Plagiat : 18 juin 2002 Cour de cassation Pourvoi n° 00-10.377

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Plagiat : 18 juin 2002 Cour de cassation Pourvoi n° 00-10.377

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / la société Conudep, société anonyme, prise en la personne de son président du conseil d’administration en exercice, M. Mustapha X…,

2 / la société Mefina, société à responsabilité limitée, prise en la personne de son gérant en exercice, M. Mustapha X…,

ayant toutes deux leur siège …,

3 / M. Mustapha X…, demeurant …,

en cassation d’un arrêt rendu le 3 novembre 1999 par la cour d’appel de Besançon (2e chambre civile), au profit :

1 / de M. Patrice Y…, demeurant …,

2 / de la société IDMM, dont le siège est …,

défendeurs à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

LA COUR, composée selon l’article L. 131-6-1 du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 6 mai 2002, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Champalaune, conseiller référendaire rapporteur, M. Métivet, Mmes Garnier, Collomp, Favre, Betch, conseillers, Mme Mouillard, M. Boinot, Mme Gueguen, MM. Sémériva, Truchot, conseillers référendaires, M. Jobard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Champalaune, conseiller référendaire, les observations de Me Guinard, avocat des sociétés Conudep et Mefina, de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de M. Y… et de la société IDMM, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à M. X… et à la société Méfina de ce qu’ils se désistent de leur pourvoi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, (Besançon, 3 novembre 1999) que la société Conudep qui a pour objet la réalisation de “toutes opérations relatives aux travaux de décolletage et de tournage par commande numérique et la fabrication de pièces destinées à l’industrie” a été constituée à ses débuts en société à responsabilité limitée dont les co-gérants étaient MM. X… et Y… ; qu’elle s’est ensuite transformée en société anonyme dont M. Y… était administrateur ;

que celui-ci a quitté la société Conudep après en avoir cédé des actions à M. X… et à la société Méfina ; qu’il a créé une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée IDMM dont il est le gérant et l’unique associé ; qu’estimant que la création de la société IDMM constituait un acte de concurrence déloyale, la société Conudep l’a assignée en justice aux fins qu’il lui soit interdit ainsi qu’à M. Y… et d’anciens salariés, également assignés, de démarcher et de débaucher ses employés et de démarcher sa clientèle, sollicitant en outre des dommages-intérêts provisionnels dans l’attente d’une expertise ; que M. X… et la société Méfina sont intervenus volontairement en instance d’appel en sollicitant la condamnation solidaire de M. Y… et de la société IDMM à leur payer des dommages-intérêts sur le fondement de l’article 1625 du Code civil ;

Sur le premier moyen, pris en ses cinq branches :

Attendu que la société Conudep fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté son action en concurrence déloyale, alors, selon le moyen :

1 / que l’utilisation de la connaissance des clients d’une société acquise par un ancien dirigeant est constitutive d’une manoeuvre lorsqu’elle lui permet de démarrer l’exploitation d’une société concurrente ; qu’en l’espèce, où il a été constaté que M. Y…, directeur commercial de la société Conudep, avait mis à profit la connaissance qu’il avait de sa clientèle, ce qui avait abouti à un transfert de clients au profit de la société IDMM dès le début de son exploitation, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations qui établissaient l’existence de manoeuvres déloyales ;

2 / que la captation de la clientèle d’une société, obtenue grâce à des actes préparatoires commis avant qu’un associé ne la quitte pour créer une société concurrente, constitue une manoeuvre déloyale ;

qu’en l’espèce, où la société IDMM, immatriculée le 25 mai 1994, avait réussi à débuter son activité dès le mois de juin 1994, avec des clients jusqu’alors fidèles à la société Conudep, celle-ci indiquait que M. Y… avait nécessairement entrepris, en sous-main, des démarches pour la création de la société IDMM, avant même de quitter la société Conudep, et ce, pour équiper une unité de production, trouver des salariés et une clientèle ; qu’en s’abstenant de rechercher s’il n’en résultait pas un comportement déloyal de la part de M. Y…, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ;

3 / que la recherche d’une confusion pour capter la clientèle d’un concurrent, notamment par la fabrication de produits similaires, constitue un acte déloyal ; qu’en l’espèce, où a été établi que les pièces fabriquées par la société IDMM étaient similaires à celles de Conudep et que sa publicité reproduisait la photographie de pièces ressemblantes à elle, celle-ci qui n’a pas recherché, si en se plaçant dès l’origine de sa création dans le sillage de la société Conudep, la société IDMM n’avait pas adopté un comportement parasitaire, ayant abouti au transfert d’une partie de la clientèle à son profit, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ;

4 / que le dommage découlant d’une concurrence déloyale, ne se déduit pas du seul détournement de clients et d’une perte de chiffre d’affaires ; qu’en l’espèce, où après avoir constaté le démarchage des clients de la société Conudep et un transfert au profit de la société IDMM, la cour d’appel qui a dit qu’il n’en résultait pas de dommage, a méconnu le préjudice intrinsèque subi par Conudep dû à un comportement parasitaire d’IDMM et à la nécessité de prospecter une nouvelle clientèle; qu’en statuant ainsi, elle a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;

5 / que le juge ne peut en aucun cas dénaturer les prétentions des parties qui définissent les termes du litige ; qu’en l’espèce, où dans ses conclusions d’appel, la société Conudep soutenait spécialement que le démarchage de ses clients ainsi que la démission de plusieurs de ses salariés, embauchés par la société IDMM, avaient entraîné une désorganisation de son entreprise, la cour d’appel, qui a cru pouvoir énoncer dans son arrêt que la société Conudep n’alléguait aucun trouble commercial, a violé l’article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que l’arrêt constate que même si M. Y… a certainement mis à profit les connaissances acquises antérieurement, ne sont pas établis un démarchage systématique de la clientèle de la société Conudep ou l’accomplissement de manoeuvres dans ce démarchage ; qu’il retient que si certains clients ont entretenu des relations avec les deux sociétés, certains ont lancé des appels d’offres auxquels la société Conudep n’a pas répond ; qu’il retient encore que la société Conudep ne rapporte pas la preuve de ses affirmations selon lesquelles M. Y… aurait entrepris des démarches concurrentielles avant la cession de ses actions en relevant que l’ordre de mouvement des actions a été signé le 6 avril 1994, que les premières factures émises par la société IDMM concernant des clients communs aux deux sociétés datent du mois de juin 1994, et que les bons de commande produits par la société Conudep pour des clients communs sont postérieurs au début d’activité de la société IDMM ; qu’en l’état de ces constatations, la cour d’appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision, et a pu statuer comme elle a fait ;

Attendu, en deuxième lieu, que l’arrêt relève qu’il ne saurait être reproché à la société IDMM d’exercer son activité dans le même secteur que la société Conudep en fabriquant les mêmes éléments ; que l’arrêt constate que si leurs publicités respectives reproduisent la photographie de pièces ressemblantes, le plagiat, non allégué, n’est pas établi, ces publicités différant en outre totalement sur la présentation des services et compétences offerts ; qu’en l’état de ces énonciations et constatations, la cour d’appel qui a procédé à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en troisième lieu, que l’arrêt ayant écarté tout comportement fautif de la société Conudep et de M. Y…, il en résulte que les motifs relatifs au préjudice de la société Conudep sont surabondants, les critiques des troisième et quatrième branches du moyen sont inopérantes ;

Qu’il suit de là que le moyen n’est pas fondé en ses première, deuxième et troisième branches et ne peut être accueilli pour le surplus ;

Et sur le second moyen :

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt d’avoir déclaré irrecevable l’intervention volontaire de M. X… et de la société Méfina, alors, selon le moyen, qu’une demande formée par voie d’intervention volontaire est recevable lorsque la demande procède de la demande originaire et se justifie au regard de l’évolution du litige ; qu’en l’espèce, où la demande en garantie de M. X… et de la société Méfina, fondée sur l’article 1625 du Code civil, était en lien direct avec la concurrence reprochée à la société IDMM en première instance et se justifiait au regard du trouble invoqué dans la jouissance des actions rachetées, c’est à dire, eu égard à l’évolution du litige, la cour d’appel qui pourtant a écarté leur intervention, a violé l’article 554 du nouveau Code de procédure civile ;

 


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