Indemnité d’éviction : 10 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/07701

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Indemnité d’éviction : 10 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/07701

10 janvier 2023
Cour d’appel de Paris
RG
20/07701

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 4

ARRET DU 10 JANVIER 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/07701 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB42U

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 31 Décembre 2019 -Tribunal d’Instance de MONTREUIL SOUS BOIS – RG n° 12-1900015

APPELANTS

Madame [D] [W]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Cynthia VAZQUEZ, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [M] [E]

Représenté par Me Cynthia VAZQUEZ, avocat au barreau de PARIS

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/032311 du 23/10/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

Madame [Y] [T]

Es qualités de Mandataire judiciaire à la protection des majeurs représentant [M] [E] demeurant [Adresse 4]

Représentée par Me Cynthia VAZQUEZ, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Commune COMMUNE DE [Localité 3] Prise en la personne de son Maire en exercice.

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. François BOUYX, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Michel CHALACHIN, président

Marie MONGIN, conseiller

François BOUYX, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Gisèle MBOLLO

ARRET :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Michel CHALACHIN , Président de Chambre et par Gisèle MBOLLO, Greffière chambre 4-4 présente lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 18 février 2000, la commune de [Localité 6] a consenti à M. [F] [B] et Mme [Z] [P] un bail d’habitation portant sur un pavillon situé [Localité 2], moyennant un loyer en principal de 5 000 francs, soit 762,25 euros, payable mensuellement et à terme échu, outre les provisions sur charges et le versement d’un dépôt de garantie de 5 000 francs, soit 762,25 euros.

Dans le cadre d’un projet de cession de patrimoine privé, la commune de [Localité 6] a mis en vente ledit pavillon au prix minimum de 1 000 000 euros.

Par acte d’huissier du 26 juillet 2017, la commune de [Localité 6] a fait délivrer à M. [F] [B] et Mme [Z] [P] un congé pour vendre, le contrat arrivant à échéance le 28 février 2018.

Ces derniers ont quitté les lieux le 31 octobre 2018.

La commune de [Localité 6] s’est aperçue courant novembre 2018 que le bien était occupé.

Le 18 novembre 2018, les services de police de [Localité 6] se sont déplacés sur les lieux et ont relevé les identités des personnes présentes sans procéder à leur évacuation.

Suivant sommation interpellative du 9 janvier 2019, Me [N], huissier de justice, indique avoir rencontré sur place M. [K] [J], ami de Mme [W], lequel lui a déclaré que cette dernière vivait sur les lieux en présence de son fils, M. [M] [E] et qu’une dizaine de personnes se trouvaient sur les lieux.

Par acte d’huissier du 24 janvier 2019, la commune de [Localité 6] a fait assigner Mme [W] devant le juge des référés du tribunal d’instance de Montreuil-sous-Bois afin d’obtenir la constatation de la qualité d’occupants sans droit ni titre de Mme [W] et de M. [E], leur expulsion ainsi que celle de tous occupants de leur chef et leur condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation.

Par ordonnance du 31 décembre 2019, le juge des référés a ainsi statué :

Renvoyons les parties à se pourvoir au fond,

Cependant, dès à présent, vu l’urgence et l’absence de contestation sérieuse,

Constatons que Mme [W] occupe sans droit ni titre les lieux situés [Localité 2], dont la commune de [Localité 6] en a la disposition,

Ordonnons l’expulsion de Mme [W] et de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique et d’un serrurier, passé le délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, conformément aux dispositions des articles L. 412-1 et suivants, R. 411-1 et suivants, R. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,

Déboutons la commune de [Localité 6] de sa demande de suppression du sursis prévu pendant la période hivernale,

Disons que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d’exécution,

Déboutons la commune de [Localité 6] de sa demande d’indemnité d’occupation,

Déboutons Mme [W] de sa demande de délais pour quitter les lieux,

Déboutons les parties du surplus de leurs demandes,

Condamnons Mme [W] aux dépens, y compris notamment le coût de l’assignation,

Rappelons que la présente ordonnance est assortie de droit de l’exécution provisoire.

Le 22 juin 2020, Mme [W] a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration reçue au greffe par la voie électronique.

Le 9 avril 2021, M. [E] assisté par Mme [Y] [T], mandataire judiciaire à la protection des majeurs, est intervenu volontairement à l’instance.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 2 juin 2021, Mme [W] et M. [E] assisté de Mme [T], demandent à la cour de :

– accueillir la demande d’intervention volontaire à la procédure actuellement pendante sous le numéro RG n° 20/07701 formée par Mme [T], ès qualité de mandataire judiciaire M. [E],

– ordonner la jonction de la présente demande avec l’affaire enregistrée au greffe du tribunal de céans, 8ème chambre – 1ère section, sous le numéro RG n° 17/02211,

– recevoir Mme [T], ès qualité de mandataire judiciaire de M. [E] en ses demandes et actions et les déclarer bien fondées,

– confirmer l’ordonnance du 31 décembre 2019 en ce qu’elle a rejeté la demande de sursis résultant de la suppression de la trêve hivernale formée par la commune de [Localité 6],

– confirmer l’ordonnance du 31 décembre 2019 en ce qu’elle a rejeté la demande d’indemnité d’occupation formée par la commune de [Localité 6],

– infirmer l’ordonnance du 31 décembre 2019 en ce qu’elle a rejeté la demande de délais supplémentaires formés par Mme [W],

– statuant à nouveau, accorder deux années de délai à Mme [W] et M. [E] représenté par Mme [T] et tous les occupants de ce chef pour quitter les lieux, à compter de la décision à intervenir,

– en tout état de cause, débouter la commune de [Localité 6] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

– condamner la commune de [Localité 6] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 5 mai 2021, la commune de [Localité 6] demande à la cour de :

– confirmer l’ordonnance du 31 décembre 2019 en ce qu’elle a constaté l’occupation sans droit ni titre de Mme [W] et, en conséquence, ordonné son expulsion sans délai,

– infirmer l’ordonnance du 31 décembre 2019 en ce qu’elle a débouté la commune de [Localité 6] de sa demande de condamnation de Mme [W] à une indemnité d’éviction,

– condamner solidairement ou in solidum Mme [W] et Mme [T], ès qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs représentant M. [E] au paiement d’une indemnité d’occupation jusqu’à parfaite libération des lieux pour un montant de 762,25 euros correspondant à l’ancien loyer pratiqué dans le pavillon,

– débouter Mme [W] et Mme [T], ès qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs représentant M. [E], de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

– en conséquence, condamner Mme [W] au paiement d’une somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [W] aux entiers dépens de l’instance en ce compris les coûts de la sommation interpellative de quitter les lieux du 9 janvier 2019, de la signification de l’assignation du 24 janvier 2019, de la signification de l’ordonnance du 27 janvier 2020 et du commandement de quitter les lieux du 29 janvier 2020.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 octobre 2022.

Invitée à déposer son dossier de plaidoirie dans les 15 jours du rappel effectué par message électronique du 15 novembre 2022, l’avocate de Mme [W] ne s’est exécutée ni dans le délai imparti ni postérieurement.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’intervention volontaire de M. [E] assisté de Mme [T], ès qualité de curatrice, doit être accueillie, rien ne s’y opposant, et la commune de [Localité 6] ne la contestant pas.

Sur la suppression des délais avant expulsion

C’est à bon droit, et par des motifs précis et circonstanciés adoptés par la cour, que le juge des référés, constatant l’absence de voie de fait caractérisée par des actes matériels positifs pour s’introduire dans les lieux, a rejeté les demandes de la commune de [Localité 6] tendant à la suppression des délais prévus par les articles L 412-1 et L 412- 6 pour parvenir à l’expulsion des occupants.

Devant la cour, elle soutient, mais sans davantage en rapporter la preuve, que la porte de la maison était fermée ce qui suppose nécessairement, selon elle, l’emploi de la force pour s’introduire dans les lieux.

L’ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu’elle n’a pas fait droit à ces demandes.

Sur la condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation

Le premier juge a refusé de faire droit à cette demande au motif que la commune de [Localité 6], qui a mis en vente le bien dont elle est propriétaire au prix d’un million d’euros sans y parvenir, n’a pas souhaité le donner à nouveau en location de sorte qu’elle n’éprouve aucun réel préjudice engendré par son occupation illicite.

Cependant, l’intimée fait justement observer que le paiement d’une indemnité d’occupation est destiné à compenser le préjudice éprouvé par le propriétaire d’un bien occupé sans droit ni titre qui ne peut plus en jouir comme il l’entend et notamment le vendre dans de bonnes conditions.

Mme [W], qui reprend à son compte la motivation du premier juge sans y ajouter, devra donc verser à la commune de [Localité 6] la somme de 762,25 euros à titre d’indemnité d’occupation provisionnelle par référence au loyer qui était acquitté par les locataires avant leur départ, ce montant n’étant pas contesté en lui-même.

Son point de départ sera fixé au jour de la présente décision, faute de demande spécifique de la commune de [Localité 6] en dépit du fait que Mme [W] occupe les lieux depuis le 18 novembre 2018.

Mme [T], en sa qualité de curatrice de M. [E], ne peut pas être condamnée personnellement au paiement de cette somme, seul M. [E], qui occupe également les lieux sans droit ni titre, pouvant l’être.

La solidarité ne se présumant pas, il ne sera pas fait droit à la demande de condamnation solidaire ou in solidum au paiement de l’indemnité d’occupation.

Sur la demande de délais pour quitter les lieux

C’est par des motifs précis et circonstanciés, adoptés par la cour, que le premier juge a rejeté la demande de délais pour quitter les lieux formulée par Mme [W].

Devant la cour, Mme [W] et son fils, intervenant volontaire, ne soutiennent aucun moyen de nature à contredire utilement la motivation du juge des référés étant rappelé qu’ils se sont introduits dans le logement sans autorisation de sa propriétaire et qu’ils l’occupent sans droit ni titre depuis le 18 novembre 2018, au moins, de sorte que les demandes de délais d’un an formée devant le premier juge puis de deux ans devant la cour ont été, de fait, totalement satisfaites et même dépassées.

L’ordonnance entreprise sera donc confirmée sur ce point.

Sur les autres demandes

Il est équitable d’allouer à la commune de [Localité 6] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [W] qui succombe en son appel, sera condamnée aux dépens en ce compris, notamment, les coûts de la sommation interpellative de quitter les lieux du 9 janvier 2019, de la signification de l’assignation du 24 janvier 2019, de la signification de l’ordonnance du 27 janvier 2020 et du commandement de quitter les lieux du 29 janvier 2020.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Déclare recevable l’intervention volontaire de M. [E] assisté de Mme [T], ès qualité de curatrice,

Confirme l’ordonnance entreprise sauf en ce qu’elle a rejeté la demande d’indemnité d’occupation sollicitée par la commune de [Localité 6],

Statuant à nouveau dans la limite de l’infirmation partielle et y ajoutant :

Condamne Mme [W] et M. [E], ce dernier en présence de sa curatrice, Mme [T], à payer à la commune de [Localité 6] une indemnité d’occupation d’un montant de 762,25 euros à compter du jour de la présente décision et jusqu’à libération des lieux,

Condamne Mme [W] à verser à la commune de [Localité 6] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,

Condamne Mme [W] aux dépens d’appel en ce compris, notamment, les coûts de la sommation interpellative de quitter les lieux du 9 janvier 2019, de la signification de l’assignation du 24 janvier 2019, de la signification de l’ordonnance du 27 janvier 2020 et du commandement de quitter les lieux du 29 janvier 2020.

Le Greffier Le Président

 


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