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17 mars 2023
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
18/11234
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-6
ARRÊT AU FOND
DU 17 MARS 2023
N°2023/ 082
Rôle N° RG 18/11234 – N° Portalis DBVB-V-B7C-BCW2C
[X] [O]
C/
SELARL FHB
[UI] [X]
Etablissement CGEA AGS DELEGATION REGIONALE DU SUD EST
SASU LES MAISONS AVENIR TRADITION
Copie exécutoire délivrée
le : 17/03/2023
à :
Me Elodie PELLEQUER de l’AARPI PERRYMOND-PELLEQUER, avocat au barreau de TOULON
Me Faten BEN HASSINE, avocat au barreau de TOULON
Association CGEA AGS DELEGATION REGIONALE DU SUD EST
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULON en date du 18 Juin 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 17/00201.
APPELANT
Monsieur [X] [O], demeurant [Adresse 7]
représenté par Me Elodie PELLEQUER de l’AARPI PERRYMOND-PELLEQUER, avocat au barreau de TOULON substituée par Me Sandy CARRACCINO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
SASU LES MAISONS AVENIR TRADITION, Monsieur [B] [I] – Président en exercice, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Faten BEN HASSINE, avocat au barreau de TOULON et par Me Guilhem DUCROS, avocat au barreau de NIMES
Maître Me [UI] [X] en qualité de mandataire liquidateur à la SAS Maison Avenir Tradition, demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Faten BEN HASSINE, avocat au barreau de TOULON et par Me Guilhem DUCROS, avocat au barreau de NIMES
Monsieur SELARL FHB prise en la personne de Maître [G] [F] en qualité d’administrateur judiciaire de la SAS Maison Avenir Tradition, demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Faten BEN HASSINE, avocat au barreau de TOULON et par Me Guilhem DUCROS, avocat au barreau de NIMES
Association CGEA AGS DELEGATION REGIONALE DU SUD EST, demeurant [Adresse 8]
Défaillante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 Janvier 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe SILVAN, Président de chambre, et Madame Estelle de REVEL, Conseiller.
M. Philippe SILVAN, Président de chambre, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Philippe SILVAN, Président de chambre
Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre
Madame Estelle de REVEL, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Mars 2023.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Mars 2023.
Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Selon contrat à durée indéterminée du 2 mai 2011, la SAS’Maisons Avenir Tradition (la société MAT), qui a pour activité la construction de maisons individuelles, a recruté M. [O] en qualité de vendeur de maisons individuelles, avec le statut employé, niveau C. Au dernier état de la relation de travail, M. [O] exerçait depuis le 1er août 2016 les fonctions de responsable de point de vente avec le statut agent de maîtrise, niveau F.
Le 16 août 2016, il a fait l’objet d’une mise à pied à titre conservatoire à compter de son retour de congés le 29 août 2016 et a été convoqué à un entretien préalable dans le cadre d’une procédure de licenciement le 1er septembre 2016.
Le 21 septembre 2016, il a été licencié pour faute lourde.
Le 24 mars 2017, il a saisi le conseil de prud’hommes de Toulon d’une contestation de son licenciement.
Par jugement du 18 juin 2018, le conseil de prud’hommes de Toulon l’a débouté de ses demandes.
Le 4 juillet 2018, M. [O] a fait appel de ce jugement.
Par jugement du 15 novembre 2021, le tribunal de commerce de Nîmes a ouvert une procédure de redressement judiciaire au profit de la société MAT. Par jugement du 15 février 2022, le tribunal de commerce de Nîmes a prononcé la liquidation judiciaire de la société MAT et désigné Maître [X] en qualité de mandataire liquidateur.
Par exploit du 11 avril 2022, M. [O] a appelé en cause l’AGS-CGEA, laquelle n’a pas constitué avocat.
A l’issue de ses conclusions du 5 septembre 2022, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, M. [O] demande de’:
”Le recevoir en son assignation en intervention forcée et la dire bien fondée et régulière sur le fondement de l’article 555 du code de procédure civile’;
Venir’:
”Maître [X], ès-qualité de liquidateur judiciaire de la SAS M.A.T’;
”La SELARL FHB, prise en la personne de Maître [F] [G], ès-qualité d’administrateur judiciaire de la SAS M.A.T’;
”La S.A AGS CGEA [Localité 9]’,
parties requises, intervenir dans la présente instance et prendre telles conclusions qu’elles jugeront utiles’;
”Leur déclarant en outre que faute de comparaître, elles s’exposent à ce qu’un arrêt soit rendu en leur absence’;
”donner acte à Maitre [X] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS MAT et Maitre [G] [F] ès-qualités d’administrateur de la SAS MAT de leurs interventions dans la procédure n° RG 18/11234′;
En conséquence, sur le fond, statuant à nouveau’:
”réformer le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Toulon en date du 18 juin 2018 en son intégralité sauf en ce qu’il a débouté la SAS M.A.T-Maison Avenir Tradition de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
”juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse’;
”rejeter les demandes de la SAS M.A.T, de Me [X] ès-qualités et de Me [F] ès-qualité’;
”fixer sa créance au passif de la SAS M.A.T aux sommes suivantes’:
– 1’466,21’€ au titre des rappels de salaire pour la période de la mise à pied’;
– 2’850,00’€ à titre d’indemnité compensatrice de préavis’;
– 1562,05’€ à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
– 20’658,76’€ à titre des rappels de salaire’;
”fixer sa créance au passif de la SAS M.A.T aux sommes suivantes’:
– 800’€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
– 5’000’€ à titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens’;
”ordonner le paiement des sommes susvisées compte tenu du caractère salarial et dès lors immédiatement exigible’;
”ordonner que l’intérêt au taux légal sur les condamnations à intervenir soit calculé à compter de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation par la société défenderesse’;
”ordonner la capitalisation des dits intérêts.
M. [O] conteste le bien fondé de son licenciement pour faute lourde aux motifs que la faute lourde se définit comme la faute commise par un salarié avec l’intention de nuire à l’employeur ou à l’entreprise, qu’il n’a jamais perçu de commissions occultes et n’a jamais détourné la clientèle de son employeur, qu’il appartient à l’employeur d’établir la faute lourde qu’il invoque, qu’il tient à rappeler, même si la charge de la preuve ne pèse pas sur lui, qu’il a toujours donné entière satisfaction à son employeur, que la société MAT ne rapporte pas la preuve des faits qu’elle lui impute, que Mme [N], témoin cité par la société MAT, était en concurrence avec lui et se trouvait sous la subordination de son employeur, qu’elle a ultérieurement démenti ses accusations en indiquant qu’elle a été victime d’un chantage à l’emploi de son employeur, que la prescription est acquise concernant certains clients ([J], [E], [R], [CB]/[Y], [C], [A] Et [VW]) puisque les faits reprochés auraient été commis plus de deux mois avant l’engagement des poursuites disciplinaires à son encontre et que la société MAT ne rapporte pas la preuve des faits reprochés.
Il reproche à la société MAT de verser aux débats des éléments de preuve obtenus de manière déloyale aux motifs qu’il est de jurisprudence constante que le salarié a droit y compris sur son temps et son lieu de travail, au respect de sa vie privée et au secret de ses correspondances, que si tout message reçu ou envoyé depuis le poste de travail du salarié mis à la disposition par l’employeur revêt par principe un caractère professionnel et peut être consulté par l’employeur, en revanche, il ne peut, en vertu du principe du secret des correspondances, consulter un message clairement identifié comme étant personnel, que les pièces 23 et 25 de la société MAT revêtent bien un caractère privé étant donné que les documents litigieux ont été transférés sur sa messagerie personnelle depuis sa messagerie professionnelle, qu’ils peuvent donc être identifiés comme étant personnels dans la mesure où le destinataire est clairement une adresse email personnelle, que ces courriels ne peuvent être produits en justice et justifier du bien-fondé des prétentions de la société MAT et qu’il s’agit d’une réelle violation de sa vie privée au bureau.
Il expose en outre que recruté au statut employé, Niveau C, avec une rémunération de 1.022’€ brut pour la part fixe, il a été rémunéré en deçà du salaire minimum conventionnel et qu’il est donc fondé à solliciter un rappel de salaire à ce titre à compter du 1er février 2014.
Selon ses conclusions du 5 décembre 2022, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, la société MAT et Maitre [X], ès qualités, demandent de’:
”juger que le licenciement de Monsieur M. [O] repose bien sur une faute lourde’;
”juger que les diverses demandes de rappel de salaires sont infondées’;
”juger que Monsieur M. [O] a perçu un trop payé de 2.778,64 euros bruts’;
En conséquence,
”confirmer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a débouté le salarié de l’ensemble de ses demandes’;
”condamner Monsieur M. [O] au remboursement des 2.778,64’€ bruts indument perçus’;
”condamner Monsieur M. [O] à payer à la société MAT et Maître [X] la somme de 3.000’€ sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile’;
”condamner Monsieur M. [O] aux entiers dépens.
La société MAT et Maître [X], ès qualités, soutiennent que la société MAT était fondée à procéder au licenciement pour faute lourde de M. [O] aux motifs que la faute lourde est celle commise par un salarié avec l’intention de nuire à l’employeur ou à l’entreprise, qu’il est constant que la faute lourde doit être retenue en présence d’un détournement de clientèle au profit d’une entreprise concurrente, cet agissement témoignant d’une intention de nuire, que début août 2016, elle a été informée que M. [O] détournait de la clientèle au profit de sociétés concurrentes, notamment en excluant certains travaux des contrats de construction en vue de les faire réaliser par une entreprise concurrente, travaillait au profit de sociétés tierces et utilisait le matériel professionnel mis à sa disposition pour violer ses obligations contractuelles, que, concernant le premier grief, M. [O] a détourné des clients de l’entreprise vers des sociétés concurrentes et ainsi perçu des commissions occultes (clients [XY], [J], [E], [R], [CB]/[Y], [C], [A],’), que, concernant le second grief, il faisait réaliser en direct, c’est à dire par d’autres sociétés, des travaux (clients [BH], [U] et [P]) et que, concernant le troisième grief, M. [O] a exercé, en violation de sa clause d’exclusivité, des fonctions d’apporteur d’affaires officieux au profit d’une société spécialisée dans la vente de piscines (O’Dream Aménagement).
Il affirment que M. [O] ne peut opposer la prescription de deux mois prévu par l’article L.’1332-4 du code du travail aux motifs qu’elle a été informée des faits commis par M. [O] en août 2016, que la procédure de licenciement a été engagée très rapidement après qu’elle ait eu connaissance des faits fautifs, que M. [O] opère une confusion entre la date de commission des faits avec celle à laquelle elle en a eu connaissance, que les courriels adressés et reçus par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel en sorte qu’elle était en droit de les ouvrir hors la présence de l’intéressé, sauf si ce dernier les identifie comme personnels, qu’une cour d’appel ne peut écarter, en tant que mode de preuve illicite, le procès-verbal établi par un huissier de justice, au motif que les messages professionnels édités par celui-ci à la demande de l’employeur provenaient d’une messagerie dont l’adresse ne mentionnait que le nom du salarié, alors qu’elle avait constaté qu’il s’agissait d’une messagerie électronique mise à sa disposition par l’entreprise et que les courriels litigieux n’avaient pas été identifiés par l’intéressé comme étant personnels, que tous les emails produits dans le cadre de la présente instance ont été récupérés sur la messagerie professionnelle du salarié et aucun d’entre eux n’était identifié comme «’personnel’» et que, dès lors, elle pouvait valablement s’en prévaloir dans un cadre disciplinaire.
Ils s’opposent en outre à la demande en rappel de salaire formée par M. [O] aux motifs que la convention collective se contente de fixer le minimum conventionnel sans disposition particulière, que les commissions et prime versées en contrepartie de la prestation de travail doivent donc être prises en compte afin de vérifier le respect du minimum conventionnel, que les calculs opérés par M. [O] sont erronés puisque fondés sur la base du salaire contractuel fixe et non à partir du salaire effectivement versé qui comprend les commissions qui sont directement liées à la prestation de travail, que compte tenu du délai de prescription de trois ans applicable en matière de rappel de salaire et de la date de saisine du conseil de prud’hommes, M. [O] devra être débouté de ses demandes afférentes aux mois de février et mars 2014, que le contrat de travail de M. [O] prévoyait que dans l’hypothèse où le montant de la rémunération variable ne permettrait pas d’atteindre le salaire minimum conventionnel, il sera versé à due concurrence une avance sur commission, laquelle serait déduite des commissions ultérieures, dès lors que les rémunérations fixes et variables ultérieures dépasseront le salaire minimum conventionnel et, qu’en cas de rupture du contrat de travail, toute avance sur commission se compensera automatiquement avec toute somme qui pourrait être due dans le cadre de l’établissement du solde de tout compte, que les mois pendant lesquels M. [O] n’a pas perçu le minimum conventionnel, il a été décompté une avance sur commissions, laquelle est ensuite soldée par la perception de commissions portant la rémunération au-delà du minimum conventionnel, qu’il subsiste un solde négatif de 571,26’€ à la date de rupture du contrat auquel s’ajoute les 2.207,38’€ payés à tort en août 2016, suite à l’oubli du service paie d’appliquer les stipulations de l’article 6 du contrat de travail et que M. [O] est aujourd’hui redevable de 2.778,64’€ bruts.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 16 décembre 2022. Pour un plus ample exposé de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à la décision déférée et aux dernières conclusions déposées par les parties.
SUR CE’:
Sur le rappel de salaire’:
sur la recevabilité des demandes de M. [O] pour les mois de février et mars 2014′:
Conformément à l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
La société MAT et Maître [X], ès qualités, dans les motifs de leurs conclusions, soulèvent la prescription de la demande en rappel de salaire de M. [O] pour les mois de février et mars 2014 sans conclure, dans le dispositif de ces mêmes conclusions, à l’irrecevabilité d’une telle prétention. Dès lors, il n’y a pas lieu à statuer de ce chef.
sur le fond’:
Selon le premier contrat de travail du 2 mai 2011, M. [O] a été recruté par la société MAT en qualité de vendeur de maisons individuelles, statut employé, niveau C selon la nomenclature de la convention collective des ETAM du bâtiment du 12 juillet 2006. Ce contrat de travail prévoyait qu’il percevrait, en contrepartie d’un temps de travail effectif mensuel de 151,67 heures, une rémunération fixe d’un montant de 1022 euros bruts et une rémunération variable dont le détail était prévu au contrat de travail. Il était en outre stipulé que, dans l’hypothèse où le montant de la rémunération variable ne permettrait pas d’atteindre le salaire minimum conventionnel, il serait versé à due concurrence une avance sur commissions, laquelle serait déduite des commissions ultérieures dès lors que les rémunérations fixes et variables ultérieures dépasseraient le salaire minimum conventionnel. Enfin il était prévu que en cas de rupture du contrat de travail, toute avance sur commissions se compensait automatiquement avec toutes sommes qui pourraient être dues dans le cadre de l’établissement du solde de tout compte.
A l’issue d’un second contrat à durée indéterminée du 1er août 2016, M. [O] a été nommé, à compter du 1er septembre 2016, responsable point de vente, statut agent de maîtrise, niveau F selon la nomenclature de la convention collective des ETAM du bâtiment du 12 juillet 2006. Ce contrat de travail prévoyait qu’il percevrait, en contrepartie d’un temps de travail effectif mensuel de 151,67 heures, une rémunération fixe d’un montant de 1022 euros bruts, une prime de RPV de 450’€ et une rémunération variable dont le détail était prévu au contrat de travail. Il était enfin prévu que en cas de rupture du contrat de travail, toute avance sur commissions se compensait automatiquement avec toutes sommes qui pourraient être dues dans le cadre de l’établissement du solde de tout compte.
Selon l’article 3.2.2 de la convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtiment du 12 juillet 2006, les barèmes de salaires minimaux sont déterminés après négociation au moins une fois par an à l’échelon régional, ils sont fixés pour un horaire mensuel moyen de 151,67 heures ou pour 35 heures en moyenne sur l’année.
Il ressort des accords sur le barème de salaire minimaux des ETAM du bâtiment de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur des 9 janvier 2014 et 15 juillet 2015 que M. [O] pouvait prétendre, en qualité d’employé, niveau C à un salaire minimum de 1683,46’euros à compter du 1er février 2014 puis de 1’696,93’euros à compter du 1er août 2015 et, en qualité d’agent de maîtrise niveau F, à un salaire minimum de 2337,76’euros à compter du 1er septembre 2016.
Il est de jurisprudence constante que, sauf dispositions conventionnelles contraires, toutes les sommes versées en contrepartie du travail entrent dans le calcul de la rémunération à comparer au salaire minimum conventionnel, ce qui suppose d’exclure celles qui n’ont pas ce caractère, notamment les éléments à finalité particulière, distincts de la rétribution de la prestation de travail, que lorsque les textes conventionnels ne contiennent pas de dispositions spécifiques quant à l’inclusion ou l’exclusion de certaines primes dans le minimum conventionnel, il y a lieu de prendre en compte les sommes versées en contrepartie du travail.
La convention collective applicable et les accords précités ne comprennent aucune exclusion quant aux sommes versées en contrepartie du travail devant servir à apprécier le respect par l’employeur des minimas conventionnels. Dès lors, toutes les sommes payées à M. [O] en contrepartie du travail devront être prises en compte.
En l’absence de toute précision sur le détail des sommes perçues en février et mars 2014 par M. [O], il n’est pas démontré par ce dernier qu’il a été rémunéré en deçà du minimum conventionnel.
Par ailleurs, M. [O] a fait l’objet d’une mise à pied conservatoire avant de prendre ses fonctions de responsable point de vente. Il est donc indifférent de rechercher si les minimas prévus pour de telles fonctions ont été respectés par la société MAT.
Entre le 1er avril 2014 et le 31 août 2016, M. [O] a perçu une rémunération totale de 45’787,98’euros alors que, en vertu du salaire minima garanti en qualité d’employé de niveau C, il pouvait prétendre à une rémunération totale de 48’899,81’euros. Il a perçu en outre une avance sur commission de 356 euros en décembre 2017 et de 3’756,55 euros en janvier 2018. Dès lors, M. [O] a été rémunéré au-delà des minimas conventionnels et ne peut donc prétendre à un rappel de salaire de ce chef.
Le tableau versé aux débats par la société MAT et Maître [X], ès qualités, insuffisamment précis et qui n’est corroboré par aucun élément de preuve pertinent, ne permet pas de démontrer que M. [O] a perçu lors de la rupture du contrat de travail un trop perçu que les intimés seraient en droit de réclamer. Ils seront par conséquent déboutés de leurs demandes de ce chef.
Sur le licenciement pour faute lourde’:
Il est de principe que la faute lourde est celle commise par le salarié dans le but de nuire à son employeur ou à l’entreprise.
Le 26 août 2016, M. [O] a été convoqué à un entretien préalable pouvant aller jusqu’à son licenciement.
La lettre de licenciement qui lui a été adressée le 21 septembre 2016 est rédigée dans les termes suivants’:
‘Nous faisons suite à l’entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement s’étant régulièrement tenu le 1 er septembre 2016 et vous notifions, par la présente, votre licenciement pour faute lourde.
Votre licenciement est fondé sur les motifs suivants’:
– Détournement de la clientèle de la société au profit d’une entreprise concurrente, dans le but de percevoir une commission occulte’;
– Exclusion de certains travaux des contrats de construction en vue de les faire réaliser par une entreprise concurrente, dans le but de percevoir une commission occulte’;
– Perception de commissions occultes émanant de constructeurs de piscines en complète infraction avec les pratiques de notre société’;
Exercice d’activités concurrentes à notre société durant votre temps de travail et au moyen de notre matériel professionnel.
I ‘ Détournement de la clientèle de la société au profit d’une entreprise concurrente
Au cours du mois de juillet 2016, Mme [H] [N], commerciale au sein de l’agence M.A.T de [Localité 6], a pris contact avec nous afin de nous informer que vous lui aviez proposé une man’uvre consistant à faire annuler une vente conclue avec ses clients afin de faire construire la maison directement par un artisan maçon avec lequel vous êtes en contact.
Pat cette man’uvre caractérisant un détournement de clientèle, la commission perçue se trouve fortement majorée, d’autant plus qu’elle n’est probablement pas déclarée à l’administration fiscale et ne supporte pas les cotisations sociales salariales.
Par la suite, Mme [N] nous a indiqué que vous lui aviez à nouveau proposé cette solution suite au refus de M.et Mme [V] du devis présenté au nom de la société M.A.T.
Vous êtes allé jusqu’à établir et lui remettre un devis au nom de la société M.T Constructions dirigée par M.[IK] [SV], ancien sous-traitant de la société M.A.T.
Après avoir pris connaissance de ce devis, il nous est apparu que les accusations de Mme [N] étaient de toute évidence fondées.
Dans le cadre de la vérification de ces faits, nous avons alors mandaté un huissier de justice aux fins de constater le contenu de votre messagerie professionnelle.
Maître [RO] [MZ] s’est présentée dans nos locaux le vendredi 5 août 2016 afin d’établir un procès-verbal de constat du contenu de votre messagerie professionnelle.
Les faits relatés par Mme [N] sont malheureusement corroborés par les emails et pièces jointes dont nous avons pu prendre connaissance.
Client [XY]
Mme [N] nous a indiqué que vous lui aviez parlé d’un client belge, M.[XY], que vous aviez détourné au profit de la société MT Constructions moyennant la perception d’une commission de plus de 80.000’€.
Vous avez affirmé à Mme [N] que le projet du client porte sur 7 maisons et plus d’un million d’euros.
Pour rappel, ce client a pris contact avec la société M.A.T par l’intermédiaire de notre site internet au début du mois de septembre 2015. Il souhaitait nous confier un projet immobilier sur la commune de [Localité 11].
Le cahier de contact ainsi que la fiche contact de notre société confirment que vous avez rencontré M.[XY] le 2 septembre 2015.
En date du 18 décembre 2015, vous avez présenté un premier devis à M.[XY] lui offrant 3 solutions distinctes pour son projet immobilier.
Nous n’avons jamais eu connaissance de la réponse du client suite à votre proposition.
Ce dossier n’avancant pas, votre chef des ventes, M.[LL], vous a relancé au mois de juin 2016 en vous transmettant de nouveau nos chiffrages sur ce projet.
Vous lui avez alors répondu que le client n’avait pas donné suite à notre devis et qu’il avait préféré contracté avec une autre entreprise.
Nous avons donc été extrêmement surpris de découvrir, sur votre messagerie professionnelle, que M.[XY] vous avez transmis le 26 juillet 2016 une photo du panneau de permis de construire mentionnant un permis délivré le 19 juillet 2016 relatif à 7 logements sur la commune de [Localité 11].
Ce panneau concerne avec évidence le projet immobilier pour lequel la société M.A.T était initialement en négociations avec M.[XY].
De la même façon, le 2 août 2016, M.[XY] vous a transmis plusieurs emails contenant, en pièces jointes, les plans d’une huitième maison à construire.
Le client vous a même communiqué les honoraires de l’architecte.
Le 5 août 2016, M.[XY] vous a de nouveau transmis les plans de cette maison contenant quelques modifications.
Ces échanges démontrent avec évidence que vous avez mené des négociations avec M.[XY] pour le compte d’une autre société que M.A.T.
Il s’agit sans le moindre doute de la société MT Constructions puisque vous avez affirmé à Mme [N] que vous alliez percevoir une commission de plus de 80.000’€ émanant de cette entité et concernant ce projet immobilier.
Vous avez donc détourné un client de notre société sur un projet dont le chiffre d’affaires aurait été supérieur à 1.000.000’€.
Client [J]
Mme [N] nous a indiqué qu’un samedi matin vous avez travaillé à la réalisation d’un devis pour ce client. Selon ses affirmations, ce devis portait l’en-tête de M.[IK] [SV].
Nous n’avons trouvé aucune trace de ce client dans nos historiques.
Là encore, les dires de Mme [N] sont avérés puisque nous avons pris connaissance sur votre messagerie professionnelle de pièces jointes transférés sur votre messagerie personnelle en date du 11 juin 2016.
Ces documents sont des devis établis par plusieurs sociétés du bâtiment (et notamment la société MT Constructions ) à l’attention de M.et Mme [J] pour un projet d’un montant total de 288.302’€.
Nous avons fait réaliser, par un huissier de justice, une sommation interpellative auprès de vos collègues de travail.
Plusieurs d’entre eux nous ont confirmé que vous aviez reconnu devant eux avoir vendu une maison à [Localité 4] pour votre propre compte.
Après étude des documents trouvés sur votre messagerie, il s’avère que cette maison correspond à votre vente pour les clients [J]-
De nouveau, nous constatons que vous avez reçu de potentiels clients de notre société mais que vous avez préféré traité «’en direct’» avec eux, c’est-à-dire les orienter vers des sociétés concurrentes à M.A.T dans le but de majorer votre commission.
Nous avons cherché à connaître l’étendue de vos détournements mais aussi votre méthodologie.
Plusieurs emails sont édifiants à ce sujet.
Client [E]
Le 3 mai 2016, vous avez transmis un devis à M.[CV] [E] en lui indiquant que la société M.A.T lui proposait une première solution pour un montant total de 180.000’€.
Vous avez ajouté que notre chiffrage pour une maison «’prête à vivre’» était de 245.000’€.
Puis dans un troisième temps, vous écrivez au client la phrase suivante’: «’Pour information, un artisan maçon Prendrait environ 150.000’€ pour le gros ‘uvre, Planchers intérieurs, charþente, toiture, menuiserie en alu gris anthracite et enduite defaçade’».
Vous indiquez donc à un client potentiel qu’un concurrent de notre société serait moins cher de 30.000’€ pour une même prestation.
Il est évident que face à une telle affirmation, le client va nécessairement choisir cette option.
On peut facilement comprendre que vous allez alors l’orienter vers la société MT Constructions de façon à percevoir une commission sur ce projet.
Client [R]
Pour ce client, nous avons constaté le même procédé que précédemment pour M.[E].
Vous avez présenté 3 devis à M.et Mme [R].
Une solution «’Hors d’eau, Hors d’air’» pour 99.000’€
Une solution «’clef en main’» pour 139.000’€
Une solution «’prête à vivre’» pour 156.000’€
Vous savez parfaitement que la société M.A.T ne réalise pas de maisons «’hors d’eau hors d’air’», sauf accord préalable exceptionnel pour réalisation d’un devis validé personnellement par le Président, puisque notre volonté est d’aller le plus loin possible dans les travaux de nos clients.
Vous avez donc offert cette solution à nos clients dans l’espoir que son prix attractif les incite à retenir ce projet.
Dans cette éventualité, vous leur auriez alors proposé de travailler avec la société MT Constructions puisque notre société ne propose pas ce type de Constructions .
Client [CB]/[Y]
Mme [CB], cliente de notre société, vous a sollicité dans le but de rénover un bien appartenant à son frère.
Suite à sa demande de devis, vous lui avez répondu par email du 25 novembre 2015′: «’je pense venir avec un attisan lors de notre entrevue de la semaine Prochaine Pour avoir une estimation’».
Nous sommes extrêmement surpris par cette proposition puisque la société M.A.T ne réalise pas encore de rénovation
Il convient donc d’en déduire que vous avez présenté cette cliente à M.[IK] [SV] alors’:
d’une part, que vous ne devez pas vous servir de notre entreprise pour développer une activité parallèle au profit d’un concurrent, d’autre part, que la société va prochainement intégrer le marché de la rénovation, ce dont vous avez déjà été informé, et aurait donc pu prendre en charge ces travaux dans les prochains mois si vous en aviez convaincu la cliente.
Client [C]
M.et Mme [C] vous ont informé le 22 avril 2016 qu’ils ne souhaitaient pas donner suite aux discussions engagées pour la construction d’une maison.
Vous leur avez alors immédiatement répondu par email du 22 avril 2016′: «’vous abandonnez le terrain ou vous préférez une autre proposition d’un constructeur, chose que je peux comprendre bien entendu, ou souhaitez-vous queje recherche un autre projet pour vous”’».
Alors qu’un client vous indique qu’il n’est pas intéressé par votre offre, vous lui indiquez immédiatement que vous êtes en mesure de lui présenter un autre projet n’émanant pas de la société M.A.T.
Il est clair ici que le moindre refus est prétexte à la proposition d’un projet au rabais mené par la société MT Constructions .
A aucun moment vous n’essayez de comprendre les raisons techniques ou financières du refus afin de négocier une nouvelle offre pour votre employeur.
Client [A]
Par email du 11 mars 2016, vous avez proposé à Mademoiselle [A], rencontrée au sein de notre agence, un devis sur un projet ne correspondant pas à nos offres commerciales.
Le contenu de votre devis ainsi que son prix font apparaître avec évidence qu’ils n’ont pas été établis au profit de la société M.A.T.
Votre man’uvre est d’autant plus évidente que les garanties et assurances proposées ne correspondent à l’offre proposée par notre société.
En effet, vous offrez à cette cliente une garantie décennale et une assurance dommage/ ouvrage mais omettez de mentionner
La garantie paiement des sous-traitants’;
La garantie de livraison à prix et délai convenus alors que vous savez très bien qu’il s’agit d’un argument de 1 er ordre’;
La garantie de remboursement d’acomptes.
Les garanties indiquées dans votre email nous semble plutôt correspondre à celles offertes par un artisan comme M.[SV].
Nous avons d’ailleurs pu constater que, le 4 juillet 2016, vous avez fait transférer, depuis votre messagerie professionnelle jusqu’à votre messagerie personnelle, l’intégralité du contrat d’assurance de M.[SV].
Cela avait probablement pour intérêt de pouvoir les fournir en cas de demande de l’un des clients détournés,
Client [VW] / BMS Promotion
En date du 6 juin 2016, vous avez récupérer sur votre messagerie personnelle les plans de deux maisons à construire sur [Localité 5].
Il est mentionné le nom de deux maîtres d’ouvrage avec lesquels nous ne travaillons plus depuis plus de 2 ans’: M.[GP] [VW] et sa société BMS Promotion.
En l’absence d’information sur ces dossiers, nous sommes contraints de considérer qu’il s’agit de clients détournés au profit d’une société concurrente.
Pour rappel, notre dernière livraison avec ce client remonte au mois de mars 2014.
Après avoir pris connaissance de votre messagerie professionnelle, il s’avère que la liste des clients dont la société n’est absolument pas informée du suivi est extrêmement longue.
Pour l’ensemble de ces clients, nous nous devons de considérer que vous avez orienté ces personnes vers un autre constructeur que votre employeur’:
[D]
[W]
[ZE]
Mme [N] nous a également indiqué que vous lui aviez fait visiter une maison à [Localité 10] probablement réalisée par LMT Constructions .
La clientèle que vous avez détournée ou tentée de détourner au profit de sociétés concurrentes à M.A.T représente un chiffre d’affaires extrêmement important.
Vos man’uvres frauduleuses créent un réel préjudice à notre entreprise et il est évident que vous avez tout fait pour nuire à notre société en détournant une part importante de notre clientèle afin de bénéficier de commissions occultes.
II ‘ Exclusion de certains travaux des contrats de construction en vue de les faire réaliser par une entreprise concurrente
Plusieurs de vos collègues de travail nous ont confirmé ce que Mme [N] nous avait déjà appris, à savoir que, lors de la vente d’une maison, vous avez pour habitude de minorer les travaux qui seront réalisés par notre société afin de vendre les prestations extérieures au bénéfice de l’un de nos concurrents.
Cela concerne notamment des garages, des terrasses ou encore des clôtures.
De cette façon, vous pouvez faire valoir auprès de nous que vous avez rempli vos objectifs commerciaux et ainsi conserver votre emploi tout en bénéficiant de commissions occultes sur les prestations annexes.
A ce jour, nous avons pu retrouver deux clients pour lesquels vous avez exercé votre
man’uvre mais le nombre de dossiers concernés doit être bien plus élevé puisque Mme
[M] [XR] nous a appris qu’elle avait connaissance de vos pratiques depuis la fin de l’année 2013.
Client [BH]
Le 28 janvier 2016, vous avez transmis à M.[T] [BH] un email contenant plusieurs pièces jointes dont un devis réalisé par la société MT Constructions .
Ce devis portait sur’:
la réalisation d’un mur de clôture, la pose d’un grillage, la pose d’un portail, la pose d’un portillon, la réalisation d’une terrasse.
Nous avons pris contact avec M.[BH] afin d’évoquer ce sujet et il nous a transmis le devis définitif de la société MT Constructions comprenant en outre la création d’un mur de soutènement et le terrassement de la propriété pour un total de
29.083’€ TTC.
Ce sont des prestations que le client peut se réserver mais que la société M.A.T propose et réalise sans aucun souci.
Il est évident que vous ne réalisez pas votre travail de persuasion au profit de la société M.A.T. en essayant de vendre ces prestations pour votre employeur.
En toute déloyauté, vous préférez convaincre nos clients qu’il est préférable de confier ces travaux à votre partenaire [IK] [SV].
Par ailleurs, nous vous rappelons que la terrasse de M.[BH] avait fait l’objet d’un refus de permis de construire.
La terrasse construite par la société MT Constructions est donc illégale et nos clients risquent une démolition de leur bien.
Malheureusement, si un tel désagrément devait se produire, il est à craindre que ces clients se retournent contre notre société puisqu’ils ont toujours discuté avec vous’: commercial de la société M.A.T.
Client [U]
Le 6 mai 2016, vous avez transmis à M.et Mme [U] un devis sur entête Maisons Avenir Tradition.
Dans cet email, vous indiquez à nos clients «’ci-joint un premier devis sommaire avec l’ensemble de votre Projet, dans la colonne «’non compis’» les travaux ont été chifré en direct’».
Cette mention d’un chiffrage «’en direct’» démontre avec évidence que vous avez également proposé à ces clients un devis parallèle établi par un autre constructeur.
Pour rappel, avec ce client, le chiffre d’affaires détourné sur les travaux à charge client s’élève à 158.000’€.
Client [P]
M.[P] nous a contactés aux fins de savoir s’il était toujours possible de livrer une station d’épuration sur son terrain comme il en avait convenu avec vous «’en direct’».
Là encore, nous sommes surpris puisque cette opération ne figure pas dans le contrat conclu avec M.[P].
Bien évidemment, lorsque ce client évoque une livraison «’en direct’» cela signifie qu’il entend que ce soit réalisé par un prestataire externe (probablement MT Constructions ).
Dans ce cas, le chiffre d’affaires détourné s’élève à 5.000’€.
Plus gave encore, si le client n’obtient pas le prix convenu pour cette station d’épuration il sera fortement mécontent et la réputation de notre société sera entachée.
III ‘ Perception de commissions occultes émanant de constructeurs de piscines en complète infraction avec les pratiques de notre société
Vous savez parfaitement que vous n’avez pas à vendre des prestations non réalisées par la société M.A.T.
Notre entreprise ne commercialise plus de piscines depuis plusieurs années et la fin de notre collaboration avec la société Les Piscines du grand Sud avec laquelle nos collaborateurs étaient effectivement commissionnés.
Désormais, vous devez informer les clients qu’ils devront contacter une entreprise spécialisée s’ils ont envie de ce type de prestation.
En revanche, à aucun moment vous ne devez orienter les clients vers une société en particulier car ce conseil pourrait rejaillir sur la réputation de M.A.T en cas de malfaçons.
Cette interdiction vous a été expressément rappelée par M.[FC] [LL] lorsqu’il a eu connaissance de vos pratiques.
En effet, il s’avère que vous avez pris pour habitude de travailler pour le compte de M.[S] [LT], ancien salarié MAT et aujourd’hui agent commercial.
M.[S] [LT] est lui-même intermédiaire dans la vente de piscine au sein d’une structure dirigée par son père M.[DO] [LT] (O’Dream Aménagement).
La SAS O’Dream Aménagement commercialise des piscines pour le compte de la société Groupe Déco France.
Ce type de structure multiplie les intermédiaires sans que le client comprenne véritablement qui est son cocontractant.
Pour nos clients, le seul interlocuteur en cas de difficulté sera le commercial M.A.T qui l’a orienté vers le constructeur de piscine et c’est donc la responsabilité de notre société qui pourrait être recherchée.
Par ailleurs, nous avons appris, et vous l’avez reconnu lors de votre entretien, que vous perceviez des commissions cn nature en cas de vente de piscine.
Ainsi, en récompense de votre intervention en faveur de M.[S] [LT], celui-ci vous a offert un ordinateur de marque Apple.
Or, il est bien évident que, si une commission doit être perçue en vertu d’un travail commercial effectué auprès de nos clients durant votre temps de travail, celle-ci doit revenir à la société M.A.T.
Nous considérons donc que, par vos pratiques, vous avez détourné des sommes devant normalement revenir à votre employeur.
Lors de votre entretien préalable, vous avez d’ailleurs reconnu les faits en présence de M.[LL]. Votre aveu a porté sur les trois clients suivants’:
[JY]
[Z]
[K]
Nous avons également pu retrouver deux clients auxquels vous avez proposé un devis de piscine’:
M.et Mme [BH]
M.et Mme [U]
Là encore, Mme [XR] nous a indiqué qu’elle avait connaissance de vos pratiques depuis fin 2013 et il y a donc fort à penser que ces clients ne sont pas les seuls concernés.
Nous espérons fortement que les piscines vendues seront correctement réalisées afin de ne pas avoir à répondre de votre intervention.
IV ‘ Exercice d’activités concurrentes à notre société durant votre temps de travail et au moyen de notre matériel professionnel
Nous avons malheureusement constaté que l’ensemble des faits décrits ci-dessus se sont déroulés durant votre temps de travail.
Il est donc évident que vous passé une grande partic de vos journées à tenter de détourner la clientèle de l’employeur qui vous rémunère.
Vous avez d’ailleurs admis à Mme [N] «’Je tiens à mon salaire MAT. Je suis en train de voir pour monter une société parallèle de mon poste
Vous avez donc utilisé les ressources et la réputation de notre entreprise en vue de rencontrer des clients intéressés par la construction d’une maison individuelle.
Par la suite, vous utilisiez les locaux et la matériel de notre société afin d’assurer le suivi de la clientèle détourné, établir des devis, envoyer des emails et même recevoir notre concurrent pendant votre temps de travail au sein même de notre agence.
La présence de M.[IK] [SV] dans nos locaux, à de multiples reprises, est confirmée par un grand nombre de vos collègues de travail.
Une majeure partie de votre temps de travail, rémunéré par nos soins, semblait destinée au développement de votre activité parallèle comme cela est confirmé par l’analyse des emails envoyés depuis votre messagerie professionnelle.
Vous êtes allé jusqu’à proposer à vos collègues de travail de vous suivre dans vos pratiques en les incitant à annuler leurs ventes au profit de M.[SV].
De tels faits démontrent votre totale déloyauté mais aussi la volonté de nuire à notre entreprise en la désorganisant et en détournant sa clientèle et son chiffre d’affaires.
Il est évident que vous avez tout mis en ‘uvre pour porter préjudice à notre société.
En conséquence, au regard du préjudice subi par notre entreprise mais surtout des man’uvres utilisées pour parvenir à vos fins, il va de soi que la poursuite de notre collaboration est absolument inenvisageable.
La gravité des stratagèmes utilisés nous conduit à mettre un terme immédiat à votre contrat de travail.
Eu égard à la gravité des faits qui vous sont reprochés, et notamment votre manquement à l’obligation de loyauté, votre licenciement prendra effet immédiatement sans préavis, ni indemnité.
Nous vous signalons à cet égard qu’en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle vous avez été mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé.
Votre licenciement étant prononcé cn raison de fautes lourdes, notre société se réserve la possibilité d’agir devant la juridiction compétente en vue d’obtenir l’indemnisation des préjudices subis.
Nous tenons immédiatement à votre disposition votre solde de tout compte, votre certificat de travail ainsi que votre attestation Pôle Emploi’.
L’article L. 1332-4 du code du travail édicte qu’aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.
Il est constant qu’une partie des faits reprochés à M. [O] auraient été commis plus de deux mois avant l’engagement des poursuites.
La société MAT et Maître [X], ès qualités, produisent le témoignage de Mme [N], ancienne salariée de la société, du 8 août 2016, selon laquelle elle aurait informé son employeur des faits de détournements de clientèle commis par M. [O] courant juillet 2016. Cette attestation est précise et détaillée concernant les faits rapportés.
S’il résulte d’un courriel adressé le 11 décembre 2016 par Mme [N] à la société MAT par lequel elle exprime sa colère après son licenciement, il n’en ressort pas l’indication que le témoignage précité était mensonger.
Il en résulte que la société MAT n’a eu connaissance des faits fondant le licenciement de M. [O] qu’à compter du mois de juillet 2016. Dès lors, les faits visés dans la lettre de licenciement n’étaient pas prescrits lors de l’engagement des poursuites.
Il est sans objet de rechercher si, en procédant à des investigations dans la messagerie professionnelle de M. [O], la société MAT a porté atteinte à la vie privée de son salarié dès lors que ce dernier, dans le dispositif de ses conclusions, sur lequel seule la cour doit statuer conformément à l’article 954 du code de procédure civile, ne sollicite pas le rejet des débats des courriels produits à l’instance.
Les courriels versés à l’instance, par leur ambiguïté, ne permettent pas de caractériser avec certitude un comportement fautif de M. [O] concernant les clients [E], [R], [C] et [A]. Il subsiste en conséquence de ce chef un doute qui devra profiter à M. [O].
En revanche, il résulte clairement du témoignage précité de Mme [N], des sommations interpellatives adressées à Mme [N], M. [LL], Mme [XR] et Mme [L], anciens salariés de la société MAT, et du surplus des courriels produits aux débats par les intimés’:
– que M. [O] a poursuivi, après le mois de juin 2016, alors que ce client avait exprimé ne pas vouloir donner suite au devis émis par la société MAT, la réalisation de diverses prestations pour le compte du client [XY],
– que M. [O] a réalisé divers devis et recherches de financements au profit de M. [J], client inconnu de la société,
– qu’il a proposé au client [CB]/[Y] la réalisation de travaux de rénovation par le biais d’un artisan,
– qu’il a échangé divers courriels de nature professionnelle avec MM. [D] et [ZE], clients inconnus de la société,
– qu’il a confié des prestations afférentes aux clients [BH], [U] et [P] à des intervenants extérieurs,
– que des devis de travaux de piscine ont été transmis par son entremise aux clients [BH] et [U],
– que les faits de détournement de clientèle se sont notamment opérés au profit d’une société M.T Construction, dont le gérant venait régulièrement dans les locaux de l’employeur de M. [O] et dont les contrats d’assurance étaient en possession de M. [O].
Il est ainsi établi que, malgré les dénégations de M. [O], ce dernier, pendant la relation de travail, alors qu’il était contractuellement tenu envers la société MAT d’une clause d’exclusivité, a accompli diverses prestations pour des particuliers souhaitant réaliser des travaux de nature immobilière et ce, parfois, au profit d’entreprises tierces. Si ces faits ont pu, en partie, porter atteinte au chiffre d’affaires de la société, il ne ressort pas des éléments soumis à l’appréciation de la cour la volonté chez M. [O] de nuire à son employeur. La société MAT ne pouvait en conséquence procéder à son licenciement pour faute lourde. En revanche, M. [O] a ainsi exercé, au profit de particuliers non-clients de l’entreprise une activité de conseil, pendant son temps de travail et en violation de sa clause d’exclusivité. La gravité de ces faits ne permettait plus son maintien dans l’entreprise et justifie en conséquence la requalification de son licenciement pour faute lourde en licenciement pour faute grave. Le licenciement pour faute grave est exclusif de l’exécution du préavis ainsi que du paiement des indemnités de rupture et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. M. [O] sera en conséquence débouté de ses demandes de ce chef.
sur les mesures accessoires’:
M. [O], partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles, devra payer à la société MAT et Maître [X], ès qualités, la somme de 2’000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS’;
LA COUR, Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire’;
DECLARE la société MAT recevable en son appel’;
CONFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Toulon du 18 juin 2018′;
DEBOUTE M. [O] de ses demandes’;
CONDAMNE M. [O] à payer à la société MAT et Maître [X], ès qualités, la somme de 2’000’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
DEBOUTE la société MAT et Maître [X], ès qualités, du surplus de leurs demandes’;
CONDAMNE M. [O] aux dépens.
Le Greffier Le Président