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18 janvier 2017
Cour de cassation
Pourvoi n°
14-10.597
COMM.
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 18 janvier 2017
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 65 F-D
Pourvoi n° G 14-10.597
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
1°/ M. [U] [P], domicilié [Adresse 1],
2°/ la société KI transports, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],
contre l’arrêt rendu le 31 octobre 2013 par la cour d’appel de Lyon (3e chambre A), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Lyonnaise de banque, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la société CM-CIC Factor, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4], venant aux droits de la CM-CIC Laviolette financement,
défenderesses à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 22 novembre 2016, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Marcus, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, M. Graveline, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Marcus, conseiller, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de M. [P] et de la société KI transports, de Me Le Prado, avocat de la société Lyonnaise de banque et de la société CM-CIC Factor, l’avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Lyon, 31 octobre 2013), que M. [P], puis la société KI transports (la société KT), dont il est le gérant, ont ouvert des comptes courants dans les livres de la société Lyonnaise de banque (la banque) et conclu des conventions de cession de créances professionnelles avec la société CM-CIC Laviolette financement, aux droits de laquelle vient la société CM-CIC Factor (la société CCLF) ; qu’à la suite de la clôture des comptes, devenus débiteurs, et du retrait des concours, ils ont assigné la banque et la société CCLF en paiement de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. [P] et la société KT font grief à l’arrêt d’écarter des débats les pièces référencées sous le n° 40 dans le bordereau de communications de pièces alors, selon le moyen :
1°/ que si le secret bancaire auquel est tenu un établissement financier constitue un empêchement légitime opposable au juge civil, il ne peut en être ainsi lorsque la banque est partie au procès et que la production de l’écrit couvert par le secret concerne son client et est produit par ce dernier pour assurer sa propre défense dans le litige l’opposant à son banquier ; qu’en écartant des débats les pièces référencées n° 40 au motif que leur prise en compte serait à l’origine d’une atteinte disproportionnée au principe impératif du secret bancaire, la cour d’appel a violé l’article 511-33 du code monétaire et financier et l’article 9 du code de procédure civile ;
2°/ que n’étant pas lui-même tenu par le secret professionnel qui s’impose au banquier, le client peut faire état des courriers internes le concernant ; qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé l’article L. 511-33 du code monétaire et financier et 9 du code de procédure civile ;
3°/ qu’en retenant que M. [P] et la société KT ne justifiaient pas de ce que la banque et la société CCLF avaient commis un abus de droit dans la rupture des concours consentis, en écartant à tort les échanges de courriels référencés n° 40, la cour d’appel a violé l’article 1315 du code civil, ensemble l’article 9 du code de procédure civile et l’article L. 511-33 du code monétaire et financier ;
Mais attendu que l’arrêt relève que la pièce n° 40 regroupe un ensemble de courriels échangés entre un ancien salarié de la banque et l’un de ses supérieurs hiérarchiques ainsi qu’un message émis par un membre de la société CCLF à l’attention de ce salarié, que celui-ci, qui avait utilisé ces documents dans le cadre d’un litige prud’homal, les a remis à M. [P] et à la société KT qui ne peuvent contester qu’ils sont protégés par le secret des correspondances et que le salarié n’était pas autorisé à les communiquer à un tiers ; qu’il retient qu’il appartient à M. [P] et à la société KT de démontrer la nécessité de produire cette pièce au soutien de leurs prétentions et l’absence d’atteinte disproportionnée à ce secret par rapport au but recherché ; qu’il retient encore que la production des échanges litigieux n’est pas impérativement nécessaire au succès de leurs demandes et que la prise en compte de ces pièces causerait une atteinte disproportionnée au secret protégé ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations, abstraction faite du motif critiqué par la première branche, qui est surabondant, la cour d’appel a pu écarter des débats la pièce litigieuse ; que le moyen, inopérant en sa troisième branche, n’est pas fondé pour le surplus ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. [P] et la société KT font grief à l’arrêt de rejeter l’intégralité de leurs demandes envers la banque et la société CCLF alors, selon le moyen :
1°/ qu’en jugeant que, s’agissant de l’obligation de conseil et d’information, en dehors des explications appuyées sur la notion de groupe, du fait de liens capitalistiques existant entre la banque et la société CCLF, la société KT ne stigmatise pas particulièrement le comportement personnel de sa banque, quand la société KT faisait valoir dans ses conclusions d’appel qu’elle avait cumulé d’importants encours auprès de la société CCLF, mais également un découvert de 100 000 euros auprès de la banque et ce, au mépris des règles internes de fonctionnement ainsi qu’il ressortait des courriels pièce n° 40 échangés entre les différents intervenants des deux établissements financiers et qu’en s’abstenant d’informer la société KT du caractère anormal du cumul des encours, la banque et la société CCLF avaient manqué à leurs obligations respectives d’information et de conseil et de mise en garde et agi avec une légèreté blâmable en ne respectant pas les règles internes du groupe CIC, la cour d’appel a méconnu les termes du litige, violant ainsi l’article 4 du code de procédure civile ;
2°/ qu’en s’abstenant de rechercher, ainsi qu’elle y était invitée par M. [P] et la société KT si la banque et la société CCLF n’avaient pas manqué à leur obligation de mise en garde de cette dernière sur les dangers du cumul de découvert et d’encours, et si en s’abstenant de proposer la mise en place d’un plan d’apurement et en rompant les financements après plusieurs mois de silence gardé, les sociétés n’avaient pas agi avec déloyauté, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil ;
3°/ que le banquier n’est pas dispensé de son devoir de conseil et de mise en garde vis-à-vis de son client du fait qu’il est assisté par un tiers ; qu’en relevant, pour écarter toute faute de la part de la banque, que la société KT était assistée d’un avocat et d’un expert comptable, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil ;
4°/ que dans ses conclusions d’appel, la société KT faisait valoir que la société CCLF ayant toléré avec continuité une ligne de financement supérieure au montant initialement déterminé de 60 000 euros ne pouvait rompre brutalement le crédit à une époque où le montant utilisé était en régression par rapport à ce qu’elle avait antérieurement accordé ; qu’en s’abstenant de répondre à ce moyen, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
5°/ qu’en se bornant à retenir que la société KT ne pouvait reprocher à la société CCLF d’avoir rompu brutalement le contrat alors qu’elle manifestait elle-même son intention de mettre fin aux relations contractuelles et que le préavis a été pleinement respecté sans que cet organisme financier ait à justifier d’un quelconque motif, sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si la société CCLF n’avait pas rompu brutalement le concours consenti dès lors qu’elle avait jusqu’ici toléré que le montant de la ligne de financement soit supérieur au montant initialement déterminé de 60 000 euros et ce, à une époque où la société KT réduisait son découvert, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil ;
6°/ que la banque commet un abus de droit dans la rupture des contrats consentis lorsque sa décision procède d’un motif illégitime ou d’une volonté de nuire ; qu’en omettant de rechercher si la rupture du concours consenti prise par la banque et la décision de rupture de la ligne de financement par la société CCLF, prises concomitamment et en concertation, ainsi que le révélaient les échanges de courriels de la pièce 40, n’étaient pas nécessairement fautives à raison même de leur caractère indissociable, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l’article 1147 du code civil ;