Secret des correspondances : 15 novembre 2011 Cour d’appel de Paris RG n° 11/00538

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Secret des correspondances : 15 novembre 2011 Cour d’appel de Paris RG n° 11/00538
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15 novembre 2011
Cour d’appel de Paris
RG n°
11/00538

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 1

ARRET DU 15 NOVEMBRE 2011

(n° 345, 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 11/00538

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2006 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 05/14247

APPELANTE :

Madame [N] [E]

[Adresse 4]

[Localité 7]

représentée par Me Nadine CORDEAU, avoué à la Cour

assistée de Maître Anne COLONNA, avocat au Barreau de Paris substituant Me Olivier HILLEL, avocat au barreau de PARIS, toque : E0257

INTIMES :

Maître [S] [D]

[Adresse 8]

[Localité 6]

représenté par la SCP BOMMART FORTSER FROMANTIN, avoués à la Cour

assisté de Me Jean-Pierre CORDELIER plaidant pour la SCP CORDELIER-RICHARD-JOURDAN, avocats au barreau de PARIS – Toque P399

LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentées par la SCP BOMMART FORTSER FROMANTIN, avoués à la Cour

assistées de Me Jean-Pierre CORDELIER plaidant pour la SCP CORDELIER-RICHARD-JOURDAN, avocats au barreau de PARIS – Toque P399

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 28 septembre 2011, en audience publique, le rapport entendu conformément à l’article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :

Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre

Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller

Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sabine DAYAN

ARRET :

– contradictoire

– rendu publiquement Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur François GRANDPIERRE, président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

***************

La Cour,

Considérant que, reprochant à M. [S] [D], avocat, d’avoir commis des négligences et des fautes graves en laissant prescrire l’action en recouvrement des loyers impayés au titre des années 1991, 1992 et 1993, en laissant prescrire, lors du renouvellement du bail au mois d’avril 1994, l’action en fixation du loyer à sa valeur locative et en donnant des informations erronées sur les conséquences du rachat de la part indivise de M. [L] [R], Mme [N] [E], propriétaire d’un immeuble à usage commercial, a saisi le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 15 mars 2006, a condamné M. [D] à lui payer les sommes de 30.000 euros et de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts, outre les intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts, ainsi que la somme de 4.000 euros en vertu des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens ;

Considérant qu’appelante de ce jugement, Mme [E], qui en poursuit l’infirmation, demande que M. [D] et Mutuelles du Mans Assurances soient condamnés à lui payer :

– au titre des arriérés de loyers, la somme de 44.826,65 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation,

– au titre du déplafonnement, la somme de 189.388,58 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de chaque échéance de loyer,

– au titre des travaux de mise en conformité, la somme de 32.531,64 euros,

– au titre du protocole conclu avec l’U.C.B., la somme de 92.174 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation,

– à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et financier, la somme de 100.000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation,

– outre la capitalisation des intérêts ;

Qu’à l’appui de ses prétentions, Mme [E] fait valoir, comme en première instance, que M. [D] a commis des négligences de nature à engager sa responsabilité civile professionnelle 1° en laissant prescrire l’action tendant au recouvrement des loyers afférents à la période comprise entre le 1er septembre 1987 et le 13 janvier 1994, 2° en laissant prescrire, lors du renouvellement du bail, au mois d’avril 1994, l’action en fixation du loyer à sa valeur locative et ce, en ne saisissant pas le juge des loyers commerciaux ou en n’interrompant pas le délai de prescription biennale et 3° en lui donnant des informations erronées sur les conséquences financières du rachat de la part de M. [R], compte tenu notamment de l’inscription d’hypothèque prise par l’U.C.B. ; qu’elle souligne que ces trois fautes lui ont causé un préjudice matériel dont elle fournit le détail et le mode de calcul, ainsi qu’un préjudice moral et financier ;

Considérant que M. [D] et les Mutuelles du Mans Assurances, son assureur, qui demandent que soient écartées des débats les lettres d’avocats couvertes par le secret professionnel dans les conditions fixées par l’article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée, concluent d’abord à l’irrecevabilité de la demande de payement de charges de copropriété, d’un montant de 32.531,64 euros comme étant prescrite et présentée pour la première fois en cause d’appel et, au demeurant non fondée ;

Que, pour le surplus et formant appel incident, M. [D] et les Mutuelles du Mans Assurances demandent que Mme [E] soit déboutée de toutes ses réclamations ;

Qu’à cette fin, les intimés approuvent les premiers juges qui ont décidé de rejeter les demandes présentées au titre d’une majoration du loyer en renouvellement du bail, incompatible avec la poursuite de la résiliation de ce bail, au titre des sommes payées à l’U.C.B. et à la S.N.B.V., dont Mme [E] était personnellement redevable, au titre des dépenses exposées en vue de maintenir l’immeuble dans son patrimoine alors qu’elle connaissait les engagements pris à l’égard des établissements bancaires ; qu’ajoutant qu’à la date du 1er avril 1996, date à laquelle la prescription biennale était opposable, la société Paradiso était débitrice envers Mme [E] de la somme de 123.341,48 francs réclamée par le commandement visant la clause résolutoire, ils font valoir que M. [D] n’a commis aucune faute en saisissant le juge des référés et engageant une procédure poursuivie par son successeur dès lors que, malgré une situation confuse sur le plan comptable, la procédure de référé a permis le versement d’une somme de 120.000 francs au titre de l’arriéré de loyers, ledit versement valant reconnaissance de dette et, partant, interrompant la prescription ; qu’en outre, ils soutiennent que, lorsque, le 30 juin 1998, M. [D] a cessé ses fonctions, étaient à recouvrer des loyers dus depuis moins de cinq ans de sorte que l’action n’était pas prescrite et qu’en conséquence, Mme [E] n’a subi aucun préjudice lié à une prétendue perte de chance de recouvrer des loyers ; qu’ils en déduisent qu’à ce titre, la demande de Mme [E] n’est pas fondée ;

Que les intimés ajoutent que le préjudice moral et financier allégué par Mme [E] trouve sa cause non pas dans le défaut de diligences, prétendument fautif, imputé à M. [D], mais dans des circonstances étrangères à l’intervention de cet avocat ;

Que les Mutuelles du Mans Assurances, qui, selon elles, ne seraient visées par aucune demande, accorde néanmoins sa garantie à M. [D], sous réserve d’une franchise de 10 % du montant du sinistre dans la limite de 3.049 euros opposée aux tiers ;

En fait :

Considérant que, le 25 mai 1982, M. [R] et Mme [E] ont acquis, chacun pour moitié indivise, un immeuble sis [Adresse 3]) moyennant le prix de 250.000 francs (38.112,25 euros), payé à hauteur de 200.000 francs (30.489,80 euros) à l’aide d’un crédit consenti par l’Union de crédit pour le bâtiment, dite U.C.B., et la Compagnie française d’épargne et de crédit ;

Que, le 20 juillet 1984, M. [R] et Mme [E] ont donné l’immeuble à bail à la société Paradiso, exploitant un restaurant, pour une durée de neuf années à compter du 1er septembre 1984 et moyennant un loyer annuel de 36.000 francs (5.488,16 euros), hors taxe ;

Que, par jugement du 14 novembre 1989, le Tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure simplifiée de redressement à l’égard de M. [R], désigné M. [U] [V] en qualité de représentant des créanciers, puis prononcé la liquidation et désigné M. [V] en qualité de liquidateur ;

Que, le 10 décembre 1993, Mme [E] a fait délivrer à la société Paradiso un commandement de payer la somme de 123.341,48 francs (18.803,29 euros) correspondant à l’arriéré de loyers et, par ce même acte, invoqué la clause résolutoire du bail ;

Que, le 7 janvier 1994, la société Paradiso a fait signifier à M. [V], ès qualités de liquidateur de M. [R], et à Mme [E] une demande de renouvellement du bail ; que la société Paradiso et Mme [E] se sont vu signifier un refus pour motif grave et légitime, M. [V] se prévalant du défaut de payement régulier des loyers malgré le commandement de payer ;

Que, par acte authentique du 27 septembre 1995, M. [V], ès qualités de liquidateur de M. [R], a vendu à Mme [E] la moitié indivise de M. [R] dans l’immeuble moyennant le prix de 500.000 francs (76.224,51 euros) payé à l’aide d’un prêt de même montant consenti par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Brie ;

Que, le 15 mars 1996, Mme [E], représentée par M. [D], avocat, a fait assigner la société Paradiso en payement d’une provision et en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire devant le juge des référés qui, par ordonnance rendue le 22 mai 1996 et confirmée par arrêt du 6 juin 1997, l’a déboutée de ses demandes en raison d’une contestation sérieuse ;

Qu’à la demande de la société Paradiso et par ordonnance du 30 avril 1997, le juge des référés a désigné M. [T], expert, en vue d’examiner les désordres affectant la toiture de l’immeuble. Par ordonnance du 14 juin 1998, Mme [E], toujours représentée par M. [D], a fait étendre la mission de l’expert en soutenant que la société Paradiso avait modifié les lieux loués et construit de nouveaux bâtiments ;

Que l’expert a procédé à sa mission et déposé le rapport de ses opérations. Le 24 novembre 1998, la société Paradiso a fait assigner Mme [E] afin d’obtenir, sous astreinte, la réalisation de travaux préconisés par l’expert tandis que, de son côté, Mme [E], représentée par un autre avocat, s’est portée demanderesse reconventionnelle ;

Que, sur ces actions et par jugement du 17 novembre 1999, le Tribunal de grande instance de Meaux a jugé :

– que le refus de renouvellement des 6 et 7 avril 1994 n’était pas valable et que le bail s’était renouvelé pour neuf années à compter du 1er avril 1994,

– que Mme [E] n’avait pas saisi le Tribunal dans le délai de deux expirant le 7 janvier 1996 afin de faire fixer les nouvelles conditions du bail et que le déplafonnement ne pouvait intervenir qu’à l’occasion du deuxième renouvellement suivant la réalisation des travaux, que la demande de payement des loyers dus antérieurement au 13 janvier 1994 était prescrite en application de l’article 2277 du Code civil ;

Que ce jugement a été confirmé par arrêt du 12 juin 2002 ;

Que, le 30 septembre 2003, Mme [E] a donné à la société Paradiso un congé avec offre de renouvellement du bail moyennant un loyer de 40.000 euros ; qu’à cette fin, elle a saisi le Tribunal de grande instance de Meaux qui, par jugement du 9 mars 2004, a décidé qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer la règle du déplafonnement lors du deuxième renouvellement du bail et ordonné une mesure d’expertise afin que soit estimée la valeur locative des locaux ;

Que, Mme [E] recherchant la responsabilité de M. [D], le Tribunal de grande instance de Paris a statué comme il est dit en tête du présent arrêt ;

Sur la demande de rejet des pièces n° 76 et n° 77 communiquées par Mme [E] :

Considérant que M. [D] et les Mutuelles du Mans Assurances demandent que soient écartées des débats les pièces numérotées 76 et 77 communiquées le 16 septembre 2011 par Mme [E] alors que l’ordonnance de clôture a été rendue le 20 septembre 2011 et que, partant, ils n’ont pas été en mesure d’en prendre utilement connaissance ;

Considérant que Mme [E] conclut au rejet des prétentions adverses ;

Considérant que, comme elle le soutient, les deux pièces dont il s’agit sont destinées à répondre à certaines assertions contenues dans les conclusions signifiées le 8 septembre 2011 par les intimés, qu’elles ont été communiquées le 16 septembre 2011 et que M. [D] et son assureur n’ont point sollicité le report de l’ordonnance de clôture qui a été rendue le 20 septembre 2011 de sorte que les deux pièces litigieuses, qui ne modifient pas les termes du débat, ont été communiquées en temps utile ;

Que M. [D] et les Mutuelles du Mans Assurances seront déboutés de leur demande de rejet des débats des pièces numérotées 76 et 77 ;

Sur la demande de rejet des pièces prétendument couvertes par le secret professionnel :

Considérant que M. [D] et les Mutuelles du Mans Assurances demandent que soient écartées des débats les lettres d’avocats communiquées aux débats par Mme [E] nonobstant la règle du secret professionnel prévue par l’article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée en vertu duquel, en toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense’les correspondances échangées’ entre l’avocat et ses confrères, à l’exception pour ces dernières de celles portant la mention « officielle »’ sont couvertes par le secret professionnel ; que, sous réserve de l’exception prévue par ce texte, le secret des correspondances des avocats est général et absolu ;

Qu’en l’espèce, les lettres adressées par M. [D] à l’un de ses confrères, chargé de la défense des intérêts de la société Paradiso, l’une le 30 juillet 1996, l’autre le 21 octobre 1997, sont dépourvues de la mention « officielle » et que, loin d’être regardée comme étant officielle, la lettre du 30 juillet 1996 porte la mention « strictement confidentiel » ;

Qu’il suit de là que ces deux lettres, portant les numéros 62 et 63 de la communication de Mme [E], seront écartées des débats ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par les intimés et tendant au rejet de la demande d’une somme correspondant aux charges de copropriété :

Considérant que cette demande, présentée par Mme [E] comme correspondant au coût de travaux de mise en conformité, est dirigée contre M. [D] dont la responsabilité est recherchée et qu’elle consiste en une demande de dommages et intérêts ;

Qu’il s’agit donc d’une prétention qui se rattache aux demandes présentées au premier juge et qui en est l’accessoire, la conséquence ou le complément au sens de l’article 566 Code de procédure civile ;

Considérant que, l’action engagée par Mme [E] contre M. [D] n’étant pas prescrite, ce chef de demande, qui s’ajoute aux prétentions initiales, n’est pas prescrit ;

Considérant qu’il suit de là que la demande dont il s’agit ne se heurte ni à la prohibition des demandes nouvelles en cause d’appel, ni à la prescription décennale édictée par l’article 2277-1 du Code civil ;

Qu’en conséquence, il convient d’écarter le fin de non-recevoir soulevée par M. [D] et les Mutuelles du Mans Assurances ;

Au fond :

Considérant qu’il convient d’examiner les trois griefs articulés par Mme [E] contre M. [D] ;

1° En ce que M. [D] aurait laissé prescrire l’action tendant au recouvrement des loyers afférents à la période comprise entre le 1er septembre 1987 et le 13 janvier 1994 :

Considérant que Mme [E] était fondée à demander des loyers antérieurs au 27 septembre 1995, date à laquelle elle a acquis les droits cédés par M. [R], son co-indivisaire, représenté par M. [V], son liquidateur, dès lors que ce droit lui a été reconnu par le jugement rendu le 17 novembre 1999 par le Tribunal de grande instance de Meaux et confirmé par un arrêt du 12 juin 2002 ;

Considérant que, même si, le juge des référés, en son ordonnance du 22 mai 1996, confirmée par la Cour le 6 juin 1997, a pris acte du versement d’une somme de 120.000 francs (18.293,88 euros) effectué à la barre par la société Paradiso, il n’en demeure pas moins que ce magistrat a rejeté la demande de provision en raison de l’existence d’une contestation sérieuse ;

Que, compte tenu de la contestation relevée et des incertitudes quant à l’issue de la procédure d’appel, il appartenait à M. [D] de saisir la juridiction du fond, seule compétente pour trancher une difficulté de cette nature, afin d’interrompre la prescription quinquennale et sauvegarder les intérêts de Mme [E] ;

Qu’en s’abstenant d’agir ainsi, M. [D] a commis une faute qui a fait perdre à Mme [E] la chance d’obtenir la totalité des loyers qui lui étaient dus, soit une somme de 44.826,65 euros ;

Qu’il convient donc d’indemniser cette perte de chance par une somme de 30.000 euros comme l’ont fait les premiers juges tout en les désapprouvant d’avoir statué « équitablement » pour arrêter ce montant ;

2° En ce que M. [D] aurait laissé prescrire, lors du renouvellement du bail, au mois d’avril 1994, l’action en fixation du loyer à sa valeur locative et ce, en ne saisissant pas le juge des loyers commerciaux ou en n’interrompant pas le délai de prescription biennale :

Considérant que, comme l’a énoncé le Tribunal de grande instance, une telle action était incompatible avec les prétentions de Mme [E] qui souhaitait que fût constatée l’acquisition de la clause résolutoire du bail en raison du défaut de payement des loyers ;

Qu’à cet égard, aucune faute n’est reprochable à M. [D] de sorte qu’il convient d’approuver les premiers juges d’avoir refusé d’indemniser Mme [E] de ce chef ;

3° En ce que M. [D] lui aurait donné des informations erronées sur les conséquences financières du rachat de la part de M. [R], compte tenu notamment de l’inscription d’hypothèque prise par l’U.C.B. :

Considérant que, par lettre du 19 septembre 1994, M. [D] a écrit à Mme [E], au sujet de la somme de 500.000 francs (76.224,51 euros) à régler à M. [V], liquidateur de M. [R] : « En ce qui concerne le créancier hypothécaire, l’U.C.B., ce dernier disposant d’une sûreté réelle sur le bien, devrait récupérer la totalité du reliquat du prêt, ce qui par effet mécanique, fera disparaître l’hypothèque sur le restaurant situé [Adresse 2]. Les fonds qui resteront disponibles seront alors distribués aux créanciers selon l’ordre du privilège ou l’ordre du chirographaire » ;

Qu’il ressort du protocole d’accord conclu le 7 août 1997 entre Mme [E] et l’U.C.B., créancière de M. [R] et de Mme [E] au titre du prêt consenti pour l’acquisition du bien, que l’U.C.B. a été déclarée déchue de la production de sa créance par le jugement rendu le 7 avril 1992 par la Tribunal de commerce de Bobigny ;

Qu’il s’ensuit qu’en renseignant Mme [E] comme il l’a fait, M. [D] a commis une erreur ;

Qu’en revanche et comme l’ont exactement énoncé les premiers juges, il n’est aucunement prouvé que les fonds versés au liquidateur par Mme [E] permettraient de désintéresser la S.N.V.B., également créancière de M. [R] ;

Considérant que l’indemnisation du préjudice subi à cet égard par Mme [E], loin de correspondre aux sommes versées à l’U.C.B., dès lors qu’elle devait les payer, qu’elle ait acquis ou non les droits de M. [R], doit être évaluée à la perte de chance d’avoir été en mesure d’accepter ou de renoncer à acquérir les droits dudit M. [R] ;

Que, comme l’ont énoncé les premiers juges, Mme [E] ne démontre pas qu’elle aurait pu renoncer à l’acquisition de ces droits dans des conditions qui lui auraient été favorables alors surtout que, par trois lettres des 13 octobre 1992, 16 mai 1994 et 29 septembre 1995, elle manifestait la volonté expresse de se porter acquisitrice des droits de M. [R], en liquidation judiciaire, et de faire échec à la procédure d’adjudication de l’immeuble ; qu’elle n’apporte donc pas la preuve d’un préjudice indemnisable ;

4° Sur le préjudice moral et financier :

Considérant que les seules fautes commises par M. [D], qui a été omis du tableau des avocats le 30 juin 1998 pour des raisons de santé, ont causé à Mme [E] des soucis et tracas, notamment d’ordre financier ;

Que l’indemnisation de ce préjudice moral a été justement limitée à la somme de 10.000 euros ;

Considérant qu’en conséquence, il convient de confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement frappé d’appel ;

Sur l’application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile :

Considérant que chacune des parties sollicite une indemnité en invoquant les dispositions susvisées ; que, succombant en leurs prétentions et supportant les dépens, M. [D] et les Mutuelles du Mans Assurances seront déboutés de leur réclamation ; qu’en revanche, l’équité ne commande pas qu’il soit donné satisfaction à Mme [E] quant à ce chef de demande ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Déboute M. [D] et les Mutuelles du Mans Assurances de leur demande de rejet des débats des pièces communiquées par Mme [N] [E] et numérotées 76 et 77 ;

Ordonne que les deux lettres émanant de M. [D], avocat, et portant les numéros 62 et 63 de la communication de Mme [E] seront écartées des débats ;

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 15 mars 2006 par le Tribunal de grande instance de Paris au profit de Mme [E] ;

Déboute Mme [E], d’une part, et M. [D] et les Mutuelles du Mans Assurances, d’autre part, chacun de sa demande d’indemnité fondée sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne M. [D] et les Mutuelles du Mans Assurances aux dépens d’appel qui seront recouvrés par Maître Cordeau, avoué de Mme [E], conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

 


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