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Vidéosurveillance : 27 juin 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 23/00201

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Vidéosurveillance : 27 juin 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 23/00201

C4

N° RG 23/00201

N° Portalis DBVM-V-B7H-LVBS

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Monique BOCCARA SOUTTER

la SCP CABINET FORSTER

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 27 JUIN 2023

Appel d’une décision (N° RG 22/00345)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Montélimar

en date du 15 décembre 2022

suivant déclaration d’appel du 09 janvier 2023

APPELANTE :

Madame [Z] [R] ép. [W]

née le 01 Novembre 1967 à [Localité 5] PORTUGAL

de nationalité Portugaise

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Monique BOCCARA SOUTTER, avocat au barreau de PARIS, substituée par Me Philippe GEGLO, avocat au barreau de PARIS,

INTIMEE :

S.A.R.L. FPVFP, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Pierre-Yves FORSTER de la SCP CABINET FORSTER, avocat au barreau de VALENCE, substitué par Me Patricia MOUSSIER, avocat au barreau de VALENCE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gwenaëlle TERRIEUX, Conseillère,

Madame Isabelle DEFARGE, Conseillère,

DÉBATS :

A l’audience publique du 15 mai 2023,

Mme Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente chargée du rapport, et Mme Gwenaëlle TERRIEUX, Conseillère, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistées de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, en présence de M. Victor BAILLY, juriste assistant près la Cour d’appel de Grenoble, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 27 juin 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 27 juin 2023.

Exposé du litige :

Mme [R] épouse [W] a été engagée le 14 avril 2009 en qualité de responsable de magasin de la boutique de [Localité 3] en contrat à durée indéterminée par la SARL FPVFP.

Mme [R] a fait l’objet d’un avertissement le 27 mai 2021 puis d’un second avertissement le 7 juillet 2021 et d’un troisième le 25 octobre 2021.

Mme [R] a été mise à pied à titre conservatoire le 3 novembre 2021 par courrier remis en mains propres et convoquée à un entretien fixé au 15 novembre 2021.

Mme [R] a été licenciée pour faute grave par courrier du 18 novembre 2021.

Mme [R] a saisi le conseil des prud’hommes de Montélimar, en date du 20 janvier 2022 aux fins d’annulation de ses trois avertissements, d’annulation de son licenciement et subsidiairement de le juger sans cause réelle et sérieuse, obtenir des rappels de salaires et des indemnités afférentes.

Par jugement du 15 décembre 2022, le conseil de prud’hommes de Montélimar, a :

Annulé l’avertissement du 7 juillet 2021 car reposant sur un moyen de preuve illicite,

Jugé que Mme [R] n’établit pas les éléments permettant de poser la présomption de harcèlement ; Ainsi que son licenciement ne peut être entaché de nullité en raison d’agissement de harcèlement qui ne peuvent être établis,

Jugé en outre que le licenciement de Mme [R] repose bien sur une faute grave

Jugé que Mme [R] a été réglée de ses heures supplémentaires ; que l’existence d’une dissimulation d’emploi salarié n’est pas établie,

Constaté la violation des minimas conventionnels,

Constaté la régularisation par la SARL FPVFP des rappels de salaires en cours de procédure

Condamné pur autant la SARL FPVFP à Mme [R] la somme de 1000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice résultant du non-respect des minimas,

Jugé que l’installation du système de vidéosurveillance n’a pas fait l’objet des déclarations préalables que son utilisation porte atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles,

Condamné la SARL FPVFP à payer à Mme [R] la somme de 2500 € nets de dommages et intérêts pour atteinte à sa vie privée,

Condamné la SARL FPVFP à payer à Mme [R] la somme de 1000€ nets pour défaut de visites médicales,

Condamné la SARL FPVFP à payer à Mme [R] la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Fixé le salaire moyen mensuel but de Mme [R] à 1764,14 €,

Débouté Mme [R] de toutes ses autres demandes,

Débouté la SARL FPVFP de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Dit n’y avoir lieu à prononcer l’exécution provisoire en application d el’article 515 du code de procédure civile ; Constaté celle de droit,

Condamné la SARL FPVFP aux dépens.

La décision a été notifiée aux parties et Mme [R] en a interjeté appel par le Réseau Privé Virtuel des Avocats en date du 9 janvier 2023 par assignation à jour fixe.

Par conclusions du n°2 du 25 avril 2023, Mme [R] demande à la cour d’appel de :

Rejeter des débats la pièce adverse 3B, l’attestant étant mineur et l’attestation n’ayant pas été autorisée par les parents de l’enfant mineur

Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

Rejeté la demande de Nullité des avertissements des 27 mai ct 25 octobre 2021,

Jugé que Mme [R] n’établit pas les éléments permettant de poser la présomption de harcèlement,

Jugé en conséquence que son licenciement ne peut être entaché de nullité en raison d’agissement de harcèlement,

Jugé que le licenciement de Mme [R] repose bien sur une faute,

Jugé que Mme [R] a été réglée de ses heures supplémentaires,

Jugé que l’existence d’une dissimulation d’emploi salarié n’est pas établie,

Débouté Mme [R] de toutes ses autres demandes

Statuant à nouveau :

Annuler les avertissements du 27 mai, et du 25 octobre 2021,

Juger son licenciement nul,

Condamner la SARL FPVFP à lui payer la somme de 42339 € (24 mois) au titre de l’indemnité pour licenciement nul.

Subsidiairement,

Juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse

Condamner la SARL FPVFP à lui payer les sommes suivantes :

19 405 € (11 mois ) au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

5569,02 € au titre de l’indemnité de licenciement,

3528,28 € (2 mois de salaires) au titre de l’indemnité de préavis,

352,82 € au titre des Congés payés sur période de préavis,

99,78 € au titre des Congés payés sur période de mise à pied conservatoire,

‘ 5 000 € au titre des dommages et intérêts pour harcèlement moral,

‘ 4471,11 € au titre des heures supplémentaires

‘ 447,11 € au titre des congés payés sur heures supplémentaires

‘ 10.584 € au titre du travail dissimulé

‘ 10584 € au titre de la discrimination.

Subsidiairement, Condamner la SARL FPVFP à lui payer la somme de 7533,36 € au titre de la violation du principe à travail égal salaire égal.

Juger que le montant des condamnations sera assorti de l’intérêt légal et portera capitalisation des intérêts,

Confirmer la décision entreprise pour le surplus,

Condamner la SARL FPVFP à lui payer la somme de 3500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par conclusions N°2 et d’appel incident en date du 24 avril 2023 , la SARL FPVFP demande à la cour d’appel de :

La Déclarer recevable et bien fondée en son appel incident,

Réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Montélimar le 15 décembre 2022 en ce qu’il a :

Annulé l’avertissement du 7 juillet 2021 car reposant sur moyen de preuve illicite,

Condamné la SARL FPVFP à payer à Madame [W] [Z] la somme de 1.000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour le préjudice résultant du non-respect des minimas, Condamné la SARL FPVFP à payer à Madame [B] [Z] la somme de 1.000 euros nets pour défaut de visites médicales,

Condamné la SARL FPVFP à payer à Madame [W] [Z] la somme de 1.000 euros nets sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Débouté la SARL FPVFP de sa demande reconventionnelle faite au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamné la SARL FPVFP aux dépens de première instance,

Statuant à nouveau sur ces points :

Juger que l’avertissement du 7 juillet 2021 est fondé et débouter Mme [R] de sa demande d’annulation de l’avertissement du 7 juillet 2021,

Débouter Mme [R] de sa demande de dommages et intérêts pour le préjudice résultant du non-respect des minimas,

Débouter Mme [R] de sa demande de dommages et intérêts pour défaut de visites médicales,

Débouter Mme [R] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

La condamner aux dépens de l’instance,

Confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

Y ajoutant :

Débouter Mme [R] de sa demande de rejet des débats de la pièce 3B communiqué par la SARL FPVFP (attestation de Madame [P] [A]),

Juger que la SARL FPVFP n’a commis aucun acte de discrimination à son encontre,

Débouter Mme [R] des demandes subséquentes suivantes sur lesquelles le jugement entrepris a omis de statuer :

A titre principal : la déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour discrimination liée à leur usine,

A titre subsidiaire : la déboutée de sa demande de dommages et intérêts sur la violation du principe A travail égal salaire égal.

La débouter de la demande formée sur l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d’appel et de sa demande de condamnation aux dépens d’appel,

Condamner Mme [R] à lui verser la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en temps premier instance qu’en cour d’appel et la condamner aux dépens d’appel.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 avril 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI :

Sur la demande de rejet de pièces :

Mme [R] sollicite le rejet des débats de l’attestation de Mme [A], apprentie mineure, du fait de sa minorité.

La SARL FPVFP fait valoir que Mme [A], quoique mineure, a été témoin des faits et donc est parfaitement bien placée pour en attester et que Mme [R] a usé à son encontre de pressions afin qu’elle se rétracte faisant face au refus de celle-ci. Mme [R] versant elle-même par ailleurs aux débats des SMS de Mme [A].

Sur ce,

Vu les dispositions de l’article 201 du code de procédure civile, le mineur qui ne peut être entendu en qualité de témoin, ne peut attester.

Il convient par conséquent de rejeter des débats à la fois l’attestation de Mme [P] [A] mineure (pièce 3b de la SARL FPVFP) et les SMS échangés entre Mme [R] épouse [W] et Mme [P] [A] (pièces 29 et 29-2 de Mme [R] épouse [W]).

Sur la demande d’annulation des avertissements :

Moyens des parties :

Mme [R] sollicite l’annulation de chacun des avertissements notifiés les 27 mai, 7 juillet et 25 octobre 2021. Elle demande la condamnation de son employeur à lui verser la somme de 100 € de dommages-intérêts par avertissement annulé dans la partie discussion de ses conclusions.

Elle fait valoir qu’en 12 ans de relation de travail, elle n’a jamais fait l’objet de la moindre sanction et soutient que ces sanctions ont été notifiées sur la base des seules allégations de Mme [E], fille de l’employeur, avec laquelle elle n’avait aucun lien hiérarchique. Elle conteste les faits reprochés.

La SARL FPVFP fait valoir en réponse que les avertissements sont fondés, que le comportement de la salariée s’est progressivement dégradé et qu’après plusieurs rappels à l’ordre à l’oral, elle a dû se résoudre à notifier des sanctions. Mme [R] reconnaissant les faits qui lui étaient reprochés à chaque fois.

Sur ce,

Les articles L.1333-1 et suivants du code du travail prévoit qu’en cas de litige en matière de sanctions disciplinaires, la juridiction apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction, que l’employeur fournit au conseil des prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction, qu’au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, la juridiction forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles et que si un doute subsiste, il profite au salarié.

Sur l’avertissement du 27 mai 2021 :

Il ressort d’un courrier du 27 mai 2021 que Mme [R] épouse [W] a été sanctionnée par un avertissement pour avoir raccroché au nez de l’employeur par téléphone pour notifier son désaccord aux directives données sur l’organisation de son travail.

Mme [R] épouse [W] ne conteste pas avoir raccroché le téléphone à son employeur mais indique s’être excusée de devoir raccrocher et ne pas avoir dès lors commis de faute.

S’il est constant que Mme [R] épouse [W] n’a pas contesté cet avertissement par écrit auprès de son employeur et qu’elle ne démontre pas l’avoir contesté oralement comme conclu, la SARL FPVFP n’apporte aucun élément démontrant que Mme [R] épouse [W] aurait « raccroché au nez de l’employeur par téléphone pour notifier son désaccord aux directives données sur l’organisation de son travail » comme reproché.

Le doute devant profiter à la salariée, il convient d’annuler cet avertissement par voie d’infirmation du jugement déféré.

Sur l’avertissement du 7 juillet 2021 :

Il ressort d’un courrier du 7 juillet 2021, que la SARL FPVFP a adressé un avertissement à Mme [R] épouse [W] pour ne pas avoir respecté les règles sanitaires mises en place dans le magasin dont elle a la responsabilité à savoir le 2 juillet 2021 à 11 heures 43, avoir accueilli, malgré les nombreux rappels à ce sujet, des clients sans porter le masque et ce pendant toute la durée de la vente.

Mme [R] épouse [W] ne conteste pas les faits reprochés mais conteste le mode de preuve irrecevable à savoir la vidéo surveillance, invoquant par ailleurs la chaleur étouffante du mois de juillet, la vaccination des deux parties à la vente et le défaut de proportionnalité de la sanction compte tenu des faits sanctionnés.

D’une part, l’employeur ne justifie pas avoir rappelé la salariée à l’ordre à de nombreuses reprises sur le port du masque comme reproché.

D’autre part, il est constant que l’employeur a utilisé la vidéo surveillance du magasin non valablement déclarée à la CNIL pour constater le défaut de masque de Mme [R] épouse [W] lors de la vente.

S’il est désormais de jurisprudence constante qu’un élément de preuve obtenu grâce à un moyen illicite est admissible, c’est à la condition, de justifier qu’il existait des raisons concrètes, des indices sérieux permettant de supposer que le salarié a violé ses obligations contractuelles, que l’employeur ne disposait pas d’un moyen moins intrusif et plus respectueux de la vie privée pour obtenir le même résultat, et d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte à la vie privée du salarié outre ses conséquences pour le salarié de cette surveillance.

La SARL FPVFP ne justifie pas qu’il existait des indices sérieux permettant de supposer Mme [R] épouse [W] violait ses obligations contractuelles et qu’elle ne disposait pas d’un moyen moins intrusif et plus respectueux de la vie privée de la salariée que la vidéo surveillance non déclarée et destinée à prévenir les vols en magasin, pour le démontrer.

Par conséquent l’avertissement susvisé basé sur un moyen de preuve illicite et disproportionné compte tenu de son atteinte à la vie privée de Mme [R] épouse [W], doit être annulé par voie de confirmation du jugement déféré.

Sur l’avertissement du 25 octobre 2021 :

Il ressort d’un courrier du 25 octobre 2021 que la SARL FPVFP a adressé un avertissement à Mme [R] épouse [W] pour avoir contesté les décisions de l’employeur et ne pas avoir exécuté la directive adressée par mail du 21 octobre, à savoir faire un inventaire tournant pour la marque CP CIE et de préparer le transfert de marchandises pour le magasin mère à [Localité 4].

Il est constant que Mme [R] épouse [W] a contesté cet avertissement par un écrit en date du 8 novembre 2021 aux termes duquel elle indique avoir obtempéré à la demande d’inventaire de la marque CP immédiatement, que dans l’heure qui a suivi, il a lui a ensuite été demandé de préparer un transfert pour le même produit alors que l’inventaire n’était pas fini, et qu’elle a alors appelé [E] [E] pour lui dire qu’un inventaire et un réassort en même temps pour la même marque n’étaient pas compatibles sauf à commettre des erreurs de stocks.

La SARL FPVFP ne démontre pas que Mme [R] épouse [W] n’a pas effectivement comme elle l’affirme, procédé à la demande d’inventaire.

En outre, le fait pour Mme [R] épouse [W] d’interroger son employeur sur une seconde directive qui lui semble incompatible avec la première en cours d’exécution, ne constitue pas un acte d’insubordination mais entre dans ses obligations de s’assurer de la bonne compréhension et de la bonne exécution des tâches qui lui sont demandées dans l’intérêt de l’entreprise et de l’exécution loyale du contrat de travail.

Mme [R] épouse [W] disposant par ailleurs du droit à émettre des opinions et avis dans le cadre de sa liberté d’expression sauf à démontrer qu’elle a exercé ce droit de manière déplacée et injurieuse, ce qui ne lui est pas reproché en l’espèce.

Il convient par conséquent d’annuler l’avertissement susvisé, faute de démontrer la réalité de faits reprochés par voie d’infirmation du jugement déféré.

Faute pour Mme [R] épouse [W] de solliciter la condamnation de la SARL FPVFP à des dommages et intérêts à ce titre dans le dispositif de ses conclusions, et la cour ne statuant que sur les prétentions visées au dispositif des conclusions au visa de l’article 954 du code de procédure civile, la cour n’est pas saisie de cette demande.

Sur la demande de dommages et intérêts pour non-respect des minimas sociaux :

Moyens des parties :

Mme [R] épouse [W] sollicite un rappel de salaires au titre de la revalorisation des salaires conventionnels et des dommages et intérêts à hauteur de 1000 €. Elle précise que l’employeur s’est acquitté des sommes avec retard à l’adresse de l’ancien cabinet de son conseil.

La SARL FPVFP explique qu’après vérification auprès de son comptable, l’employeur constate qu’en effet les minimas sociaux ont été revalorisés et qu’il s’était déchargé de cette tâche sur son comptable qui pour sa part attendait de son côté que l’employeur l’informe des mises à jour de la convention collective. Il reconnait être redevable de 2 520 € bruts de rappel de salaires outre 250 € de congés payés afférents dont il indique s’être d’ores et déjà acquitté.

L’employeur estime que la demande de dommages et intérêts à ce titre est excessive et que Mme [R] ne démontre pas son préjudice et que si elle s’en était ouverte à la SARL FPVFP de manière amiable, il aurait spontanément réglé le rappel dû.

Il convient de confirmer la décision s’agissant de la constatation du règlement par l’employeur du rappel de salaires et de la réformer sur le quantum de dommages et intérêts, et de condamner la SARL FPVFP à verser à Mme [R] épouse [W] la somme de 250 € à ce titre.

Sur la demande de dommages et intérêts pour non-respect de la visite médicale :

Moyens des parties :

Mme [R] épouse [W] soutient n’avoir bénéficié d’aucune visite médicale depuis son embauche.

La SARL FPVFP qui ne le conteste pas soutient que Mme [R] ne démontre pas l’existence de son préjudice à ce titre.

Sur ce,

En application d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation, faute de démontrer l’existence et l’étendue du préjudice résultant du défaut d’organisation des visites médicales, Mme [R] épouse [W] doit être déboutée de sa demande à ce titre par voie d’infirmation du jugement déféré.

Sur la demande au titre des heures supplémentaires :

Moyens des parties :

Mme [R] soutient que les horaires d’ouverture de la boutique sont 10H-12H30 et 14H-19H du mardi au samedi soit 37 heures 30 par semaine, mais qu’en réalité, étant la seule salariée de la boutique, elle a dû s’occuper de la caisse après la fermeture, et ne pouvait fermer la boutique à 19h30, soit 2 heures supplémentaires non réglées de novembre 2018 à novembre 2021. Elle indique avoir également travaillé pendant 10 ans à la Braderie de 9 H à 12 H et de 13 H à 19 H outre au moment de Noël, le dimanche et le lundi où elle était régulièrement contrainte de travailler.

La SARL FPVFP conteste pour sa part la réalisation par Mme [R] épouse [W] d’heures supplémentaires. Elle soutient que Mme [R] épouse [W] a déjà été réglée des deux heures par jour au-delà des horaires d’ouverture du magasin, le contrat prévoyant 38 heures de travail alors que les heures d’ouverture du magasin couvrent 37 heures 30 par mois. Elle fait valoir que Mme [R] épouse [W] n’apporte pas d’éléments susceptibles de justifier la réalisation d’heures supplémentaires, ni décompte. La SARL FPVFP affirme que Mme [R] épouse [W] a été réglée de ses heures supplémentaires pour les braderies et récupérait ces heures en repos.

Sur ce,

S’agissant des heures supplémentaires, conformément à l’article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; la durée légale du travail, constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l’article L 3121-22 du code du travail, les heures supplémentaires devant se décompter par semaine civile.

Par application de l’article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, le juge formant sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.

Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Par ailleurs, il doit être rappelé que l’absence d’autorisation donnée par l’employeur au salarié pour effectuer des heures supplémentaires est indifférente dès lors que les heures supplémentaires ont été rendues nécessaires par les tâches confiées au salarié.

En l’espèce, Mme [R] épouse [W] verse aux débats les éléments suivants quant aux heures non rémunérées dont elle réclame le paiement :

Les horaires de la boutique : 10 heures- 12 heures30 et 14 heures- 19 heures,

L’attestation de M. [Y], retraité et ancien commerçant voisin de la SARL FPVFP boutique de [Localité 3] qui indique que Mme [R] épouse [W] respectait les horaires d’ouverture de la boutique et n’hésitait pas à rester plus longtemps si elle avait un client,

L’avenant au contrat de travail de Mme [D] pour un temps de travail de 39 heures par semaine

Un mail de M. [E] signé par [E] [E] du 9 septembre 2021 précisant les horaires de la braderie pour le vendredi et samedi pour chaque salarié (9 H-12H et 13 H-19H pour Mme [R] épouse [W]),

Une affiche précisant les horaires d’ouverture du dimanche 16 décembre et du lundi 17 décembre,

Des SMS de son employeur,

Un mail du 28 octobre 2021.

Les documents et pièces ainsi produits par Mme [R] épouse [W], constituent une présentation d’éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’elle prétend avoir accomplies de nature à permettre à l’employeur d’y répondre utilement.

La SARL FPVFP justifie par la production de l’article 5 du contrat de travail et de ses bulletins de salaires de Mme [R] épouse [W] était rémunérée sur la base d’un temps de travail de 38 heures par semaines, durée excédant l’amplitude des horaires de l’ouverture de la boutique.

L’attestation de M. [Y], vague et imprécise, se fondant uniquement sur les horaires d’ouverture de la boutique ne permettant pas de démontrer que Mme [R] épouse [W] dépassait de manière systématique les horaires prévus dans son contrat de travail comme elle le conclut. Elle doit donc être déboutée de sa demande de paiement de 2 heures supplémentaires par mois pendant 3 ans.

Les deux SMS produits aux débats non contestés par l’employeur ne démontrent pas la consigne de celui-ci de devoir rester après l’horaire de fermeture de la boutique, mais seulement qu’une cliente va passer le lendemain matin , et sont donc inopérants s’agissant de la question de la réalisation d’heures supplémentaires.

Le mail du 28 octobre 2021 à 18 H 43 qui concerne « un réassort à donner demain matin » sur certains produits énumérés, vise la matinée du lendemain sans horaire précisé, sachant que Mme [R] épouse [W] est censée accomplir 38 heures par semaine comme prévu dans son contrat de travail. Cet élément étant donc également inopérant.

La SARL FPVFP ne conteste pas que Mme [R] épouse [W] pouvait effectuer des heures supplémentaires ponctuellement en raison des braderies et journées d’ouverture. Si l’employeur verse aux débats des échanges de mails depuis 2019 avec Mme [R] épouse [W] aux termes desquels elle récapitule ses heures supplémentaires et que la SARL FPVFP lui accorde des jours de repos et des modifications d’horaires en rattrapage, l’employeur ne démontre pas comme il lui incombe, que la totalité des heures supplémentaires effectuées du fait des événements commerciaux ponctuels a bien été indemnisée.

Il convient par conséquent par voie d’infirmation du jugement déféré de condamner la SARL FPVFP à payer à Mme [R] épouse [W] la somme de 597,96 € à ce titre outre la somme de 59,79€ au titre des congés payés afférents.

Sur la demande au titre du travail dissimulé :

Moyens des parties :

Mme [R] épouse [W] sollicite une indemnisation à ce titre fondée sur le non paiement de l’intégralité de ses heures supplémentaires.

La SARL FPVFP conteste l’existence d’ heures supplémentaires impayées et affirme que Mme [R] épouse [W] ne rapporte pas la preuve du caractère intentionnel du non-paiement des heures supplémentaires.

Sur ce,

Il résulte des dispositions de l’article L. 8221-5 du code du travail qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L’article L. 8223-1 du code du travail dispose qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Le paiement de cette indemnité suppose de rapporter la preuve, outre de la violation des formalités visées à l’article L.8223-1 du code du travail, de la volonté de l’employeur de se soustraire intentionnellement à leur accomplissement. Ce caractère intentionnel ne peut résulter du seul défaut de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie ni se déduire de la seule application d’une convention de forfait illicite.

En l’espèce, faute de démontrer le caractère intentionnel du travail dissimulé qui ne peut résulter du seul défaut de paiement d’heures supplémentaires, Mme [R] épouse [W] doit être déboutée de sa demande à ce titre par voie de confirmation du jugement déféré.

Sur la demande au titre de l’atteinte à la vie privé du fait de la vidéo surveillance :

Moyens des parties :

Mme [R] épouse [W] soutient que les trois caméras de la boutique installées depuis 2015 selon motif officiel « la sécurité du personnel et à titre dissuasif, pour identifier les vols ou les agressions », n’ont pas été déclarées à la CNIL et que la direction ainsi que Madame [E] [J] [E] pouvaient les visualiser en direct grâce à une application sur leurs portables et les conserver. Madame [E] [J] [E] avait décidé pour intimider salariés et apprentis de leur faire comprendre clairement qu’elle les surveillait en permanence. Mme [R] épouse [W] demande des dommages et intérêts à ce titre.

La SARL FPVFP répond que les caméras étaient présentes avant l’arrivée de Mme [E]- [J] et qu’elles étaient justifiées par les vols dans les boutiques qui proposaient des produits haut de gamme particulièrement convoités, et affairme que Mme [E] ne passait pas son temps à visionner les caméras même si elle admet que le système permettait un visionnage sur ordinateur et application (gérant ayant un problème de santé et Mme [E] étant enceinte de 7 mois).

Sur ce,

Il résulte des dispositions de l’article 9 du code civil que chacun a droit au respect de sa vie privée.

Selon l’article L. 1222-4 du code du travail, aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance.

L’article L.1121-1 du code du travail dispose que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.

En l’espèce il est constant que le système vidéo surveillance de la SARL FPVFP en son établissement de [Localité 3], installé depuis 2015 et comportant trois caméras de surveillance dont l’une orientée vers la caisse, les deux autres à l’entrée et au fond du magasin, n’a pas été valablement déclaré à la CNIL. Il est toutefois admis que Mme [R] épouse [W] avait connaissance de son existence.

La SARL FPVFP qui soutient que le système de vidéosurveillance était justifié par les nombreux vols à déplorer, ne le démontre pas et ne conteste pas que le système permettait de filmer directement les salariés, dont Mme [R] épouse [W] ,à leur poste de travail et qu’il lui était possible de visionner les images sur tout support tel que ordinateur ou téléphone.

Il ressort par ailleurs d’un des avertissements susvisés, annulé, que c’est la caméra vidéo surveillance de la caisse qui a permis à l’employeur de savoir que Mme [R] épouse [W] ne portait pas le masque de protection lors d’une vente et qu’il s’en ait servi pour la sanctionner (date et heure exacte à la minute près).

Il y a par conséquent lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé que ce système de vidéosurveillance ainsi illégalement installé, portait une atteinte disproportionnée à la vie privée de Mme [R] épouse [W], et a condamné la SARL FPVFP à lui verser la somme de 2 500 € de dommages et intérêts à ce titre.

Sur la discrimination fondée sur les origines et subsidiairement la violation du principe d’égalité de rémunération :

Moyens des parties :

Mme [R] soutient avoir été victime de discrimination à raison de son origine et fait valoir au soutien de cette allégation qu’elle a été recrutée au poste de Responsable de boutique avec un salaire de base bien inférieur à celui de Mme [E] et de Mme [D], toutes deux de nationalité française et sur la base d’un volume horaire également inférieur, ses collègues ayant pourtant toutes les deux une ancienneté moindre, et pour Mme [E] des responsabilités et un échelon inférieur. Elle allègue également que lui ont été refusés des augmentations, le statut de cadre, les minimas sociaux n’ont pas été respectés et ses heures supplémentaires non intégralement rémunérées.

La SARL FPVFP conteste toute discrimination et fait valoir que Mme [R] n’avait jamais évoqué une quelconque discrimination pendant la relation de travail et que cette demande est apparue juste avant l’audience de jugement de première instance sans aucun fondement. Elle explique que Mme [E] est Manager d’équipe et par conséquent supérieure hiérarchique de Mme [R] avec un salaire plus élevé justifié, sans que cela soit discriminatoire, que le successeur de Mme [R] a un salaire qui n’excède pas les minimas sociaux comme elle, alors qu’il est un homme d’origine française.

Sur ce,

L’article L. 1132-1 du code du travail prévoit qu’aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

Par ailleurs, l’article L. 1134-1 du code du travail dispose que lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, qu’au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

L’article L.1134-1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige relatif à l’application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Il résulte du principe ‘à travail égal, salaire égal’, dont s’inspirent les articles L.1242-14, L.1242-15, L.2261-22.9 , L.2271-1.8° et L.3221-2 du code du travail, que l’employeur a l’obligation d’assurer une égalité de rémunération entre les salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale sauf à justifier de la disparité de salaire existante par des critères objectifs et étrangers à toute discrimination.

En l’espèce, Mme [R] épouse [W] ne démontre pas comme conclu que lui auraient été refusés le statut de cadre et une augmentation.

Il est en revanche établi que certaines heures supplémentaires de Mme [R] épouse [W] n’ont pas été rémunérées et que la SARL FPVFP a failli au respect des minimas sociaux.

Il ressort des contrats de travail de Mme [R] épouse [W] et de Mme [E] [J] versés aux débats par les parties que la rémunération de départ de la seconde (d’origine française) est supérieure à celle de Mme [R] épouse [W] (d’origine portugaise).

Mme [R] épouse [W] établit ainsi l’existence matérielle de faits pouvant laisser présumer l’existence d’une discrimination à son encontre.

Il incombe dès lors à l’employeur de démontrer que faits établis sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur l’origine.

Il ressort des éléments versés aux débats que :

Mme [R] épouse [W] a été recrutée le 10 avril 2009 en qualité de responsable de magasin pour une rémunération mensuelle brute de 1 650 € pour 151,67 heures plus 176,78 € pour 13 heures supplémentaires à 25 % soit une base hebdomadaire de 38 heures,

Mme [E] a été embauchée le 1er août 2016 en qualité de manageur d’équipes (catégorie VIII) pour une rémunération mensuelle brute de 2 031,09 € pour 151,67 heures par mois.

Il en ressort que non seulement 7 années séparent l’embauche des deux salariés, mais que Mme [E] n’occupe pas le même emploi que Mme [R] épouse [W], qu’elle a des responsabilités sur deux magasins de la SARL FPVFP alors que Mme [R] épouse [W] est la responsable d’un seul des deux magasins ([Localité 3]).

La SARL FPVFP justifie par ailleurs avoir adressé à Mme [R] épouse [W] le 21 décembre 2017, la modification de l’organigramme de l’entreprise, positionnant Mme [E] en sa qualité de manager des équipes, sous la responsabilité directe du gérant, [K] [E], hiérarchiquement supérieure à Mme [R] épouse [W] et au reste des salariés de l’entreprise.

La différence de salaires entre les deux salariées est par conséquent justifiée par une cause étrangère à une discrimination fondée sur l’origine.

Par ailleurs, la SARL FPVFP a produit :

Le projet de contrat de travail signé de M. [G], successeur de Mme [R] épouse [W], de nationalité française qui est rémunéré 1 990 € pour 169 heures par mois, soit non au-delà des minimas sociaux.

Le contrat de travail à temps partiel de Mme [D] en qualité de vendeuse catégorie VIII du 1er septembre 2017 et son les bulletins de salaires de mai 2021 dont il ressort que le taux horaire de base est identique à celui de Mme [R] épouse [W]

S’agissant du non-respect établi des minimas sociaux, M. [U], comptable de la SARL FPVFP atteste dans la procédure qu’il établissait les bulletins de salaires et qu’il n’avait pas constaté que les indices des salaires correspondants aux coefficients avaient changé, la SARL FPVFP justifiant ainsi d’une négligence dans la réévaluation des salaires et de la transmission des informations au comptable.

Il doit être enfin noté que Mme [R] épouse [W] n’a jamais évoqué l’existence d’une discrimination fondée sur son origine au cours de la longue relation contractuelle.

La cour en déduit que le seul défaut de paiement d’heures supplémentaires et le non-respect non intentionnel des minimas sociaux ne sont pas suffisants pour caractériser l’existence d’une discrimination fondée sur l’origine étrangère de la salariée.

S’agissant du non-respect du principe « A travail égal, salaire égal », il a été démontré que Mme [E] [J] n’exerçait pas les mêmes fonctions que Mme [R] épouse [W] et n’avait pas le même niveau hiérarchique, justifiant la différence de rémunération.

Par ailleurs, Mme [D] située au même niveau que Mme [R] épouse [W] dans l’organigramme perçoit un salaire horaire équivalent.

Il y a lieu par conséquent de débouter Mme [R] épouse [W] de sa demande à ce titre.

Sur le harcèlement moral et la demande de nullité du licenciement :

Moyens des parties :

Mme [R] soutient avoir été victime de harcèlement moral de la part de Mme [E] [J], fille de l’employeur et vendeuse. Elle allègue au soutien du harcèlement moral qu’à son arrivée, elle a été rétrogradée et mise au placard, que celle-ci lui donnait des ordres alors qu’elle n’était que vendeuse (rétrogradation), qu’elle subissait de sa part, un flicage constant, des brimades, des remarques humiliantes, publiques et incessantes, des sanctions disciplinaires non fondées et l’affectation systématique à des missions ingrates et dévalorisantes. Elle indique également ne pas avoir pu bénéficier de formation pour combler ses lacunes alors que l’employeur avait l’obligation d’adapter et de développer ses compétences ; elle n’a bénéficié d’aucune augmentation pendant 12 ans et n’était pas rémunérée pour ses heures supplémentaires. Sa détresse et sa souffrance au travail ayant été constatées par le médecin qui la suit.

La SARL FPVFP conteste les faits de harcèlement moral allégués. L’employeur fait valoir que Mme [E] [J] était embauchée et positionnée dans l’organigramme en tant que Manager des équipes et en charge de distribuer le travail auprès des responsables de magasin et des employés. Elle était donc le N+1 de Mme [R] depuis 5 ans au moment du licenciement de cette dernière.

La salariée n’a jamais été de rétrogradée, ses fonctions n’ayant pas été modifiées ni ses attributions. Il a simplement intégré un échelon supplémentaire entre le gérant et Mme [R] épouse [W] et les autres salariés, le poste étant attribué à Madame [E]-[J] afin qu’elle puisse manager les 2 équipes existantes à [Localité 4] et [Localité 3]. La création d’un échelon hiérarchique intermédiaire n’entraine pas un déclassement du salarié qui ne peut invoquer aucune modification de son contrat de travail. Mme [E] n’était pas présente au quotidien sur le magasin de [Localité 3] et la salariée était donc toujours autonome la plupart du temps. L’employeur soutient qu’en réalité la salariée supportait mal les directives et considérait que, du fait de son ancienneté elle n’avait aucune directive à recevoir, le fait que Mme [E] était plus jeune qu’elle, lui posant problème. La SARL FPVFP soutient que Mme [E] a 28 ans et un niveau bac+3 (Bachelor marketing de la mode et du luxe) justifiant son niveau de responsabilité dans l’entreprise.

L’employeur allègue que durant la relation de travail, l’initiative d’utiliser ses droits à la formation appartient au salarié et que Mme [R] n’a fait aucune demande ni entrepris aucune démarche à ce titre.

Sur ce,

Aux termes des articles L.1152-1 et L. 1152- 2 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel et aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

Suivants les dispositions de l’article L 1154-1 du même code, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral; dans l’affirmative, il appartient ensuite à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Le harcèlement moral n’est en soi, ni la pression, ni le surmenage, ni le conflit personnel ou non entre salariés, ni les contraintes de gestion ou le rappel à l’ordre voire le recadrage par un supérieur hiérarchique d’un salarié défaillant dans la mise en ‘uvre de ses fonctions.

Les règles de preuve plus favorables à la partie demanderesse ne dispensent pas celle-ci d’établir la matérialité des éléments de fait précis et concordants qu’elle présente au soutien de l’allégation selon laquelle elle subirait un harcèlement moral au travail.

En application des dispositions de l’article L.1152-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.

Sur le défaut de pouvoir hiérarchique de Mme [E] à l’encontre de Mme [R] épouse [W] et la rétrogradation de Mme [R] épouse [W]  :

Il est démontré que Mme [E] [J] était bien la supérieure hiérarchique de Mme [R] épouse [W] à compter de son entrée dans l’entreprise en 2016 et que Mme [R] épouse [W] n’a subi aucune modification de son contrat de travail de ce fait, que ses fonctions et responsabilités n’ont pas été modifiées, la salariée reconnaissant notamment que Mme [E] ne se déplaçait qu’une fois par semaine au magasin de [Localité 3] qu’elle gérait. La seule mention erronée de la qualité de vendeuse de Mme [E] sur ses les bulletins de salaires ne suffisant à contredire son statut hiérarchique corroboré par son contrat de travail, l’organigramme et l’attestation des salariés et de Mme [N], ancienne salariée, qui confirme que « [Z] (Mme [R] épouse [W]) avait clairement conscience que Mme [E] était la manger des équipes un organigramme était affiché sur la porte de la réserve de [Localité 3]. Elle n’en faisait qu’à sa tête’ ». Ces faits ne sont pas établis.

Sur la dévalorisation et la critique systématique de Mme [E] à l’encontre de Mme [R] épouse [W] et son affectation systématique à des tâches ingrates :

Mme [R] épouse [W] verse aux débats :

L’attestation de Mme [H], vendeuse de la boutique en face de celle de Mme [R] épouse [W] qui explique avoir été témoin de son magasin du ton sec et directif de [E] (Mme [E]) conte [Z] (Mme [R] épouse [W]) et que le 26 octobre 2021, la situation a complètement dégénéré, [E] usant d’un ton plus autoritaire finissant par cirer plus que de parler’ » ;

Les attestations identiques et dactylographiées de 8 commerçants de la rue qui loue le comportement professionnel, agréable et respectueux de Mme [R] épouse [W] ;

L’attestation de M. [T], ancien salarié entre 2012 et 2014 ‘ qui décrit Mme [R] épouse [W] comme calme et mesurée et professionnelle et indique qu’elle avait de bonnes relations avec M. [K] [E] ;

L’attestation de M. [Y], commerçant voisin de la boutique qui affirme avoir entendu le 21 juin 2021, Mme [E] crier et faire des reproches à Mme [R] épouse [W] ;

M. [X], commerçant qui déclare avoir entendu à plusieurs reprises Mme [E] [E] crier en direction de Mme [R] épouse [W], la porte de la boutique étant souvent ouverte.

Il en ressort que Mme [R] épouse [W] ne verse aucun élément permettant d’établir qu’elle était systématiquement affectée à des taches dégradantes.

De plus si les attestations susvisées permettent d’établir que les relations de Mme [R] épouse [W] avec sa supérieure hiérarchique, Mme [E], n’étaient pas bonnes et pouvaient aboutir à des altercations parfois « sonores », il n’est pas démontré que Mme [E] adoptait à l’encontre de Mme [R] épouse [W] un comportement systématiquement dénigrant et dévalorisant et donc inadapté.

Ces faits ne sont pas établis.

S’agissant du défaut de formation, Mme [R] épouse [W] a bénéficié, contrairement à ce qu’elle conclut, d’une formation de deux jours (26 et 27 février 2018) intitulée « gestion informatique habillement de la personne » au sein de l’entreprise à [Localité 4]. Ce fait n’est donc pas établi.

Il est en revanche établi que :

Certaines heures supplémentaires n’ont pas été rémunérées ;

Les minimas sociaux n’ont pas été respectés ;

La SARL FPVFP a utilisé la vidéo surveillance non déclarées à la CNIL pour observer Mme [R] épouse [W] à son poste de travail pour la sanctionner et a porté atteinte à sa vie privée ;

Mme [R] épouse [W] n’a pas bénéficié de réévaluation de son salaire à la hausse ;

Mme [R] épouse [W] n’a pas bénéficié d’évaluation professionnelle ;

Mme [R] épouse [W] a fait l’objet de trois avertissements en 2021 ont jugés non fondés et annulés par la présente cour.

Mme [R] épouse [W] établit ainsi l’existence matérielle de faits précis, concordants et répétés, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral à son encontre.

Il incombe dès lors à la SARL FPVFP de démontrer que les faits ainsi établis sont étrangers à tout harcèlement moral.

Si le non-respect des minimas-sociaux constitue la résultat d’une négligence conjuguée de l’employeur et de son comptable, la SARL FPVFP ne donne aucun élément permettant de justifier par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral, les autres faits ci-dessus établis.

La cour constate que les sanctions disciplinaires annulées dans la présente instance, ont été infligées sur seulement quelques mois alors que Mme [R] épouse [W] n’avait pas d’antécédents disciplinaires dans le cadre d’une relation contractuelle de plus de 12 années, et que la salariée a fait l’objet d’une surveillance illégitime par le biais d’une vidéo surveillance par ailleurs non valablement déclarée à la CNIL.

Il convient par conséquent de juger que Mme [R] épouse [W] a été victime de harcèlement moral de la part de son employeur par voie d’infirmation du jugement déféré.

Il convient de condamner la SARL FPVFP à payer à Mme [R] épouse [W] la somme de 5 000 € de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

En application de l’article L.1152-3 du code du travail, le licenciement intervenu dans ce contexte est nul par voie d’infirmation du jugement déféré.

Il convient de condamner la SARL FPVFP à verser à Mme [R] épouse [W], la somme de 21 169,68 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a :

INFIRME le jugement déféré excepté en ce qu’il a :

Annulé l’avertissement du 7 juillet 2021 car reposant sur un moyen de preuve illicite,

Jugé que l’existence d’une dissimulation d’emploi salarié n’est pas établie

Constaté la violation des minimas conventionnels

Constaté la régularisation par la SARL FPVFP des rappels de salaires en cours de procédure

Jugé que l’installation du système de vidéosurveillance n’a pas fait l’objet des déclarations préalables que son utilisation porte atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles

Condamné la SARL FPVFP à payer à Mme [R] la somme de 2500 € nets de dommages et intérêts pour atteinte à sa vie privée

Condamné la SARL FPVFP à payer à Mme [R], la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Fixé le salaire moyen mensuel but de Mme [R] à 1764,14€

Débouté la SARL FPVFP de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Dit n’y avoir lieu à prononcer l’exécution provisoire en application de l’article 515 du code de procédure civile ; Constaté celle de droit

Condamné la SARL FPVFP aux dépens.

L’INFIRME pour le surplus,

STATUANT à nouveau sur les chefs d’infirmation,

Y ajoutant,

REJETE des débats l’attestation de Mme [P] [A] mineure (pièce 3b de la SARL FPVFP) et les SMS échangés entre Mme [R] épouse [W] et Mme [P] [A] (pièces 29 et 29-2 de Mme [R] épouse [W]),

ANNULE l’avertissement notifié à Mme [R] épouse [W] le 27 mai 2021,

ANNULE l’avertissement notifié à Mme [R] épouse [W] le 7 juillet 2021,

DIT que la cour n’est pas saisie d’une demande de dommages et intérêts au titre de l’annulation des avertissements,

DEBOUTE Mme [R] de sa demande de dommages et intérêts pour défaut de visite médicale,

CONDAMNE la SARL FPVFP à payer à Mme [R] épouse [W] la somme de 250 € de dommages et intérêts pour non-respect des minimas sociaux,

DEBOUTE Mme [R] épouse [W] de ses demande au titre de la discrimination fondée sur l’origine et sur la violation dommages et intérêts principe « A travail égal, salaire égal »,

DIT que Mme [R] épouse [W] a été victime de harcèlement moral de la part de la SARL FPVFP,

ANNULE son licenciement,

CONDAMNE la SARL FPVFP à payer à Mme [R] épouse [W] les sommes suivantes :

597,96 € au titre des heures supplémentaires impayées outre la somme de 59,79 € au titre des congés payés afférents,

5 000 € de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

21 169,68 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.

ORDONNE la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343 -2 du code

civil,

CONDAMNE la SARL FPVFP à payer à Mme [R] épouse [W], la somme de

2 500 € à sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

CONDAMNE la SARL FPVFP aux dépens exposés en cause d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été

préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de

procédure civile.

Signé par Madame Valéry Charbonnier, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame

Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate

signataire.

La Greffière, La Conseillère faisant fonction de Présidente,

 


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