Indemnité d’éviction : 22 novembre 2022 Cour d’appel de Pau RG n° 20/02458

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Indemnité d’éviction : 22 novembre 2022 Cour d’appel de Pau RG n° 20/02458

22 novembre 2022
Cour d’appel de Pau
RG
20/02458

CD/SH

Numéro 22/04105

COUR D’APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 22/11/2022

Dossier : N° RG 20/02458 – N° Portalis DBVV-V-B7E-HVJA

Nature affaire :

Autres demandes relatives au bail à construction ou à l’emphytéose

Affaire :

S.C.I. CARJUL

S.A.R.L. LES PRODUITS DU NEUREST

C/

[Adresse 9]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 22 Novembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 27 Septembre 2022, devant :

Madame DUCHAC, Présidente, magistrate chargée du rapport conformément à l’article 785 du Code de procédure civile

Madame ROSA-SCHALL, Conseillère

Monsieur SERNY, Magistrat honoraire

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière, présente.

Les magistrates du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTES :

S.C.I. CARJUL représentée par sa gérante domiciliée de droit audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

S.A.R.L. LES PRODUITS DU NEUREST représentée par son gérant domicilié de droit audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentées et assistées de Maître CHEVALLIER-FILLASTRE de la SCP CHEVALLIER-FILLASTRE, avocat au barreau de TARBES

INTIMEE :

COMMUNE DE [Localité 5] représentée par son Maire en exercice, régulièrement habilité à cet effet par une délibération du Conseil municipal

Hôtel de Ville

[Adresse 12]

[Localité 5]

Représentée par Maître CREPIN de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de PAU

assistée de Maître BANEL, de la SELARL GOUTAL ALIBERT & associés, avocat au barreau de PARIS

sur appel de la décision

en date du 26 MAI 2020

rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TARBES

RG numéro : 18/00037

Par acte notarié du 15 juin 1989, la Commune de [Localité 5] a consenti à la SARL MONGIMAB un bail emphytéotique sur une parcelle dont elle était propriétaire sur la commune de [Localité 8] (station de ski [10]), cadastrée [Cadastre 6] pour une durée de 30 ans, à compter du 1er octobre 1987, avec possibilité de renouvellement.

L’acte prévoyait qu’à l’échéance du bail, les parties se rapprocheraient pour en établir un nouveau contrat aux mêmes conditions avec la précision que le bailleur resterait propriétaire du sol et le preneur des constructions qui y étaient ou y auraient été édifiées. Si le bailleur souhaitait reprendre sa liberté, il serait tenu d’indemniser le preneur de la valeur des constructions, calculée, à défaut d’accord entre les parties ‘ comme en matière d’expropriation’.

La SARL MONGIMAB a fait édifier sur la parcelle louée un immeuble comprenant un commerce et une cuisine au rez-de-chaussée, deux chambres à l’étage et un étage constituant des combles. Elle donnait ces lieux à bail commercial à la SARL LES PRODUITS DE NEUREST par acte du 1er décembre 2005.

Par acte authentique reçu le 14 mars 2012, la SARL MONGIMAB a vendu l’immeuble à la SCI CARJUL au prix de 170.000 €.

Par acte sous-seing privé du 1er avril 2012, la SCI CARJUL a conclu avec la SARL LES PRODUITS DE NEUREST un nouveau bail commercial, d’une durée de 9 ans.

Par courrier du 25 novembre 2015, la Commune de [Localité 5] a signifié à la SCI CARJUL , venant aux droits de la SARL MONGIMAB , sa volonté de ne pas renouveler le bail emphytéotique à son échéance en raison de son emprise dans le périmètre d’un projet immobilier de résidence de tourisme.

La SCI CARJUL a été mise en demeure par la commune de libérer les lieux et invitée à participer à leur remise à disposition contradictoire, à laquelle elle s’est opposée faisant valoir qu’elle restait propriétaire des constructions en l’absence de proposition d’indemnisation.

Suivant lettres RAR des 8 juin et 26 septembre 2017, la Commune de [Localité 5] a mis en demeure la SCI CARJUL de libérer les lieux et l’a invitée à participer à leur mise à disposition contradictoire fixée le 2 octobre 2017. La SCI CARJUL s’y est opposée, exposant par acte d’huissier du 6 octobre 2017 qu’elle restait propriétaire des construction en l’absence de proposition d’indemnisation de la commune.

Les parties ne sont pas parvenues à un accord. La Commune de [Localité 5] a fait démolir l’immeuble.

C’est dans ce contexte que par acte en date du 26 décembre 2017, la SCI CARJUL et la SARL unipersonnelle LES PRODUITS DE NEUREST ont fait assigner la Commune de [Localité 5] devant le tribunal de grande instance de TARBES, aux fins d’obtenir sa condamnation à les indemniser de la perte de leur immeuble qu’elle a fait détruire, à hauteur de 350.000 euros outre 100.000 euros de dommages et intérêts, la somme de 300.000 euros au titre du préjudice résultant de la perte de fonds de commerce, la destruction du mobilier, matériel et stock et de son droit de rétention jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction, outre 30.000 euros à chacune en réparation du préjudice moral et 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La Commune de [Localité 5] quant à elle soutenait être propriétaire du sol et du bâtiment y édifié et proposait une indemnité de 15.000 € correspondant à l’évaluation réalisée par la Direction de l’ Immobilier de l’ Etat, comme en matière d’expropriation.

Suivant jugement réputé contradictoire en date du 26 mai 2020, le tribunal a :

– constaté que la Commune de [Localité 5] est propriétaire de la parcelle cadastrée section [Cadastre 6] d’une contenance de 104 m² située sur le territoire de la commune de [Localité 8] et également, depuis le 30 septembre 2017, des constructions destinées à l’exploitation du commerce de boulangerie qui y sont édifiées,

– fixé à la somme de 18.000 euros, l’indemnité contractuelle due par la Commune de [Localité 5] pour le non renouvellement du bail emphytéotique et condamné la Commune de [Localité 5] à verser à la société CARJUL ladite somme,

– constaté que la Commune de [Localité 5] offre de restituer l’ensemble des biens mobiliers et matériels qui garnissaient les lieux loués et enjoint à la SARL unipersonnelle LES PRODUITS DE NEUREST de les récupérer dans le délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir,

– condamné la SCI CARJUL et la SARL LES PRODUITS DE NEUREST à payer à la Commune de [Localité 5] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision,

– condamné la SCI CARJUL et la SARL LES PRODUITS DE NEUREST aux entiers dépens, avec distraction au bénéfice de Maître Buendia, avocat associé de la SCP Chambeyron-Buendia, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

La SCI CARJUL et la SARL LES PRODUITS DE NEUREST ont relevé appel par déclaration du 23 octobre 2020, critiquant la décision dans chacune de ses dispositions.

Aux termes de leurs dernières écritures en date du 29 juillet 2021, la SCI CARJUL et la SARL LES PRODUITS DE NEUREST, appelantes, demandent à la cour :

– d’infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Tarbes du 26 mai 2020,

– d’ordonner qu’aux termes du bail emphytéotique formant loi des parties, la commune se devait, en fin de bail non renouvelé, de tenter à l’amiable une évaluation de la valeur des constructions et, à défaut, de faire estimer celles-ci contradictoirement,

– d’ordonner que la commune ne pouvait s’emparer des constructions litigieuses et les détruire sans avoir au préalable indemnisé la SCI CARJUL comme en matière d’expropriation,

– d’ordonner qu’en pénétrant par effraction dans l’immeuble et en faisant abattre celui-ci, la Commune de [Localité 5] a violé ses engagements contractuels et détruit la chose d’autrui, ce dont elle doit réparation,

– de condamner en conséquence la Commune de [Localité 5] à indemniser la SCI CARJUL relativement à la perte de son immeuble à hauteur de 350.000 euros,

– à titre subsidiaire sur ce point précis, avant dire droit au fond, d’ordonner une mesure d’expertise avec mission donnée à l’expert de donner la valeur dudit immeuble figurant au cadastré rénové de la commune de [Localité 8] section [Cadastre 6] lieu-dit « La Mongie »,

– d’ordonner qu’en se dispensant d’indemniser au préalable la SCI CARJUL et en détruisant l’immeuble de celle-ci, la commune a causé à la SCI CARJUL un préjudice qui sera sanctionné par l’octroi de 100.000 euros à la charge de la commune et de condamner la Commune de [Localité 5] à payer à la SCI CARJUL 100.000 euros de dommages et intérêts à ce titre,

– d’ordonner que dans l’immeuble édifié sur le terrain loué par bail emphytéotique, la SARL LES PRODUITS DE NEUREST avait créé un fonds de commerce et avait équipé celui-ci de matériel et de stock,

– d’ordonner qu’en faisant détruire ledit immeuble et en dispersant sans le moindre avis malgré la notification adressée, le matériel et le stock, la Commune de [Localité 5] a causé un grave préjudice à la SARL locataire par un comportement totalement fautif, tant par rapport au bail que par rapport à la loi,

– de condamner en conséquence la Commune de [Localité 5] à indemniser la SARL LES PRODUITS DE NEUREST du préjudice résultant de la perte de son fonds, de la destruction et de la disparition de son mobilier, matériel et stock et de son droit de rétention jusqu’au paiement de l’indemnité d’éviction, soit la somme de 300.000 euros de dommages et intérêts,

– de condamner la Commune de [Localité 5] à raison de son coup de force totalement contraire à la loi des parties et au droit, à payer une indemnité de 30.000 euros à chacune des sociétés concluantes, en réparation du préjudice moral causé par son comportement aussi brutal qu’illégal,

– de condamner la Commune de [Localité 5] à payer en outre à chacune des sociétés concluantes 6.000 euros d’indemnité selon l’article 700 du code de procédure civile outre à supporter les entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Chevallier-Fillastre sur ses offres et affirmations de droit,

– débouter la Commune de [Localité 5] de l’ensemble de ses demandes.

Par conclusions déposées le 12 avril 2021, la Commune de [Localité 5] demande à la cour :

– de déclarer irrecevables les conclusions nouvelles adverses tendant à la nomination d’un expert judiciaire,

– de rejeter, comme mal fondée, la requête en appel formée par les sociétés SCI CARJUL et SARL LES PRODUITS DE NEUREST à l’encontre du jugement rendu le 26 mai 2020 par le tribunal de grande instance de Tarbes,

– de confirmer le jugement rendu le 26 mai 2020 par le tribunal de grande instance de Tarbes,

– de condamner les sociétés SCI CARJUL et SARL LES PRODUITS DE NEUREST à verser à la Commune de [Localité 5] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamner les sociétés SCI CARJUL et SARL LES PRODUITS DE NEUREST aux entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de Maître Piault, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 août 2022.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la demande d’expertise

La demande d’expertise relative à la valeur de la construction ne constitue pas une prétention nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile mais une défense au fond relative à la demande d’indemnisation de la valeur de l’immeuble. Elle est donc recevable.

Sur la propriété de l’immeuble et la responsabilité de la commune qui l’a démoli

Les appelantes soutiennent la propriété des constructions affectée contractuellement au preneur à bail du sol ne cessait pas au terme du bail, la clause d’accession ne jouant pas tant que les parties n’étaient pas parvenues à un accord sur l’indemnisation de la construction. Elles considèrent donc que l’évaluation de la construction était un préalable contractuel à leur prise de possession par la commune bailleresse, qui ne pouvait donc les démolir sans commettre une faute contractuelle.

Le bail liant la Commune de [Localité 5] à la SCI CARJUL énonce qu’à son expiration, dans le cas où le bailleur ‘ voudrait reprendre sa liberté, il serait tenu de verser au PRENEUR une indemnité égale à la valeur des constructions à l’époque correspondant à l’expiration du bail sous réserve de tout préjudice.

A défaut d’accord amiable sur le montant de ladite indemnité, sa valeur serait déterminée comme en matière d’expropriation ‘ .

La Commune de [Localité 5] a refusé le renouvellement du bail à son échéance.

Le premier juge a justement apprécié, qu’en application du contrat, en cas de non renouvellement du bail, quel que soit son motif, la commune bailleresse a recouvré la propriété des constructions édifiées sur son terrain.

En effet, dès lors que le bail, en vertu duquel le preneur tenait son droit de propriété sur les seules constructions, a pris fin, la bailleresse recouvre de plein droit la propriété des dites constructions, en application de la règle suivant laquelle le propriétaire du sol est propriétaire des constructions y édifiées.

Si le bailleur est alors contractuellement tenu à indemniser le preneur, les parties n’ont nullement conditionné le transfert de la possession voire de la propriété à l’accord sur le montant de l’indemnité ou à la fixation de celle-ci.

Par conséquent, la Commune de [Localité 5] était fondée, à l’expiration du bail qu’elle n’a pas entendu renouveler, soit le 30 septembre 2017, à prendre possession des immeubles édifiés sur le terrain et à en disposer, y compris par leur démolition.

Par ailleurs, contrairement à ce qu’avance la SCI CARJUL , la Commune de [Localité 5] a cherché à trouver une solution amiable avec elle :

– elle a signifié dès le 25 novembre 2015 son souhait de ne pas renouveler le bail à son échéance le 30 septembre 2017, précisant qu’elle saisissait les services de France Domaine afin de déterminer la valeur de la construction ;

– elle a proposé à la SCI CARJUL, par courrier du 15 septembre 2016, une indemnisation à hauteur de 15.000 € correspondant à l’avis des Domaines en date du 8 août 2016 ;

– elle a enfin proposé à la SCI CARJUL, par courrier du 9 février 2017, une indemnité de 50.000 € si elle acceptait de quitter les lieux le 30 avril 2017, ou à défaut l’indemnité de 15.000 € conforme à l’évaluation des Domaines à l’échéance du bail.

Sur ces bases les parties ne sont pas parvenues à un accord.

Il résulte donc de ces éléments, que la Commune de [Localité 5] qui avait recouvré la propriété des constructions à l’expiration du bail et a proposé une indemnisation à la SCI CARJUL, n’a pas commis de faute dans l’exécution du contrat.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu’il a constaté la propriété de la Commune de [Localité 5] sur les constructions édifiées sur la parcelle [Cadastre 6], depuis le 30 septembre 2017. La cour ajoutera qu’elle n’a commis aucune faute en reprenant possession des lieux. La SCI CARJUL sera déboutée de ses demandes indemnitaires liées à la faute alléguée de la commune.

Sur le montant de l’indemnisation

* indemnisation de la SCI CARJUL, preneur au bail emphytéotique

En l’absence d’accord entre les parties quant au montant de l’indemnisation de la valeur des constructions, le contrat prévoyait qu’elle serait déterminée ‘comme en matière d’expropriation’.

Cette disposition doit être entendue comme renvoyant aux principes directeurs de l’indemnisation par le juge de l’expropriation définis à l’article L322-1 et suivant du code de l’expropriation (dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2015), à savoir :

– l’indemnité est fixée à la date du jugement de première instance, suivant la consistance des biens à la date de référence, qui en l’espèce ne peut être que celle de l’expiration du bail, soit le 30 septembre 2017 ;

– les éléments de comparaison doivent être pris en compte à cette date.

La construction a été acquise par la SCI CARJUL le 14 mars 2012, soit 5 ans et six mois avant l’échéance du bail, au prix de 170.000 €. Le service France Domaine a évalué le bien à 15.000 €. Cet avis contient une description précise du bien. Enfin, dans le cours de la négociation, la commune a proposé à la SCI CARJUL une somme de 50.000 €.

Ces éléments sont suffisants pour permettre à la cour de statuer sur l’indemnisation de la SCI CARJUL, il n’y a pas lieu à expertise.

Il résulte de la description contenue dans l’avis de valeur du service France Domaine, que la parcelle [Cadastre 6], d’une contenance de 104 m2, comprend sur la totalité de son emprise, une partie d’immeuble décrit comme délabré, faisant corps avec l’immeuble de la parcelle [Cadastre 7], dont la Commune de [Localité 5] justifie qu’il a fait l’objet d’un arrêté de péril le 5 mars 2012. Le bien est situé au coeur de la station de ski de [10], en contrebas de la gare de départ du téléphérique du [11]. Il est bâti en pierres, parpaings et crépi, avec un toit en tôle sans isolation, il est dans un état très vétuste et menacé par les effondrements de la partie de l’immeuble située sur la parcelle voisine.

La construction comprend un rez-de-chaussée consistant en un magasin à usage commercial d’épicerie-dépôt de pain et une cuisine. L’étage est composé de deux chambres et d’une cuisine.

La cour retient de cet avis, d’une part l’exposition exceptionnelle de la construction dont il convient de tenir compte nonobstant le fait que le terrain n’appartient pas à la SCI CARJUL et d’autre part, son état très vétuste ainsi que la menace d’effondrement de l’immeuble voisin frappé d’un arrêté de péril.

L’avis de France Domaine expose qu’il est établi suivant la méthode par comparaison, mais il n’indique pas les termes de comparaison utilisés, alors que la cour dispose, outre cet avis, du montant de l’acquisition du bien cinq ans plus tôt à hauteur de 170.000 €, ainsi que d’une proposition formée par la commune le 9 février 2017, à hauteur de 50.000 €.

Ainsi, au regard de ces éléments de consistance du bien, de son emplacement exceptionnel mais également de son état de délabrement à la date de référence et de la dépréciation liée à la menace d’effondrement de l’immeuble voisin, compte tenu du prix d’acquisition du bien en mars 2012, de la somme proposée par la commune en cours de négociation, l’indemnisation revenant à la SCI CARJUL pour la valeur de la construction doit être fixée à la somme de 130.000 €.

Réformant le jugement, la Commune de [Localité 5] sera condamnée à lui payer cette somme.

* indemnisation de la SARL LES PRODUITS DE NEUREST, locataire commercial de la SCI CARJUL

Dès lors que la Commune de [Localité 5] n’a commis aucune faute contractuelle à l’égard de la SCI CARJUL, ayant été fondée à reprendre possession du bien et à en disposer, la SARL LES PRODUITS DE NEUREST, locataire commercial ne démontre pas une faute délictuelle à son égard.

Il appartenait au contraire à la SCI CARJUL , bailleur de la SARL LES PRODUITS DE NEUREST, de l’informer du caractère précaire du bail commercial en raison de l’imminence de la perte de ses droits sur le terrain et par suite sur la construction, ainsi que des démarches engagées par la commune.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la SARL LES PRODUITS DE NEUREST de sa demande indemnitaire contre la Commune de [Localité 5], constaté que cette dernière offre de restituer à la SARL LES PRODUITS DE NEUREST les mobiliers et matériels garnissant les lieux, avec injonction à la SARL LES PRODUITS DE NEUREST de venir les reprendre.

Sur les demandes annexes

La Commune de [Localité 5] qui succombe partiellement supportera les dépens d’appel et de première instance, dont distraction, en réformation de la décision déférée.

Au regard de l’équité, elle sera condamnée à payer à la SCI CARJUL la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, réformant la décision dont appel.

Aucune somme ne sera allouée au titre des frais à la SARL LES PRODUITS DE NEUREST, le jugement sera confirmé.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déclare recevable la demande d’expertise formée par la SCI CARJUL,

La rejette,

Confirme le jugement dont appel en ce qu’il a :

– constaté que la Commune de [Localité 5] est propriétaire de la parcelle cadastrée section [Cadastre 6] d’une contenance de 104 m² située sur le territoire de la commune de [Localité 8] et également, depuis le 30 septembre 2017, des constructions destinées à l’exploitation du commerce de boulangerie qui y sont édifiées,

– constaté que la Commune de [Localité 5] offre de restituer l’ensemble des biens mobiliers et matériels qui garnissaient les lieux loués et enjoint à la SARL unipersonnelle LES PRODUITS DE NEUREST de les récupérer dans le délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir,

Y ajoutant,

Dit que la Commune de [Localité 5] n’a commis aucune faute en prenant possession de l’immeuble et déboute la SCI CARJUL de ses demandes indemnitaires liées à la faute alléguée de la commune,

Réforme le jugement en ce qu’il a :

– fixé à la somme de 18.000 euros, l’indemnité contractuelle due par la Commune de [Localité 5] pour le non renouvellement du bail emphytéotique et condamné la Commune de [Localité 5] à verser à la société CARJUL ladite somme,

– condamné la SCI CARJUL et la SARL LES PRODUITS DE NEUREST à payer à la Commune de [Localité 5] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SCI CARJUL et la SARL LES PRODUITS DE NEUREST aux entiers dépens, avec distraction,

Statuant à nouveau,

Condamne la Commune de [Localité 5] à payer à la SCI CARJUL la somme de 130.000 € au titre de l’indemnisation contractuelle pour la valeur de la construction,

Condamne la Commune de [Localité 5] à payer à la SCI CARJUL la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SARL LES PRODUITS DE NEUREST de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Commune de [Localité 5] aux dépens, dont distraction au profit des avocats de la cause qui en ont fait la demande.

Le présent arrêt a été signé par Mme DUCHAC, Présidente, et par Mme HAUGUEL, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

Sylvie HAUGUEL Caroline DUCHAC

 


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