que l’opération litigieuse a été conclue sur démarchage à domicile.

S’agissant d’un contrat conclu hors établissement, il est en conséquence régi par les dispositions des articles L.221-1 et suivants du code de la consommation applicables à la date de signature du contrat, soit les dispositions du code de la consommation postérieures à l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et antérieures à l’ordonnance n°2021-1247 du 29 septembre 2021 entrée en vigueur le 1er octobre 2021.

Aux termes de l’article L.221-5 du code de la consommation applicable, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations suivantes :

1° les informations prévues aux articles L.111-1 et L.111-2.

Les informations de l’article L.111-1 que le professionnel communique au consommateur sont les suivantes :

1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° le prix du bien ou du service, en application des articles L.112-1 à L.112-4 ;

3° en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service (l’article R.111-1 précise que le contrat indique les modalités d’exécution et de livraison du contrat).

4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;

5° s’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;

6° la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

Aux termes de l’article L.221-9, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations mentionnées à l’article L.221-5. […]. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L.221-5.

Enfin, l’article L.242-1 prévoit que les dispositions de l’article L.221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

Le JCP a jugé que la description des biens fournis était insuffisante.

L’appelante estime que les premiers juges ont ajouté au texte en exigeant des détails non prévus par la loi. S’agissant de la marque des panneaux, elle indique que deux marques étaient stipulées, et que seule l’absence de mention et non son imprécision peut entraîner la nullité.

S’agissant du prix unitaire et du prix de la main d’oeuvre, aucun texte ne prévoit une telle ventilation du prix, seul le prix global à payer étant exigé.

S’agissant du modèle, du poids et de la surface des panneaux, il faut démontrer le caractère déterminant de ces éléments dans le consentement des acheteurs, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Par ailleurs, le bon de commande stipule la pose de panneaux en intégration ou surimposition.

Aucun texte n’exige que le bon de commande fasse un descriptif technique de l’installation. Enfin la seule démarche administrative à effectuer l’est auprès de la mairie pour les travaux de pose.

Les intimés soutiennent que la marque et le modèle des biens vendus constituent indubitablement une caractéristique essentielle au sens des dispositions du code de la consommation, faute de quoi le prestataire peut installer tout et n’importe quoi. A défaut, l’acheteur ne peut pas comparer, dans le délai légal de rétractation, les équipements et leur performance par rapport à ceux d’autres sociétés.

En l’espèce, la description du bien vendu figurant au bon de commande est la suivante:

– fourniture et pose de 30 panneaux photovoltaïque BISOL/EURENER. Garantie fabricant 20 ans de production

– puissance totale 9 Kwc d’énergie électrique, 30 micro-onduleurs ENPHASE M215/M250/IQ-7

– intégration ou surimposition de toiture GSE/K2 systems et coffret de protection électrique AC

– système de régulation centrale et de monitoring de chauffage

– demandes administratives à charge de notre entreprise

– autoconsommation

– prix HT : 26693,81 – TVA : 3006,19 – prix TTC : 29700

Il résulte de cette énumération qu’elle est en réalité très imprécise puisque seule est indiquée la marque des panneaux, et encore de façon alternative donc sans certitude, et la puissance totale de l’installation. Rien n’est dit sur le modèle de panneaux. En outre, aucun détail du prix n’est fourni. De plus, en l’absence de précision sur le modèle et la marque des panneaux, le vendeur ne peut évidemment dire si les panneaux seront en surimposition ou en intégration, or il s’agit là de travaux aux conséquences bien différentes sur le bâti pour les acheteurs et donc d’une information très importante.

Ces lacunes dans le bon de commande sur les caractéristiques essentielles des biens ainsi commandés ne permettent pas à l’acheteur de savoir réellement ce qu’il achète, le vendeur se laissant une faculté de substitution et de type d’installation, ni de pouvoir comparer l’offre ainsi proposée à d’autres dans le délai légal de rétractation.

Ainsi, les prescriptions du code de la consommation ci-dessus rappelées n’ont pas été respectées et la nullité du contrat de vente est encourue, emportant confirmation de la décision sur ce point.

2/ Sur la confirmation du contrat

La méconnaissance des dispositions sus-visées du code de la consommation, tout comme celle des articles 1130 et suivants du code civil, est sanctionnée par une nullité relative susceptible d’être couverte par les actes postérieurs.

Selon l’article 1182 du code civil, la confirmation est l’acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l’objet de l’obligation et le vice affectant le contrat. La confirmation ne peut intervenir qu’après la conclusion du contrat.

L’exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu’après que la violence a cessé.

La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers.

Il convient donc de déterminer si l’auteur a eu connaissance du vice et l’intention de le réparer. La première de ces conditions est à la base de toute confirmation. Si une partie n’a pas eu connaissance du vice affectant l’acte, elle ne peut émettre un consentement éclairé destiné à le confirmer.

Le JCP a estimé qu’il n’y avait pas eu de confirmation de l’acte nul, la signature de l’attestation de fin de travaux ne pouvant emporter une telle renonciation. Il a ajouté que le fait de considérer que le consommateur peut se convaincre, lors de la conclusion du contrat, de l’absence ou de l’incomplétude des mentions obligatoires et doit s’en prévaloir avant toute exécution, revient à priver de toute portée le formalisme impératif du code de la consommation et à faire peser le contrôle de la régularité de l’opération non pas sur le juge a posteriori, mais sur le consommateur a priori. Il a également relevé que les vendeurs contestaient avoir signé l’attestation de livraison.

L’appelante soutient que les intimés ont réitéré leur consentement de façon expresse en:

– signant le contrat de crédit

– signant une fiche de dialogue relative à leurs revenus et charges

– signant une fiche de conseil en assurance

– lui remettant leurs éléments d’identité et de solvabilité

– obtenant les autorisations administratives

– acceptant la livraison des marchandises

– suivant les travaux

– signant une attestation de livraison et de mise en service

– signant un mandat de prélèvement SEPA

– obtenant l’attestation de conformité du consuel.

Les intimés soutiennent l’inverse. Ils indiquent avoir signé le contrat de crédit en même temps que le bon de commande et dans la précipitation. Ils n’ont pas signé la moindre attestation de livraison et ont refusé de signer la fiche d’installation. L’attestation de livraison produite par l’appelante n’est pas signée par eux. Ils n’ont pas signé de mandat de prélèvement SEPA. Leur installation ne fonctionne pas : ni en autoconsommation, ni pour la revente car elle n’a pas été raccordée. Ils produisent une expertise qui démontre au contraire une augmentation de leur consommation d’électricité. Enfin, le consuel n’effectue aucune vérification in situ. Ils n’ont versé aucune mensualité du prêt.

En l’espèce, si les acheteurs ont bien coché sur le contrat de vente la case en face de la mention suivante : ‘le client déclare avoir pris connaissance des conditions de vente figurant au-dessous de ce bon de commande et des articles L.221-18 à L.221-19 du code de la consommation et notamment de la faculté de renonciation prévue par l’article L.221-18 en utilisation le formulaire imprimable à la fin des conditions de vente’, il ne résulte pas desdites conditions une reproduction intégrale des dispositions de ces articles, et notamment de l’article L.221-18 pourtant essentiel.

Par ailleurs, il apparaît qu’ils n’ont versé aucune mensualité du prêt et que leur installation n’est pas raccordée. En effet, et contrairement à ce que soutient l’appelante à titre liminaire dans ses écritures, l’installation n’était pas en auto-consommation mais bien mixte puisqu’il résulte d’un avenant au contrat en date du 26 novembre 2029 produit par les intimés qu’il a finalement été décidé que l’installation serait la suivante : ‘raccordement de 6 Kw en auto-consommation plus revente de surplus ; raccordement de 3 Kw en revente totale’. Il s’ensuit que l’installation devait donc nécessairement être raccordée au réseau, sans que cet avenant ne précise les modalités de ce raccordement : type de travaux, coût, prise en charge…

Ils produisent en outre un document rédigé par la SARL Rolhion Energie qui a expertisé leur installation et dont il résulte qu’elle n’est pas opérationnelle. Ce document, qui peut être qualifié d’analyse de leur installation plus que d’expertise, n’est certes pas contradictoire mais est corroboré par les factures d’électricité qu’ils produisent et qui attestent d’une hausse de leur consommation depuis 2020, en contradiction avec le but d’une installation qui serait fonctionnelle.

Les époux [F] n’ont donc eu nulle intention de couvrir les vices affectant le bon de commande et leur attitude postérieure à la signature démontre l’inverse, le jugement étant également confirmé sur ce point.

Le jugement sera également nécessairement confirmé en ce qu’il a prononcé, par application des dispositions de l’article L.312-55 du code de la consommation, l’annulation subséquente du contrat de crédit affecté.

3/ Sur les conséquences de l’annulation des contrats

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a ordonné que les parties soient replacées dans leur état originel, ce qui implique dans les rapports prêteur/emprunteur, l’obligation pour le prêteur de rembourser aux emprunteurs les échéances réglées par ces derniers.

S’agissant du remboursement par l’emprunteur du capital prêté, il s’évince des articles L.312-48 et L.312-55 du code de la consommation que le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute (Cass. Civ 1ère 25 novembre 2020, 19-14.908).

Aussi, il appartenait notamment à la banque prêteuse de vérifier à son initiative la régularité du bon de commande en sollicitant sa communication par le vendeur ou d’effectuer les démarches lui permettant de se convaincre que le contrat était régulier.

L’appelante prétend n’avoir commis aucune faute dans la libération des fonds. Elle expose que lorsque la banque prouve la mise en service de l’installation, les obligations des emprunteurs prennent effet à son égard. Elle n’a pas à vérifier la mise en service de l’installation ni l’obtention des autorisations administratives. Le contrat initial était en auto-consommation, or elle n’a jamais eu connaissance de l’avenant qui ne lui est pas opposable et par ailleurs les emprunteurs ont signé l’attestation de livraison et d’installation. La banque n’avait pas à vérifier la signature figurant sur cette attestation et il appartient le cas échéant aux intimés de démontrer qu’il s’agit d’un faux. En outre, le contrat avait l’apparence d’un contrat régulier.

En l’espèce, l’appelante a versé les fonds à la société prestataire alors même que l’examen du bon de commande fait ressortir des irrégularités manifestes du contrat : non-reproduction intégrale des articles relatifs au droit de rétractation dans le cadre d’un démarchage à domicile, défaut de précision quant au matériel acheté (type et marque) et ses modalités d’installation. Alors qu’il s’agit d’un organisme de crédit rompu aux mécanismes de financement de ce type d’installations, l’appelante aurait dû constater que le bon de commande n’était de toute évidence pas conforme aux dispositions du code de la consommation.

L’imprudence fautive de l’organisme de crédit est en conséquence caractérisée.

La privation de la créance de restitution du prêteur ne peut toutefois être prononcée qu’à la mesure du préjudice subi par les emprunteurs en lien avec les fautes retenues.

Le JCP a estimé que la faute du prêteur était de nature à le priver des deux tiers du capital prêté, soit 19 800 euros

L’appelante rappelle que les intimés doivent démontrer l’existence d’un lien de causalité entre la faute de la banque et leur préjudice. Le vendeur étant en liquidation judiciaire, les intimés conserveront le bénéfice de l’installation. Elle indique que le prétendu préjudice de ne pas pouvoir récupérer les fonds auprès du vendeur et de ne pas obtenir la désinstallation du matériel en raison de la liquidation judiciaire du vendeur n’était pas prévisible au moment de la signature du contrat et ne constitue nullement une suite immédiate, directe et certaine de la faute d’avoir financé un bon de commande entaché de causes de nullité. Le contrat qu’elle a financé a été exécuté, sans que l’avenant lui soit opposable. En outre, le prétendu rapport d’expertise produit par les intimés n’a aucune valeur car il n’est pas contradictoire. Enfin, les factures produites ne permettent pas de démontrer une hausse de la consommation d’électricité.

De leur côté, les intimés soutiennent que leur installation ne fonctionne pas ainsi qu’en atteste l’expertise de la société Rolhion et leurs factures d’électricité. Aucune entreprise n’acceptera d’intervenir sur leur installation pour la rendre opérationnelle. Ils devront donc assumer des frais de dépose et de remise en état. Ils sollicitent une dispense intégrale de tout remboursement envers le prêteur.

A titre liminaire il sera observé que le fait de financer un contrat nul rend plus que prévisible l’existence d’un préjudice pouvant en découler, de sorte que ce premier argument de l’appelant ne peut qu’être écarté.

Ainsi que l’a relevé le JCP, l’analyse de l’entreprise Rolhion fait apparaître que l’installation ne peut fonctionner en l’état en raison du sous-dimensionnement de certains éléments. Si cette seule analyse n’est certes pas suffisante pour faire foi, ainsi qu’il a été dit plus haut, elle est corroborée par les factures d’électricité versées au débat par les intimés dont il ne résulte pas une baisse de leur consommation, mais au contraire une augmentation, ni une quelconque revente. Les intimés devront donc engager des frais pour faire fonctionner leur installation.

Sils prétendent vouloir la déposer, ils ne justifient pas avoir entamé des démarches à cette fin et ne produisent aucun devis pour chiffrer le coût d’une telle intervention. Aussi, leur demande de dispense totale de restitution des fonds prêtés n’est pas justifiée.

Au total, il apparaît que le JCP a justement évalué aux deux tiers du montant du crédit, soit la somme de 19 800 euros, leur préjudice.

Il s’ensuit que la décision sera également confirmée sur les conséquences de l’annulation des contrats.

4/ Sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens en cause d’appel

L’appelante succombant en son appel en supportera les dépens et sera condamnée à payer aux époux [F] une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Condamne la SA Cofidis à payer à M. [T] [F] et Mme [O] [S] épouse [F] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Condamne la SA Cofidis aux dépens d’appel, dont distraction au profit de maître David Teyssier de la SCP Treins Poulet et associés.

Le Greffier La Présidente

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x