Indemnité d’éviction : 23 mars 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 20-18.486

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Indemnité d’éviction : 23 mars 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 20-18.486

23 mars 2022
Cour de cassation
Pourvoi n°
20-18.486

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 mars 2022

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 365 F-D

Pourvoi n° H 20-18.486

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 MARS 2022

M. [U] [H], domicilié [Adresse 6], a formé le pourvoi n° H 20-18.486 contre l’arrêt rendu le 26 février 2020 par la cour d’appel de Bordeaux (chambre sociale, section A), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société LGA, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 3], anciennement dénommée SCP [T], prise en qualité de mandataire liquidateur de la société La Mécanique et l’engrenage modernes,

2°/ à M. [V] [L], domicilié [Adresse 1], pris en qualité d’administrateur judiciaire de la société La Mécanique et l’engrenage modernes,

3°/ à l’AGS CGEA de [Localité 4], dont le siège est [Adresse 7],

4°/ à la société Alliance MJ, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], prise en qualité de mandataire liquidateur de la société MEM Industry,

5°/ à l’AGS CGEA d’Annecy, dont le siège est [Adresse 5],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [H], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Alliance MJ, ès qualités, après débats en l’audience publique du 2 février 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme Roques, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 26 février 2020), M. [H] a été engagé par la société La Mécanique et l’engrenage modernes (MEM) à compter du 28 janvier 2008 en qualité de câbleur atelier-peintre. Il a été élu membre titulaire de la délégation unique du personnel.

2. La société a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce du 14 mai 2013, la cession de ses actifs a été ordonnée le 1er octobre 2013 au profit de la société Finega, à laquelle s’est substituée la société MEM Industry, puis la société MEM a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 8 octobre 2013.

3. L’administrateur judiciaire à la liquidation de la société MEM a sollicité l’autorisation de licencier M. [H] le 28 octobre 2013. L’inspecteur du travail a refusé d’autoriser le licenciement par décision du 16 décembre 2013. Par décision du 11 août 2014, le ministre du travail a autorisé le licenciement du salarié.

4. Le 9 septembre 2014, la société MEM Industry a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir le remboursement des salaires versés au salarié de décembre 2013 à juin 2014. Le salarié a sollicité à titre principal sa réintégration dans la société MEM Industry et le paiement des salaires de décembre 2013 au jour du jugement, la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur pour absence de fourniture de travail et absence de paiement du salaire, ainsi que des dommages et intérêts pour discrimination syndicale.

5. Par jugement du 5 janvier 2016, le tribunal de commerce de Vienne a prononcé la liquidation judiciaire de la société MEM Industry sans poursuite d’activité. La société Alliance MJ a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

6. Par jugement du 3 mars 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté le recours exercé par le salarié à l’encontre de la décision du ministre du 11 août 2014. Par arrêt du 15 mai 2018, la cour administrative d’appel de [Localité 4] a annulé le jugement du 3 mars 2016 et la décision ministérielle d’autorisation du 11 août 2014.

7. Le salarié a sollicité sa réintégration à son poste et dans son mandat le 13 juillet 2018.

8. Il a été convoqué le 30 juillet 2018 par le liquidateur de la société MEM Industry à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

9. Par décision du 28 septembre 2018, l’inspecteur du travail a refusé d’autoriser le licenciement du salarié. Le 9 novembre 2018, il a retiré cette décision pour non-respect du contradictoire et rendu une nouvelle décision de refus d’autorisation de licenciement.

10. Par décision du 3 mai 2019, le ministre du travail a annulé la décision de refus d’autorisation du 9 novembre 2018 et autorisé le licenciement.

11. Le salarié a été licencié pour motif économique le 15 mai 2019.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés

12. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

13. Le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir fixer in solidum au passif des liquidations judiciaires des sociétés MEM et MEM Industry une créance de dommages-intérêts pour le préjudice matériel et le préjudice moral au titre de la discrimination syndicale, alors :

« 1°/ que si le juge judiciaire ne peut, en l’état de l’autorisation administrative accordée à l’employeur de licencier un salarié protégé, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement, il reste compétent pour apprécier les fautes commises par l’employeur pendant la période antérieure au licenciement et notamment l’existence d’une discrimination syndicale subie au cours de cette période ; que le contrôle exercé par l’administration du travail, saisie d’une demande d’autorisation administrative de licenciement, de l’absence de lien avec les mandats détenus par le salarié ne rend pas irrecevable la demande du salarié fondée sur la discrimination syndicale qu’il a subie dans le déroulement de sa carrière ; qu’en retenant que les manquements invoqués par le salarié ont nécessairement été pris en considération par l’autorité administrative dans le cadre de la procédure d’autorisation du licenciement pour refuser de connaître de la demande du salarié fondée sur la discrimination syndicale subie au cours de sa carrière, la cour d’appel a violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble le principe de séparation des pouvoirs ;

2°/ que l’exposant faisait valoir que les 17 licenciements envisagés atteignaient 42 % du personnel de la société MEM mais 100 % des représentants du personnel actifs et 100 % des représentants CGT ; qu’en se bornant à énoncer que sur les 17 licenciements envisagés, 6 concernaient des représentants du personnel sans se prononcer, ainsi qu’elle y était invitée, sur la proportion des représentants du personnel concernée comparée à la proportion de l’ensemble des salariés concernés par le licenciement, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail ;

3°/ qu’au titre de la discrimination syndicale, le salarié faisait valoir que, de concert avec la société MEM Industries qui dès le stade de l’offre de reprise avait très clairement fait part de son intention de ne pas reprendre les représentants du personnel, la société MEM avait, au moment du licenciement, procédé à une subdivision des catégories professionnelles et à un choix des critères d’ordre des licenciements destinés à désigner l’intégralité des représentants du personnel parmi les salariés ; qu’en retenant que le choix de l’employeur de viser des catégories autres que les catégories professionnelles, qui seules peuvent servir de base à l’établissement de l’ordre de licenciement, et son refus de rajouter le critère de la polyvalence au titre des qualités professionnelles, ne constituent pas plus des éléments de nature à laisser supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si ces décisions n’avaient pas conduit à ce que la totalité des représentants du personnel soit désigné par l’ordre des licenciements établi par l’employeur, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail ;

4°/ que lorsqu’une discrimination est invoquée, il appartient au juge de se prononcer sur tous les éléments avancés par le salarié et de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments établis par le salarié laissent présumer l’existence d’une discrimination ; que la cour d’appel a retenu que si sur les 17 licenciements envisagés, 6 concernaient des représentants du personnel, ce seul élément n’est pas de nature à laisser supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte et que le choix de viser les « catégories professionnelles/catégories d’emploi », plutôt que les « catégories professionnelles », de même que le refus de rajouter le critère de la polyvalence au titre des qualités professionnelles ne constituent pas plus des éléments de nature à laisser supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte ; qu’en statuant ainsi, cependant qu’il lui appartenait de dire si, pris ensemble, ces éléments ne laissaient pas présumer l’existence d’une discrimination, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article L. 1134-1 du code du travail ;

5°/ que constitue une discrimination syndicale toute mesure prise par l’employeur en considération de l’appartenance ou de l’activité syndicale du salarié ; que l’absence de contestation par les salariés protégés informés des mesures d’ordre des licenciements n’est pas de nature à exclure la discrimination ; qu’en retenant que les salariés protégés, dont l’exposant, n’ont pas contesté la définition des postes supprimés bien qu’ils en aient eu la possibilité, la cour d’appel qui a statué par un motif impropre à exclure la discrimination dénoncée, a violé les articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail. »

 


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