Bail d’habitation : 28 septembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/00596

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Bail d’habitation : 28 septembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/00596
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 28 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/ 413

N° RG 20/00596

N° Portalis DBVB-V-B7E-BFN3Z

[D] [W]

C/

[G] [R] veuve [W]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Jérôme PASCHAL

Me Jean Baptiste GOBAILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d’Instance d’AIX EN PROVENCE en date du 13 Décembre 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-18-0009.

APPELANTE

Madame [D] [W]

née le 30 Mai 1965 à [Localité 3], demeurant [Adresse 1]

représentée et plaidant par Me Jérôme PASCHAL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Madame [G] [R] veuve [W]

née le 08 Septembre 1932 à [Localité 2], demeurant [Adresse 4]

représentée et plaidant par Me Jean Baptiste GOBAILLE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Septembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Septembre 2022, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE

Aux termes d’un premier jugement rendu le 17 juin 2016 et désormais définitif, le tribunal d’instance d’Aix-en-Provence a jugé que les parties étaient liées par un bail d’habitation verbal portant sur un appartement de type 3 au sein d’un immeuble en copropriété dénommé résidence ‘Lou Vedigane’ situé [Adresse 1], moyennant un loyer mensuel de 400 euros.

Il y a lieu de préciser que Madame [G] [R] veuve [W] est par ailleurs usufruitière de ce bien immobilier depuis le décès de son époux survenu le 14 novembre 2010, tandis que sa fille [D] [W] en détient la nue-propriété indivisément avec sa soeur [Y].

Le 17 août 2017, Madame [G] [W] a fait délivrer à sa fille une sommation de payer les loyers échus et de justifier d’une assurance couvrant les risques locatifs.

Faute d’obtenir satisfaction, elle l’a ensuite assignée à comparaître devant le tribunal d’instance par acte du 28 juin 2018 pour entendre prononcer la résiliation judiciaire du bail et ordonner son expulsion.

Madame [D] [W] a conclu avant dire droit à l’organisation d’une expertise psychiatrique à l’effet de déterminer si sa mère était en capacité d’agir en justice.

Subsidiairement elle a reconnu l’existence d’une dette locative de 8.930 euros, mais s’est opposée à la résiliation du bail en sollicitant l’octroi de délais de paiement.

Par jugement rendu le 13 décembre 2019, le tribunal a :

– rejeté la demande d’expertise,

– prononcé la résiliation du bail d’habitation pour cause de défaut de paiement du loyer, et ordonné en conséquence l’expulsion de [D] [W] et de tous occupants de son chef,

– condamné l’intéressée au paiement d’une somme de 10.830 euros au titre de la dette locative arrêtée au 31 octobre 2019, lui accordant cependant la faculté de se libérer en 24 mensualités,

– fixé une indemnité d’occupation de 400 euros par mois, charges en sus, jusqu’à la libération effective des lieux,

– et condamné la défenderesse aux entiers dépens.

Le premier juge a refusé toutefois de prononcer l’exécution provisoire de sa décision.

Durant le cours du délibéré, un incendie s’est déclaré dans l’appartement le 13 novembre 2019, causant des dommages importants et nécessitant le relogement des occupants. Par la suite un rapport d’expertise diligenté à l’initiative de la compagnie BPCE, assureur de la locataire, a conclu que la cause du sinistre restait indéterminée.

Madame [D] [W], qui a reçu signification du jugement le 20 décembre 2019, a interjeté appel par déclaration adressée le 14 janvier 2020 au greffe de la cour.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions d’appel notifiées le 21 janvier 2020, Madame [D] [W] invoque le fait nouveau résultant de l’incendie, et soutient que celui-ci aurait été causé par un vice de construction ou un défaut d’entretien, de nature à l’exonérer de sa responsabilité. Elle fait également grief à sa mère d’avoir omis d’assurer le bien.

Aux termes du dispositif de ces mêmes écritures elle demande à la cour de constater l’apurement de la dette locative, de réformer le jugement entrepris, et de dire n’y avoir lieu à résiliation du bail, non plus qu’à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives notifiées le 1er juin 2022, Madame [G] [R] veuve [W] fait valoir que les moyens invoqués au soutien de l’appel sont irrecevables dès lors qu’en vertu de l’article 954 du code de procédure civile la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions, et qu’en tout état de cause le sinistre survenu le 13 novembre 2019 ne saurait exonérer la locataire de sa dette, étant précisé qu’aucun paiement n’est intervenu depuis l’audience tenue devant le premier juge, et que le loyer continue à courir à défaut de restitution des lieux.

Elle demande à la cour de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a prononcé la résiliation du bail, ordonné l’expulsion de [D] [W] et condamné celle-ci au paiement de la somme de 10.830 euros au titre de la dette locative arrêtée au 31 octobre 2019.

Elle conclut en revanche à l’infirmation de la décision quant à l’octroi de délais de paiement ainsi qu’à sa réformation s’agissant du montant de l’indemnité d’occupation, qu’elle demande de fixer à 800 euros par mois, charges en sus.

Y ajoutant, elle réclame paiement d’une somme de 12.800 euros au titre des loyers échus entre novembre 2019 et juin 2022, à parfaire à la date du prononcé de l’arrêt.

Elle demande également paiement d’intérêts au taux légal sur chacune des échéances impayées, capitalisés dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.

Elle entend d’autre part mettre en cause la responsabilité de la locataire sortante du fait de l’incendie sur le fondement de l’article 1733 du code civil, et précise qu’elle n’a perçu à ce jour aucune indemnité de la part des assureurs.

Elle demande en conséquence à la cour de condamner la partie adverse, sous peine d’astreinte, à exécuter à ses frais l’intégralité des travaux de remise en état de l’appartement, ou subsidiairement à lui payer à ce titre la somme provisionnelle de 45.000 euros, sauf à ordonner préalablement une mesure d’expertise judiciaire.

Elle réclame également paiement d’une somme de 800 euros par mois en réparation de l’impossibilité de remettre le logement en location, et ce jusqu’à la fin des travaux.

Elle sollicite enfin paiement d’une indemnité de 2.400 euros au titre de ses frais irrépétibles exposés en première instance, et de 7.500 euros au titre de ceux exposés en cause d’appel, outre ses dépens.

DISCUSSION

Sur la résiliation du bail :

En vertu de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions. Or en l’espèce force est de constater qu’aux termes du dispositif de ses conclusions d’appel Madame [D] [W] ne tire aucune conséquence juridique des moyens qu’elle invoque dans la discussion.

La cour entend néanmoins préciser que la résiliation du bail ne résulte pas de la perte de la chose louée, qui n’a été détruite qu’en partie selon le rapport d’expertise diligenté par la compagnie BPCE ASSURANCES, mais du défaut de paiement du loyer, en violation d’une obligation essentielle incombant au locataire, étant précisé que celui-ci a perduré au delà de la décision rendue en première instance puisqu’il n’est justifié d’aucun règlement depuis l’audience tenue devant le premier juge.

Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du bail aux torts exclusifs de la locataire et ordonné son expulsion, la date d’effet de cette résiliation étant fixée au jour de son prononcé, soit le 13 décembre 2019.

Sur la dette locative :

En aucun cas l’incendie de l’appartement ne saurait exonérer [D] [W] de sa dette locative antérieure, fixée à la somme de 10.830 euros par une disposition non contestée du jugement, les intérêts au taux légal devant courir à la date de son prononcé conformément au droit commun, et pouvant être capitalisés dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.

L’échéancier de paiement accordé par le premier juge sera confirmé, ainsi que la clause de déchéance figurant au dispositif en cas de défaut de règlement d’une seule mensualité.

En revanche aucun loyer ni indemnité d’occupation ne sont dus postérieurement au sinistre dès lors qu’il est constant que la locataire a été totalement privée de la jouissance des lieux, l’appartement étant demeuré inhabitable jusqu’à ce jour.

Sur la réparation des conséquences de l’incendie :

Suivant l’article 910-4 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties à l’instance d’appel doivent présenter dès leurs premières conclusions l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. Demeurent néanmoins recevables les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses, ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

En l’espèce les premières conclusions notifiées par l’intimée le 22 avril 2020, alors qu’elle avait d’ores et déjà connaissance du rapport d’expertise diligenté à la demande de la compagnie BPCE, tendaient uniquement à réserver ses droits indemnitaires en lien avec le sinistre ‘en cas d’évolution du litige en cours de procédure’, ce qui ne constitue pas une prétention.

Ce n’est que le 1er juin 2022, quelques jours seulement avant le prononcé de l’ordonnance de clôture, que Madame [G] [W] a notifié de nouvelles conclusions tendant à la réparation des conséquences de l’incendie, alors qu’aucun fait nouveau n’était survenu entre-temps.

Il convient en conséquence de déclarer d’office ces prétentions irrecevables.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a condamné Madame [D] [W] au paiement d’une indemnité d’occupation,

Statuant à nouveau, déboute Madame [G] [R] veuve [W] de sa demande formée de ce chef,

Y ajoutant, dit que le montant de la dette locative produira intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, lesquels seront capitalisés dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil,

Déclare irrecevables les demandes de Madame [G] [W] tendant à la réparation des conséquences de l’incendie,

Condamne Madame [D] [W] aux dépens de l’instance d’appel, ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés par l’intimée.

LA GREFFIERELE PRESIDENT

 


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