Indemnité d’éviction : 25 janvier 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 22/01040

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Indemnité d’éviction : 25 janvier 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 22/01040

25 janvier 2023
Cour d’appel de Nîmes
RG
22/01040

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/01040 – N° Portalis DBVH-V-B7G-IMD2

CC

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D’AVIGNON

20 janvier 2022 RG :21/00214

[L] [M]

C/

S.C.I. D2GJH

Grosse délivrée

le

à

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale

ARRÊT DU 25 JANVIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance d’AVIGNON en date du 20 Janvier 2022, N°21/00214

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre

Madame Claire OUGIER, Conseillère

Madame Agnès VAREILLES, Conseillère

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 09 Janvier 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 25 Janvier 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANT :

Monsieur [E] [L] [M]

né le 09 Septembre 1968 à TURQUIE

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représenté par Me Delphine LECOINTE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D’AVIGNON

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/002351 du 20/04/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Nîmes)

INTIMÉE :

S.C.I. D2GJH, inscrite au RCS de MARSEILLE, SIREN n°481052561, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice domicilié audit

siège,

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Olivier COLLION, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D’AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 29 Décembre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 25 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSÉ

Vu l’appel interjeté le 16 mars 2022 par Monsieur [E] [L] [M] à l’encontre du jugement prononcé le 20 janvier 2022 par le tribunal judiciaire d’Avignon dans l’instance n° 21/00214.

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 25 mai 2022 par l’appelant et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 2 août 2022 par la SCI D2GJH, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu l’ordonnance du 15 septembre 2022 de clôture de la procédure à effet différé au 29 décembre 2022.

* * *

Par acte sous signature privée du 22 mai 2012, la SCI D2GJH (bailleresse) a consenti un bail commercial à Monsieur [K] [B] (preneur), conclu pour une durée de 9 ans, prenant effet à compter du jour de la signature du bail et jusqu’au 21 mai 2021.

Le loyer initial était de 405,68 euros, révisable chaque année en fonction de la variation de l’indice du coût de la construction.

Plusieurs cessions de droit au bail sont intervenues depuis la conclusion du bail commercial et Monsieur [G] [X], dernier cessionnaire en date, a cédé son droit au bail ainsi que son fonds à Monsieur [L] [M] en mai 2016.

Depuis le mois d’avril 2019, les loyers n’ont plus été régulièrement réglés par le locataire.

Le 31 août 2020, un commandement de payer des loyers a été délivré au locataire, qui est resté sans réponse.

Par exploit du 19 janvier 2021, la SCI D2GJH a fait assigner Monsieur [L] [M] en résolution du bail commercial, en condamnation au paiement des loyers restants dus et au paiement d’une indemnité d’occupation égale au montant du loyer jusqu’à parfaite libération devant le tribunal judiciaire d’Avignon.

Par jugement du 20 janvier 2022, le tribunal judiciaire d’Avignon a :

-Prononcé la résiliation aux torts exclusifs de Monsieur [E] [L] [M], du bail commercial conclu le 22 mai 2012 entre la SCI D2GJH et Monsieur [K] [B] et transmis en mai 2016 à Monsieur [E] [L] [M], portant sur un local commercial situé [Adresse 2] (84) ;

-Ordonné en conséquence à Monsieur [E] [L] [M], dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement, de quitter les lieux occupés indûment avec toutes les personnes s’y trouvant de son chef, et en satisfaisant aux obligations du locataire sortant, faute de quoi il pourra être procédé à son expulsion, au besoin avec l’aide de la force publique et un serrurier ;

-Condamné Monsieur [E] [L] [M] à payer à la SCI D2GJH la somme de six mille huit cent onze euros et trente deux centimes (6 811,32 euros), avec intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2021 sur la somme de 5 577,33 euros et à compter du prononcé du présent jugement pour le surplus ;

-Débouté la SCI D2GJH de sa demande de refus d’indemnité d’éviction au locataire dont le bail est résilié à ses torts exclusifs ;

-Débouté Monsieur [E] [L] [M] de sa demande de délais de paiement ;

-Rejeté toute autres demandes ;

-Rappelé qu’en application de l’article 514 du code de procédure civile, dans sa rédaction résultant du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, le présent jugement est exécutoire de droit à titre provisoire ;

-Condamné Monsieur [E] [L] [M] à payer à la SCI D2GJH la somme de mille euros (1 000 euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamné Monsieur [E] [L] [M] aux entiers dépens, lesquels incluront le coût des divers actes d’huissier nécessaires à la procédure (commandement de payer du 31 août 2020, assignation en justice…).

Monsieur [E] [L] [M] a relevé appel de ce jugement aux fins de le voir réformer en toutes ses dispositions, à l’exception de celle déboutant la SCI D2GJH de sa demande de refus d’indemnité d’éviction au locataire.

Par requête en omission de statuer du 22 février 2022, la SCI D2GJH a demandé au tribunal judiciaire d’Avignon de statuer sur la demande qui a été omise dans la décision rendue le 20 janvier 2022 et compléter la décision, ainsi que condamner Monsieur [E] [L] [M], occupant sans droit ni titre des lieux loués à compter du prononcer du jugement, date à laquelle la résiliation du bail prend effet, au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle équivalente au montant du loyer dû mensuellement.

Par conclusions du 2 juin 2022, la SCI D2GJH a demandé au tribunal judiciaire de donner acte à son désistement, ce qu’il a constaté par jugement du 22 septembre 2022.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l’appelant demande à la cour, au visa de l’article 1343-5 du code civil (anciens articles 1244-1 à 1244-3 du code civil) de :

-Infirmer le jugement du 20 janvier 2022 du tribunal judiciaire d’Avignon ;

-Constater que Monsieur [E] [L] [M] justifie de difficultés lui permettant d’invoquer les dispositions de l’article 1343-5 du code civil (anciens articles 1244-1 à 1244-3 du code civil) ;

-Déclarer recevable et fondée sa demande de délai ;

-Accorder un délai de 24 mois pour lui permettre d’apurer la dette ;

-Dire que pendant ce délai, les majorations d’intérêts encourues à raison du retard cesseront d’être dues ;

-Débouter la SCI D2GJH de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Statuer ce que de droit sur les dépens.

Au soutien de ses prétentions, l’appelant fait valoir que :

-Monsieur [L] [M] ne conteste pas sa dette, correspondant à des loyers commerciaux impayés ;

-en raison de ses problèmes de santé et de la crise sanitaire, il n’a pu exercer son activité de restauration rapide ;

-il perçoit 800 euros de pension d’invalidité et est hébergé ;

-Monsieur [L] [M] est de bonne volonté et souhaite retravailler.

***

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l’intimée demande à la cour, au visa des articles 462, 463 du code de procédure civile, de l’article 1343-5 du code civil, du jugement du 20 janvier 2022, des pièces versées au débat, de :

-Statuer sur la demande qui a été omise dans la décision rendue le 20 janvier 2022 et compléter cette décision ;

-Condamner Monsieur [E] [L] [M], occupant sans droit ni titre des lieux loués, à compter du prononcé du jugement, date à laquelle la résiliation du bail prend effet, au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle équivalente au montant du loyer dû mensuellement ;

-Confirmer la décision entreprise ;

-Débouter Monsieur [L] [M] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause,

-Condamner Monsieur [L] [M] à payer à la SCI D2GJH la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, l’intimée fait valoir que :

Sur l’omission de statuer,

-dans sa décision du 20 janvier 2022, le tribunal judiciaire d’Avignon a, dans ses motifs, indiqué « qu’à compter du prononcé du jugement, date à laquelle la résiliation du bail prend effet, Monsieur [E] [L] [M], occupant sans droit ni titre des lieux loués, devra s’acquitter d’une indemnité d’occupation mensuelle équivalente au montant du loyer dû mensuellement » ;

-cependant, le jugement ne comporte pas, dans son dispositif, de condamnation de Monsieur [L] [M] au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle et il a donc été omis de statuer sur ce chef ;

Sur la confirmation du jugement,

-Monsieur [L] [M] apporte aux débats le montant de sa pension d’invalidité de 800 euros pour la période du 1er janvier 2022 au 31 janvier 2022 mais ne justifie pas être en mesure d’apurer sa dette sur 24 mois ;

-Monsieur [L] [M] ne propose pas de plan d’apurement de sa dette sur la période sollicitée ;

-aucun élément apporté ne permet de s’assurer que le débiteur est en recherche effective d’un travail et qu’il pourra respecter des paiements mensuels sur une période de 24 mois ;

-le débiteur ne respecte plus ses obligations et cherche à s’en soustraire depuis plusieurs années, rien ne laissant penser que cela changerait dans l’hypothèse d’un échelonnement de la dette ;

-cela fait 3 ans et demi que le débiteur n’a honoré aucun paiement à la SCI D2GJH et a déjà obtenu des délais de paiement qu’il s’est octroyé d’office ;

Sur les difficultés injustifiées,

-la crise sanitaire ne doit pouvoir profiter que dans une certaine mesure et cet argument ne profite qu’à la SCI D2GJH qui connaît de réelles difficultés financières en l’état de ces impayés, dans la mesure où le local était inexploité et fermé et ce bien avant le commencement de la crise sanitaire ;

-les problèmes de santé du locataire datent de 2019, ne permettant pas d’expliquer les impayés datant de 2016 ; de plus, le preneur n’a pas informé la bailleresse de ce statut de travailleur handicapé ; enfin, la MDPH reconnaît au locataire le statut de travailleur handicapé, sans taux d’IPP, signifiant que le locataire est bien en mesure de travailler, à défaut de quoi il ne serait pas « travailleur » ; le locataire est donc de mauvaise foi ;

-le débiteur aurait pu proposer une cession de bail pour régler ses dettes ;

-le débiteur a perçu des aides de l’État et une protection légale suffisamment élargie pour pouvoir prétendre à des délais de paiement ; en outre, il a bénéficié d’aides ponctuelles, d’un montant excédant sa dette mais n’a jamais pensé à régler la bailleresse ;

-le débiteur aurait pu informer sa bailleresse de ses difficultés financières.

***

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

L’objet de l’appel principal porte uniquement sur le refus du tribunal d’allouer des délais de paiement au locataire.

Il est donc acquis que le bail commercial signé le 22 mai 2012, transmis en mai 2016 à Monsieur [E] [L] [M] est résilié à ses torts exclusifs, que son expulsion a été ordonnée aux termes du jugement du 20 janvier 2022 et qu’il doit payer la somme de 6 811,32 euros représentant le montant des loyers dus jusqu’en avril 2021.

Le bailleur ne produit pas de décompte de loyers plus récent. Il soutient cependant, sans être contredit, que le locataire n’a pas repris le paiement des « loyers courants ».

Les problèmes de santé du locataire, s’ils sont indéniablement douloureux, n’empêchent pas une activité professionnelle et sa reconnaissance de travailleur handicapé ne lui a pas donné droit à la fixation d’un taux d’IPP, ainsi que le précise la notification de la décision d’accord de la reconnaissance de travailleur handicapé du 25 juin 2019.

La crise sanitaire n’a pas eu pour effet de dispenser les locataires de payer leurs loyers, car ils disposaient toujours des lieux loués.

Monsieur [E] [L] [M] perçoit une pension mensuelle de 800 euros.

Il sollicite un délai de paiement de 24 mois sans faire aucune proposition de versement échelonné des sommes dues.

Or, il convient de remédier à l’omission de statuer affectant le jugement déféré qui a fait droit à la demande en paiement d’une indemnité d’occupation à compter de la résiliation du bail équivalente au montant du loyer mensuel, sans le mentionner dans son dispositif, de sorte que Monsieur [E] [L] [M] doit apurer sa dette de 6 811,32 euros et le paiement d’une indemnité d’occupation à compter de la signification du jugement du 20 janvier 2022, ce qui représente une dette totale supérieure à 10 000 euros. A cela s’ajoutera les indemnités d’occupation dues jusqu’à libération des lieux.

La situation financière du débiteur ne lui permet pas d’apurer cette dette dans le délai de 24 mois et les besoins du créancier, qui a déjà subi, en fait, ces délais de paiement s’opposent à ce qu’il soit fait droit à la demande de délais de grâce de Monsieur [E] [L] [M].

Monsieur [E] [L] [M] , qui succombe, devra supporter les dépens de l’instance et payer à la SCI D2GJH une somme équitablement arbitrée à 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme en sa disposition déférée à la cour le jugement prononcé le 20 janvier 2022 et déboute Monsieur [E] [L] [M] de sa demande de délais de paiement,

Y ajoutant,

Vu l’omission de statuer,

Condamne Monsieur [E] [L] [M], occupant sans droit ni titre en vertu du jugement du 20 janvier 2022 qui a prononcé la résiliation du bail, au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle équivalente au montant du loyer dû mensuellement, à compter de la signification de ce jugement du 20 janvier 2022.

Dit que Monsieur [E] [L] [M] supportera les dépens d’appel et payera à la SCI D2GJH une somme de 2 000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Dit qu’il sera fait application de la loi sur l’aide juridictionnelle.

Arrêt signé par la présidente et par la greffiere.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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