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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-8
ARRÊT AU FOND
DU 19 OCTOBRE 2022
N° 2022/ 451
RG 19/04412
N° Portalis DBVB-V-B7D-BD6YA
[V] [X]
C/
[G] [W]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Françoise BOULAN
Me Charles TOLLINCHI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal d’Instance de FREJUS en date du 29 Janvier 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-18-0375.
APPELANT
Monsieur [V] [X]
né le 31 Juillet 1931 à [Localité 6] (MAROC), demeurant [Adresse 1] – [Localité 3]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2019/3271 du 26/04/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)
représenté par Me Françoise BOULAN, membre de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIME
Monsieur [G] [W]
né le 13 Juillet 1935 à [Localité 8] (68), demeurant [Adresse 2] – [Localité 4]
représenté par Me Charles TOLLINCHI, membre de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Philippe COULANGE, Président
Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère
Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Octobre 2022.
ARRÊT
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Octobre 2022, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Par acte sous seing privé en date du 29 juillet 2014, M.[W] a consenti un bail d’habitation non meublé avec prise d’effet au 1er août 2014, à M. [X] portant sur un appartement sis [Adresse 5] à [Localité 7]. Le montant du loyer est fixé à la somme de 730€.
Par exploit d’huissier signifié à personne en date du 1er mars 2018, M. [X] se plaignant de troubles de jouissance du bien loué a assigné son bailleur devant le tribunal d’instance de FREJUS, qui par jugement rendu le 29 janvier 2019, a :
DEBOUTE M. [X] de l’intégralité de ses demande, aux motifs que les réparations dont il demande remboursement lui incombaient et qu’il n’établit pas de lien de causalité entre les fissures du sol de l’entrée et sa chute et donc le trouble de jouissance allégué,
CONDAMNE M. [X] à verser à M. [W] la somme de 800 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens,
DEBOUTE le défendeur pour le surplus;
ORDONNE l’exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration au greffe en date du 15 mars 2019, M. [X] a interjeté appel de cette décision.
Il sollicite :
Statuant sur son appel à l’encontre de la décision rendue le 29 janvier 2019 par le Tribunal d’Instance de FREJUS,
Le déclarant recevable et bien fondé,
Y faisant droit,
INFIRMER la décision entreprise en ce qu’elle a :
– Débouté M. [X] de l’intégralité de ses demandes,
– L’a condamné à verser à M.[W] la somme de huit cents euros (800 euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– L’a débouté pour le surplus
Statuant à nouveau,
DIRE ET JUGER que M.[W] a manqué à ses obligations lui incombant conformément à l’article 1719 du Code civil.
CONDAMNER M.[W] à lui verser les sommes suivantes :
– 10.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance,
– 69,00 € au titre du remboursement des frais de remplacement du mitigeur et du flexible.
CONDAMNER M. [W] à lui payer, la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de 1ère instance et d’appel, ceux d’appel distraits au profit de Maître Françoise BOULAN, membre de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, Avocats associés aux offres de droit.
A l’appui de son recours, il fait valoir :
– que depuis son entrée dans les lieux il s’est plaint du mauvais état du carrelage lui occasionnant des chutes alors qu’il est âgé de 90 ans,
– que ce mauvais état du carrelage concerne d’autres appartements dans la co-propriété,
– qu’en dépit d’une première réparation du sol en 2016 après deux chutes dont une avec témoins, la barre de seuil reste dangereuse pour une personne de son âge,
– qu’il a subi une nouvelle chute après cette réparation,
– que depuis un accident subi en mars 2020, le risque est amplifié parce qu’il doit se déplacer avec un déambulateur ou des béquilles,
– que le bailleur a tardé à agir et que son action est restée inefficace,
– que la défaillance du mandataire du bailleur ne saurait exonérer ce dernier de ses obligations,
– que le bailleur doit lui rembourser le remplacement du mitigeur et du flexible.
M. [W] conclut :
CONFIRMER le jugement entrepris, puis statuant à nouveau :
CONSTATER que l’appartement loué par M. [W] est parfaitement entretenu ;
CONSTATER que les désordres allégués par M. [X] portant sur le carrelage du séjour de l’appartement pris à bail ne sont pas démontrés ;
CONSTATER que M. [X] ne démontre pas la causalité des chutes allégués dans l’appartement pris à bail avec les désordres décrits ;
CONSTATER que M. [X] ne démontre pas la réalité du préjudice revendiqué ;
Par suite,
DIRE ET JUGER que M. [W] a satisfait à l’ensemble de ses obligations en qualité de bailleur de l’appartement pris à bail par M. [X] ;
En conséquence,
DEBOUTER M. [X] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées contre M. [W].
EN TOUT ETAT DE CAUSE,
CONDAMNER M. [X] à payer à M. [W] la somme de 5.000€ en raison du caractère abusif de la procédure ;
CONDAMNER M. [X] à payer à M. [W] la somme de 4.000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens ;
Il soutient :
– que l’état des lieux d’entrée indique que le carrelage du séjour est en bon état à l’exception de quelques fissures,
– que le locataire s’est plaint de ces fissures à compter de septembre 2015,
– que le locataire ne démontre pas la réalité du trouble de jouissance allégué,
– que le locataire n’établit pas le lien de causalité entre les fissures et les chutes alléguées, que seul le témoignage de Mme [U] fait ce lien alors qu’il s’agit d’une amie, qui s’est portée caution solidaire du bail, et qu’il n’est étayé par aucun document médical,
– que le remplacement d’un mitigeur et de son flexible relève des menues réparations incombant au locataire.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 15 juin 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur les demandes principales
Aux termes des dispositions de l’article 1719 du code civil, le bailleur a une obligation par la nature du contrat de louage et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière d’assurer la jouissance paisible à son locataire de la chose louée pendant la durée du bail.
Il n’aura pas à répondre des vices et défauts connus du locataire avant conclusion du bail ou lorsque ceux-ci étaient notoires sauf si ceux-ci se sont ensuite amplifiés au point d’empêcher, alors, une jouissance paisible des lieux loués.
Le locataire doit démontrer qu’il est troublé dans la jouissance paisible des lieux loués, que ce trouble porte sur le bien principal, objet de la location, ou sur ces accessoires dans la mesure où ces derniers contribuent à l’usage des lieux loués attendu du locataire.
Le locataire prétend que du fait de fissures sur le carrelage du séjour et des chutes qu’elles ont occasionnées, il n’a pu occuper normalement cet espace, ce qui lui a occasionné un préjudice de jouissance.
L’état des lieux d’entrée effectué le 4 août 2014 indique concernant le carrelage du séjour qu’il est ‘bon fissures’, sans précision ni sur leur nombre ni sur leur nature, soit esthétique soit compromettant la solidité de l’ouvrage. Il importe peu à ce titre que d’autres co-propriétaires du même immeuble attestent avoir dû procéder à des réfections du carrelage du fait d’un affaissement du sol, en effet ces attestations sont insuffisantes à établir un tel affaissement dans le bien objet du bail. Le locataire ne produit aucun constat d’huissier.
Seule l’attestation de Mme [U] le 11 novembre 2016 fait un lien entre l’état du carrelage et une chute du locataire en mars 2016 soit six mois plus tôt, pour autant cette attestation n’est corroborée par aucun document médical.
Si le certificat médical du docteur [H] du 22 septembre 2016 relate les dires du locataires relatifs à une chute le 16 septembre 2016 et fait un bilan lésionnel avec une ITT de 3 jours, il ne permet pas d’établir le lien de causalité entre ce bilan et l’état du carrelage du séjour du bien loué.
De même l’ordonnance du 7 août 2017, qui prescrit des soins à domicile durant 4 semaines, ne permet pas davantage d’établir ce lien.
Le certificat du docteur [Z], dont la date est illisible, qui indique que le sol du logement de M.[X] ‘PEUT’ présenter un risque de chute, ne suffit pas à établir le lien de causalité entre les chutes alléguées et ce sol.
Enfin, le rapport du centre d’imagerie du 7 janvier 2022 fait un état du matériel d’ostéosynthèse hanche gauche mais n’est pas de nature à lier cet état à une chute, qui plus est due au sol du séjour de son logement.
De plus le 25 septembre 2016 des travaux ont été réalisés et le locataire ne justifie nullement que ces travaux maintiennent la dangerosité alléguée du sol.
En effet, s’il résulte des attestations versées aux débats que les travaux ont créé une petite marche entre le séjour et la cuisine et l’entrée, rien n’indique que cette petite marche soit non conforme et dangereuse pour un locataire, ni qu’une faute de réalisation ait été commise imputable au bailleur.
Ainsi, en l’absence de preuve de l’existence d’un manquement du bailleur à ses obligations contractuelles, c’est à juste titre que le premier juge a rejeté la demande indemnitaire du locataire au titre du préjudice de jouissance allégué.
Par ailleurs, l’article 7d) de la loi du 6 juillet 1989 met à la charge du locataire l’entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et des menues réparations ainsi que l’ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d’Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure.
Les réparations locatives sont définies par le décret n°87-712 du 26 août 1987.
Le remplacement du mitigeur et de son flexible sont des menues réparations à la charge du locataire, qui ne rapporte pas la preuve d’avoir dû les changer du fait de leur vétusté ou d’une malfaçon.
En conséquence c’est valablement que le premier juge a débouté le locataire de sa demande en remboursement.
Sur la demande indemnitaire en procédure abusive
L’exercice d’une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à dommages et intérêts qu’en cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollent au dol.
En l’espèce, M. [W] ne rapporte pas la preuve de l’abus qu’il invoque et sera débouté de sa demande à ce titre.
Sur les autres demandes
M. [X] est condamné à 1 000 € d’article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 29 janvier 2019 par le Tribunal d’instance de FREJUS,
Y ajoutant
CONDAMNE M.[X] à régler à M.[W] la somme de 1 000€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure Civile,
CONDAMNE M.[X] aux entiers dépens de l’appel.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT