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8 juin 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/19331
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 10
ARRÊT DU 08 JUIN 2023
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/19331 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGWMO
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 06 Octobre 2022 – Juge de la mise en état de Tribunal judiciaire de Paris RG n° 21/00775
APPELANTS
Monsieur [K] [G]
Né le 18 mai 1956 à PARIS(75)
[Adresse 1]
[Localité 5]
ET
S.A.S.U. EXP HOLDING, agissant poursuites et diligences ses représentants légaux, domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
ET
S.A.S. BE AD-VISED CAPITAL PARTNERS, agissant poursuites et diligences ses représentants légaux, domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 8]
[Localité 7]
Représentés et assistés tous à l’audience par Me Tristan DUPRE DE PUGET de la SCP FISCHER TANDEAU DE MARSAC SUR & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0147
INTIMÉ
Monsieur [K] [U]
né le 14 mars 1966 à STRASBOURG (67)
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représenté par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34
Assisté à l’audience de Me Benoît DENIAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0291
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été plaidée le 09 Mai 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Florence PAPIN, Présidente
Mme Valérie MORLET, Conseillère
M. Laurent NAJEM, Conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Florence PAPIN, Présidente, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Florence PAPIN, Présidente et par Ekaterina RAZMAKHNINA, greffier, présent lors de la mise à disposition.
***
Rappel des faits et de la procédure :
Monsieur [U], Monsieur [G] et Madame [Z]-[C] ont été associés de la SAS Exclusive Partners.
Par acte du 17 octobre 2019, Monsieur [U] et ses enfants ainsi que Madame [Z] et ses enfants ont cédé les parts qu’ils détenaient dans la société Exclusive Partners à la SAS Exp holding, dont Monsieur [G] est le président, pour un montant de 12.499.500 euros payable en trois échéances, au prorata de la quote-part des parts cédées.
Par actes du même jour, Monsieur [G] et la SAS Be ad-vised capital partners se sont portés cautions solidaires du paiement du prix de cession dans la limite de 1.330.022,88 euros en principal, intérêts, frais et accessoires.
Monsieur [U] n’a pas perçu le règlement de la troisième échéance représentant la somme de 586.774,80 euros.
Par acte d’huissier du 22 décembre 2020, Monsieur [U] a assigné devant le tribunal judiciaire de Paris la société Exp Holding, Monsieur [G] et la société Be ad-vised capital partners en vue d’obtenir le paiement de la somme de 586.774,80 euros.
Le 13 septembre 2021, les sociétés Exclusive Partners et Exp Holding ont adressé une plainte au Procureur de la République de Paris, à l’encontre de Monsieur [U] pour des faits d’accès et de maintien frauduleux à un système de traitement automatisé de données, d’entrave au fonctionnement d’un système de traitement automatisé de données, et d’atteinte au secret des correspondances au sens des articles 323-1, 323-2, et 226-15 du code pénal.
Le 6 octobre 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris, saisi par la SAS Exp Holding , de Monsieur [G] et la SAS Be ad-vised capital partners a :
Rejeté la demande de sursis à statuer,
Dit que les dépens de l’incident suivront le sort des dépens de l’instance principale,
Rejeté la demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Renvoyé les parties à l’audience dématérialisée de mise en état du 1er décembre 2022 pour conclusions au fond de la SAS Exp Holding , de Monsieur [G] et la SAS Be ad-vised capital partners, au plus tard le 28 novembre 2022.
Monsieur [G], la SASU Exp Holding et la SAS Be ad-vised capital partners ont interjeté appel de l’ordonnance du juge de la mise en état le 21 novembre 2022.
Prétentions des parties :
Par leurs dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 16 janvier 2023, Monsieur [G], la SASU Exp Holding et la SAS Be ad-vised capital partners demandent à la cour de :
Infirmer l’ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris en ce qu’elle a :
Rejeté la demande de sursis à statuer,
Dit que les dépens de l’incident suivront le sort des dépens de l’instance principale,
Rejeté la demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Renvoyé les parties à l’audience dématérialisée de mise en état du 1er décembre 2022 pour conclusions au fond de la SAS Exp Holding , de Monsieur [G] et la SAS Be ad-vised capital partners, au plus tard le 28 novembre 2022,
La reprenant et y ajoutant,
Ordonner le sursis à statuer dans la procédure pendante devant le tribunal judiciaire de Paris et enregistrée sous le numéro RG n°21/00775 jusqu’à l’achèvement de l’enquête et de la procédure pénale quant aux intrusions dans le CRM et aux tentatives de déstabilisation des sociétés Exclusive Partners et Exp Holding ,
Condamner Monsieur [U] à payer à la société Exp Holding , à Monsieur [G] et à la société Be ad-vised partners une somme de 5.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de la présente procédure d’appel dont distraction sera faite au profit de la SCP FTMS Avocats par application de l’article 699 du même code.
Les appelants font valoir :
‘ que l’enquête pénale permettra de déterminer l’ampleur des fautes notamment contractuelles et l’importance du préjudice qu’ils ont subi, qui viendrait par compensation avec les sommes qui pourraient être dues à Monsieur [U],
‘ qu’en effet ces manquements sont d’abord de nature à fonder, concernant la troisième échéance du prix du contrat, un refus de leur part sur le fondement de l’exception d’inexécution,
‘ qu’il y a un lien direct entre la réparation des infractions qui pourraient être retenues par le juge pénal et l’instance civile initiée devant le tribunal judiciaire de Paris,
‘ qu’il est dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de suspendre la présence instance civile en attendant que l’action publique permette d’évaluer l’étendue exacte des manquements de Monsieur [U] et des préjudices subséquents,
– que les fautes pénales de Monsieur [U] constituent également des fautes contractuelles et délictuelles à leur égard.
Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 10 février 2023, Monsieur [U] demande à la cour de :
Vu les conventions passées,
Vu l’article 4 du code de procédure pénale,
Confirmer l’ordonnance du juge de la mise en état du 6 octobre 2022 en tous points,
En conséquence,
Débouter la société Exp Holding , Monsieur [G] et la société Be ad-vised capital partners de leur demande de sursis à statuer dans l’attente des résultats de leur plainte pénale du 13 septembre 2021,
Renvoyer l’affaire au fond avec injonction de conclure des appelants,
Les condamner à payer à Monsieur [U] la somme de 2.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
Les condamner aux entiers dépens.
Monsieur [U] fait valoir que :
‘ que la plainte pénale s’est soldée par un classement sans suite,
‘ que les deux instances sont totalement indépendantes,
‘ que la plainte pénale déposée le dernier jour imparti pour conclure dans le cadre de l’instance civile en démontre le caractère artificiel et son objectif de retarder le paiement des sommes auxquelles il a droit.
La clôture a été prononcée le 12 avril 2023.
MOTIFS
Sur la demande de sursis à statuer :
Il résulte de l’article 4 du code de procédure pénale que l’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction prévue par l’article 2 peut être exercée devant une juridiction civile, séparément de l’action publique.
Toutefois, il est sursis au jugement de cette action tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement.
La mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu’elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil.
L’article 4 alinéa 2 précité ne vise que l’action civile exercée devant une juridiction civile indépendamment de l’action pénale.
Le 13 septembre 2021, les sociétés Exclusive Partners et Exp Holding ont adressé une plainte au Procureur de la République, à l’encontre de Monsieur [U], pour des faits d’accès et de maintien frauduleux à un système de traitement automatisé de données, d’entrave au fonctionnement d’un système de traitement automatisé de données, et d’atteinte au secret des correspondances au sens des articles 323-1, 323-2 et 226-15 du code pénal.
Il n’est pas suffisamment justifié par une ‘fiche de renseignement sur l’état de la procédure’ complétée par le greffe datée du 9 décembre 2021 que, plus de 18 mois plus tard lorsque la cour statue, une suite ait été donnée à cette plainte et que l’action publique ait été mise en mouvement.
Monsieur [U] verse aux débats un email émanant du brigadier de police Madame [T] [F] en date du 7 février 2023 évoquant au contraire le classement sans suite de la plainte contredit par aucun autre élément versé par les appelants.
L’assignation a été délivrée le 22 décembre 2020 dans la présente affaire par Monsieur [U] à l’encontre des sociétés Exp Holding, Be Ad-vised Capital Partners ainsi que de Monsieur [G] en vue d’obtenir le paiement de la somme 586 774,80 euros suite à la cession des parts qu’il détenait avec ses enfants dans le société Exclusive Partners à la SAS Exp Holding dont Monsieur [G] est le président.
Les intimés, qui fondent leur demande reconventionnelle en dommages et intérêts devant la juridiction civile sur la faute contractuelle, distincte d’une infraction pénale ou allèguent d’une exception d’inexécution par application des articles 1219’et 1220 du code civil, n’agissent donc pas dans le cadre de l’action civile en réparation du dommage causé par une infraction pour laquelle le sursis à statuer est prévu par l’article 4 alinéa 2 du code de procédure pénale, le sursis à statuer ne s’imposant pas dans l’hypothèse où la décision à intervenir au pénal serait uniquement susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil.
La demande de sursis à statuer ne revêt donc pas un caractère obligatoire mais a un caractère facultatif et est laissée à l’appréciation de la juridiction auprès de laquelle la demande est formulée.
Il y a lieu de rappeler en réponse aux arguments développés par les appelants au soutien de leur demande de sursis à statuer que la faute pénale et la faute civile sont distinctes et qu’une procédure pénale n’est pas destinée à évaluer un préjudice éventuellement subi.
La cour relève que la plainte a été déposée par les appelants suite à l’assignation de Monsieur [U] en vue d’obtenir le paiement de la dernière échéance du prix de cession de parts sociales.
En l’absence de preuve d’une procédure pénale toujours en cours et d’un lien suffisant entre les faits reprochés à Monsieur [U] aux termes de la plainte pénale déposée 8 mois après l’assignation et la procédure civile en paiement, il n’est pas dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de surseoir à statuer.
Il y a lieu de confirmer la décision déférée qui a débouté les sociétés Exp Holding, Be Ad-vised Capital Partners ainsi que Monsieur [G] de leur demande de sursis à statuer.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :
La décision déférée est confirmée en ce qu’elle a dit que les dépens de l’incident suivront le sort des dépens de l’instance principale et rejeté la demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile.
A hauteur de cour, les sociétés Exp Holding, Be Ad-vised Capital Partners ainsi que Monsieur [G] sont condamnés aux dépens d’appel et à payer à Monsieur [U] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme la décision entreprise,
Y ajoutant,
Condamne la SASU Exp Holding, la SAS Be Ad-vised Capital Partners ainsi que Monsieur [G] à verser à Monsieur [U] une indemnité de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne les sociétés Exp Holding, Be Ad-vised Capital Partners ainsi que Monsieur [G] aux dépens de l’appel,
Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE